Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : recours en récupération - Récupération sur donation - Assurance-vie
 

Dossier no 060929

Mme X...
Séance du 6 novembre 2009

Décision lue en séance publique le 27 novembre 2009

    Vu enregistré à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Saône-et-Loire le 22 décembre 2005, la requête présentée par Mme Y... demeurant dans le Rhône tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Saône-et-Loire du 11 octobre 2005 de récupération à l’encontre de Mme Z... bénéficiaire d’une assurance-vie souscrite par Mme X... par les moyens que Mme Z... est malade, âgée de 80 ans et ne dispose pas de ressources nécessaires au remboursement de cette somme ; que de plus, selon la jurisprudence, un contrat d’assurance-vie ne peut être requalifié en donation que si, compte tenu des circonstances dans lesquelles il a été souscrit, il révèle une intention libérale de la part du souscripteur de se dépouiller au profit du bénéficiaire ; qu’au moment de la souscription le 8 avril 1992 Mme X..., âgée de 85 ans, ne bénéficiait pas de l’aide sociale ; qu’elle l’a perçue six ans après et disposait de liquidités financières puisqu’elle venait de vendre sa maison ; que de surcroît le capital versé dans le cadre de ce contrat d’assurance-vie représentait mensuellement 23 euros soit 2,8 % de sa retraite mensuelle ; qu’il résulte dès lors de l’ensemble de ces éléments que les conditions exigées par la jurisprudence ne sont pas remplies et qu’ainsi aucun élément ne permet de conclure à une intention libérale de la défunte permettant la requalification de l’assurance-vie en donation ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense du président du conseil général de la Saône-et-Loire en date du 22 mai 2006 qui conclut au rejet de la requête par les moyens que sur la recevabilité de la requête Mme Y..., fille de Mme Z..., qui n’était pas partie à l’instance devant la commission départementale d’aide sociale ne justifie pas de sa qualité pour former appel de la décision du 11 octobre 2005 ; que par ailleurs Mme Y... n’a pas qualité pour agir au nom de Mme Z... ; qu’ainsi la requête n’est pas recevable et ne peut qu’être rejetée ; que sur la requalification du contrat d’assurance-vie en donation indirecte la requérante conteste cette requalification ; qu’en application de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles, le département exerce des recours contre le donataire, lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande ; que la jurisprudence de la commission centrale d’aide sociale confirmée par le conseil d’Etat dans un arrêt du 19 novembre 2004 autorise la requalification d’un contrat d’assurance-vie en donation indirecte permettant ainsi d’exercer un recours contre donataire au premier euro, sous certaines conditions ; que Mme X... a souscrit le contrat d’assurance-vie le 8 avril 1992, soit moins de dix ans avant la demande d’aide sociale du 1er août 1998 ; que le contrat d’assurance-vie a été souscrit jusqu’à concurrence du montant de l’aide attribuée soit 11 265,46 euros et sur le capital placé (et non perçu) en assurance-vie ; qu’alors que Mme X... entrait en maison de retraite le 18 juillet 1992 à titre payant, elle a souscrit un contrat d’assurance-vie le 8 avril 1992 pour une période de 10 ans pour un montant placé de 2 286,74 euros alors que Mme X... n’avait que 480,37 euros de revenus de capitaux mobiliers en 1996 lors de sa demande d’aide sociale ; que ce contrat a été souscrit au profit de sa nièce Mme Z... qui a perçu à ce titre 3 637,29 euros sans qu’aucune contre partie ne soit établie ; que par ailleurs, le solde de la succession est nul ; qu’ainsi le montant des primes versées dans le cadre du contrat d’assurance-vie était manifestement excessif au regard des possibilités du souscripteur ; que compte tenu de l’âge de Mme X... à la date de souscription du contrat d’assurance-vie (85 ans) et de la durée du contrat (10 ans) qui fait apparaître l’absence d’un aléa véritable, de l’importance des primes versées par rapport à l’actif disponible de l’intéressée, les primes constituent en réalité une donation donnant lieu à l’application de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles ; que le moyen selon lequel le recours en récupération sur l’assurance-vie souscrite par Mme X... requalifiée en donation ne peut être engagé, doit donc être écarté ; que par ailleurs, le département rappelle que l’aide sociale a le caractère d’une avance ; que la créance s’élève à 11 265,46 euros ; que la récupération s’opère sur le capital placé soit 2286,74 euros - 367,40 euros (frais d’obsèques déduits) soit 1 919,34 euros alors que Mme Z... a perçu 3 637,29 euros au titre de l’assurance-vie ; que dans son recours devant la commission départementale d’aide sociale Mme Z... demande dans l’hypothèse d’un rejet de sa requête, un échelonnement de paiement compte tenu de ses ressources ; que la commission centrale d’aide sociale n’a pas compétence pour faire droit à cette demande ; que Mme Z... a la possibilité de faire une demande écrite auprès du payeur départemental accompagnée de tous les justificatifs permettant d’attester des difficultés de remboursement ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 6 novembre 2009, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il ressort des pièces versées au dossier que la demande à la commission départementale d’aide sociale de la Saône-et-Loire (21 juillet 2005) et la requête d’appel (21 décembre 2005) ont bien été formulées par Mme Y... pour Mme Z... ; que l’en-tête du mémoire du 10 octobre 2005 devant la commission départementale d’aide sociale au nom de Mme Z..., alors que le mémoire seul versé au dossier n’est pas signé, n’est pas de nature à infirmer l’identité de la requérante en première instance, comme en appel qui était Mme Z... représentée par Mme Y... ; qu’ainsi le président du conseil général de la Saône-et-Loire n’est pas fondé à soutenir que la requête est irrecevable faute d’identité de parties en première instance et en appel ;
    Mais considérant que le président du conseil général soutient également que Mme Y... est « sans qualité à agir » ; que par cette formulation il ne peut qu’être regardé comme ayant estimé devoir soulever le moyen (d’ailleurs en droit strict d’ordre public...) tiré de la possibilité pour Mme Z... de se faire représenter dans la présente instance par sa fille, Mme Y... ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 4, 1er alinéa, de la loi du 31 décembre 1971 : « Nul ne peut s’il n’est avocat assister ou représenter les parties postuler ou plaider devant toute juridiction (...). Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacles à l’application des dispositions législatives ou réglementaires spéciales en vigueur à la date de la publication de la présente loi (...) » ; qu’à la date dont s’agit aucune disposition ne permettait la représentation devant les juridictions d’aide sociale par un tiers, non avocat, fut-ce la fille d’une personne âgée et que celle-ci ne pouvait, si elle n’était l’objet d’une mesure de protection comportant représentation, qu’introduire elle-même les instances ou se faire représenter par un avocat ; que compte tenu de l’évidente inapropriété de telles dispositions aux conditions particulières de fonctionnement des juridictions sociales l’ordonnance du 8 février 2005 a étendu au contentieux technique de la sécurité sociale des dispositions dérogatoires permettant la représentation autrement que par avocat notamment par les enfants ; qu’en matière d’aide sociale si la loi du 6 janvier 1986 a prévu la possibilité d’une assistance du requérant lors de l’audience de la juridiction elle n’a pas prévu la possibilité d’une représentation dans la procédure écrite non plus qu’à l’audience et il n’a pas été pourvu pour les juridictions administratives spécialisées à la même mise à jour que celle sus rappelée intervenue pour les juridictions sociales de l’ordre judiciaire ; qu’en tout état de cause le président du conseil général de la Saône-et-Loire a soulevé l’absence de qualité pour agir de Mme Y... dans son mémoire en défense devant la présente juridiction qui a été communiqué ; que, nonobstant la demande de procuration effectuée en cours d’instance, la commission centrale d’aide sociale dont la présente formation appelle depuis plusieurs années l’attention sur les conséquences de la situation procédurale ainsi maintenue mais qui ne peut qu’appliquer la loi rejettera comme irrecevable pour défaut de qualité pour agir la requête de Mme Y... pour Mme Z...,

Décide

    Art. 1er.  -  La requête de Mme Y... pour Mme Z... est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 6 novembre 2009 où siégeaient M. LEVY, président, M. JOURDIN, assesseur, et Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 27 novembre 2009.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer