Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2200 |
DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE | ||
Mots clés : Détermination de la collectivité débitrice - Placement |
Dossier no 091192
M. X...
Séance du 10 juin 2010
Décision lue en séance publique le 30 juin 2010
Vu, enregistré au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 7 septembre 2009, le recours par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis demande au juge de laide sociale de déterminer le domicile de secours de M. X..., né le 31 octobre 1965 et placé, conformément à la décision de la commission dorientation et de reclassement professionnel de la Seine-Saint-Denis du 19 octobre 1999 dans le foyer occupationnel pour personnes handicapées « F... » de B... (Belgique) du 3 mai 2000 au 2 mai 2010 ;
Vu la lettre du 30 juillet 2009 par laquelle le président du conseil général Landes, où les parents de lintéressé demeurent en dernier lieu, décline sa compétence et transmet le dossier au préfet de la Seine-Saint-Denis ;
Vu, enregistré comme ci-dessus, le 8 décembre 2009, le mémoire en réponse du président du conseil général de la Seine-Saint-Denis tendant au rejet des conclusions du recours du préfet et indiquant que M. X... a conservé son domicile de secours dans le département du Pas-de-Calais où résidaient ses parents à la veille de sa majorité et auquel incomberait en conséquence la prise en charge des frais dhébergement de lintéressé en Belgique ;
Vu, enregistré comme ci-dessus, le 27 octobre 2009 et le 21 janvier 2010, le mémoire en réponse du président du conseil général des Landes tendant à décliner sa compétence en ce qui concerne la prise en charge des frais dhébergement de M. X... dans le foyer occupationnel belge « F... » ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Après avoir entendu à laudience publique du 10 juin 2010 M. GOUSSOT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quà nouveau le département du Pas-de-Calais ne présente pas de mémoire en défense dès lors que le litige pose un problème réel, témoignant ainsi de la considération quil porte au juge administratif de laide sociale ;
Considérant que pour lapplication des articles L. 111-3 et L. 122-1 à L. 122-3 du code de laction sociale et des familles la commission centrale daide sociale statuant en application de larticle L. 134-3 du même code est compétente pour connaître des litiges relatifs à limputation financière des dépenses afférentes aux prestations légales daide sociale prévues au 3e alinéa de larticle L. 121-1 auquel renvoie le 1er alinéa de larticle L. 122-1 ; que si lEtat ou un département entendent par application soit de dispositions de conventions quils ont signées avec des organismes gestionnaires détablissements ou de services, soit de dispositions unilatérales de règlement départemental daide sociale pourvoir à une action sociale facultative au titre de prestations qui ne sont pas au nombre des prestations légales daide sociale, la compétence quils acceptent ainsi dassumer ne donne pas lieu à des dépenses dont limputation financière procède de la détermination de domicile de secours ou de la compétence résiduelle de lEtat prévues pour les prestations légales daide sociale par les dispositions précitées ;
Considérant que M. X... qui est placé dans un foyer pour adultes handicapés en Belgique, après avoir été durant sa minorité puis en dérogation dâge admis dans un institut médico-éducatif (IME) géré par la même association à charge de lassurance maladie, a obtenu sans difficulté en vertu de dispositions normatives qui ont été prises par les pouvoirs publics à linitiative des services compétents pour les placements de la sorte à charge de la sécurité sociale, alors quils ne lont pas été dans les mêmes conditions pour les placements dans des établissements à charge de laide sociale, situation dailleurs fréquente, la prise en charge des frais exposés par lassurance maladie ; quaprès son admission en foyer occupationnel ses frais de placement ont été pris en charge par lEtat (DDASS de la Seine-Saint-Denis) en vertu dune « convention individuelle » prenant effet au 31 octobre 1990, date deffet de la décision de la COTOREP procédant à la première orientation de la sorte, dont larticle 1er dispose que M. X... est « admis au bénéfice de laide sociale de lEtat en Seine-Saint-Denis », et prévoit ainsi la prise en charge des frais dhébergement et dentretien par lEtat ; que larticle 6 précise que « la DDASS sengage à rembourser au foyer les frais de séjour sur la base du prix "de journée alors en vigueur" ajoutant que « tout rehaussement de ce prix ne pourrait intervenir quaprès accord du département de Seine-Saint-Denis » (il y a lieu sans doute dentendre la « DDASS de la Seine-Saint-Denis » puisquà lépoque lEtat ne contestait pas sa compétence ») ; que la COTOREP a renouvelé son orientation par deux décisions prenant effet de 1995 et de 2000, la décision de la commission des droits et de lautonomie prolongeant le placement à compter du 3 mai 2010 qui est intervenue ou ne saurait manquer dintervenir ne figurant pas au dossier, mais le litige portant en toute hypothèse sur les frais engagés durant la période deffet de la précédente décision ; que larticle 9 de la convention prévoit que « en cas de décision de retrait par le DDAS ou de la COTOREP celle-ci ne prendra effet » que dans les conditions quelle détermine, cet article étant le seul à régir la résiliation de la convention qui ne prévoit par ailleurs aucun terme autre que celui procédant nécessairement de leffet ratione temporis des décisions de la COTOREP (devenue CDAPH) ; que la convention demeure donc à lheure actuelle toujours en vigueur ;
Considérant que le préfet de la Seine-Saint-Denis sest avisé que M. X... nétait pas en réalité SDF et a entendu obtenir la reconnaissance de leur compétence dimputation financière par le ou les départements compétents ; quil résulte de sa requête quil a dabord saisi « par communication téléphonique » (!) le département de la Seine-Saint-Denis, qui a fait valoir que le domicile de secours est dans le Pas-de-Calais ; quil a ensuite saisi le département du Pas-de-Calais dont aucune décision formalisée adressée au préfet requérant ne figure au dossier mais qui selon le préfet requérant « a également refusé systématiquement de prendre ce dossier en charge compte tenu du placement hors de France et conseille aux familles se trouvant confrontées à cette situation, soit de reprendre leurs enfants ou parents à leur domicile, soit de les placer en hôpital psychiatrique », quelle que puisse être pour toute personne ayant une connaissance minimale de la situation des familles de personnes handicapées la délicatesse dune telle réponse si elle a été ainsi formulée ; que ce faisant le département du Pas-de-Calais oppose tant la perte de domicile de secours que labsence de droit à laide sociale hors résidence en France en application de larticle L. 111-1 du code de laction sociale et des familles selon lequel « sous réserve des dispositions des articles L. 111-2 et L. 111-3 toute personne résidant en France bénéficie, si elle remplit les conditions légales dattribution, des formes de laide sociale telles quelles sont définies dans le présent code » ; que cet article concerne en réalité les prestations légales daide sociale et non laide sociale facultative relevant dune convention passée par lEtat ou le département ou du règlement départemental daide sociale pour des formes et modalités daides nentrant pas au nombre de celles constituant les prestations légales daide sociale, tel étant le cas lorsque lassisté ne réside pas en France, quil réside à létranger en établissement sanitaire ou social ou hors établissement ; que le préfet a alors à nouveau saisi le département de la Seine-Saint-Denis pour lui demander de prendre en charge « à titre tout à fait exceptionnel » les frais litigieux puis le département des Landes, où entre-temps avaient déménagé les parents de M. X..., qui a refusé sa compétence par lettre du 30 juillet 2009 ; que cest à la suite de cette dernière récusation que par requête du 5 septembre 2009 le préfet demande à la commission centrale daide sociale de « déterminer le domicile de secours de M. X... ce qui par définition désignera la collectivité débitrice » sans conclure dailleurs à ce quil soit fixé dans tel ou tel département ;
Considérant toutefois que, comme il a été dit ci-dessus, la compétence attribuée à la commission centrale daide sociale statuant en premier et dernier ressort pour déterminer limputation financière des dépenses daide sociale nest prévue quen ce qui concerne les prestations daide sociale légale ; quil résulte, comme il a été également dit ci-dessus, de linstruction que la prise en charge de lespèce intervient en fonction dune « convention individuelle » de prise en charge qui ne relève pas de laide sociale légale ; que dailleurs il ressort en réalité du dossier quaucune demande daide sociale légale na jamais été expressément formulée par la tutrice de M. X..., la lettre du mois de décembre 1999 adressée au directeur du foyer de B... étant sans doute rédigée sur limprimé type dune « décision prise par la commission daide sociale » mais aucune date et aucune référence à une commission cantonale, la décision paraissant en réalité avoir été prise par le préfet dans ses rapports avec le gestionnaire et sans demande daide sociale formalisée de lassisté, la demande et le dossier familial figurant au dossier nétant en effet ni signés ni datés ; que quoi quil en soit et en toute hypothèse le présent litige nentre pas au nombre de ceux régis par les articles L. 134-3, L. 111-3, L. 122-1 et L. 121-1 du code de laction sociale et des familles ; quil suit de tout ce qui précède que la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis ne peut être que rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Considérant que tant que la convention actuellement en vigueur ne sera pas dénoncée et que la CDAPH orientera M. X... vers le foyer de B..., les stipulations de cette convention continueront à trouver application nonobstant la présente décision ; quil napparaît pas déraisonnable à la commission centrale daide sociale qui vient de statuer en droit dajouter que pour éclairer sa décision à venir le préfet requérant, si comme il nest pas exclu les départements recherchés persistent à décliner leur compétence, pourra comparer la situation de lespèce toutes choses égales à celle résultant de la jurisprudence du conseil dEtat Pyrénées-Atlantiques concernant le cas où une personne a résidé à létranger sans avoir jamais résidé en France ou, après y avoir perdu tout domicile de secours sans pour autant avoir été à létranger sans domicile fixe, mais au contraire pourvue dune adresse stable, revient en France pour y être uniquement admise dans un établissement « sanitaire ou social » ; que dans cette hypothèse la décision précitée a étendu de sorte que ne soit pas laissées sans solution de prise en charge des personnes justifiant par ailleurs du droit à laide sociale, lapplication de larticle L. 111-3 à des demandeurs pourtant toujours pourvus dun « domicile fixe » à létranger mais admis dès leur arrivée sur le territoire français en provenance de létranger dans un établissement sanitaire ou social et ainsi insusceptibles de voir leur prise en charge assurée par un département, la compétence dimputation financière de lEtat ; que dans cette hypothèse la situation de ces personnes a été assimilée à celle des personnes sans « domicile fixe » ; que sans doute la situation de lespèce est différente en ce que ces personnes résidant au moment de la demande daide sociale sur le territoire français relevaient bien de laide sociale légale, mais que néanmoins dans ce cadre la jurisprudence a considéré quil y avait lieu de pallier les situations dexclusions qui auraient pu procéder dune application rigoureuse et littérale des textes ; que si, après notification de la présente décision, lEtat continuera à se trouver placé dans la situation dune convention individuelle procédant de laide sociale facultative il nen demeure pas moins que des analogies existent entre les situations en ce que les textes tels quils sont rédigés ne permettent pas de prendre en compte une situation qui dans le cas des placements en Belgique nest pourtant nullement exceptionnelle et procède des lacunes mêmes du maillage du territoire français en établissements daccueil pour adultes handicapés contraignant à des placements de la sorte qui conduiraient si aucune solution nétait trouvée lEtat français à bénéficier des lacunes mêmes du dispositif daccueil des adultes handicapés sur son territoire pour refuser toute prise en charge ; mais que cette « problématique » ne se situe pas dans le cadre du seul litige dont est saisie la présente juridiction concernant la demande du préfet de la Seine-Saint-Denis dimputer aux départements intimés la charge des frais de placement de M. X... au foyer occupationnel de B... (Belgique), requête qui ne peut être que rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaitre,
Décide
Art. 1er. - La requête du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaitre.
Art. 2. - La présente décision sera notifiée par les soins du secrétariat de la commission centrale daide sociale au préfet de la Seine-Saint-Denis, au président du conseil général du Pas-de-Calais, au président du conseil général de la Seine-Saint-Denis, au président du conseil général des Landes et, pour information à Mme X... ainsi quau foyer occupationnel agrobiologoque « F... » (Belgique).
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 10 juin 2010 où siégeaient M. LEVY, président, Mlle THOMAS, assesseure, et M. GOUSSOT, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 30 juin 2010.
La République mande et ordonne au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer