Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3200
 
  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Répétition de l’indu - Ressources
 

Dossier no 041299

Mme Thérèse R...
Séance du 16 juin 2006

Décision lue en séance publique le 12 janvier 2007

        Vu le recours formé le 1er décembre 2003 pour Mme Thérèse R... et tendant à l’annulation de la décision du 17 octobre 2003 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Vienne a confirméla décision du préfet du département de la Haute-Vienne en date du 30 juin 2003 lui ayant notifié un indu de revenu minimum d’insertion de 11.699,99 euros au titre de la période courue du 1er novembre 2000 au 31 octobre 2002, au motif de son absence de droit à compter du 1er janvier 1999 ;
        La requérante soutient que le rapprochement de ses ressources avec la réglementation relative au calcul du revenu cadastral requis pour bénéficier de l’allocation de revenu minimum d’insertion montre que les calculs ayant justifié le jugement attaqué sont erronés ; que les calculs au fondement de la décision préfectorale ne peuvent être vérifiés en l’absence d’indication relative au montant du revenu cadastral plafond et du revenu de son exploitation ; que pour l’ouverture des droits au 1er janvier 1999 devaient être pris en considération les revenus perçus au cours de l’avant-dernière année, soit en 1997 ; qu’en application de l’article 14 alinéa 4 du décret du 12 décembre 1988, le revenu cadastral plafond devait être majoré de 50 % dès lors que le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chacun des six enfants à charge ; que c’est en tenant compte d’une surface d’exploitation erronée que la mutualité sociale agricole a calculé son bénéfice forfaitaire agricole dès lors que ce calcul devait être fait en fonction de la surface exploitée et non de la surface déclarée de l’exploitation, laquelle incluait des terres encore en friche ; que le contrôleur a confondu les terres gelées, éligibles aux aides communautaires et les terres en friche qui ne sont prises en compte ni pour le calcul de ces aides, ni pour l’application des règles en matière de protection sociale, dès lors qu’elles n’ont jamais été exploitées ; qu’il en découle une erreur dans le rapport de contrôle qui a conclu à tort qu’elle avait fait de fausses déclarations en ce qui concerne la superficie de son exploitation ;
        Vu la décision attaquée ;
        Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
        Vu la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 et les décrets subséquents ;
        Vu le code de l’action sociale et des familles ;
        Vu les lettres en date des 4 et 23 janvier 2006 invitant les parties à l’instance à se présenter, si elles le souhaitent, à l’audience ;
        Vu le mémoire récapitulatif no 2 déposé le 15 juin 2006 pour Mme R..., et faisant état de l’intervention volontaire de Maître Roland L... ès-qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Mme Thérèse R... ;
        Après avoir entendu à l’audience publique du 16 juin 2006, Mlle Petitjean, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
        Considérant qu’aux termes de l’article 2 de la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 repris à l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit, dans les conditions prévues par la présente section, à un revenu minimum d’insertion » ;
        Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 relatif aux conditions d’accès à l’allocation du revenu minimum d’insertion, dans sa version alors en vigueur : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article 3 de la loi du 1er décembre 1988 susvisée est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint ou concubin de l’intéressé ou soient à sa charge. Lorsque le foyer comporte plus de deux enfants ou personnes de moins de vingt-cinq ans à charge, à l’exception du conjoint ou du concubin de l’intéressé, la majoration à laquelle ouvre droit chacun des enfants ou personnes est portée à 40 % à partir du troisième enfant ou de la troisième personne » ; qu’aux termes de l’article 14 du même décret : « Les personnes non salariées des professions agricoles peuvent prétendre à l’allocation de revenu minimum d’insertion lorsqu’elles sont soumises au régime prévu aux articles 64 et 76 du code général des impôts et lorsqu’elles mettent en valeur une exploitation située sur le territoire métropolitain dont le revenu cadastral déterminé en application de l’article 1106-6 du code rural est inférieur, par personne non salariée participant à la mise en valeur de l’exploitation et répondant aux conditions fixées à l’article 2 de la loi du 1er décembre 1988 susvisée, au montant du revenu minimum d’insertion défini en application de l’article 3 de la loi du 1er décembre 1988 susvisée, exprimé en revenu cadastral. Lorsque parmi ces personnes non salariées se trouve un couple de conjoints ou concubins, un seul des membres du couple est pris en compte pour l’application de l’alinéa précédent. Un arrêté des ministres chargé de l’agriculture, du budget et de la sécurité sociale fixe ce revenu cadastral plafond selon l’équivalence établie entre le résultat brut d’exploitation des exploitations agricoles constaté dans les comptes de l’agriculture et le revenu cadastral des exploitations agricoles. Le résultat brut d’exploitation ci-dessus s’entend déduction faite des cotisations sociales dues au titre du régime de protection sociale des non-salariés agricoles. Le montant du revenu cadastral défini au troisième alinéa est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire à condition que les personnes soient : le conjoint ou le concubin de l’intéressé, un aide familial, au sens de l’article 1106-1 du code rural, âgé de moins de vingt-cinq ans et non chargé de famille, un associé d’exploitation défini par la loi no 73-650 du 13 juillet 1973 âgé de moins de vingt-cinq ans et non chargé de famille, une personne de dix-sept à vingt-cinq ans remplissant les conditions fixées à l’article 2. Toutefois, lorsque le foyer se compose de plus de deux personnes mentionnées aux 2o , 3o , et 4o de l’alinéa précédent, la superficie définie au premier alinéa est majorée de 40 % à partir de la troisième personne » ; qu’aux termes des articles 17 et 18 du même décret : « Le préfet arrête l’évaluation des revenus professionnels non salariés (...). Les revenus professionnels relevant de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles s’entendent des bénéfices de l’avant-dernière année précédant celle au cours de laquelle le droit à l’allocation est examiné. Lorsque les bénéfices n’ont pas été imposés, les revenus des personnes soumises au régime du forfait sont calculés par l’organisme payeur en appliquant aux productions animales et végétales les éléments retenus pour le calcul des bénéfices agricoles forfaitaires figurant aux tableaux publiés au Journal officiel de la République française. Toute aide, subvention et indemnité non retenue pour la fixation du bénéfice forfaitaire ainsi que pour le bénéfice mentionné à l’article 76 du code général des impôts est ajoutée aux revenus définis aux alinéas précédents. Un arrêté préfectoral recense celles qui ont été prises en considération pour la fixation du forfait » ;
        Considérant qu’il ressort de l’instruction et des pièces du dossier, que Mme  Thérèse R..., exploitante agricole, a été admise au bénéfice de l’allocation du revenu minimum d’insertion à compter du 1er janvier 1999 ; qu’une enquête diligentée par les services de la caisse de mutualité sociale agricole à partir de juin 2002 a révélé que depuis l’origine, les superficies déclarées auprès d’elle par l’exploitante pour calculer le revenu cadastral de son exploitation et son bénéfice forfaitaire agricole, avaient été inférieures à celles déclarées auprès de la direction départementale de l’agriculture et de la forêt en vue du calcul des aides à l’exploitation ; que par une décision du 10 décembre 2002, le préfet a suspendu le droit à l’allocation de revenu minimum d’insertion de l’intéressée, avec effet au 1er novembre 2002, dans l’attente des résultats du contrôle initié par la caisse ; que par courrier du 31 mars 2003, le centre des impôts de Bellac faisait savoir à la caisse, pour faire suite à sa demande, que les forfaits agricoles de l’exploitante s’établissaient à 99.836,00 francs pour l’année 1999, 86.433,00 francs pour l’année 2000, et 13.034,00 euros pour l’année 2001, alors qu’il avait été tenu compte, pour le calcul de l’allocation de revenu minimum d’insertion, d’un forfait de 21.721,00 francs en 1999, et de 30.391,00 francs en 2000 ; que les services de la caisse ont conclu que Mme  Thérèse R... avait bénéficié d’un paiement indu de 22.190,26 euros au titre de la période courue du 1er janvier 1999 au 31 octobre 2002, au motif d’une part que le revenu cadastral était supérieur au plafond d’accès au revenu minimum d’insertion, et d’autre part que les montants de ses ressources perçues de 1999 à 2001 ne lui ouvraient pas droit au versement du revenu minimum d’insertion ; que par décision du 30 juin 2003, le préfet lui a notifié une dette de 11.699,99 euros au titre du revenu minimum d’insertion perçu pour la période biennale non prescrite du 31 octobre 2000 au 31 octobre 2002 ; que par jugement du 10 novembre 2004, le tribunal de grande instance de Limoges a prononcé la liquidation judiciaire de Mme Thérèse R... ; que ce jugement a été frappé d’appel ; que par jugement du 14 février 2006, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Vienne, avant dire droit sur une opposition à contrainte formée par Mme Thérèse R... relative à des cotisations pour les exercices 2000 à 2003, et sur l’assignation de la caisse en répétition de l’indu de revenu minimum d’insertion, a ordonné une expertise à l’effet notamment de « vérifier les dires des parties quant aux surfaces cultivées et réellement déclarées à la MSA, la DDAF et les services fiscaux » ;
        Considérant que par son mémoire récapitulatif susvisé, la requérante demande, à titre principal, le sursis à statuer dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise ordonné par le tribunal des affaires de sécurité sociale, et à titre subsidiaire, l’annulation de la décision préfectorale du 30 juin 2003 ainsi que la réintégration de ses droits dans le dispositif du revenu minimum d’insertion depuis le 1er janvier 1999 ;
        Sur le sursis à statuer :
        Considérant que la demande de sursis doit être rejetée, la présente juridiction étant en mesure de statuer sur la base des seuls éléments apportés au dossier ;
        Sur l’annulation de la décision préfectorale :
        Considérant que ni la décision attaquée, ni aucune des pièces soumises à l’examen de la présente juridiction, n’indiquent, pour les années en cause, les montants du revenu cadastral de l’exploitation de la requérante, qui seraient supérieurs à ceux du revenu cadastral plafond, étant observé que leur détermination relève de modalités de calcul différentes de celles pour l’évaluation des revenus agricoles forfaitaires et du plafond de ressources pour prétendre au bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; qu’ainsi, à titre d’exemple, ainsi qu’il ressort des dispositions susvisées, si le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint ou concubin de l’intéressé ou soient à sa charge, la majoration étant portée à 40 % à partir du troisième enfant, le montant du revenu cadastral plafond est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % par personne supplémentaire à condition que les personnes soient le conjoint ou le concubin, un aide familial, un associé d’exploitation, la superficie de l’exploitation étant majorée de 40 % à partir de la troisième personne ;
        Considérant par ailleurs qu’il ressort d’une télécopie versée au dossier par la requérante, datée du 10 février 2006, émanant de la recette des impôts de Bellac, que contrairement à ce qui a été retenu par les services de la caisse de mutualité sociale agricole, son bénéfice agricole forfaitaire de 1999 n’a pas fait l’objet de réévaluation et demeure fixé à la somme de 23.070,00 francs, inférieur à la somme de 99.836,00 francs pris en compte par ladite caisse pour justifier la notification de l’indu au titre de l’année  2001 ; qu’aucune évaluation du bénéfice agricole forfaitaire pour l’année 1998, au soutien de la réclamation d’indu au titre de la période courue du 1er novembre 2000 au 31 décembre 2000, ne figure à la décision attaquée ni dans aucune pièce du dossier ; qu’en ce qui concerne l’indu réclamé au titre de l’année 2002, il n’est pas démontré que l’évaluation du bénéfice agricole forfaitaire de l’année 2000 a été calculée sur la base des terres exploitées à l’exclusion des friches ;
        Considérant qu’il résulte de ce qui précède, que ne sont établis ni le défaut des conditions d’accès à l’allocation du revenu minimum d’insertion, ni le fait que les bénéfices forfaitaires agricoles de la requérante pour les années 1998, 1999, et 2000, aient excédé le montant du revenu minimum d’insertion au titre de ces mêmes périodes ; qu’en conséquence, Mme Thérèse R... est fondée à demander l’annulation de la décision du préfet de la Haute-Vienne en date du 30 juin 2003, ensemble la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Vienne du 17 octobre 2003 qui l’a confirmée ; qu’il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le conseil général de la Haute-Vienne pour le réexamen des droits de la requérante en tenant compte de ce qui précède ;
        Sur la réintégration de Mme  Thérèse R... dans le dispositif du revenu minimum d’insertion depuis le 1er janvier 1999 :
        Considérant que le recours formé par Mme  Thérèse R... à l’encontre du jugement de la commission départementale d’aide sociale n’a saisi la présente juridiction que de la seule question de l’indu ; que la requérante n’est, par suite, pas recevable à demander qu’il soit statué sur sa réintégration dans le dispositif du revenu minimum d’insertion à compter du 1er janvier 1999, observation lui étant faite à ce sujet qu’elle n’a pas pu « sortir » dudit dispositif avant la décision préfectorale de suspension datée du 10 décembre 2002,

Décide

        Art. 1er. - La demande de sursis à statuer est rejetée.
        Art. 2. - La décision préfectorale du 30 juin 2003 ensemble la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Vienne sont annulées.
        Art. 3. - La demande Mme Thérèse R... de réintégration dans le dispositif du revenu minimum d’insertion à compter du 1er janvier 1999 est irrecevable.
        Art. 4. - La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
        Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 16 Juin 2006 où siégeaient M. Fournier, président, Mme Perez-Vieu, assesseur, Mlle Petitjean, rapporteure.
        Décision lue en séance publique le 12 janvier 2007.
        La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer