Dispositions spécifiques aux différents types daide sociale |
3420 |
AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH) | ||
Mots clés : ASPH - Placement - Participation financière - Titre |
Dossier no 091169
Mlle X...
Séance du 10 juin 2010
Décision lue en séance publique le 30 juin 2010
Vu, enregistré par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Lozère le 17 août 2009, le recours par lequel M. Y..., assistée de maître V..., avocat, demande à la commission centrale daide sociale dannuler la décision en date du 2 juin 2009 par laquelle la commission départementale daide sociale de la Lozère sest déclarée incompétente pour statuer sur « le fondement et la validité du titre exécutoire établi par le payeur départemental de la Lozère à la demande du président du conseil général pour un montant de 393 776,16 euros prétendument due (sic) au titre du reversement des ressources » de Mlle X..., placée depuis 1982 dans létablissement et service daide par le travail (ESAT) « B... » à M... (Lozère), et ce par les moyens que :
1o « Lensemble des contestations relatives au recouvrement des sommes demandées à des particuliers en raison des dépenses exposées par une collectivité publique au titre de laide sociale relève de la CDAS, sous réserve des questions relevant de la compétence judiciaire » ;
2o Le titre exécutoire litigieux serait frappé de nullité du fait de labsence de mention des voies et délais dopposition et de recours ;
3o La rétention de justifications imputée à M. Y..., curateur de lintéressée depuis 2000, naurait aucun fondement ;
4o Enfin, la dette de Mlle X..., égale aux deux tiers de son salaire et à quatre vingt-dix % de ses autres ressources, aurait été déterminée sans tenir compte des charges « notamment » fiscales pesant sur les revenus tirés du patrimoine de lintéressée ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, enregistré au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 10 novembre 2009, le mémoire en défense du président du conseil général de la Lozère, assisté de maître P..., avocat, tendant au rejet des conclusions du recours susvisé par les motifs que :
1o La juridiction administrative de droit commun est seule compétente pour apprécier la validité dun titre de recettes ;
2o Lopposition au titre de recettes exécutoire, qui, en lespèce, nest frappé daucune cause de nullité, doit être formée contre le comptable public ;
3o Enfin, la commission départementale daide sociale, dans une décision du 28 juin 2001 devenue définitive, a fixé les sommes à récupérer au titre de la période 1982 à 2000 à 328 320 euros, le département de la Lozère, sur le fondement des justificatifs des ressources réelles, notamment des revenus fonciers, les ayant arrêtées à 145 437,32 euros pour la période 2001 à 2007 puis ramenées au total à 393 776,16 euros au lieu de 473 757,32 euros ;
Vu, enregistré comme ci-dessus, le 15 décembre 2009, le mémoire en réplique présenté pour M. Y... persistant dans ses précédentes conclusions et tendant en outre au cas il serait fait droit à la demande du département à la désignation dun expert pour estimer la valeur des immeubles et des loyers afférents sur la période 1982 à 2000 par les mêmes moyens et les moyens que linertie du département pendant près de 20 ans na pour cause son obstruction alors quil nintervient pourtant que depuis 2000 en qualité de curateur de sa sur ; que la commission départementale daide sociale était bien compétente pour statuer sur le titre exécutoire, dont la nullité procéderait du « défaut de précisions des bases de liquidation » ; quil est impossible dobtenir les pièces justificatives des charges fiscales depuis 1982 ; que pour les années concernant sa gestion il a fait diligence et a communiqué à ladministration lensemble des justifications quil a pu retrouver ; que lexistence des immeubles devait apparaitre dans le dossier du juge des tutelles dès 1982 ; quaucune critique de sa gestion na été formulée ; que le département a laissé passer vingt-cinq ans avant de mettre à exécution ses décisions ; quil ne peut être avancée de retour à meilleure fortune de Mlle X... ; quune expertise aurait permis de constater quil est impensable quen 1982 mais aussi en 1992 les loyers aient pu être du montant de 1 600 euros par mois compte tenu de létat des locaux ; quil y a lieu dordonner une mesure dexpertise dans la mesure où il serait fait droit à la demande du département ; quil ne peut être sérieusement soutenu que le calcul de ladministration est favorable à la protégée ; que si les sommes sollicitées ne sont pas ramenées à la baisse, lensemble des comptes de Mlle X... doivent être soldés au fur et à mesure des années où les immeubles seront vendus ; que revenus fonciers subissent les aléas des périodes doccupation des locaux mais également des frais liés à tout gestionnaire immobilier ; quun bien a été vendu non pour régler le département mais parce quil était dans un état de ruine avancé ; que ladministration ne tient pas compte dans ses calculs de labattement quentraîne labsence de Mlle X... de lESAT « B... » quarante cinq jours par an, ce qui induit déjà une décote importante par rapport aux sommes réclamées ; que lensemble des imprécisions voulues par le département motive dautant plus la désignation dun expert ;
Vu, enregistré le 6 mai 2010, le nouveau mémoire pour M. Y... en communication de pièces non communiquées antérieurement ;
Vu, enregistré le 17 mai 2010, le mémoire présenté pour le département de Lozère persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes motifs et les motifs quil est permis de sinterroger sur le caractère exhaustif des placements justifiés ; que la somme de 228 741,40 euros retirée de la dernière vente immobilière a été investie en assurance-vie mobilisable sur autorisation judiciaire et que les pièces produites ne permettaient nullement den retrouver trace ; que la fortune de Mlle X... ne provient pas spécialement de son salaire mais de son capital et de ses placements ;
Vu, enregistrées le 8 juin 2010, les nouvelles pièces produites pour M. Y... ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Après avoir entendu à laudience publique du 10 juin 2010, M. GOUSSOT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que contrairement à ce que soutient le président du conseil général de la Lozère la requête est dirigée contre cette collectivité prise en la personne du président du conseil général (« lordonnateur ») et quà lappui dune opposition formulée à lencontre dun titre de perception rendu exécutoire, le débiteur est fondé à se prévaloir de moyens non seulement de légalité interne mais également de légalité externe, quil y a lieu pour le juge saisi de lopposition contre un titre de perception rendu exécutoire portant sur une créance de nature administrative dexaminer ;
Considérant dune part quà lintérieur de lordre de juridictions administratives cest le juge de laide sociale qui est compétent pour examiner lensemble des contestations portant sur le recouvrement des créances daide sociale au nombre desquelles lopposition formée contre un titre de perception rendu exécutoire émis pour avoir recouvrement dune telle créance ;
Considérant dautre part que si sur le fondement de larticle L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales les oppositions aux actes de poursuites intervenus postérieurement à lémission du titre de perception relèvent, y compris lorsque la créance est de nature administrative, de la compétence de lautorité judiciaire en ce qui concerne la régularité en la forme de ces actes et de celle du juge administratif compétent en ce qui concerne seulement lexistence, la quotité et lexigibilité de la créance, le titre de perception préalablement rendu exécutoire par lordonnateur ne constitue pas lui-même un acte de poursuites de la nature de ceux pour lesquels en cas de contestation contentieuse la compétence du juge administratif est ainsi limitée ; que sagissant de lopposition au titre de perception rendu exécutoire ce juge - en lespèce, comme il a été rappelé plus haut, le juge de laide sociale - est compétent pour connaitre tant des moyens de légalité interne que des moyens de légalité externe formulés à lappui des conclusions dirigées contre le titre contesté ; que cest par suite à tort que la commission départementale daide sociale de la Lozère sest dans la décision attaquée déclarée incompétente pour « connaitre de la validité du titre de recette » ; quil y a lieu dannuler - dans sa totalité et non seulement dans cette mesure - la décision attaquée et dévoquer lensemble de la demande ;
Considérant que le titre exécutoire litigieux nanalyse pas avec une précision suffisante les bases de liquidation de la créance du département et les éléments de calcul de celle-ci, en indiquant « reversement ressources de 1982 à 2007 » sans autre précision ; que si le département de la Lozère considère que « le débat sera définitivement clos » en ce que « le débiteur avait préalablement été averti des bases de liquidation de la créance par courrier du 3 juillet 2008 notamment » aucune référence à cette lettre non plus quà aucune autre correspondance ne figure dans le titre lui-même ; quil nest pas allégué et ne ressort pas du dossier quune telle référence figurât dans le courrier dexpédition de ce titre ; quen conséquence le titre litigieux ne peut être quannulé ;
Considérant quil appartient au président du conseil général, sil sy croit fondé, de pourvoir postérieurement à la notification de la présente décision au recouvrement de la créance du département par un titre régulier en la forme ; que le juge de laide sociale même de plein contentieux ne peut dans le litige procédant de lopposition au titre de perception rendu exécutoire ne pas se borner à annuler le titre irrégulier en statuant sur le bien fondé de la créance recherchée dès lors que celle-ci ne peut plus procéder dun titre quil lui appartient dannuler ; quil ne pourra donc examiner le bien fondé de la créance que sil est à nouveau saisi dune opposition contre un titre de perception régulier en la forme ;
Considérant que M. Y... nétant pas partie perdante dans la présente instance les conclusions du département de la Lozère tendant à ce quil soit condamné à lui verser 2 000 euros au titre des frais supportés non compris dans les dépens ne peuvent quêtre rejetées ;
Considérant quil y a lieu dans les circonstances de lespèce de condamner le département de la Lozère à payer globalement à M. Y... la somme de 2 000 euros sur le fondement non comme allégué de larticle 700 NCPC mais de larticle L. 75-I de la loi du 10 juillet 1991 au titre des frais exposés non compris dans les dépens quil a supportés en première instance et en appel,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale de la Lozère en date du 2 juin 2009, ensemble le titre de perception rendu exécutoire émis par le président du conseil général de la Lozère le 12 septembre 2008 à lencontre de Mlle X... sont annulés.
Art. 2. - Le département de la Lozère paiera 2 000 euros à M. Y... sur le fondement de larticle L. 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Art. 3. - Le surplus des conclusions de M. Y... et des conclusions du département de la Lozère fondées sur larticle L. 75-I de la loi du 10 juillet 1991 est rejeté.
Art. 4. - La présente décision sera transmise au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 10 juin 2010 où siégeaient M. LEVY, président, Mlle THOMAS, assesseure, et M. GOUSSOT, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 30 juin 2010.
La République mande et ordonne au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer