Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Hypothèque
 

Dossier n° 080041

Mlle S...
Séance du 23 octobre 2008

Décision lue en séance publique le 27 novembre 2008

    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 2 janvier 2008, la requête présentée par la SCP G..., avocat au conseil d’Etat et à la cour de cassation, pour M. B... agissant comme curateur de Mlle S... demeurant à P... tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de Paris du 17 novembre 2006 rejetant sa demande dirigée contre une notification du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général du 27 avril 2006 décidant de l’inscription d’une hypothèque sur un bien dont Mlle S... est propriétaire indivis à P... ensemble à l’annulation de cette décision par les moyens que le rapporteur de la commission départementale d’aide sociale n’a pas la qualité de secrétaire de la commission et que l’on ignore du reste sa qualité et ses éventuels liens avec les services du département ; que la commission s’est prononcée au vu de pièces qui n’ont pas été communiquées au requérant ni soumises à la contradiction ; que la décision n’a été prise ni par le président du conseil général ni par un fonctionnaire disposant d’une délégation de signature de ce dernier ; que le département de Paris ne justifie pas du montant de la créance qu’il entend recouvrer ; que Mlle S... travaille dans un CAT et acquitte un loyer ; qu’il parait de surcroit assez extraordinaire que l’administration puisse attendre des années avant de faire connaitre les »conditions » auxquelles elle se dispose à « aider » un handicapé avant de présenter une facture dont elle n’a jamais prévenu auparavant privant la famille de la possibilité de s’organiser autrement le cas échéant ; que la créance parait douteuse au regard du droit de chacun au respect de ses biens ;
    Vu enregistré le 2 janvier 2008 le mémoire en défense du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général tendant au rejet de la requête par les motifs que Mlle A... a été désignée rapporteure dans les conditions prévues à l’article L. 134-6 du code de l’action sociale et des familles ; qu’elle exerce des responsabilités dans le domaine social et répond à un critère de compétence ; que le rapporteur devant la commission départementale d’aide sociale n’expose pas le dossier en tant qu’agent du département de Paris défendant les intérêts du département mais en qualité de rapporteur devant une juridiction ; que les arguments avancés sont donc inopérants ; qu’il y a lieu d’annexer au mémoire une copie du document non communiqué pour respecter le principe du contradictoire mais qu’aucune obligation n’imposait au département d’adresser au curateur l’évaluation foncière des biens de sa protégée les règles de procédure relatives à la contradiction s’appliquant en effet uniquement devant une juridiction ; que la décision d’hypothèque a été régulièrement prise par un fonctionnaire ayant délégation de signature du président du conseil général ; que la jurisprudence dont se prévaut Mlle S... n’est pas applicable à la situation de son dossier ; que l’état de frais produit a été établi à partir des états justificatifs des dépenses engagées par le département et des contributions de Mlle S... à ses frais d’hébergement ; que l’hypothèque ne pouvait être prise qu’à partie du moment où la créance était justifiée et certaine ; qu’aucun délai n’est prévu par les textes ; que l’information relative aux conditions suspensives de l’attribution de l’aide sociale est régulièrement présente non seulement aux versos des imprimés mais des notifications des décisions des commissions d’admission et du président du conseil général admettant à l’aide sociale ; qu’ainsi la famille ou du moins M. B... ne pouvait méconnaitre l’existence du privilège donné à l’administration ; que quand bien même le curateur aurait néanmoins pu l’ignorer, cette éventualité ne saurait cependant faire obstacle à la mise en œuvre du privilège ; que pour préjudiciable que puisse être à Mlle S... l’inscription d’hypothèque aucun élément ne justifie que le département y renonce ;
    Vu enregistré le 18 septembre 2008 le mémoire en réplique présenté pour Mlle S... persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et tendant en outre à ce que « la ville de P... » soit condamnée à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de la justice administrative par les mêmes moyens et les moyens que l’agent du département de Paris auquel on demanderait de ne pas réfléchir en tant qu’agent du département serait appelé à un exercice quelque peu schizophrénique et en tout cas ne présenterait aucune garantie d’impartialité objective ; qu’il appartient à la commission centrale d’aide sociale d’exercer ses pouvoirs d’instruction pour les vérifications nécessaires à cet égard ; qu’il est peu convenable au regard du principe d’impartialité que les rapporteurs soient désignés « sur proposition du président du conseil de Paris » ; que si le texte le prévoit il n’est conforme ni au principe d’impartialité des juridictions ni aux exigences qui se déduisent de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ; que le département ne justifie ni de la délégation de signature qu’il invoque ni de sa publication ; qu’en toute hypothèse le tuteur de Mlle S... n’a pas été mis en mesure avant l’intervention de la décision attaquée de faire connaitre ses observations en violation des prescriptions de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 qui s’applique aux décisions de prise d’hypothèque comme aux décisions de récupération ; que le respect de la procédure contradictoire souhaitable pour la famille ne présentait aucun inconvénient ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la loi du 24 avril 2000 ;
    Vu la lettre en date du 6 août 2008 invitant les parties à se présenter à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 23 octobre 2008, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur la régularité du jugement attaqué sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
    Considérant qu’il n’est pas sérieusement contesté et même implicitement admis par le défendeur que le rapporteur devant la commission départementale d’aide sociale était un agent du département en fonction dans un service en charge des questions d’aide sociale ; que dans ces conditions, quelle que puisse être l’indépendance « subjective » de ce rapporteur qui n’est d’ailleurs pas contestée le principe d’indépendance et d’impartialité des juridictions administratives a été méconnu ; qu’il y a lieu d’annuler la décision attaquée et d’évoquer la demande ;
    Sur la légalité externe de la décision du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général d’inscription d’hypothèque légale sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
    Considérant que la décision d’inscription d’une hypothèque impose des sujétions au propriétaire des biens concernés, doit être motivée en application de l’article 3 de la loi du 11 juillet 1979 et qu’en conséquence elle ne peut intervenir qu’après que l’intéressé ait été mis à même de présenter des observations écrites et le cas échéant sur sa demande des observations orales en application de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; qu’il est constant que tel n’a pas été le cas en l’espèce ; qu’il y a donc lieu d’annuler cette décision ;
    Sur le bien fondé de l’hypothèque ;
    Considérant qu’il appartient au juge de plein contentieux de l’aide sociale de statuer non seulement sur la légalité de la décision attaquée mais également sur le bien fondé de la sujétion qu’elle impose ; que lorsqu’il annule une décision administrative pour un motif d’illégalité externe il lui appartient de statuer au fond sur la demande de l’assisté ;
    Considérant que la créance pour le recouvrement de laquelle l’hypothèque est inscrite est justifiée par un état liquidatif faisant apparaitre à la fois le montant des participations de l’aide sociale et celui des participations de l’assistée à ses frais d’hébergement et d’entretien ; que le requérant ne formule aucune critique à l’encontre de cet état qui justifie la créance par lui-même sauf à ce qu’à tout le moins un commencement de preuve de son inexactitude soit apporté notamment par la contestation soit des tarifs appliqués durant la période litigieuse soit de la présence de l’assistée durant cette période ; qu’en l’espèce aucune critique de la sorte ni aucune autre ne sont portées ; que le moyen tiré de ce que la créance n’est pas justifiée dans son quantum doit être écarté ;
    Considérant que l’absence d’informations lors de la demande d’aide sociale sur l’éventualité d’une prise d’hypothèque pour la garantie de recouvrement pour les créances d’aide sociale à intervenir pas davantage que le délai écoulé entre la décision d’admission et la prise d’hypothèque ne sont sanctionnés par aucun texte et ne sont pas de nature à entacher la légalité de la décision litigieuse ; que d’ailleurs l’administration fait valoir sans contredit que l’éventualité dont s’agit est portée sur les imprimés d’aide sociale adressés au demandeur lors de la procédure d’instruction de son dossier ;
    Considérant que la circonstance que la décision attaquée n’ait pas indiqué les modalités de recours demeure sans incidence sur sa légalité de la décision mais n’a de conséquence le cas échéant que sur le point de départ du délai de recours contentieux ;
    Considérant que la décision attaquée n’a ni pour objet ni pour effet de « répartir la somme récupérée entre les héritiers » non plus que de décider d’une « récupération » à l’encontre d’un seul d’entr’eux ; que pour statuer sur la décision d’inscription d’hypothèque les juridictions d’aide sociale compétentes pour en apprécier la légalité n’ont lieu de renvoyer à l’autorité judiciaire une question préjudicielle qu’en cas de difficulté sérieuse ; qu’il appartient par contre à la commission centrale d’aide sociale de statuer sauf dans l’hypothèse d’une réelle difficulté juridique sur la valeur du bien, objet de l’inscription hypothécaire ;
    Considérant que la décision attaquée ne porte contrairement à ce que soutient le requérant aucune atteinte à la possibilité de se marier pour Mlle S... qui est célibataire, alors même que la loi a limité aux « conjoints » l’exemption de récupération qu’elle comporte dans la rédaction de l’article L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles issu de la loi du 11 février 2005 ;
    Considérant que lorsqu’un immeuble est en indivision l’hypothèque n’est prise qu’à hauteur des droits de l’assisté ; que le requérant fait valoir que le bien hypothéqué est propriété de deux indivisaires, Mlle S... et son frère, et qu’il est usufruitier légal du quart de la succession dont ce bien fait partie ; que la notification en date du 27 avril 2006 est ainsi rédigée « je vous informe que pour garantir la récupération une hypothèque a été prise le 7 avril 2006 sur le bien immobilier sis à P... pour une sureté de créance de 348 059,19 euros » ; que le montant de la garantie prise n’est pas précisé ; que l’administration dans le mémoire en défense fait état de ce que « le montant de la part (...) revenant » à Mlle S... « peut être estimé à ce jour à 255 500 euros » (soit la moitié de la valeur retenue par le service des domaines) mais qu’il n’est pas possible en l’état à la commission centrale d’aide sociale d’apprécier avec certitude si l’inscription a bien été limitée au montant procédant de la part et des droits de l’assistée dans le bien hypothéqué ; qu’il y a lieu dès lors avant dire droit sur ce dernier moyen de procéder par les soins du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général à un supplément d’instruction dont l’objet est précisé dans le dispositif de la présente décision,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de Paris en date du 17 novembre 2006, ensemble la décision du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général en date du 27 avril 2006 sont annulées.
    Art. 2.  -  Avant dire droit sur les conclusions de la requête de M. B... il est procédé par les soins du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général à un supplément d’instruction contradictoire aux fins de fournir à la commission centrale d’aide sociale d’une part l’inscription hypothécaire contestée, d’autre part tous éléments de droit et de fait lui permettant de s’assurer que le montant de la dite inscription pris le 7 avril 2006 sur le bien sis à P... l’a été en proportion exacte des droits de l’assistée sur ce bien.
    Art. 3.  -  Tous droit et moyen des parties sont et demeurent réservés pour autant qu’il n’y a pas été expressément statué par la présente décision.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions et de la requête en tant qu’il tend à la levée totale de l’hypothèque est rejeté.
    Art. 5.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 23 octobre 2008 où siégeaient M. Levy, président, Mlle Balsera, assesseure, et Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 27 novembre 2008.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer