Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Domicile de secours - Prise en charge - Conditions
 

Dossier no 061560

M. T...
Séance du 7 décembre 2007

Décision lue en séance publique le 14 janvier 2008

    Vu, enregistré par le secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 4 août 2006, le recours par lequel le préfet du Var demande au juge de l’aide sociale d’annuler la décision du 8 juin 2006 de la commission d’admission à l’aide sociale de Draguignan, statuant en formation plénière, ayant mis à la charge de l’aide sociale de l’Etat les frais d’hébergement de M. T... à la maison de retraite P... située à T... (Var), par les moyens que l’intéressé avait sa résidence dans le Var lorsqu’il a été admis dans cet établissement qui abrite aussi une communauté religieuse ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistré comme ci-dessus, le 20 mars 2007, le mémoire en réponse du président du conseil général du Var tendant au rejet des conclusions du recours susvisé, par les motifs que M. T... a été immédiatement admis, le 8 avril 1986, à la maison de retraite de T... à son retour de l’étranger et n’a pu acquérir de domicile de secours au sens des articles 193 et 194 du code de la famille et de l’aide sociale, alors en vigueur ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu les anciens articles 193 et 194 du code de la famille et de l’aide sociale ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 7 décembre 2007 M. Goussot, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que M. T..., religieux, exerçant son ministère à l’étranger, est arrivé en France le 6 avril 1986 pour y prendre sa retraite ; qu’il a été immédiatement admis à la maison de retraite de T... (Var) ;
    Considérant que, pour imputer à l’occasion de l’examen de la demande de renouvellement d’aide sociale du placement des personnes âgées à l’Etat la charge des frais d’hébergement litigieux, la commission d’admission à l’aide sociale de Draguignan, statuant en formation plénière, s’est fondée sur l’imprécision des textes applicables et sur le fait que l’Etat avait accepté à l’origine la prise en charge des frais dont s’agit au titre des personnes « sans domicile fixe » au sens de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles ; que ces deux motifs ne sont pas de nature à fonder la décision attaquée dès lors que, d’une part, il appartient à toute juridiction, en application de l’article 4 du code civil notamment, et surtout lorsque les textes sont imprécis, de les interpréter et de donner une solution procédant de cette interprétation aux litiges dont elle est saisie et, d’autre part, que la circonstance que l’Etat avait accepté à l’origine de prendre en charge les frais d’aide sociale ne lui interdisait nullement de revenir sur cette position à l’occasion d’une demande de renouvellement, alors surtout, d’ailleurs, qu’il ne conclut pas à la rétroactivité de la charge dont il sollicite dorénavant l’imputation ; qu’il y a lieu par suite d’annuler comme entachée d’erreurs de droit la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Draguignan statuant en formation plénière attaquée ;
    Considérant, toutefois, qu’il appartient au juge de plein contentieux de l’aide sociale de statuer non seulement sur la légalité de la décision attaquée mais sur la charge des frais litigieux, compte tenu notamment des moyens des parties à l’instance ;
    Considérant qu’il n’est pas contesté que M. T... est arrivé le 6 avril 1986, postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 6 janvier 1986, dans le Var, en provenance de l’étranger, où il résidait antérieurement, pour être admis directement à la maison de retraite de T..., dont il n’est pas contesté qu’elle est autorisée au titre de l’article L. 313-1 du code de l’action sociale et des familles et est ainsi un établissement social non acquisitif de domicile de secours ; qu’il n’est pas allégué et ne ressort pas du dossier que M. T... soit arrivé en France en provenance de l’étranger en raison de circonstances exceptionnelles de la nature de celles fondant la compétence de l’Etat pour la prise en charge des frais d’aide sociale des personnes en provenance de l’étranger en vertu de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles ; que, dans ces circonstances, la présente juridiction jugeait que l’aide sociale ne pouvait prendre en charge les frais dont s’agit ;
    Mais considérant que par une décision du 27 septembre 2006, département des Pyrénées-Atlantiques, dont il y a lieu d’étendre la solution à la présente instance, le Conseil d’Etat a jugé qu’une personne qui n’était pas dépourvue de domicile fixe aux Etats-Unis où elle résidait et qui était arrivée en France pour y être admise directement dans un établissement social était au nombre des personnes « sans domicile fixe » ou « sans résidence stable » entrant également dans le champ d’application de l’article L. 111-3 précité du code de l’action sociale et des familles pour l’imputation de la charge des frais d’aide sociale à l’Etat ; que, dans ces conditions, la présente juridiction applique désormais cette solution jurisprudentielle alors même qu’il n’est pas possible d’affirmer non seulement que M. T... est rentré en France du fait de circonstances exceptionnelles imposant son retour, mais encore qu’il était à l’étranger sans domicile fixe, ce qui n’était nullement le cas et que ces deux situations sont les seules que les dispositions applicables prennent expressément en compte pour imputer la charge des frais à l’Etat ; qu’il y a donc lieu, dans ces conditions, d’imputer à cette collectivité d’aide sociale la charge des frais litigieux d’aide sociale entrainés par l’hébergement de M. T... ;
    Considérant au surplus qu’en admettant même que la demande initiale d’aide sociale ait été déposée à l’arrivée de M. T... en France et non « alors qu’il séjournait encore » à l’étranger, circonstance prise en compte par la décision du Conseil d’Etat précitée, cette seule différence dans la situation de fait ne serait pas de nature à interdire la transposition de la solution adoptée à la présente instance, dès lors qu’elle est extérieure à la réalité de la situation de fait qu’il y a lieu de prendre en compte, qui est de savoir si, à l’arrivée en France, soit un domicile de secours, soit une résidence peuvent être déterminés ; que, dans les deux hypothèses, tel ne peut être, dans le dernier état de la jurisprudence (Val-d’Oise) du conseil d’Etat, le cas ; qu’ainsi, en toute hypothèse, les frais d’aide sociale étaient à la charge de l’Etat au moment de l’admission de M. T... et, celui-ci ayant constamment séjourné dans un établissement social, il n’a pu ultérieurement acquérir un domicile de secours dans le département du Var ; qu’ainsi c’est bien à l’Etat qu’incombent les frais litigieux,

Décide

    Art. 1er.  -  Les frais d’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées pour l’accueil de M. T... à la maison de retraite de T... (Var) sont à la charge de l’Etat.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité et au ministre du logement et de la ville, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 7 décembre 2007 où siégeaient M. Lévy, président, M. Nouvel, assesseur, et M. Goussot, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 14 janvier 2008.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer