Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Donation - Contrat d’assurance vie
 

Dossier no 061502

M. R... Jean
Séance du 27 avril 2007

Décision lue en séance publique le 5 juin 2007

    Vu enregistrée à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Alpes-Maritimes le 30 décembre 2005, la requête présentée pour MM. Jean-Pierre et Jean-Paul G... par Me  Stéphane G..., avocat, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes en date du 26 septembre 2005 rejetant leur demande dirigée contre les décisions de la commission d’admission à l’aide sociale de Nice 3 du 23 mai 2005 décidant de récupérer au titre du recours contre le donataire la somme de 32 205,47 euros à raison des prestations avancées par l’aide sociale à leur oncle M.  Jean R... et reportant le remboursement de la créance à la vente du bien immobilier inclus dans l’actif successoral par les moyens que le demandeur ne justifie pas de sa créance en produisant les pièces justificatives ; que les différents comptes communiqués ne permettent pas d’établir avec précision les sommes réellement dues, que s’agissant de la réintégration des assurances vie il convient de préciser que l’argumentation développée par le demandeur prête largement à discussion au sens des articles L. 131-1 et suivants du code des assurances puisque le souscripteur a contracté lesdites assurances plus de 20 ans avant son décès, que le demandeur ne démontre pas qu’il s’agissait pour le défunt de consentir irrévocablement une libéralité au profit de ses neveux non plus que l’abattement forfaitaire ainsi que le seuil d’exonération aient été appliqués ;
    Vu le mémoire en défense du président du conseil général des Alpes-Maritimes en date du 1er mars 2006 tendant au rejet de la requête par les motifs que les contrats ont été souscrits à 74 et 75 ans, que la créance de 100 411,94 euros est constituée par des frais d’assurance personnelle, allocation compensatrice, foyer restaurant, aide ménagère à domicile, que la déclaration de succession laisse apparaître un actif net successoral de 111 005,53 euros soit une créance récupérable à ce titre de 48 325,84 euros, que le report de la récupération contre la succession à la date de la vente du bien immobilier qui constitue une part importante de l’actif a été accepté, que la créance d’aide sociale est différente en ce qui concerne le recours contre le donataire puisque dans ce cas il n’y a ni seuil ni abattement à la différence du recours contre la succession d’où procède la nécessité d’établir deux actes de créance ;
    Vu enregistré le 8 mars 2007 le nouveau mémoire présenté pour les consorts G... par Me G... persistant dans leurs précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens que l’article 1315 du code civil a été méconnu ; que certains frais sont seulement mentionnés de manière manuscrite et sans décompte ; qu’en vertu de l’article 1331 du code civil comme d’un principe général du droit l’administration doit établir ses créances ; que les contrats d’assurance vie décès ont été souscrits plusieurs années avant le décès du stipulant ; que la preuve du caractère frauduleux n’est pas apportée, non plus que celle du caractère révocable de la donation prétendue ou du dépouillement volontaire ; que le patrimoine affecté était relativement négligeable par rapport à l’actif successoral ;
    Vu les décisions attaquées ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 avril 2007, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
    Considérant en premier lieu que les décisions de la commission d’admission à l’aide sociale sont postérieures à l’entrée en vigueur de la loi du 11 février 2005 dont l’article 95 a supprimé pour l’avenir tous recours en récupération d’arrérages d’allocation compensatrice alors même que le fait générateur du versement de ces arrérages est antérieur à son entrée en vigueur et ce qu’il s’agisse du recours contre la succession ou du recours contre le donataire ; que ces dispositions s’appliquent pour les motifs mêmes énoncés dans la décision de ce jour numéro 061670 qui est jointe à la notification de la présente décision, motifs auxquels il est ici expressément renvoyé, étant seulement rappelé de surcroît que le fait générateur du recours contre la succession est le décès de l’assisté, ce qui ne modifie en rien le raisonnement auquel il renvoie ; que les prestations restant à récupérer (assurance personnelle, aide ménagère, foyer-restaurant) semblent recherchées indifféremment au titre du recours contre la succession et du recours contre le donataire sans que les décisions attaquées ne permettent de discriminer avec précision quelles sont exactement les prestations qui sont recherchées par chaque recours ; qu’il y a donc lieu de statuer sur les moyens relatifs aux deux recours, en tant que n’est pas concernée l’allocation compensatrice ;
    Considérant en deuxième lieu que le stipulant a souscrit à 74 et 75 ans sans être atteint selon les parties d’une affection au pronostic vital défavorable les contrats d’assurance vie décès litigieux pour un montant de prime de 32 205,47 euros ; qu’à son décès à 83 ans l’actif net successoral est de 111 005,53 euros en ce compris un actif mobilier relativement conséquent ; que dans ces conditions l’administration n’apporte pas la preuve qui lui incombe de l’intention libérale du stipulant au moment de la souscription des contrats litigieux à l’égard des bénéficiaires de second rang, preuve qui permettrait seulement de requalifier les contrats souscrits en donation indirecte ; qu’ainsi aucune récupération contre le donataire n’a lieu d’être ;
    Considérant que dès lors, que comme il a été dit, les décisions attaquées ne permettent pas de discriminer avec précision les prestations respectivement recherchées au titre de l’action contre la succession et que restent à récupérer les trois prestations dites, d’une part postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 31 octobre 1985 (article 81 modifiant l’article 43 de la loi du 30 juin 1975) aucune récupération n’est désormais possible au titre des cotisations d’assurance personnelle alors que la décision de récupération est postérieure à l’entrée en vigueur de cette loi ; que d’autre part les prestations au titre des foyers restaurants et de l’aide ménagère doivent l’une et l’autre être regardées comme des prestations à domicile (les prestations des foyers-restaurants pouvant le cas échéant être assurées par portage) et qu’à eux seuls leurs montants demeurent en deçà du plancher en deçà duquel aucune action en récupération contre la succession au titre des prestations à domicile versées de son vivant à l’assisté ne peut être diligentée ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens, et notamment ceux relatifs à la preuve de la dispense des prestations d’aide sociale dont la récupération est recherchée ; qu’il y a lieu de faire droit aux conclusions de la requête dirigées contre les deux décisions attaquées relatives à la récupération contre la succession et à la récupération contre le donataire,

Décide

    Art.  1er.  -  Les décisions de la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes des 25 septembre 2005 et de la commission d’admission à l’aide sociale de Nice 3 en date du 23 mai 2005 relatives au recours contre la succession de M.  Jean R... et au recours contre MM. Jean-Paul et Jean-Pierre G... en qualité de donataires de M.  Jean R... sont annulées.
    Art.  2.  -  Il n’y a lieu à récupération à l’encontre de MM. Jean-Pierre et Jean-Paul G... en leur qualité d’héritiers comme de prétendus donataires des prestations d’aide sociale avancées de son vivant à M.  R... par le département des Alpes-Maritimes.
    Art.  3.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 avril 2007 où siégeaient M. Lévy, président, M. Reveneau, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 5 juin 2007.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer