Dispositions spécifiques aux différents types daide sociale |
3200 |
REVENU MINIMUM DINSERTION (RMI) | ||
Mots clés : Revenu minimum dinsertion (RMI) - Suspension - Insertion |
Conseil dEtat statuant au contentieux
Dossier no 282963
M. M...
Séance du 21 mars 2007
Lecture du 23 avril 2007
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juillet et 8 novembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil dÉtat, présentés par le Territoire de Belfort, représenté par le président du conseil général ; le Territoire de Belfort demande au Conseil dÉtat :
1o dannuler la décision du 18 mai 2005 par laquelle la commission centrale daide sociale a annulé ensemble la décision de la commission départementale daide sociale de Belfort du 15 mai 2003 rejetant le recours de M. Philippe M..., et la décision de la commission locale dinsertion du 17 décembre 2002 suspendant les droits à lallocation de revenu minimum dinsertion de lintéressé ;
2o statuant au fond, de rejeter lappel de M. M... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu la loi no 2003-1200 du 18 décembre 2003 ;
Vu le décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Catherine de Salins, maître des requêtes ;
- les conclusions de M. Christophe Devys, commissaire du Gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par M. M... :
Considérant quaux termes de larticle 52 de la loi du 18 décembre 2003 : « Les dispositions de la présente loi sont applicables à compter du 1er janvier 2004, sous réserve de lentrée en vigueur à cette date des dispositions de la loi de finances mentionnée à larticle 4/ Sous la même réserve, dans lattente de la publication des dispositions réglementaires nécessaires à lapplication des dispositions issues du titre Ier de la présente loi, le président du conseil général, ou, dans les départements doutre-mer, lagence dinsertion, exerce, à compter du 1er janvier 2004, au nom du département, ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, de la collectivité territoriale, les compétences exercées avant cette date par le préfet, au nom de lÉtat, en matière de revenu minimum dinsertion » ; quil résulte de ces dispositions quà compter du 1er janvier 2004, date à laquelle le transfert de compétence au département opéré par cette loi en matière de revenu minimum dinsertion a pris effet, le département a été substitué à lÉtat dans lexercice de lensemble des compétences concernant cette allocation, y compris pour les dossiers ayant déjà donné lieu à une décision et pour les actions engagées devant le juge administratif ;
Considérant que, par lettre du 9 janvier 2003, M. M... a été informé de la décision prise par lÉtat de suspendre à son égard et pendant une période de quatre mois le bénéfice de lallocation de revenu minimum dinsertion ; que lintéressé ayant formé appel de la décision de la Commission départementale daide sociale de Belfort en date du 15 mai 2003, qui avait rejeté sa demande dannulation de cette décision, la commission centrale daide sociale a communiqué sa requête au préfet par lettre du 20 octobre 2003, date à laquelle lÉtat était toujours compétent en matière de revenu minimum dinsertion ; que dans ces conditions, le Territoire de Belfort qui, depuis le 1er janvier 2004, a été substitué à lÉtat dans cette matière et, du fait de la mise en cause de lÉtat par la commission centrale daide sociale, doit être regardé comme ayant été présent dans cette instance, est recevable à se pourvoir en cassation conte la décision en date du 18 mai 2005 par laquelle la commission centrale daide sociale a annulé la décision suspendant le bénéfice du revenu minimum dinsertion à légard de M. M... ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par ce dernier à la requête du Territoire de Belfort ne peut quêtre écartée ;
Sur le pourvoi :
Considérant quil ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la lettre de la présidente de la commission locale dinsertion du 9 janvier 2003 informe M. M... de lopposition de la commission lors de sa séance du 17 décembre 2002 à la validation du contrat élaboré avec le travailleur social, contrat jugé non viable et insuffisamment crédible par lensemble des partenaires du dispositif, en lui indiquant quil reste possible de réexaminer cette position avant le 14 janvier 2003 afin de revenir sur la décision de suspension qui était jointe ; que cette dernière décision, non datée, prise « pour le préfet par le directeur des affaires sanitaires et sociales » indique quau vu de lavis de la commission locale dinsertion en date du 17 décembre 2002, qui constate limpossibilité de signer avec lui un contrat dinsertion basé sur un projet autre que la création dentreprise, il a décidé de cesser de lui verser lallocation du revenu minimum dinsertion pour la période du 1er janvier au 30 avril 2003 ; que, dans ces conditions, la décision de suspension du bénéfice de cette allocation doit être regardée comme ayant été prise par le préfet du Territoire de Belfort ; quainsi, la Commission centrale daide sociale sest méprise sur la portée de lavis de la commission locale dinsertion en date du 17 décembre 2002 en estimant quil constituait la décision de suspension du bénéfice du revenu minimum dinsertion ; que, par suite, sa décision doit être annulée ;
Considérant quil y a lieu, pour le Conseil dÉtat, de régler laffaire au fond en application des dispositions de larticle L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant, en premier lieu, quainsi quil vient dêtre dit, la décision de suspension a été prise pour le préfet, par le directeur des affaires sanitaires et sociales ; quil ressort des pièces du dossier quà cette date, celui-ci disposait dune délégation de signature lhabilitant à signer cette décision au nom du préfet ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision aurait été prise par une autorité incompétente doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que la décision préfectorale litigieuse nest pas fondée sur labsence dobtention de laide à la création dentreprise ; quen conséquence, le moyen tiré de ce que le préfet ne pouvait légalement se fonder sur ce motif pour prononcer la suspension du bénéfice du revenu minimum dinsertion ne peut quêtre écarté ;
Considérant en troisième lieu, quaux termes du premier alinéa de larticle L. 262-20 du code de laction sociale et des familles, dans sa rédaction alors en vigueur : « Le droit à lallocation est renouvelable, par périodes comprises entre trois mois et un an, par décision du représentant de lÉtat dans le département, après avis de la commission locale dinsertion sur la mise en uvre du contrat dinsertion mentionné à larticle L. 262-37 et, le cas échéant, au vu du nouveau contrat dinsertion » ; que larticle L. 262-21 du même code dispose : « Dans le cas où le contrat est arrivé à échéance si, du fait de lintéressé et sans motif légitime, le contrat na pas été renouvelé ou un nouveau contrat na pas pu être établi, le versement de lallocation peut être suspendu par le représentant de lÉtat, après avis de la commission locale dinsertion, après que lintéressé, assisté, le cas échéant, de la personne de son choix, a été mis en mesure de faire connaître ses observations. La suspension ne peut être prononcée lorsque la responsabilité du défaut de communication du contrat dinsertion est imputable aux services chargés de le conclure avec lintéressé » ; que le deuxième alinéa de larticle L. 262-23 de ce code précise que : « Si le non respect du contrat incombe au bénéficiaire de la prestation, le versement de lallocation peut être suspendu. Dans ce cas, le service de la prestation est rétabli lorsquun nouveau contrat a pu être conclu » ; quil résulte de ces dispositions que lautorité compétente en matière de revenu minimum dinsertion peut légalement décider la suspension du versement de lallocation lorsquil apparaît que le projet de création dentreprise ayant fait lobjet de précédents contrats ne savère pas viable et que le bénéficiaire du revenu minimum dinsertion refuse de signer un contrat reposant sur un nouveau projet, sans que lintéressé puisse, dans ces conditions, se prévaloir de droit acquis du fait des contrats ayant précédemment été conclu ; quainsi, en se fondant sur le défaut de viabilité du projet de création dentreprise de M. M... et limpossibilité de signer avec lui un contrat ayant un autre objectif, alors que le précédant contrat était arrivé à son terme, le préfet na pas méconnu les dispositions précitées ni procédé à une rupture unilatérale et abusive dun contrat en cours ;
Considérant, enfin, quil résulte de linstruction que M. M... a été admis au bénéfice du revenu minimum dinsertion pour la première fois en 1999 sur la base dun projet dinsertion qui tendait principalement à la création dune entreprise et a fait lobjet de contrats successifs ; que ce projet, qui na été précisé en une activité de « consultant dentreprise » quau cours de lannée 2002, a alors été regardé comme non viable et insuffisamment crédible par les partenaires du dispositif de réinsertion et que lintéressé, informé de lappréciation ainsi portée sur son projet, a refusé de présenter un projet différent ; que M. M... nétablit pas que ces dernières circonstances - qui, ainsi quil vient dêtre dit, sont de nature à fonder une décision de suspension du revenu minimum dinsertion - seraient erronées ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède que M. M... nest pas fondé à soutenir que cest à tort que la commission départementale daide sociale du Territoire de Belfort dont la décision est suffisamment motivée, a rejeté ses conclusions tendant à lannulation de la décision préfectorale suspendant le bénéfice du revenu minimum dinsertion pour la période du 1er janvier au 30 avril 2003 ;
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission centrale daide sociale en date du 18 mai 2005 est annulée.
Art. 2. - La requête présentée par M. M... devant la Commission centrale daide sociale est rejetée..
Art. 3. - La présente décision sera notifiée au Territoire de Belfort, à M. Philippe M... et au ministre de la santé et des solidarités.