Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3300
 
  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES ÂGÉES (ASPA)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Placement - Ressources - Déclaration
 

Dossier no 091080

Mme X...
Séance du 1er octobre 2010

Décision lue en séance publique le 5 novembre 2010

    Vu enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 3 juillet 2009, la requête présentée pour Mme X... demeurant à la maison de retraite M... à S..., par l’ATI Aquitaine son tuteur, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde en date du 29 mai 2009 rejetant sa demande dirigée contre la décision du président du conseil général de la Gironde du 9 mai 2008 rejetant sa demande de prise en charge des frais d’hébergement à la maison de retraite dite par l’aide sociale à compter du 5 octobre 2007 par les moyens que ses ressources se composent de la pension de retraite d’un montant mensuel de 810,87 euros, alors que le coût mensuel moyen de son hébergement à la maison de retraite M... est de 1 735,69 euros ; que s’agissant de son épargne déclarée 11 183,56 euros pour un compte assurance-vie, 1 519,25 euros pour un livret épargne et un solde déficitaire pour un compte courant C... de 11,23 euros, seuls les revenus que produisent les capitaux placés peuvent être pris en compte en application de l’article L. 132-1 du code de l’action sociale et des familles ; qu’ainsi les avoirs bancaires dont s’agit ne peuvent être retenus comme tels mais doivent seulement l’être à hauteur des revenus procurés ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré le 21 janvier 2010, le mémoire en défense du président du conseil général de la Gironde tendant au rejet de la requête par les motifs que les frais de séjour pour la période du 5 octobre 2007 au 30 novembre 2009 ont pu être financés en totalité par Mme X... et qu’une prise en charge a été accordée à compter du 1er décembre 2009 par décision du 28 décembre 2009 ; que Mme X... disposait de ressources complémentaires ; que l’aide sociale répond à un état de besoin du demandeur et est un droit subsidiaire ; qu’elle disposait de plusieurs comptes dont certains souscrits après la demande d’aide sociale ; que la nature des comptes et les montants des placements déclarés étaient anormalement différents entre la première demande ou la demande de renouvellement et le recours devant la commission départementale ; que les attestations relatives aux différents comptes bancaires n’étaient pas fournies ou incomplètes ; que l’ATI ne fournit jamais spontanément et régulièrement la nature et les montants des intérêts des divers placements et ne peut donc démontrer l’état de besoin de ses protégés ; qu’aucun des établissements concernés n’a contesté ses décisions devant la commission départementale ; que les frais d’hébergement ont pu être avancés par les personnes âgées ce qui prouve bien leur absence de besoin ; que les autorisations spécifiques du juge des tutelles ont été données ; que l’intéressé bénéficie désormais d’une prise en charge ; que dans le cas où la commission annulerait les décisions de rejet, il serait dans l’incapacité d’instruire les dossiers et de calculer la part des frais des intéressés et celle du département pour les périodes considérées faute de justificatifs complets des ressources ; qu’il y a lieu d’impartir aux associations de tutelle de fournir la totalité des documents bancaires nécessaires à l’instruction ;
    Vu enregistré le 22 février 2010, le mémoire en réplique présenté, pour Mme X..., par l’ATI Aquitaine, persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens qu’elle ne s’est acquittée d’une partie de ses frais d’hébergement que pour éviter de faire supporter une dette conséquente à la maison de retraite et ce dans son intérêt pour conserver de bonnes relations avec celle-ci ; que le paiement des frais d’hébergement sur son épargne a mis en danger son budget qui n’est plus en mesure de supporter financièrement certains frais annexes dont le montant peut être élevé tel que l’achat de vêtements ou de lunettes avec un « reste à vivre » qui ne lui permet pas de faire face à de telles dépenses ; qu’elle a ouvert un compte épargne logement sur lequel sont payées au département les sommes correspondant aux revenus des capitaux placés ; que le tuteur fournit des relevés bancaires mentionnant les intérêts ; que la production d’attestations est coûteuse et la réception de celles-ci prend énormément de temps ;
    Vu enregistré le 7 avril 2010, le mémoire en réplique du président du conseil général de la Gironde persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes motifs et les motifs que l’ATI reconnaît que les intérêts des placements doivent être affectés au paiement des frais d’hébergement ; que ceux-ci ont bien été réglés avec l’accord du juge des tutelles ; que le montant global des biens mobiliers déclaré a augmenté après le dépôt de la demande et l’entrée en établissement ; que Mme X... était revenue à meilleure fortune et a abondé son contrat d’assurance-vie ne pouvant ainsi réclamer l’aide de la collectivité pour les dépenses non couvertes par le minimum de revenus laissé à disposition ; qu’en tout état de cause ses revenus doivent être affectés prioritairement au paiement des frais de placement dans la limite légale ; qu’il n’a jamais eu connaissance du compte épargne logement dont l’ATI fait état ; que l’état de besoin durant la période litigieuse ne peut être démontré et la part des frais restant à la charge de la collectivité déterminée ; que les relevés produits sont des documents internes à l’ATI sur lesquels elle effectue de nombreux mouvements ; qu’en l’absence de données ne présentant pas d’ambiguïté, les articles L. 132-1 et L. 132-3 du code de l’action sociale et des familles ne peuvent être mis correctement en application ;
    Vu enregistré le 31 mai 2010, le mémoire en duplique de l’ATI Aquitaine, pour Mme X..., persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens que le juge des tutelles n’a donné son accord que sous réserve de l’admission à l’aide sociale pour l’avance de frais ; que les pièces jointes établissent les intérêts des capitaux placés respectivement pour 2007 et 2008 de montants relativement insignifiants et n’augmentant pas suffisamment ses revenus mensuels pour qu’elle puisse supporter les charges d’hébergement ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 1er octobre 2010, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il n’était pas établi contrairement à ce que soutient la décision du 9 mai 2008 du président du conseil général de la Gironde que les « revenus » de Mme X... lui permettaient de s’acquitter de ses frais d’hébergement à compter du 5 octobre 2007 ; qu’en jugeant qu’elle n’avait pas démontré disposer de « ressources » suffisantes la commission départementale d’aide sociale de la Gironde n’a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions des articles L. 132-1, L. 132-3 et R. 132-1 du code de l’action sociale et des familles ; qu’en ajoutant que « les frais ont pu être réglés de façon régulière » le premier juge a énoncé un motif inopérant et sans incidence sur la détermination de la participation de l’aide sociale ; qu’il y a lieu toutefois pour la commission centrale d’aide sociale saisie par l’effet dévolutif de l’appel d’examiner les moyens de première instance et d’appel de Mme X... et du président du conseil général de la Gironde ;
    Considérant qu’il n’est pas contesté que les frais d’hébergement à régler doivent être retenus à hauteur de 1 735,19 euros par mois alors même que le litige porte sur la période du 5 octobre 2007 au 31 novembre 2009 ; qu’il n’est pas davantage contesté que la pension de retraite de Mme X... est de 810,87 euros par mois (même si les montants ont sans doute varié durant la période litigieuse) ; qu’il est suffisamment établi par les pièces jointes en duplique qu’en 2007 Mme X... a touché des intérêts de 319,01 euros (soit 27 euros par mois arrondis) et en 2008 205,45 euros (soit 17 euros par mois arrondis), pièces non contestées par le président du conseil général auquel elles ont été communiquées ; que la variation des capitaux possédés par l’assistée dont fait état l’administration est par elle-même sans incidence sur le droit à l’aide sociale dès lors que les intérêts effectivement perçus pour chaque période sont bien pris en compte ; qu’en revanche l’ATI n’est pas fondée, en tout état de cause, à faire valoir que le minimum de revenus laissé à disposition de Mme X... ne lui permettait pas de s’acquitter de dépenses de première nécessité tels des vêtements et des lunettes alors que durant la même période elle a abondé ses placements comme il résulte suffisamment du dossier alors d’ailleurs qu’en tout état de cause les dépenses dont s’agit ne sont pas de la nature de celles légalement déductibles du montant des revenus de l’assistée avant imputation à celui-ci du pourcentage de 10 % correspondant au minimum de ressources qui lui est laissé avant détermination de la participation de l’aide sociale ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que pour un tarif qui sera retenu uniformément à 1 735,14 euros (la commission centrale d’aide sociale quels que puissent être ses pouvoirs inquisitoriaux « n’ayant pas les moyens dans ses conditions de fonctionnement » d’instruire le dossier pour production des arrêtés de tarification successifs que les parties auraient dû prendre en compte...), les revenus à prendre en compte sont de 837,87 euros pour chaque mois de 2007 et de 827,87 euros pour chaque mois de 2008 ; qu’à ce montant doivent être ajoutés 3 % du montant des contrats d’assurance-vie possédés durant chaque mois de la période litigieuse, la présente juridiction faisant dorénavant application de la jurisprudence du Conseil d’Etat selon laquelle pour de tels placements le taux à prendre en compte n’est pas le taux des intérêts capitalisés et indisponibles dus aux stipulants mais le taux forfaitaire prévu en cas d’absence de placement par les dispositions applicables ;
    Considérant qu’aucune précision n’étant fournie quant aux dépenses légalement ou constitutionnellement obligatoires ou encore qui auraient dû être prises en compte par le tarif de l’établissement et ne l’auraient pas été, la participation de l’assistée doit être fixée à 90 % du revenu ci-dessus déterminé, qui sont affectés au paiement des frais d’hébergement et que la participation de l’aide sociale s’établit par déduction du montant du tarif du montant ainsi affecté ;
    Considérant que pour 2009, le dossier ne fournit pas les renseignements nécessaires à la fixation des bases à laquelle il vient d’être procédé pour les deux années précédentes ; que pour l’application de la présente décision, il y aura lieu d’appliquer aux éléments qui seront fournis par l’ATI Aquitaine la même base de calcul que ci-dessus pour la détermination des participations litigieuses ;
    Considérant qu’il peut être observé qu’il aurait été loisible, au vu des éléments incomplets de justification fournis en l’état par l’ATI qui a été mise à même de le faire au cours de l’instruction à la présente juridiction, de rejeter sa demande comme le lui demande le président du conseil général de la Gironde mais qu’il n’est pas interdit au juge, en l’état du dossier, de renvoyer à nouveau les parties pour détermination du montant exact de leurs participations respectives en admettant l’assistée à l’aide sociale pour le paiement par le département du montant différentiel restant à sa charge par soustraction du tarif des revenus de l’assistée affectés à celui-ci, étant rappelé qu’au prix d’une plus grande souplesse et d’une moins grande conflictualité de leurs relations les parties devraient aisément établir en commun le montant exact aux quelques centimes d’euro près qui ne peuvent être déterminées, à l’heure actuelle, des participations mensuelles de l’assistée et de la collectivité d’aide sociale pour l’exécution de la présente décision ; que dans la présente instance, la présente juridiction considère par contre qu’il est possible de ne pas suivre la position du président du conseil général de la Gironde demandant le rejet de la requête au motif qu’en l’état l’ATI Aquitaine n’a pas justifié aux quelques centimes près dont il s’agit de la participation exacte de sa protégée ce qui ne pourrait que se retourner contre celle-ci sous réserve d’une éventuelle et aléatoire action en responsabilité contre le tuteur ; que s’il est vrai, enfin, que celui-ci littéralement ne conclut qu’à la censure de la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde et au renvoi devant l’administration, il n’est pas possible de se borner à un tel dispositif dès lors que la décision administrative attaquée devant le premier juge rejetait la demande ; qu’elle doit être censurée et que compte tenu de cette censure, il y a lieu pour le juge de plein contentieux de l’aide sociale de fixer nécessairement lui-même sinon les montants des participations respectives à tout le moins les bases de celles-ci avec une précision suffisante,

Décide

    Art. 1er.  -  Les décisions de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde en date du 29 mai 2009 et du président du conseil général de la Gironde en date du 9 mai 2008 sont annulées.
    Art. 2.  -  Mme X... est admise à l’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d’hébergement et d’entretien à l’EHPAD M... à S... pour la période du 5 octobre 2007 au 30 novembre 2009.
    Art. 3.  -  Les participations de Mme X... et de l’aide sociale aux frais mentionnés à l’article 2 sont déterminées pour les périodes respectives des 5 octobre 2007 au 31 décembre 2007, du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008 et du 1er janvier 2009 au 30 novembre 2009 conformément aux motifs du présent jugement.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions de l’ATI Aquitaine, pour Mme X..., est rejeté.
    Art. 5.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er octobre 2010 où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, et Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 5 novembre 2010.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer