Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Vie maritale
 

Dossier no 050392

Mme V... Kalayarany
Séance du 19 juin 2006

Décision lue en séance publique le 23 juin 2006

    Vu la requête formée par Mme Kalayarany V..., enregistrée le 2 décembre 2004 par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Val-d’Oise, et tendant à l’annulation de la décision du 5 octobre 2004 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Val-d’Oise a confirmé la décision préfectorale en date du 17 décembre 2003 portant confirmation d’une décision du 10 avril 2002 lui supprimant le bénéfice de toute prestation et lui réclamant la répétition d’un indu, d’une part, et refusant de lui accorder toute remise de sa dette à hauteur de 4 923,90 euros, née d’un trop-perçu d’allocation de revenu minimum d’insertion pendant la période du mois de juin 2001 au mois de mars 2002, d’autre part ;
    La requérante soutient qu’elle n’a jamais perçu les allocations de revenu minimum d’insertion versées par la caisse d’allocations familiales du Haut-Rhin à la suite de la demande frauduleuse formée par son époux, dont elle est séparée de fait et reste, jusqu’à aujourd’hui, sans nouvelles ; qu’il revient à ce dernier d’assumer l’entière responsabilité de ses propres agissements ; qu’elle a d’ailleurs déposé une plainte pour faux en écriture au motif que son époux avait imité sa signature en formant une demande de revenu minimum d’insertion pour un couple auprès des services de la caisse d’allocations familiales du Haut-Rhin ; qu’elle-même n’a jamais cherché à dissimuler le fait que son époux avait quitté le domicile conjugal et, au contraire, qu’elle s’est attachée à en avertir les autorités françaises compétentes en matière de contrôle de la régularité du séjour en France des étrangers ; qu’en tout état de cause, sa situation de précarité ne lui permet pas de faire face au remboursement de la dette mise à sa charge ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 ;
    Vu le décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 19 juin 2006, M. Morosoli, rapporteur, ainsi que les observations de Mme Kalayarany V..., et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 3 du décret no 88-1111 du 12 décembre 1988, devenu l’article R. 262-3 du code de l’action sociale et des familles : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ; qu’aux termes de l’article 28, alinéa 1, du décret no 88-1111 du 12 décembre 1988, devenu l’article R. 262-44, alinéa 1, du code de l’action sociale et des familles : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (...) ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments » ; qu’aux termes de l’article 29, alinéa 1, de la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988, devenu l’article L. 262-41, alinéa 1, du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations est récupéré par retenue sur le montant des allocations à échoir ou, si le bénéficiaire opte pour cette solution ou s’il n’est plus éligible au revenu minimum d’insertion, par remboursement de la dette en un ou plusieurs versements » ; qu’aux termes de l’article 29, alinéa 5, de la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988, devenu l’article L. 262-41, alinéa 4, du code de l’action sociale et des familles : « En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite sur décision prise selon des modalités fixées par voie réglementaire » ;
    Considérant qu’au mois de juin 2001, Mme Kalayarany V... a été admise au bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion pour un couple ; que par une décision du préfet du Val-d’Oise en date du 10 avril 2002, l’intéressée s’est vu notifier, au motif que son époux avait obtenu frauduleusement auprès de la caisse d’allocations familiales du Haut-Rhin l’ouverture concurrente de droits à l’allocation de revenu minimum d’insertion pour un couple, un indu à hauteur de 4 923,90 euros pour la période du mois de juin 2001 au mois de mars 2002 ; qu’entre-temps, l’époux de la requérante a quitté le domicile conjugal et l’a laissée avec un enfant ; que Mme Kalayarany V... a demandé la remise gracieuse de sa dette ; que par une décision préfectorale en date du 17 décembre 2003, sa demande a été rejetée ;
    Considérant que, pour l’application des dispositions précitées relatives à la procédure de remise gracieuse des dettes résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion, il appartient aux juridictions de l’aide sociale, eu égard à leur qualité de juges de plein contentieux, non seulement d’apprécier la légalité de la décision prise par l’autorité compétente pour accorder ou refuser la remise gracieuse d’une dette, mais encore de se prononcer elles-mêmes sur le bien-fondé de la demande de l’intéressé d’après l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l’une et l’autre partie ; que, par suite, en limitant ses pouvoirs à l’appréciation de la réalité de l’indu et de la légalité de la décision du 17 décembre 2003 par laquelle le préfet du Val-d’Oise a rejeté la demande de Mme Kalayarany V... tendant à obtenir la remise gracieuse de sa dette, sans examiner la situation de l’intéressée, la commission départementale d’aide sociale du Val-d’Oise a méconnu l’étendue de ses pouvoirs ; que, dès lors, sa décision en date du 5 octobre 2004 doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant, en premier lieu, que dans les circonstances particulières de l’espèce, eu égard au fait que la bonne foi de la requérante est établie par les justificatifs apportés et les différentes pièces du dossier, et compte tenu de la situation de précarité de Mme Kalayarany V..., qui vit seule et sans ressources, hébergée chez un particulier, avec un enfant à charge, il y a lieu de lui accorder une remise totale de sa dette de 4 923,90 euros, y compris pour la part correspondant à l’allocation de revenu minimum d’insertion versée pour son époux par la caisse d’allocations familiales du Val-d’Oise, au motif notamment que l’intéressée aurait pu solliciter l’allocation de parent isolé, ce qu’elle n’a pas fait initialement ; qu’en tout état de cause, il appartient au département du Haut-Rhin, s’il s’y croit fondé, de rechercher la répétition de l’indu qu’il réclame auprès de l’époux de la requérante ;
    Considérant, en second lieu, qu’il y a lieu de rétablir Mme Kalayarany V... dans ses droits à l’allocation de revenu minimum d’insertion à compter de sa radiation du dispositif intervenue au mois d’avril 2002, sous réserve de la période où lui a été servie l’allocation de parent isolé, et jusqu’à la nouvelle ouverture des droits à l’allocation de revenu minimum d’insertion intervenue au bénéfice de la requérante au mois de février 2006, chacune de ces prestations devant être liquidée en tenant compte d’un foyer constitué d’une personne seule avec un enfant à charge ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Val-d’Oise en date du 5 octobre 2004, ensemble la décision du préfet du 17 décembre 2003, sont annulées.
    Art. 2.  -  Il est accordé à Mme Kalayarany V... une remise totale de sa dette de 4 923,90 euros.
    Art. 3.  -  Mme Kalayarany V... est rétablie dans ses droits à l’allocation de revenu minimum d’insertion à compter de sa radiation du dispositif intervenue au mois d’avril 2002, sous réserve de la période où lui a été servie l’allocation de parent isolé, et jusqu’à la nouvelle ouverture de ses droits à l’allocation de revenu minimum d’insertion intervenue au mois de février 2006.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 19 juin 2006 où siégeaient M. Belorgey, président, M. Vieu, assesseur, M. Morosoli, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 23 juin 2006.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer