Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2220 |
DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE | ||
Mots clés : Domicile de secours - Etablissement |
Dossier no 080044
M. X...
Séance du 12 décembre 2008
Décision lue en séance publique le 6 février 2009
Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 3 décembre 2007, le recours par lequel le président du conseil général du département de la Côte-dOr demande au juge de laide sociale de mettre à la charge de celui des Alpes-Maritimes les frais de séjour de M. X... au foyer F... en Côte dOr à compter du 3 juin 2006 et ce jusquau 22 août 2007, date du décès de lintéressé, par le moyen que celui-ci avait acquis un domicile de secours dans le département des Alpes-Maritimes lorsquil avait été admis dans cet établissement et lavait conservé durant son séjour dans le foyer, autorisé le 15 avril 2004 ;
Vu la décision du 4 avril 2007 par laquelle le président du conseil général des Alpes-Maritimes a pris en charge les frais de séjour de M. X... du 1er mars au 2 juin 2006 ;
Vu enregistré le 15 avril 2008, le mémoire en défense du président du conseil général des Alpes-Maritimes tendant au rejet des conclusions du recours susvisé par les motifs que M. X... était en réalité locataire dun appartement géré par lassociation « A... » et que seul le service daccompagnement social faisait lobjet dune tarification sociale, en sorte quau terme dune résidence habituelle de plus de trois mois dans le logement de la résidence située en Côte dOr il avait acquis un domicile de secours dans le département de la Côte-dOr auquel incombent les frais de séjour ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu la lettre en date du 26 août 2008 invitant les parties à se présenter à laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 12 décembre 2008, M. GOUSSOT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que si le président du conseil général des Alpes-Maritimes saisi par le président du conseil général de la Côte-dOr, na pas saisi la commission centrale daide sociale : il a produit dans son mémoire en défense dans la présente instance sans opposer lirrecevabilité de la saisine par le président du conseil général de la Côte-dOr auquel il avait retourné le dossier ; quil na pas opposé labsence de décision préalable ; que dans ces conditions la requête du président du conseil général de la Côte-dOr est recevable ;
Considérant que si lorsquun établissement dhébergement est autorisé la circonstance que lassisté sy acquitte dun loyer est sans incidence sur la nature détablissement social autorisé de la structure et en conséquence sur labsence dacquisition du domicile de secours en y résidant, pour lapplication de larticle L. 122-2 du code de laction sociale et des familles (le conseil dEtat ayant sur ce point infirmé la jurisprudence de la présente juridiction qui applique dorénavant la jurisprudence de la juridiction régulatrice) ; il nen demeure pas moins que seules relèvent des prestations légales daide sociale au titre desquelles seulement sapplique limputation financière des dépenses par lacquisition et/ou la perte dun domicile de secours les dépenses « dhébergement et dentretien » dans les foyers et les foyers-logement pour personnes handicapées adultes, ainsi quil résulte des dispositions des articles L. 122-1 et L. 121-1 selon lesquelles « les dépenses daide sociale prévues à larticle L. 121-1 sont à la charge des départements dans lesquels les bénéficiaires ont leur domicile de secours (...) les prestations légales daide sociale sont à charge des départements dans lesquels les bénéficiaires ont leur domicile de secours » ; que sagissant de laide sociale facultative en ce quelle crée des dépenses daide sociale et, en toute hypothèse, ne se borne pas à améliorer les prestations légales les dépenses sont à la charge du département dans lequel réside lassisté sans que ny fasse obstacle le séjour dans un établissement sanitaire ou social ;
Considérant quaux termes de larticle L. 344-5 du code de laction sociale et des familles issu de la loi du 11 février 2005 mais dont la rédaction issue de la loi du 30 juin 1975 na pas été modifiée substantiellement : « les frais dhébergement et dentretien des personnes handicapées accueillies (...) dans les établissements mentionnés (...) au 7 du 1 de larticle L. 312-1 sont à charge » de laide sociale ; que ces dispositions ne visent que les frais « dhébergement et dentretien » ; que la présente juridiction considère depuis huit ans que lorsque laide sociale ne sacquitte pas de frais de logement, de nourriture, de blanchiment etc.... mais uniquement de frais de personnel socio-éducatif il nexiste ni « hébergement » ni même « entretien » au sens des dispositions précitées et quen conséquence la prise en charge relève de laide sociale facultative ; que la « légalisation des services » par la loi du 2 janvier 2002 na, en toute hypothèse, pas modifié la situation puisque lintervention dun service est sans incidence sur lacquisition et la perte du domicile de secours qui ne procède que de ladmission dans un établissement assurant non seulement lentretien mais encore lhébergement ; que toutefois la présente juridiction qui appelle en vain depuis huit ans lattention des autorités responsables sur lurgente nécessité, selon elle, de modifier des textes datant de plus de trente ans compte tenu de lévolution des prises en charge dont la présente instance illustre à nouveau les caractéristiques, modifiera dans la présente décision sa jurisprudence, le conseil dEtat en huit ans nayant jamais été amené à se prononcer sur la situation de lespèce en létat des textes applicables et le juge de laide sociale ne pouvant indéfiniment maintenir, en labsence dadaptation des textes aux réalités des pratiques actuelles, une jurisprudence qui pour juridiquement fondée quelle puisse lui sembler est de nature à biaiser artificiellement les modalités de prise en charge des personnes handicapées adultes en soumettant à des régimes différents dimputation financière des dépenses des prises en charge dans des établissements autorisés comme foyers et présentant en réalité au delà des caractéristiques formelles de paiement par lassisté de ses frais dhébergement et dentretien sur ses allocations et/ou sa rémunération en Centre daide par le travail sensé garantir davantage son autonomie que la prise en charge moyennant un prix de journée les mêmes caractéristiques, cest-à-dire laccueil dune personne généralement admise en Centre daide par le travail pour de longues années, voire durant toute sa vie dans une structure assistée quelles que soient en réalité les modalités dacquittement des frais correspondant à lhébergement et à lentretien par lassisté ; quen toute hypothèse, en tout cas, il apparait à la présente juridiction déraisonnable de ne pas traiter au regard de limputation financière des dépenses dans des conditions identiques des situations qui ne sont en réalité, à son entendement, pas différentes ou qui, selon un certain nombre de départements, sont différentes mais dans le sens dune plus grande autonomie de la personne handicapée lorsque laide sociale nintervient que pour les frais dintervention du personnel notamment éducatif, lesquels constituent en réalité lessentiel de la charge qui demeure nécessaire pour la personne ainsi « autonomisée » dans des conditions très voisines quant au coût total de ce que serait la prise en charge dans un foyer dit « traditionnel » ;
Considérant en lespèce en premier lieu, quaux termes de larticle 1er de larrêté dautorisation du 15 avril 2004 « lautorisation a été accordée (...) en vue de la création dune structure daccueil (...) en tant quétablissement expérimental visé à larticle L. 312-1-12 du code de laction sociale et des familles ayant pour vocation la réinsertion en milieu ordinaire » ; que les dispositions précitées de larticle L. 344-5 ne visent que les établissements « mentionnés au 7o du 1 de larticle L. 312-1 » ; que le législateur qui na certainement pas entendu ne pas prévoir lintervention de laide sociale dans les établissements dits « expérimentaux » na toutefois pas réglé expressément la situation de ceux-ci au titre de la prise en charge des frais dhébergement et dentretien ; quil y a lieu dadmettre que dès lors que la structure continue à présenter en réalité comme en lespèce les caractéristiques dun foyer dhébergement ordinaire et que seules varient les modalités dacquittement des charges assumées par la personne handicapée et le montant de la participation de laide sociale sans doute plus élevé quil ne le serait par application des dispositions des articles D. 344-34 et suivants, la loi na pas entendu soumettre les prises en charges dans les établissements relevant de larticle L. 312-1-12 à des règles différentes de celles expressément prévues pour ceux relevant de larticle L. 312-1-7 pour autant que les caractéristiques de la structure ne soient pas substantiellement modifiées ce qui est le cas en lespèce, même si cette structure présente par rapport à lanalyse qui précède la particularité de ne prévoir en principe laccueil des intéressés que pour une période limitée et entend pourvoir à lissue dune période de trois ans ou au maximum de quatre ans selon larticle 5 de la « convention dhabilitation » à linsertion en milieu ordinaire (la question étant évidemment posée de savoir ce que devient la personne qui au bout de cette période ne bénéficie pas dune telle insertion) ; quil y a lieu dajouter que la solution ainsi adoptée par la présente décision ne sera pas limitée aux établissements « expérimentaux » entendant naccueillir les personnes prises en charge que durant une brève période mais vaudra pour tous les foyers présentant les mêmes caractéristiques dagencement du financement de la prise en charge même si, comme il a été envisagé ci-dessus, les intéressés y sont en réalité accueillis pendant de longues années voire toute leur vie active lorsquils travaillent en Centre daide par le travail ;
Considérant en deuxième lieu, que selon larticle 8 de la « convention dhabilitation » en date du 1er (?) janvier 2006 la répartition des frais entraînés par la prise charge est la suivante :
« - les charges dhébergement et dentretien financées directement par le résident ;
- les charges daccompagnement socio-éducatif lié au handicap financées par le département de la Côte-dOr,
en conséquence létablissement facturera au résident mensuellement ses frais dhébergement » (et dentretien évidemment) « et au conseil général un prix de journée » « accompagnements socio-éducatifs » ; que selon larticle 9 le département de la Côte-dOr sengage « à fixer le prix de journée relatif aux charges daccompagnement socio-éducatif lié au handicap financées par laide sociale départementale » ; quil résulte de ce qui a été dit ci-dessus que dès lors quil y a lieu, comme il vient dêtre dit, dassimiler les établissements relevant de larticle L. 312-1-12 à ceux relevant de larticle L. 312-1-7 (le caractère « expérimental » des modalités de financement dont il sagit étant dailleurs tout à fait relatif puisque la présente juridiction observe dans un nombre croissant de dossiers quil est employé sans fondement légal il est vrai dans un très grand nombre détablissements ne prétendant pas à des modalités de fonctionnement « expérimental ») de telles modalités de financement doivent être regardées comme sans incidence sur la nature de charges « dentretien » des frais exposés par laide sociale au foyer F... et quainsi cette prise en charge, qui par ailleurs nest pas celle dun service daccompagnement mais bien dun établissement autorisé « en tant quétablissement », fut-il expérimental, est sans incidence sur la nature détablissement dabord et détablissement autorisé ensuite de la structure ; quen conséquence dès lors quil est admis que les frais « daccompagnement socio-éducatif » doivent être regardés, pour que la carence du législateur et du pouvoir réglementaire à prendre des textes adaptés aux modalités de prise en charge actuelles ne débouche pas sur une solution juridiquement correcte mais socialement contre indiquée comme des frais « dentretien » le séjour dans la structure dont il sagit nest pas acquisitif de domicile de secours en application des dispositions de larticle L. 122-2 du code de laction sociale et des familles ;
Considérant dailleurs en troisième lieu, que la solution quil y a lieu dadopter dorénavant parait dautant plus se justifier que les dispositions dorénavant applicables selon les articles R. 314-140 et suivants du code de laction sociale et des familles certes relatifs aux foyers médicalisés, ce que nest pas la structure F..., et aux « services daccompagnement », ce quelle nest pas non plus malgré les termes employés en ce qui concerne la participation de laide sociale par lautorisation et la convention précitées, prévoient dorénavant que dans ces foyers ( qui sont des établissements) le tarif journalier est fixé et en conséquence laide sociale intervient pour « laccompagnement à la vie sociale et le cas échéant lhébergement » que ces textes ne se réfèrent même plus à la notion « dentretien » ; que quelle que puisse être la légalité et, en tout cas, la simple cohérence intellectuelle dune telle formulation au regard des dispositions législatives suscitées qui ne sont pas modifiées prévoyant lintervention de laide sociale pour lhébergement et lentretien il reste que la sémantique du pouvoir réglementaire conduit nécessairement à considérer que dorénavant la pratique tend à assimiler « accompagnement » à « entretien » et que dans ces conditions dès lors que cet « accompagnement » est dispensé dans un établissement autorisé et non par un service non rattaché à un établissement lautorisation dont il sagit détermine limputation financière de la dépense par non acquisition dun domicile de secours, la circonstance que lassisté sacquitte dun loyer ou ait la qualité de sous-locataire étant dailleurs, comme il a été rappelé du reste ci-dessus, sans incidence sur la nature détablissement autorisé de la structure et les conséquences quil y a lieu den tirer quant à la charge des dépenses daide sociale ; quil peut être enfin ajouté que dans la jurisprudence CANCIANI contre département de la Haute-Garonne datant de plus de dix ans le conseil dEtat a expressément admis que laide sociale pouvait intervenir non seulement en internat et semi-internat mais encore en externat semblant par là même considérer, contrairement à la jurisprudence jusqualors constante de la présente juridiction que des frais « daccompagnement » et en tout cas de simple prise en charge socio-éducative pouvaient être considérées comme des dépenses « dentretien » ; que pour lensemble de ces motifs la présente juridiction considère dans la présente instance et considèrera dorénavant que lorsquune personne handicapée est accueillie dans un foyer pour adultes handicapés autorisé elle ny acquiert pas son domicile de secours quels que puissent être lambiguïté des termes employés par les textes dautorisation et de conventionnement adoptés par les départements, la contrariété de cette solution avec les termes mêmes de larticle L. 344-5 jamais modifiés (et à bien des égards la réalité de la situation quil sagit dapprécier étant pour le moins paradoxal de considérer que la simple intervention déducateurs auprès dune personne mentalement handicapée constitue « lentretien » de celle-ci) ; que cette relative incongruité logique et sémantique doit néanmoins être relativisée dans la mesure où dans un foyer « traditionnel » les frais dhébergement et dentretien proprement dits ne constituent pas lessentiel du tarif à charge de laide sociale, qui réside bien dans le coût du personnel éducatif dont il a toujours été admis que, dès lors du moins que les frais dhébergement et dentretien proprement dit sont également pris en compte, ils contribuaient audit « entretien » ;
Considérant dans ces conditions quil résulte de tout ce qui précède que M. X... accueilli au foyer F... na pu acquérir au bout de trois mois de présence dans cette structure un domicile de secours dans le département de la Côte-dOr, mais a conservé le domicile de secours dont il nest pas contesté quantérieurement à cette admission il était fixé dans le département des Alpes-Maritimes ; quil y a lieu, par suite, de mettre à la charge de ce dernier département les frais procédant « du prix de journée relatif aux charges daccompagnement socio-éducatif liés au handicap financées par laide sociale départementale » selon larticle 9 de la convention liant le département de la Côte-dOr à lassociation « A... » ;
Considérant que pour la dernière fois la commission centrale daide sociale appellera, comme elle le fait depuis huit ans, lattention des autorités responsables sur lurgente nécessité de modifier dans un sens compréhensible et gérable tant par les départements que par les gestionnaires détablissements et les familles de personnes handicapées elles mêmes les modalités de prise en charge des handicapés adultes en structure résidentielles, le juge se trouvant depuis une dizaine dannées amené à intervenir dans un contexte de prise en charge avec lequel les textes applicables ne sont plus dans un rapport de cohérence et ne pouvant en conséquence que retenir des interprétations soit littérales et sans doute inadaptées, soit (trop) constructives et sans doute contestables ; que seule, encore un fois, lintervention du législateur et du pouvoir réglementaire est de nature selon la présente juridiction à rendre la présente situation juridiquement gérable,
Décide
Art. 1er. - Le domicile de secours de M. X... est dans le département des Alpes-Maritimes pour la prise en charge des frais dhébergement de lintéressé au foyer « F... » du 3 juin 2006 au 22 août 2007.
Art. 2. - La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 12 décembre 2008 où siégeaient M. LEVY, président, M. PERONNET, assesseur, et M. GOUSSOT, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 6 février 2009.
La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer