Dispositions spécifiques aux différents types daide sociale |
3420 |
AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH) | ||
Mots clés : ASPH - Placement - Etablissement |
Dossier no 080819
M. A...
Séance du 3 avril 2009
Décision lue en séance publique le 14 mai 2009
Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 16 mai 2008, la requête présentée pour M. A..., par son tuteur la société des intérêts populaires, tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale réformer la décision en date du 19 décembre 2007 de la commission départementale daide sociale du Nord en tant quelle nadmet que partiellement sa prise en charge au titre de laide sociale à lhébergement des personnes âgées à la maison de retraite X... et lexclut à lEHPAD Y... par les moyens que par notification de décision en date du 4 février 1999 la COTOREP a préconisé un placement en foyer occupationnel et faute de structure elle némettait pas dopposition dâge à lentrée en hospice ou section hospice (maison de retraite) quil y a lieu de prendre en considération cet accord ; quune dérogation dâge pour entrée en maison de retraite a été demandée en 2002 mais na jamais été accordée ; que lévolution de létat de M. A... layant fortement altéré son médecin traitant préconise de le maintenir à lEHPAD Y..., son état de santé nétant pas compatible avec un changement de structure ; que cette « décision » va à lencontre des diverses décisions de refus de prise en charge et met la situation budgétaire de M. A... dans une « précarité très importante » ;
Vu la décision attaquée ;
Vu enregistré le 22 octobre 2008 le mémoire en défense du président du conseil général du Nord tendant dune part, à la réformation de la décision de la commission départementale daide sociale du Nord en tant quelle a accordé le bénéfice de laide sociale à M. A... du 19 novembre 2003 au 4 février 2004 pour le placement à X... et dautre part, au rejet des conclusions de la requête de lassociation Société des intérêts populaires par les motifs que cest à juste titre que la commission dadmission à laide sociale a rejeté la demande daide sociale pour le placement à Hautmont comme à Y... ; quen effet seules les personnes âgées de plus de soixante ans peuvent bénéficier de laide sociale servie par le département et quaucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit la prise en charge des frais de séjour dune personne âgée de moins de 60 ans au titre de laide sociale ; que, toutefois, il a fait usage de la faculté ouverte par larticle L. 121-4 du code de laction sociale et des familles de modalités de prise en charge plus favorables en appliquant les dispositions du chapitre III du titre IV de son règlement départemental daide sociale doù il résulte que le président du conseil général peut autoriser une personne handicapée à déroger à la condition dâge pour entrer en maison de retraite et dispose à ce titre dun pouvoir discrétionnaire en appréciant souverainement la situation du demandeur ; que plus lâge de celui-ci se rapproche de lâge légal, plus il a de chance de voir sa demande de dérogation prise en compte alors quen lespèce M. A... était âgé de quarante-neuf ans lorsquil a déposé sa demande ; que le président du conseil général sest conformé à trois avis médicaux défavorables pour rejeter la demande de dérogation formulée ; que la COTOREP dans ses décisions du 9 juillet 2004 et 26 août 2005 a estimé que M. A... ne relevait pas dun établissement médico-social ; que ces décisions confirment que létat de santé de M. A... ne permettait pas de le placer dans un établissement pour personnes âgées ; que cest bien sur la base de lavis défavorable du médecin départemental et de la décision du 26 août 2005 de la COTOREP que ladmission a été refusée ; quil ny avait pas lieu de faire prévaloir la décision de la COTOREP du 29 janvier 1999 ni lunique avis médical favorable du 22 juin 2004 ; que la commission départementale daide sociale du Nord a elle-même confirmé le refus de dérogation dâge à compter du 5 février 2004 alors quaucun élément ne justifie une solution différente pour la période antérieure ; que lidentité de la situation conduit pour la période courant du 5 février 2004 à rejeter la requête dappel de lassociation requérante ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu la lettre en date du 21 Janvier 2009 invitant les parties à se présenter à laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 3 avril 2009, Mlle Erdmann, rapporteure, Mme Leslie Pacoret, pour le président du conseil général du Nord, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que M. A... est décédé le 7 novembre 2008 ; quà cette date le département du Nord avait produit son mémoire en défense enregistré le 22 octobre 2008 ; que laffaire est en létat et quil y a lieu de statuer ;
Considérant que le présent dossier illustre à nouveau la situation trop connue de la présente juridiction des personnes atteintes de troubles mentaux justifiant dune prise en charge psychiatrique dont selon les termes du certificat figurant au dossier établi par le médecin chef de service du secteur concerné, les établissements psychiatriques « se débarrassent en (les) mettant dans une maison de retraite à distance » ; que les orientations pour M. A..., né le 25 septembre 1954, ont été sollicitées de la COTOREP ; que le 29 janvier 1999 celle-ci a orienté pour deux ans à compter de la date dadmission vers un « foyer occupationnel » (i.i. juridiquement un foyer dhébergement...) et énoncé que « faute de structure elle német pas dopposition dâge à lentrée en hospice ou section dhospice » ; que compte tenu de la précision sémantique habituelle des imprimés tenant lieu de décisions aux instances dorientation cette décision nécessite une double interprétation ; quil est considéré que dune part, labsence dopposition équivaut à une décision dorientation de la COTOREP vers un établissement pour personnes âgées faute que ne soit trouvée de place en foyer occupationnel ; que dautre part, il doit être considéré queu égard à lemploi du terme « faute de structure », la commission oriente également pour une période de deux ans à compter de ladmission vers la structure - établissement pour personnes âgées - substitutive ; quà la suite de cette décision une « dérogation dâge » (pour lentrée en EHPAD à moins de soixante ans) a été sollicitée en 2002 selon le requérant, le 12 décembre 2003 selon le département ; que M. A... est entré à la maison de retraite du centre hospitalier X... du 19 novembre 2003 au 4 février 2004 puis à lEHPAD Y... à compter du 5 février 2004, et quil y est demeuré jusquà son décès ; quultérieurement, la COTOREP a continué à être saisie pour des orientations de cette personne handicapée vers des établissements pour handicapés ; quà la suite dune demande dorientation en maison daccueil spécialisée elle a décidé les 9 juillet 2004 et 26 août 2005 que M. A... « ne relève pas dun établissement médico-social » ; que, toutefois, cette décision navait pas pour objet et ne pouvait légalement avoir pour effet de revenir sur la précédente décision du 29 janvier 1999 orientant pour deux ans à compter de ladmission M. A..., le cas échéant, vers un établissement pour personnes âgées substitutif de lorientation inaboutie en foyer (établissement alors « social » nécessairement, à la différence dune maison daccueil spécialisée) ; que le 8 février 2008 linstance dorientation a refusé une orientation en foyer dhébergement ; que le département a, à la suite de la décision de la COTOREP du 29 janvier 1999, instruit les demandes de M. A... dadmission dans un établissement pour personnes âgées comme des demandes de « dérogation dâge » et quau vu de certificats médicaux majoritairement défavorables à ladmission en établissement pour personnes âgées et dun avis de M. P... (présenté comme médecin mais qui est sans doute plutôt un cadre administratif) énonçant que « la situation de M. A... relève plus dune prise en charge sanitaire. A ce titre, il nest pas concevable de faire supporter par le département une prise en charge financière qui doit incomber à lEtat » la commission dadmission à laide sociale dA...a, par deux décisions du 30 septembre 2005, refusé la prise en charge dune part à X... et dautre part à Y... ; que M. A... est néanmoins demeuré à lEHPAD Y... jusquà son décès, son état étant ultérieurement jugé incompatible avec un transfert vers un autre établissement (lequel dailleurs puisque toute autre orientation lui a été refusée) ; que dans ces conditions soit M. A..., soit en toute vraisemblance létablissement et/ou les bases des tarifs des années postérieures à celles des déficits nécessairement générés devaient selon le département supporter les frais à X... et puis à Y... ; que saisie par le gérant de tutelle de M. A... le 26 octobre 2005, la commission départementale daide sociale du Nord par la décision attaquée du 19 décembre 2007 a fait droit « exceptionnellement » à la demande pour la prise en charge à X... et rejeté celle pour la prise en charge à Y... ; que la société des intérêts populaires forme appel du deuxième chef de cette décision et le président du conseil général du Nord appel incident du premier ;
Sur lappel incident du président du conseil général du Nord ;
Considérant que la commission dadmission à laide sociale dA... a pris deux décisions portant sur deux périodes successives et distinctes daccueil dans deux établissements différents ; que la contestation par lappel incident de la prise en charge de M. A... à létablissement X... présente à juger un litige distinct de celui soumis à la commission centrale daide sociale par lappel principal ; que lappel incident nest ainsi pas recevable et quayant été formé postérieurement à lexpiration du délai de recours contentieux contre la décision de la commission départementale daide sociale il ne peut être requalifié en appel principal ; quil doit en conséquence être rejeté ;
Sur lappel de la Société des intérêts populaires pour M. A... ;
Considérant que le président du conseil général du Nord considère « quaucune disposition législative ou réglementaire ne permet la prise en charge des frais de séjour dune personne âgée de moins de 60 ans au titre de laide sociale » ; que sagissant comme il lexpose lui-même dune personne handicapée (de plus de 80 %), il y a lieu nécessairement de lire « au titre de laide sociale aux personnes âgées », le président du conseil général du Nord nentendant sans doute pas soutenir que M. A... ne serait pas susceptible de bénéficier de laide aux personnes handicapées... ; quil expose que, toutefois, ladministration a fait application des dispositions plus favorables du règlement départemental daide sociale lui permettant dans lexercice dun pouvoir discrétionnaire dadmettre une personne handicapée de moins de soixante ans pour la prise en charge dun placement en maison de retraite par « dérogation dâge » ;
Mais considérant quaux termes de larticle L. 241-1 du code de laction sociale et des familles : « Toute personne handicapée dont le taux dinvalidité est au moins égal à 80 %, ou qui compte tenu de son handicap est dans lincapacité de se procurer un emploi peut bénéficier des prestations prévues au chapitre 1er du titre III du présent livre » ; quau nombre de ces prestations figure laide sociale à lhébergement dans un établissement pour personnes âgées ; quen conséquence une telle admission est de droit si les conditions légales et réglementaires en sont remplies et est soumise à lentier contrôle du juge de plein contentieux de laide sociale ; que le président du conseil général du Nord ne saurait utilement se prévaloir des dispositions prétendument plus favorables du Règlement départemental daide sociale en tant quelles lui confèreraient un pouvoir discrétionnaire dadmission au cas par cas dans un établissement pour personnes âgées dune personne handicapée de moins de soixante ans ; quainsi il appartient, le cas échéant, au juge de laide sociale dexercer son entier contrôle sur les avis médicaux et administratifs au vu desquels est intervenue la décision de la commission dadmission à laide sociale (aujourdhui du président du conseil général) ;
Considérant dabord, en lespèce, que comme il a été dit la décision du 29 janvier 1999 de la COTOREP navait pas été rendue caduque par les décisions ultérieures de linstance dorientation en tant quelle préconisait, à titre substitutif pour une période de deux ans à compter de ladmission, lorientation vers un établissement pour personnes âgées dans le cadre légal qui ne pouvait quêtre celui sus rappelé de laide aux personnes âgées ; que M. A... ayant été admis en maison de retraite le 19 novembre 2003 avait en fonction de cette décision droit à la prise en charge de ses frais dhébergement jusquau 18 novembre 2005, alors même que la commission navait pas désigné nominalement les établissements pour personnes âgées, seul le principe dune telle orientation dont elle avait bien décidé étant contesté par le département ; quà supposer même que linstance dorientation ait statué illégalement sur une orientation matérialisée dans le cadre non de laide aux personnes handicapées mais de laide aux personnes âgées qui peut également être accordée à ces personnes sur le fondement des dispositions législatives précitées, le président du conseil général na pas formé de recours sur ce point contre cette décision devant la juridiction compétente et, celle-ci aurait elle-même été illégale, elle est en toute hypothèse définitive et le président du conseil général était tenu de lexécuter tant quelle nétait pas infirmée par la juridiction compétente et demeure dorénavant tenu de le faire ; que sil est vrai, quà la date de la présente décision, lorientation « générale » vers une catégorie détablissements relève du Tribunal administratif et quil nexiste pas de questions préjudicielles de légalité dune décision administrative entre juridictions administratives, il ne résulte pas de linstruction, comme il va être précisé ci après, que lorientation vers un EHPAD de M. A..., même si son état relevait davantage dinstitutions de santé psychiatrique, ne fut pas justifiée, la frontière entre prises en charge psychiatrique et médico-sociale nétant pas hermétique, ni insusceptible de solutions plurielles, comme en fait foi dailleurs le maintien de lassisté jusquà son décès en EHPAD dont les responsables ne paraissent pas avoir mis en cause le principe mais seulement le financement ; quainsi de ce premier chef les frais de placement de M. A... doivent être pris en charge du 19 novembre 2003 (et ainsi du 4 février 2004) au 18 novembre 2005 ;
Considérant ensuite que, comme il a été dit, la décision du 29 janvier 1999 ne peut être interprétée comme orientant, pour une période supérieure à deux ans à compter de ladmission dans létablissement, M. A... ; que, toutefois, ladmission à laide sociale à lhébergement des personnes âgées pour des personnes handicapées de moins de soixante ans peut intervenir sans décision de la COTOREP sur décision des instances départementales prise après avis du médecin départemental ; que, comme il a été dit, la décision prise dans ces conditions par linstance dadmission ne lest pas dans lexercice dun pouvoir discrétionnaire non soumis au contrôle du juge de laide sociale mais relève de lentier contrôle de plein contentieux de celui-ci ;
Considérant quil résulte de linstruction que les avis médicaux émis varient et notamment chez le même praticien à des intervalles rapprochés en fonction de paramètres qui ne sont pas précisés ; que lavis de M. P... en date du 6 octobre 2004 considère quil relève « plus » dune prise en charge sanitaire et que la position des instances départementales sévince en réalité autant dune opposition de principe à supporter des charges indues pour les départements que dune appréciation spécifique de la situation de chaque demandeur daide ; quen réalité « aux frontières (imprécises) » du sanitaire et du médico-social une personne peut relever « plus » dune prise en charge sanitaire mais tout aussi bien relever dune prise en charge substitutive médico-sociale si compte tenu de son état et de labsence de possibilité de matérialisation dune prise en charge sanitaire, celle-ci vient à se révéler comme ultime recours ; quen lespèce, il résulte suffisamment des pièces versées au dossier que létat de M. A... justifiait, et davantage encore à la date de son décès où tout transfert était contre indiqué depuis plusieurs mois au moins, dune prise en charge en EHPAD, alors même quune prise en charge sanitaire aurait été davantage encore appropriée ; quau demeurant la suggestion faite dans le rapport de M. P... de prise en charge sanitaire, sans hospitalisation, par le secteur moyennant une supervision par une équipe médico-sociale apparait au regard de la réalité de la situation de M. A..., bénéficiant alors et dune telle supervision et dune aide ménagère particulièrement aléatoire, la situation de lintéressé sétant avant son admission à Hautmont manifestement dégradée au fur et à mesure de son maintien solitaire dans une vie « autonome » quil nétait plus à même dassumer avec le seul soutien de quelques heures daide ménagère et dune supervision épisodique dune équipe médico-sociale ; quainsi il peut être considéré que dès la fin de la période deffet de la décision de la COTOREP, soit le 18 novembre 2005 et jusquau décès de M. A..., au vu des éléments postérieurs à lémission des avis médicaux initiaux quil appartient au juge de plein contentieux de laide sociale de prendre en compte à la date de sa décision, le maintien de lintéressé à létablissement Y... était médicalement et socialement justifié et quainsi cest pour lensemble de la période litigieuse que les frais de placement doivent être supportés par laide sociale aux personnes âgées ;
Décide
Art. 1er. - Lappel incident du président du conseil général du Nord est rejeté.
Art. 2. - M. A... est admis à laide sociale à lhébergement des personnes âgées pour la prise en charge des frais de son placement au centre hospitalier X... du 19 novembre 2003 au 4 février 2004 et à lEHPAD « D... » à Y... du 5 février 2004 au 7 novembre 2008.
Art. 3. - La décision de la commission départementale daide sociale du Nord du 19 décembre 2007 est réformée en ce quelle a de contraire à larticle 2.
Art. 4. - La présente décision sera notifiée par les soins du secrétariat de la commission centrale daide sociale à la Société des intérêts populaires, au président du conseil général du Nord et, pour information, aux directeurs du centre hospitalier X... et de lEHPAD Y...
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 3 Avril 2009 où siégeaient M. Levy, président, Mlle Balsera, assesseure, et Mlle Erdmann, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 14 mai 2009.
La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer