Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Récupération sur succession - Procédure - Contradictoire |
Dossier no 110478
Mme X...
Séance du 6 octobre 2011
Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011
Vu enregistré au secrétariat de la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations de la Lozère le 7 février 2011, la requête présentée par M. X..., demeurant dans le Rhône, tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale annuler la décision de la commission départementale daide sociale de la Lozère en date du 30 novembre 2010 rejetant sa demande dannulation de la décision du président du conseil général de la Lozère du 28 juillet 2010 décidant dune récupération contre la succession de Mme X... par les moyens que le statut de personne handicapée à plus de 80 % de celle-ci depuis 1974 na jamais été pris en compte ; que la loi du 11 février 2005 a prévu au second alinéa de larticle L. 344-5-1 du code de laction sociale et des familles la précision que les dispositions de larticle L. 344-5 du même code sappliquent pour les personnes âgées de plus de 60 ans qui nont jamais été hébergées en établissement pour personnes handicapées dès lors quelles ont un taux dincapacité égal ou supérieur à 80 % ; que cette position est confirmée par la doctrine juridique ; que le conseil général de la Lozère na pas répondu à ses interrogations concernant la prise en charge de Mme X... en tant que personne handicapée ;
Vu la décision attaquée ;
Vu enregistré le 7 juillet 2011, le mémoire en défense du président du conseil général de la Lozère tendant au rejet de la requête par les motifs que lors du recours devant la commission départementale daide sociale il a été démontré que les justificatifs produits servaient de base à la décision contestée et quil avait été fait application des dispositions du code de laction sociale et des familles articles R. 132-11 et L. 132-8 ; que lors de laudience il a été rappelé que les héritiers ne sauraient avancer quils nont pas été informés de lexistence des recours ; que ladministration na pas à informer les successeurs éventuels du bénéficiaire de lexercice dun tel recours ; que le conseil général vérifie que le demandeur daide sociale avait pris connaissance des conséquences de ladmission à laide sociale comme le prouvent les attestations signées des 6 septembre 2004 et 27 avril 2009 ; quà la suite des précisions apportées par le notaire le 12 octobre 2010, le montant de la récupération a été ramené à 10 698,25 euros ; que le nouveau motif de contestation formulé en appel na jamais été présenté auparavant ; que si par extraordinaire la commission centrale daide sociale acceptait dexaminer le recours présenté sur la base de ce nouveau motif et si Mme X... devait pouvoir prétendre à lexonération de récupération sur succession, il est joint un état des frais engagés indiquant une répartition entre la créance constituée avant et après la date de publication de la loi du 11 février 2005 qui conduirait, le cas échéant, à ramener le montant de la créance à la somme de 2 705,72 euros ;
Vu enregistré le 9 août 2011, le mémoire en réplique de M. X... persistant dans les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et les moyens que la demande adressée au président de la commission départementale daide sociale et la lettre au président du conseil général de la Lozère formulaient la demande expresse de communiquer tous les justificatifs du dossier étant donné que MM. X..., Y... et Z... nont jamais reçu de factures détaillées afférentes aux paiements de laide sociale ; que ces justificatifs nont jamais été transmis contrairement à ce que soutient le président du conseil général de la Lozère ; que la lettre du 9 novembre 2010 lui indiquant quil pouvait être entendu devant la commission départementale daide sociale est entachée derreur en sadressant à Mme X..., en précisant que la commission examinera une demande relative à la protection complémentaire CMU ; quenfin la convocation ne fait jamais état de la constitution dobservations écrites et précise seulement quil y a possibilité pour le demandeur dêtre entendu ; que cest pour cette raison et en parfaite ignorance de la procédure écrite que MM. X..., Y... et Z... ont décidé de présenter leurs argumentaires oralement devant la commission départementale daide sociale ; quils nont dailleurs jamais remis dargumentaire écrit avant la réunion de celle-ci ; que lors de cette réunion, la présidente na pas souhaité prendre en compte les nouveaux arguments de MM. X..., Y... et Z... - repris en appel - au motif quils navaient pas été présentés sous forme écrite et leur a conseillé de former une requête auprès du président du conseil général de la Lozère afin quil prenne en considération ces nouveaux arguments, ce quils ont fait le 10 janvier 2011 ; que copie de cette requête a été transmise à la présidente de la commission départementale daide sociale à la même date afin que ces nouveaux éléments soient pris compte ; quà ce jour le conseil général na pas répondu à ce courrier ; quil aurait dû informer les obligés alimentaires des conditions dexonération du remboursement de lavance de laide sociale pour les personnes handicapées lors du renouvellement de la demande de laide sociale ; quil ne saurait se prévaloir de lignorance de cet état de fait, la maison départementale des personnes handicapées qui a validé le statut de personne handicapée à plus de 80 % de Mme X... étant sous son autorité directe et sa responsabilité ;
Vu enregistré le 11 août 2011, le mémoire du président du conseil général de la Lozère persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes motifs ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu larticle 18 de la loi du 11 février 2005 ;
Après avoir entendu à laudience publique du 6 octobre 2011, Mlle ERDMANN, rapporteure, M. X..., en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Sur létendue ratione personae de la saisine de la commission centrale daide sociale ;
Considérant que les trois cohéritiers ont saisi la commission départementale daide sociale de la Lozère ; que, toutefois, le dossier ne permettant pas de déterminer si la décision a été notifiée ou non à MM. Y... et Z... qui étaient en fait, nonobstant la mention du seul nom de M. X... en haut de la demande, également signataires de celle-ci et qui demeurent recevables sil nest pas justifié dune notification de la décision du premier juge à leur égard à saisir la commission centrale daide sociale, seul M. X... a saisi celle-ci en appel en des termes qui dailleurs ne peuvent être interprétés comme impliquant pour le juge dappel lobligation de régulariser la requête en ce qui concerne MM. Y... et Z... ; que la requête nest donc recevable quen ce qui concerne M. X... et la décharge ne sera accordée quen proportion de ses droits dans la succession de Mme X... ;
Sur la recevabilité des moyens soulevés devant la commission centrale daide sociale et la régularité de la décision attaquée de la commission départementale daide sociale de la Lozère ;
Considérant que M. X... ne peut être regardé comme ayant motivé sa demande à la commission départementale daide sociale en se bornant à demander à ladministration de « bien vouloir (...) fournir dans les meilleurs délais le dossier justifiant la somme énoncée dans » la décision de récupération « ainsi que tous les justificatifs permettant le décompte de ce montant » ; quà la vérité compte tenu de la confusion dans lesprit des administrés et dans les pratiques par exemple dans le département de la Lozère entre commission départementale daide sociale et services du conseil général, il serait loisible à la commission centrale daide sociale de voir dans cette formulation, un moyen tiré de labsence de justification de la créance récupérée mais quelle nentend pas sengager dans une telle interprétation qui en lespèce compliquerait encore les choses ; quil appartenait donc à la commission départementale daide sociale dinviter les demandeurs de première instance à motiver leur demande, ce qui na pas été fait (les obligations des premiers juges ne pouvant raisonnablement être différentes de celles imposées au juge dappel) ; quen outre les demandeurs nont jamais été destinataires du mémoire en défense de ladministration qui les aurait selon toute vraisemblance amenés à motiver leurs prétentions ; que si la décision attaquée ne fait état que de laudition du représentant de ladministration (!) il doit être tenu comme établi et du reste non contesté en appel que M. X... était bien présent à laudience de la commission départementale daide sociale qui sest tenue le 30 novembre 2010 ; que faute quil ait été destinataire dun mémoire en défense il a entendu exposer alors oralement le moyen du « statut de handicapée » de Mme X... quil reprend en appel ; quil nest pas contesté (et quil est au demeurant parfaitement plausible...) que la présidente de la commission départementale daide sociale lui ait indiqué ne pas entendre prendre en considération ce moyen qui - et pour cause ! - navait pas été exposé dans la procédure écrite et la invité à reformuler une contestation auprès de ladministration, ce quil a fait postérieurement à la notification de la décision attaquée tout en prenant soin - opportunément (...) ! - de formuler le même moyen « nouveau » dans sa requête dappel ; que si les motivations des décisions des premiers juges font en principe foi en ce quen lespèce elles nindiquent pas que M. X... aurait été entendu ce nest que jusquà preuve contraire ; quil résulte de ce qui précède que cette preuve peut être regardée en ladite espèce comme apportée (...) ;
Considérant, par ailleurs, que M. X... soulève postérieurement à lexpiration du délai de recours contentieux les moyens susvisés tirés de lirrégularité de la procédure devant les premiers juges et de leur décision ; que ces moyens doivent être regardés comme recevables dès lors quil est de jurisprudence que le juge dappel ne saurait rejeter une requête comme non motivée sans inviter le demandeur à régulariser et quil serait dans un tel contexte jurisprudentiel dès lors illogique et de plus inéquitable dopposer aux requérants dappel la tardiveté de certains moyens présentés dans des mémoires postérieurs à lexpiration du délai dappel alors que leurs requêtes présentées dans ledit délai avaient été quant à elles motivées... ; que pour dire les choses « juridiquement » la jurisprudence intercopie ne sapplique que lorsque sont applicables les dispositions du code de justice administrative imposant la motivation de la requête dappel dans le délai de recours contentieux, ce qui nest pas le cas devant la commission centrale daide sociale ; que la commission centrale daide sociale sestime donc en droit dexaminer les moyens formulés par M. X... relatifs à la régularité de la décision attaquée ;
Sans quil soit besoin dexaminer les autres moyens relatifs à la régularité de la décision de la commission départementale daide sociale de la Lozère du 30 novembre 2010 ;
Considérant que le principe général du contradictoire simpose même en labsence de textes relatifs aux modalités de la procédure devant une juridiction administrative telle la commission centrale daide sociale ; que même sil est jugé en dernier lieu par la jurisprudence (dernière décision C.E. no 94562 du 17 mars 1993 publiée, mais sur un autre point, avec les conclusions du commissaire du Gouvernement à la Revue trimestrielle de droit sanitaire et social, décision dont on se saurait exclure quelle ait été depuis lors confirmée par des décisions non publiées)... ! que ce principe nest pas méconnu lorsquen labsence de demande de requérants (particulièrement juridiquement autodidactes... !) les pièces de la procédure au nombre desquelles paraissent bien figurer les mémoires et non seulement les pièces jointes ne sont pas communiquées à ces requérants, il napparait pas possible en létat à la présente juridiction de maintenir dix-huit ans après compte tenu de lévolution des garanties offertes notamment par les contrôles de conventionalité et de constitutionnalité une telle jurisprudence quelles que puissent être les raisons « pratiques » qui contribuent à lexpliquer (souci ne pas « alourdir la tâche... » de secrétariats au demeurant non rémunérés par le ministère de la justice...) ; que la présente formation tient dailleurs pour sa part la main à ce que les mémoires en défense ou apportant des éléments nouveaux soient à tout le moins communiqués aux requérants dappel ; quen létat la solution retenue ne saurait être regardée comme correspondant aux exigences actuelles en létat actuel du droit concernant le respect du principe du contradictoire ; quil nest pas contesté - le contraire ne ressort pas du dossier - que le mémoire en défense présenté à la commission départementale daide sociale de la Lozère par le président du conseil général de la Lozère na pas été communiqué à M. X..., ce qui contribue dailleurs, comme il a été indiqué plus haut, à expliquer que sa demande nait pas été motivée jusquà la clôture de linstruction écrite ; quil suit de ce qui précède que le principe du contradictoire qui sapplique à toute juridiction administrative a été dans ces circonstances méconnu ; quil y a lieu en conséquence dannuler la décision attaquée et de statuer par la voie de lévocation ;
Considérant que pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus énoncés le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de larticle 18 de la loi du 11 février 2005 ne saurait être regardé comme présenté tardivement devant la commission centrale daide sociale ; que le juge dappel statue dans le cadre de lévocation comme juge de première instance, linstruction devant ce juge se poursuivant devant lui ; que sil est vrai que pour autant il ne saurait prendre en compte même en cas dévocation des conclusions nouvelles en appel cette règle ne trouve pas application en lespèce où est en cause la seule recevabilité du moyen tiré de la violation de larticle 18 de la loi du 11 février 2005 alors que la commission départementale daide sociale non plus dailleurs que la commission centrale daide sociale nont invité M. X... à régulariser sa demande devant la commission départementale daide sociale ; quil suit de ce qui précède que le moyen tiré de la violation de larticle 18 de la loi du 11 février 2005 est, contrairement à ce que soutient le président du conseil général de la Lozère susceptible dêtre examiné par la présente juridiction ;
Sur la légalité de la décision attaquée sans quil soit besoin dexaminer les autres moyens ;
Considérant quil ressort du dossier et nest pas contesté que Mme X... née en 1917 sest vue octroyer une carte dinvalidité au taux de 80 % pour la première fois en 1974, soit avant 65 ans ; quaprès 1975, et nonobstant loctroi par ailleurs dune carte « station debout pénible » qui ne préjuge pas dun tel taux dinvalidité, ledit taux lui a été constamment reconnu par diverses décisions de la COTOREP, notamment, portant sur la période du 1er octobre 1996 au 1er octobre 2006 ; quà la date du décès de Mme X... le 29 avril 2009 - celle du fait générateur de la récupération - les dispositions du 2e alinéa de larticle L. 344-5-1 issues de larticle 18 de la loi du 11 février 2005 étaient applicables compte tenu de lintervention du décret du 19 février 2009 insérant au code de laction sociale et des familles un article D. 344-40 fixant à 80 % le taux dincapacité requis par cet alinéa ; que si le président du conseil général soutient en joignant létat de frais correspondant à cette position que les dispositions litigieuses de la loi du 11 février 2005 ne permettent la décharge de récupération quà compter de la publication de celle-ci, larticle 18-VI dispose que « les dispositions » (de larticle L. 344-5-1) « sappliquent aux personnes handicapées accueillies au 12 février 2005 dans les établissements ou services mentionnés au 6o du 1 de larticle L. 312-1 du même code dès lors quelles satisfont aux conditions posées » et que les deux alinéa de larticle L. 344-5-1 ont ainsi pour objet et pour effet de prévoir limpossibilité de récupération non seulement pour les frais exposés postérieurement à lentrée en vigueur de la loi mais pour ceux qui lont été antérieurement dès lors par ailleurs que le fait générateur de la récupération est, ce qui comme il a été dit est le cas en lespèce, postérieur à ladite entrée en vigueur ; que dans le dernier état de ses conclusions M. X... peut être regardé comme persistant à solliciter la décharge de toute récupération et non seulement la réduction de son montant à hauteur des périodes daccueil de Mme X... en EHPAD postérieures à lentrée en vigueur de la loi du 11 février 2005 ; quil y a lieu par suite de faire droit à ces conclusions,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale de la Lozère en date du 30 novembre 2010, ensemble la décision du président du conseil général de la Lozère en date du 28 juillet 2010 en tant quelles sappliquent à M. X... à hauteur de ses droits dans la succession de Mme X... sont annulées.
Art. 2. - Il ny a lieu à récupération à lencontre de M. X... des prestations avancées par laide sociale à Mme X... à hauteur de ses droits dans la succession de celle-ci.
Art. 3. - La présente décision sera transmise à la ministre de lécologie, du développement durable, des transports et du logement et à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 6 octobre 2011 où siégeaient M. LEVY, président, Mme NORMAND, assesseure, Mlle ERDMANN, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 26 octobre 2011.
La République mande et ordonne à la ministre de lécologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer