Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2320 |
RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Prestation spécifique dépendance (PSD) - Recours en récupération - Succession |
Conseil dEtat statuant au contentieux
Dossier no 277305
Mme M...
Séance du 25 mai 2007
Lecture du 11 juin 2007
Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 7 février 2005, 2 juin 2005 et 29 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil dEtat, présentés pour M. Roland M... ; M. M... demande au Conseil dEtat :
1o Dannuler la décision du 2 novembre 2004 par laquelle la commission centrale daide sociale a rejeté sa demande tendant à lannulation de la décision en date du 24 janvier 2002 par laquelle la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme a maintenu la décision de récupération contre la succession de sa mère, Mme Germaine M..., des sommes qui ont été avancées par laide sociale au titre de la prestation spécifique dépendance ;
2o Statuant au fond, dannuler la décision de la commission départementale daide sociale en date du 24 janvier 2002 et celle de la commission dadmission de Royat du 13 juin 2001 ;
3o De mettre à la charge du département du Puy-de-Dôme le versement de la somme de 2 000 euros au titre de larticle L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu le code civil ;
Vu la loi no 97-60 du 24 janvier 1997 ;
Vu le décret no 61-495 du 15 mai 1961 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Catherine de Salins, maître des requêtes ;
- le rapport de Me H..., avocat de M. M... ;
- les conclusions de M. Luc Derepas, commissaire du Gouvernement ;
Considérant, dune part, quaux termes du premier alinéa de larticle 146 du code de la famille et de laide sociale, en vigueur à la date du décès de Mme M... et désormais codifié à larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles : « Des recours sont exercés par le département [...] : a) [...] contre la succession du bénéficiaire » ; quaux termes de lavant-dernier alinéa du même article : « Le recouvrement sur la succession du bénéficiaire [...] de la prestation spécifique dépendance [...] sexerce sur la partie de lactif net successoral, défini par les règles du droit commun, qui excède un seuil fixé par décret en Conseil dEtat » ; que larticle 4-1 du décret du 15 mai 1961 modifié a fixé à un montant de 46 000 euros ce dernier seuil et prévu que seule la partie de la prestation spécifique dépendance excédant la somme de 760 euros peut faire lobjet dune récupération ; que la détermination des sommes pouvant être déduites pour le calcul de lactif net successoral se fait par application des règles de droit civil ;
Considérant, dautre part, quaux termes de larticle 815-13 du code civil : « Lorsquun indivisaire a amélioré à ses frais létat dun bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon léquité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au moment du partage ou de laliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des impenses nécessaires quil a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore quelles ne les aient point améliorés. Inversement, lindivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute » ; quil résulte de ces dispositions quil doit être tenu compte des travaux damélioration, à lexception des travaux de simple entretien, dun bien réalisé par un propriétaire indivis dans la mesure où ils ont contribué à augmenter la valeur de ce bien, ainsi que ceux de conservation de ce bien, sans que puisse lui être utilement opposée la circonstance quil serait le seul ou le principal bénéficiaire des travaux ainsi réalisés ; que lorsque, comme en lespèce, lindivision a pris fin du fait du décès de lun des deux coïndivisaires et que lautre indivisaire est son seul héritier, la prise en compte des travaux que lindivisaire survivant a effectué peut se faire par une inscription de ceux-ci au passif de la succession, dans la limite, pour les travaux damélioration, du montant de la plus-value apportée à limmeuble ;
Considérant que, pour juger que les dispositions de larticle 146 du code de la famille et de laide sociale permettaient de récupérer la somme de 8 830,57 euros correspondant au montant, après déduction des 760 euros, de la prestation spécifique dépendance perçue par Mme M... entre le 1er janvier 1998 et la date de son décès le 31 décembre 1999 sur sa succession revenue à son fils et unique héritier M. M... et confirmer les décisions de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme en date du 24 janvier 2002 et de la commission dadmission à laide sociale de Royat du 13 juin 2001, la commission centrale daide sociale a principalement retenu que ces travaux - quelle a qualifiés de travaux damélioration - avaient amélioré le confort du bien et permis au requérant de le mettre en location et den tirer des revenus fonciers ; quen se fondant ainsi à la fois sur le caractère de travaux de confort et sur la circonstance que M. M... et sa mère avaient dores et déjà bénéficié de ces travaux, sans rechercher sil sagissait de travaux damélioration ayant augmenté la valeur du bien indivis à due concurrence du montant de ces travaux ou de travaux de conservation, la commission centrale daide sociale a entaché son raisonnement derreur de droit ; que sa décision doit, en conséquence, être annulée ;
Considérant quil y a lieu, par application des dispositions de larticle L. 831-2 du code de justice administrative, de statuer sur lappel formé par M. M... devant la commission centrale daide sociale ;
Considérant que pour évaluer à 40 879,61 euros le montant de lactif net de la succession de la mère, M. M... soutient que doivent être déduits du montant des biens figurant à lactif non seulement les frais funéraires et les dépenses quil a acquittés pour le compte de sa mère et qui se chiffrent à la somme de 235 570 francs (35 912 euros) mais également des travaux dun montant de 436 804,37 francs (66 590 euros) quil a fait réaliser à ses frais sur un bien immobilier dont ils étaient coïndivisaires ; que le litige porte uniquement sur la déduction de ces travaux ;
Considérant que, dune part, quainsi quil vient dêtre dit, la circonstance que ces travaux constitueraient des travaux de confort ne peut légalement justifier à elle seule le refus de les déduire pour calculer lactif net successoral ;
Considérant, dautre part, quil résulte de lensemble des factures versées au dossier que ces dépenses sont réelles et quelles nont pas revêtu un caractère somptuaire ; quelles ont, pour lessentiel et selon le cas, amélioré le bien ou permis sa conservation ; que le département du Puy-de-Dôme, qui les a lui-même qualifiés de travaux damélioration, ne conteste pas que les travaux en litige ont augmenté la valeur du bien dun montant au moins égal à celui dont M. M... sollicite la déduction pour le calcul de lactif net successoral ; que, si ont été à tort incluses parmi ces factures des dépenses dentretien, le montant de celles-ci ne dépasse pas la somme de 5 120 euros correspondant à lécart entre le seuil de lactif net successoral permettant la récupération, soit 46 000 euros, et lactif net déclaré, soit 40 879,61 euros ;
Considérant quil résulte de ce qui précède que M. M... est fondé à soutenir que cest à tort que, par sa décision du 24 janvier 2002, la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme a rejeté sa demande tendant à lannulation de la décision de la commission dadmission à laide sociale de Royat du 13 juin 2001 autorisant le département du Puy-de-Dôme à récupérer la somme de 8 830,57 euros sur la succession de Mme M... ; quil y a lieu, par voie de conséquence, dans les circonstances de lespèce, de mettre à la charge du département du Puy-de-Dôme, sur le fondement de larticle L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à M. M... de la somme de 2 000 euros quil demande au titre des frais quil a exposés et non compris dans les dépens,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission centrale daide sociale en date du 2 novembre 2004, celles de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme en date du 24 janvier 2002 et de la commission dadmission à laide sociale de Royat en date du 13 juin 2001 sont annulées.
Art. 2. - Le département du Puy-de-Dôme versera à M. M... la somme de 2 000 euros au titre de larticle L. 761-1 du code de justice administrative.
Art. 3. - La présente décision sera notifiée à M. M..., au département du Puy-de-Dôme et au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.