Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Compétence
 

Dossier no 100834

M. X...
Séance du 20 mai 2011

Décision lue en séance publique le 1er juillet 2011

    Vu enregistré à la direction départementale de la cohésion sociale de Meurthe-et-Moselle le 17 mars 2010, l’appel par lequel M. X... demande à la commission centrale d’aide sociale :
    1o D’annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de Meurthe-et-Moselle du 3 décembre 2009 confirmant celle du président du conseil général de ce département du 17 septembre 2009 de ne pas verser la prestation de compensation du handicap au titre de l’aide humaine allouée à l’intéressé par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées au motif qu’il n’a pas indiqué le montant de la rente qu’il reçoit du fonds de garantie automobile, et ce par les moyens, d’une part, que la composition de la commission départementale d’aide sociale n’est pas conforme à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, d’autre part, que la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées n’est fondée à prendre en compte, pour minorer la prestation en cause, que « les sommes versées correspondant à un droit de même nature au titre d’un régime de sécurité sociale » ;
    2o D’annuler en conséquence la décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées ;
    3o De lui accorder la prestation de compensation du handicap au titre de l’aide humaine ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré, comme ci-dessus, le 28 juillet 2010, le mémoire en défense par lequel le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle soutient que :
    1o Les conseillers généraux, en tant qu’ils ne sont pas soumis à un pouvoir hiérarchique du président de l’assemblée départementale, « siègent en toute indépendance » ;
    2o Les fonctionnaires de l’Etat ayant participé à la délibération du 3 novembre 2009 ont statué en toute impartialité puisqu’ils ne dépendaient pas du ministère chargé des affaires sociales ;
    3o La liquidation et le versement de la PCH incombent au président du conseil général et non à la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées qui se borne à l’octroyer ;
    4o L’appelant n’est pas fondé à se prévaloir d’une décision de la juridiction de céans ayant estimé que ne pouvait être regardée comme revenue à meilleure fortune une personne indemnisée au titre d’un préjudice ;
    5o La prestation de compensation du handicap, allocation d’assistance dont le montant est déterminé « dans la limite des frais supportés par la personne handicapée », n’est pas comparable à l’allocation aux adultes handicapés, un minima social soumis à un plafond de ressources, ni à l’allocation compensatrice pour tierce personne, qui avait souvent le caractère « d’une prestation de subsistance » ;
    6o La rente versée par le fonds de garantie automobile doit être affectée à la couverture des frais engagés au titre de l’assistance d’une tierce personne ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 20 mai 2011, M. GOUSSOT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que M. X... demeure recevable à se prévaloir de la méconnaissance par la décision attaquée de la commission départementale d’aide sociale de Meurthe-et-Moselle des stipulations de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, nonobstant la décision du Conseil constitutionnel du 25 mars 2011 ; qu’il est constant que la décision attaquée a été prise par une commission où siégeaient en méconnaissance du principe d’impartialité, dont la violation est sanctionnée par ces stipulations, deux conseillers généraux ; qu’en toute hypothèse, cette présence d’élus, qui s’ils ne sont pas soumis à l’autorité hiérarchique du président du conseil général sont néanmoins amenés à délibérer sur le budget du département et les décisions réglementaires du conseil général en matière d’aide sociale, est bien de nature à caractériser la violation dudit principe et des stipulations de l’article 6-1 de la CEDH qui en sanctionnent la méconnaissance au regard des exigences du procès équitable ; qu’il suit de là qu’il y a lieu d’annuler la décision attaquée et d’évoquer la demande ;
    Considérant que si la prestation de compensation du handicap est une prestation en nature il n’est pas allégué et ne ressort pas du dossier que, nonobstant la décision de suspension du versement de la prestation dont l’octroi avait été décidé par la commission départementale des droits et de l’autonomie des personnes handicapées prise par le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle, M. X... n’ait pas fait appel aux services d’une tierce personne rémunérée et qu’ainsi il y a bien lieu de statuer à la date de la présente décision sur ses droits à la prestation de compensation du handicap ;
    Considérant que, nonobstant son argumentation d’appel, M. X... n’a, en tout état de cause, pas abandonné le moyen formulé devant la commission départementale tiré de ce que le président du conseil général ne pouvait refuser d’appliquer la décision de la commission départementale des droits et de l’autonomie des personnes handicapées de Meurthe-et-Moselle du 16 juin 2009 en tant qu’elle lui attribuait la prestation de compensation du handicap au titre de l’élément « aide humaine » pour un montant de 119,22 euros ; que la décision de refus de versement de celui-ci n’a pas été prise contrairement à ce que soutient l’administration au titre du contrôle d’effectivité de l’utilisation de la prestation en cours de période d’attribution de celle-ci mais s’analyse comme une décision de refus d’octroi de la prestation au motif que M. X... refusait de communiquer le montant de la rente qui lui était versée par le fonds de garantie de le FGAO ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles : « I. - Toute personne handicapée résidant de façon stable et régulière en France (...) a droit à une prestation de compensation qui a le caractère d’une prestation en nature qui peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces. » ; qu’elle est notamment appelée à couvrir des charges « 1o - Liées à un besoin d’aide humaine (...) », conformément aux dispositions de l’article L. 245-3 du même code ; qu’outre des ressources, qui ne sont pas en litige en la présente instance, il est tenu compte des sommes versées en application de chaque « droit ouvert de même nature au titre d’un régime de sécurité sociale (...) » pour fixer le montant de la prestation de compensation du handicap, de l’assiette duquel celles-ci sont déduites ; que l’article R. 245-42 du code précité prévoit que : « Les montants attribués au titre des divers éléments de la prestation de compensation sont déterminés dans la limite des frais supportés par la personne handicapée. Ils sont établis à partir de tarifs fixés par arrêtés du ministre chargé des personnes handicapées. » ;
    Considérant, en l’espèce, que M. X... a été victime, en 1991, d’un grave accident de la route qui est à l’origine de son handicap ; que, pour la période du 1er décembre 2008 au 30 novembre 2012, la CDAPH lui a accordé, dans sa séance du 16 juin 2009, la prestation de compensation du handicap comprenant notamment une aide humaine de 35 heures et 29 minutes par mois représentant, au taux horaire de 3,36 euros égal à 50 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance, une somme mensuelle de 199,22 euros ; que par une décision du 17 septembre 2009 le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle a sursis à l’exécution de celle de la CDAPH au motif que M. X... avait refusé de lui communiquer le montant de la rente viagère que lui verse le FGAO en réparation du dommage corporel consécutif à l’accident dont il a été victime ;
    Considérant, en toute hypothèse, que dès lors que la commission départementale des droits et de l’autonomie des personnes handicapées n’avait pas, conformément aux dispositions précitées de l’article L. 245-3 et de celles de l’article R. 245-40 aux termes duquel « pour fixer les montants attribués au titre des divers éléments de (la) prestation la commission déduit les sommes versées correspondant à un droit de même nature ouvert au titre d’un régime de sécurité sociale », déduit le montant de la rente versée par le FGAO et n’avait pas davantage au titre de l’article R. 245-42 réduit le montant de la prestation en considérant que du fait de l’attribution de cette rente les frais supportés par M. X... étaient moins élevés, le président du conseil général ne pouvait suspendre - et en réalité refuser - le versement de la prestation au montant fixé par l’instance collégiale mais seulement, s’il s’y croyait fondé, saisir le tribunal du contentieux de l’incapacité pour contester la décision de celle-ci ; que d’ailleurs le jugement dont il se prévaut en demandant à la commission centrale d’aide sociale de retenir la position qu’il expose émane bien (quelle qu’en puisse être d’ailleurs la pertinence...) du tribunal du contentieux de l’incapacité de Caen ; qu’ainsi il y a lieu de faire droit à la requête de M. X...,

Décide

    Art. 1er.  -  Les décisions du président du conseil général de Meurthe-et-Moselle et de la commission départementale d’aide sociale de Meurthe-et-Moselle, respectivement des 17 septembre 2009 et 3 décembre 2009, sont annulées.
    Art. 2.  -  M. X... est rétabli dans son droit à la prestation de compensation du handicap à compter du 1er décembre 2008 dans les conditions fixées par la décision de la commission départementale des droits et de l’autonomie des personnes handicapées de Meurthe-et-Moselle du 17 juin 2009 et renvoyé devant le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle pour liquidation de ses droits conformément à cette décision.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 20 mai 2011, où siégeaient M. LEVY, président, Mlle THOMAS, assesseure, M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 1er juillet 2011
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer