Dispositions spécifiques aux différents types daide sociale |
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AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH) | ||
Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Placement - Obligation alimentaire - Besoins |
Dossier no 110473
Mlle X...
Séance du 6 octobre 2011
Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011
Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 23 février 2011, la requête présentée par lUnion départementale des associations familiales (UDAF) de la Charente pour Mlle X... tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale annuler la décision de la commission départementale daide sociale de la Charente en date du 18 janvier 2011 rejetant sa demande dirigée contre la décision du 22 juin 2010 par laquelle le président du conseil général de la Charente a refusé laide sociale à lhébergement aux adultes handicapés à compter du 1er mai 2010 par les moyens que les ressources nont pas évolué depuis la première décision du conseil général du 16 février 2007, seule lallocation compensatrice pour tierce personne passant de 72,04 euros ( ?) en 2009 à 726,85 euros en 2011 ; quelle demande lapplication de larticle L. 132-1 du code de laction sociale et des familles qui prévoit la prise en charge des seuls revenus du demandeur daide ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, enregistré le 21 juillet 2011, le mémoire en défense du président du conseil général de la Charente tendant au rejet de la requête par les motifs que laide sociale est subsidiaire et constitue un droit subjectif ; que le dépôt dune demande ne doit pas être automatique, chaque cas faisant lobjet dune appréciation particulière ; que le tuteur doit apporter dans sa gestion les soins diligents et avisés dans le seul intérêt de la personne protégée et ne doit pas systématiquement solliciter laide sociale ; quen lespèce lallocation compensatrice pour tierce personne aurait dû être obtenue au montant de 726,85 euros mensuels ; que Mlle X... dispose dun capital qui lui aurait permis de régler ses charges pendant huit ans et déviter ainsi à ses héritiers de devoir faire face à la récupération sur la succession de laide sociale à lhébergement ; que, depuis le 14 mars 2011, elle a quitté lhôpital pour entrer en maison de retraite spécialisée et le besoin daide nexiste plus ; que le tuteur na pas cru devoir régler les factures de lhôpital et la participation légale aux frais dhébergement des personnes handicapées non travailleuses qui doit être versée quelle que soit la décision daide sociale ; que le juge aux affaires familiales lorsquil est saisi vérifie si le créancier daliments ne dispose pas de moyens propres pour subvenir à ses besoins, notamment dun capital ; quen lespèce, on peut estimer comme aurait pu le faire le juge aux affaires familiales si Mlle X... avait eu des enfants quelle dispose dun patrimoine suffisant pour financer ses charges ; quil ny a pas de raison que le besoin daide soit apprécié différemment en fonction de la présence ou non dobligés alimentaires ; que Mlle X... napporte pas la preuve de son état de besoin et de labsence de moyens alternatifs dy pourvoir ;
Vu le 12 août 2011, le mémoire en réplique présenté par lUDAF de la Charente, pour Mlle X... persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens quelle est tenue de faire valoir les droits et intérêts de la personne protégée ; quelle ne sollicite pas laide sociale pour « se protéger dun hypothétique reproche dun membre de la famille » mais pour faire valoir les droits de sa protégée ; que le conseil général na pas à apprécier la légitimité du dépôt de laide sociale par le mandataire judiciaire mais doit apprécier si au regard des ressources du postulant laide sociale peut être attribuée ; quen contrepartie de lexemption de prise en compte des ressources en capital de larticle L. 132-1, larticle L. 132-8 institue la possibilité de récupération au décès ou en cas de recours à meilleure fortune ; que le conseil général ne fait pas une stricte application de larticle L. 132-1 et tend à éviter aux héritiers de Mlle X... une récupération dirigée contre le patrimoine et non les héritiers alors quune telle récupération est prévue par le code de laction sociale et des familles ; que pour la période concernée Mlle X... percevait une allocation compensatrice pour tierce personne de 726,85 euros à la suite de la demande de régularisation de sa prestation faite par le tuteur auprès de la MDPH ; quil est étonnant pour des ressources identiques que le conseil général refuse une aide quil a antérieurement attribuée ; que Mlle X... nayant ni ascendant vivant ni descendant, il est surprenant que le conseil général se prévale dune jurisprudence du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance dAngoulême ; que, nayant pu en lespèce mettre en uvre la solidarité familiale et ayant fait valoir ses droits à tout autre type de solidarité et prestations, le dépôt dune demande daide sociale au bénéfice de Mlle X... prend donc tout son intérêt ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code civil ;
Après avoir entendu à laudience publique du 6 octobre 2011, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que pour la période litigieuse (1er mai 2010-14 mars 2011) Mlle X... a sollicité pour régularisation lallocation compensatrice pour tierce personne au taux maximum et la obtenue pour ladite période ; quainsi le moyen tiré par le président du conseil général de la Charente de ce quelle ne pouvait solliciter laide sociale que pour autant quelle avait fait valoir son droit à tous les revenus dont elle était en droit de disposer manque en toute hypothèse en fait ;
Considérant que la circonstance que pour la période litigieuse antérieure au transfert de sa protégée en maison daccueil spécialisé le tuteur se soit abstenu de régler au centre hospitalier les factures afférentes à ladmission en USLD de Mlle X... est inopérante dans le cadre du présent litige relatif à ladmission à laide sociale et quil appartient seulement, sil sy croit fondé, au centre hospitalier de faire valoir ses droits à lencontre de Mlle X... ;
Sans quil soit besoin de statuer sur les autres moyens ;
Considérant quen se fondant sur le caractère subsidiaire de laide sociale tout en citant les termes de larticle L. 132-1 du code de laction sociale et des familles qui prévoit la prise en compte des « revenus professionnels et autres et de la valeur des capitaux non productifs de revenus », alors que cet article exclut par ses termes mêmes la prise en compte des ressources en capital et ne permet que celle des revenus effectivement perçus ou celle dun revenu fictif sensé être produit par les capitaux non placés, la commission départementale daide sociale de la Charente a entaché sa décision de contradiction de motifs et derreur de droit ; quil y a lieu de statuer par leffet dévolutif de lappel ;
Considérant que le caractère subsidiaire de laide sociale na lieu de sappliquer que compte tenu des exceptions qui lui sont apportées par les dispositions applicables au nombre desquelles celles précitées qui ne prévoient au stade de ladmission à laide sociale la prise en compte que des seuls revenus ;
Considérant, il est vrai, que pour lessentiel le président du conseil général se prévaut de la « jurisprudence constante » des juges aux affaires familiales du tribunal de grande instance dAngoulême qui pour apprécier les créances daliments dont peuvent se prévaloir les bénéficiaires de lobligation alimentaire, notamment les demandeurs daide sociale, considèrent que pour lappréciation du besoin du créancier daide et des obligations du débiteur il y a lieu de prendre en compte non seulement les revenus, mais encore le capital possédé par le créancier ;
Mais considérant, en premier lieu et en toute hypothèse, que ce moyen est inopérant, la loi daide sociale applicable à la détermination des ressources du demandeur daide au nombre desquelles les créances alimentaires étant différente de la loi civile applicable à la détermination de ces créances déterminées en application des articles 205 et suivants du code civil ; quau demeurant, comme lexpose le président du conseil général lui-même, le demandeur na pas en lespèce dobligés alimentaires ; que la prestation litigieuse est accordée sans prise en compte de cette obligation ; que ce seul motif suffit à fonder le rejet du moyen du président du conseil général ;
Considérant, en second lieu et surabondamment, pour faire reste de droit et de « cohérence » affichée ou affirmée par le défendeur que la jurisprudence des juges aux affaires familiales du tribunal de grande instance dAngoulême ne simpose pas au juge de laide sociale auquel il appartient dappliquer les dispositions du code civil telles dailleurs quinterprétées par la jurisprudence de la cour de cassation sans quil y ait lieu en lespèce en toute hypothèse à renvoi préjudiciel à lautorité judiciaire ; que les articles 205 et 207 du code civil nimpliquent ni par leur lettre ni par leur esprit que lexercice du droit aux aliments soit subordonné à la condition que le créancier alimentaire ne possède ni immeuble ni aucune ressource en capital ; quils édictent que le devoir alimentaire naît entre ascendants et descendants du seul fait que lun deux est dans le besoin ; que létat de besoin est constitué sil procède dun défaut de revenus ; que même sil dispose dun capital le créancier peut réclamer des aliments dès lors quil ne tire pas de ce capital des revenus suffisants à la condition quil le gère utilement ; quen lespèce il nest nullement établi et dailleurs même pas allégué, abstraction faite de ce que ladministration en se fondant sur la jurisprudence précitée de juges aux affaires familiales entend imposer au demandeur daide de sen défaire avant toute admission à laide sociale, que les capitaux possédés par Mlle X... ne soient pas utilement gérés dans lintérêt du demandeur de laide sociale par le tuteur de celle-ci ; que dès lors que les capitaux mobiliers dont les revenus sont pris en compte pour ladmission à laide sociale et la détermination de la participation de lassisté aux frais daide sociale sont ainsi utilement gérés et quune gestion autre ne serait pas susceptible de procurer à lassistée des revenus supérieurs tels que laide sociale puisse lui être refusée, il appartiendrait à linstance dadmission à laide sociale et au juge de laide sociale de faire application des dispositions du code civil telles quelles sont ci-dessus interprétées et dailleurs, au cas où lautorité judiciaire saisie pour la fixation individuelle des dettes de chaque obligé nen ferait pas quant à elle, alors application, il appartiendrait à la partie lésée de faire usage des voies de droit dont elle disposerait contre les jugements ainsi intervenus ; que ce nest que sils étaient définitifs et non contestés quils simposeraient définitivement à ladministration et au juge de laide sociale après fixation des dettes de chaque obligé alors même, que ladministration ou le juge auraient, comme il leur appartenait de le faire, fait application au stade antérieur de lévaluation du quantum global de la dette des débiteurs daliments des principes qui viennent dêtre rappelés ; quainsi et contrairement à ce que soutient le président du conseil général de la Charente, il nexiste pas en réalité de contradiction entre lappréciation des ressources du créancier daide pour lapplication des dispositions précitées du code civil et celle qui résulte dans le droit de laide sociale pour lappréciation des ressources propres du demandeur de larticle L. 132-1 du code de laction sociale et des familles, ainsi que le précise dailleurs une doctrine autorisée (ALFANDARI, précis, éd. 2011 no 203) qui enseigne que « seuls les revenus doivent être pris en considération et cette règle est conforme aux principes généraux des droits alimentaires » ;
Considérant, ainsi, que lunique motif par lequel la commission centrale daide sociale entre en annulation des décisions attaquées pour lapplication de la loi daide sociale par le juge de laide sociale nest nullement en contradiction avec lapplication des dispositions du code civil, soit par le juge de laide sociale au stade de lévaluation de lensemble des créances alimentaires dont peut se prévaloir le demandeur daide, soit même dailleurs par lautorité judiciaire, du moins la jurisprudence de la cour régulatrice alors même que les juges du fond ont en cette matière un pouvoir dappréciation très étendu qui sexerce en fonction des circonstances et des situations des parties, sans, toutefois, quun tel pouvoir ne conduise à prendre en compte des ressources en capital productives de revenus normaux par une gestion utile et avisée desdites ressources par le créancier daliments pour la fixation des obligations de son débiteur ;
Considérant quaucun litige nexistant entre les parties sur la fixation du différentiel tarif moins ressources à prendre en compte, abstraction faite de celui sur lequel il vient dêtre statué sagissant des créances alimentaires, il y a lieu à renvoi devant le président du conseil général de la Charente pour liquidation des droits de Mlle X..., conformément aux motifs de la présente décision,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale de la Charente en date du 18 janvier 2011 et la décision du président du conseil général de la Charente en date du 22 juin 2010 sont annulées en tant quelles refusent à Mlle X... le bénéfice de laide sociale pour la prise en charge de ses frais dhébergement et dentretien à lUSLD du centre hospitalier du 1er mai 2010 au 14 mars 2011.
Art. 2. - La présente décision sera transmise à la ministre de lécologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 6 octobre 2011 où siégeaient M. LEVY, président, Mme NORMAND, assesseure, Mlle ERDMANN, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011.
La République mande et ordonne à la ministre de lécologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer