Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3500
 
  COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE COMPLÉMENTAIRE  
 

Mots clés : Couverture maladie universelle (CMU) - Conditions - Demande
 

Dossier no 051401
Dossier no 051452

M. Emil V...
Séance du 16 mai 2006

Décision lue en séance publique 16 mai 2006

    Vu le recours formé le 8 septembre 2005 par M. Emil V..., par lequel le requérant demande à la commission centrale d’aide sociale d’annuler la décision du 28 juin 2005, par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Paris a rejeté sa demande de lui ouvrir droit au renouvellement du bénéfice de la protection complémentaire en matière de santé à compter du 1er mai 2005 pour une nouvelle période d’un an et de prononcer son admission au bénéfice de la couverture maladie universelle complémentaire ;
    M. Emil V... conteste, dans son mémoire comprenant 199 feuillets, la décision déférée pour différents motifs de forme et de fond, dont les principaux sont résumés ci-après : le requérant fait valoir, tout d’abord, que le jugement encourt la nullité pour défaut de mention du commissaire du gouvernement, du rapporteur et de sa qualité, de l’audition des parties (art. 200 du code TA/CAA), et d’avoir procédé à une instruction à charge et donc inéquitable ; le requérant reproche, en outre, en premier lieu à la caisse primaire d’assurance maladie, qui était la partie défenderesse, de n’avoir pas répondu aux moyens évoqués par lui devant la juridiction ; de ne lui avoir pas transmis une information sur le renouvellement de ses droits ; la caisse étant représentée à l’instance, elle était soumise aux mesures d’instruction prises par la commission départementale d’aide sociale de Paris et devait notifier ses observations sur la procédure et la rupture de droit dont le requérant est victime ; en second lieu, à la commission départementale d’aide sociale d’avoir soulevé d’office l’irrecevabilité de la requête, en l’absence d’une réponse expresse de la caisse d’assurance maladie au moyen invoqué devant elle et d’avoir ainsi dénaturé les conclusions de son mémoire ; au surplus de ses conclusions, le requérant conteste avoir soutenu à l’audience, comme l’indique le jugement contesté, que le renouvellement du bénéfice à la couverture maladie universelle complémentaire doit être automatique ; à l’appui de son affirmation il précise que sa fille Mme Corina V..., étant son mandataire, a remis lors de la séance de jugement, quatre documents dont notamment : la preuve matérielle d’une demande de renouvellement de la couverture maladie universelle complémentaire déposée pour l’exercice 2004, revêtue du cachet du secrétariat de la commission départementale d’aide sociale, idem un document attestant que le requérant a soulevé auprès de la caisse d’assurance maladie son obligation de notifier avant la date d’échéance des droits, un courrier d’avertissement nominal du fait que la procédure de renouvellement n’est pas automatique, ce document apportant un contredit aux affirmations du jugement ; que le jugement litigieux a procédé à nouveau à une analyse erronée de ses conclusions en affirmant qu’il aurait indiqué n’avoir pu saisir la caisse d’assurance maladie pour solliciter un renouvellement de ses droits en 2005 « en raison du litige en cours d’examen », ce point ayant au contraire été soulevé en première instance ;
    Le requérant ajoute, aux moyens évoqués ci-dessus que le jugement doit être annulé pour diverses erreurs matérielles, pour déni de justice et procès inéquitable lui ayant causé un préjudice grave du fait de la rupture de ses droits à la couverture maladie universelle depuis le 30 avril 2004 ; que la décision pour rectification d’erreur matérielle n’aurait pas été faite le 10 juin 2005 mais le 28 juin 2005 ; que la commission départementale d’aide sociale ne s’est pas conformée aux règles du code de justice administrative en matière de notification ; qu’enfin son mandataire n’a pas, contrairement à ce qu’indique le jugement déféré, fait d’observations en séance, mais a, au contraire, maintenu « de plus fort » toutes les écritures du requérant enregistrées à la commission départementale d’aide sociale ; qu’enfin, la commission départementale d’aide sociale, par défaut de remise à l’audience du 28 janvier 2005, d’un titre exécutoire lui permettant de bénéficier de ses droits sans délai, lui a causé un préjudice important, notamment du fait que le droit à la couverture maladie universelle complémentaire n’est pas automatique ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la sécurité sociale ;
    Vu les lettres du 27 octobre 2005 invitant les parties à compléter le dossier et à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 16 mai 2006, M. Raynaut, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties ;
    Considérant que le recours également enregistré auprès de la commission centrale d’aide sociale au nom de l’épouse du requérant, Mme Maria V..., poursuit les mêmes fins et par les même moyens doit être joint à celui de son époux et faire l’objet d’une seule et même décision ;
    Sur la procédure suivie devant la commission départementale d’aide sociale et le caractère équitable du jugement :
    Considérant que si, en application des dispositions du septième alinéa de l’article 129 du code de la famille et de l’aide sociale, maintenu alors en vigueur par le I de l’article 5 de l’ordonnance du 21 décembre 2000 relative à la partie législative du code de l’action sociale et des familles, un rapporteur, nommé soit parmi les membres du Conseil d’Etat et les magistrats de la Cour des comptes, soit parmi les fonctionnaires des administrations centrales des ministères, soit parmi les personnes, particulièrement compétentes en matière d’aide ou d’action sociale, est chargé de l’instruction des dossiers soumis à l’examen de la commission centrale d’aide sociale, ses attributions ne diffèrent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et ne lui confèrent pas le pouvoir de décider par lui-même de modifier le champ de la saisine de la juridiction ; qu’ainsi, et alors même qu’il incombe par ailleurs au rapporteur de faire à l’audience un exposé des faits consistant en une présentation de l’affaire, la participation de celui-ci au délibéré de la commission centrale d’aide sociale n’est pas, par elle-même, de nature à porter atteinte au principe d’impartialité rappelé par les stipulations du premier paragraphe de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
    Considérant qu’au surplus, aucun texte n’impose devant les juridictions d’aide sociale, la présence d’un commissaire du gouvernement, ni la mention de la qualité du rapporteur et qu’il y a lieu enfin d’observer que la décision déférée n’encourt aucune censure pour avoir omis de convoquer les parties, de les avoir entendues, le jugement mentionnant expressément l’audition de Mme Corina V..., sa fille ;
    Sur le refus de la caisse primaire d’assurance maladie de notifier ses observations sur le mémoire de M. Emil V..., en particulier sur la procédure et la rupture de droit dont le requérant serait victime ;
    Considérant qu’il n’est pas allégué, ni démontré que la juridiction d’aide sociale, dont la décision est déférée, n’aurait pas transmis à la caisse primaire d’assurance maladie l’ensemble des pièces constituant le mémoire du requérant ; que si celle-ci s’est abstenue d’y répondre, l’abstention du défendeur à l’audience ou par écrit ne saurait avoir pour effet d’entacher la décision de la commission départementale d’aide sociale de partialité ou d’une erreur de droit susceptible de justifier son annulation ; que le moyen tiré de ce que la juridiction aurait entaché sa décision d’une irrégularité en le fondant sur un motif relevé d’office, non communiqué préalablement et contradictoirement aux parties, est inopérant ;
    Sur le moyen invoqué selon lequel la juridiction d’aide sociale aurait dénaturé les conclusions de son mémoire :
    Considérant que dans son mémoire reçu et enregistré, à la fois devant le tribunal des affaires de sécurité sociale qui s’est dessaisi au profit de la juridiction d’aide sociale ainsi qu’au secrétariat de ladite juridiction, l’intéressé a demandé à la commission départementale d’aide sociale, « vu la date d’échéance de ses droits, vu le défaut de notification de la part de la caisse primaire d’assurance maladie (...) d’ordonner à la caisse d’assurance maladie de prononcer le renouvellement de son droit à la protection complémentaire en matière de santé à compter du 30 avril 2004 (...) » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction et des allégations du requérant qu’aucune demande d’admission au bénéfice de la couverture maladie universelle complémentaire n’a été déposée par l’intéressé à la suite de la décision du 28 janvier 2005 de la commission départementale d’aide sociale constatant la décision implicite d’admission intervenue en sa faveur à compter du 1er avril 2004, pour une période d’un an, auprès de la caisse primaire d’assurance maladie de Paris dont il relève ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 861-5 du code de la sécurité sociale : « La demande d’attribution de la protection complémentaire, (...), est faite auprès de la caisse du régime d’affiliation du demandeur (...). La décision est prise par l’autorité administrative qui peut déléguer ce pouvoir au directeur de la caisse. Cette décision doit être notifiée au demandeur dans un délai maximal fixé par décret et peut faire l’objet d’un recours contentieux devant la commission départementale d’aide sociale. » ;
    En l’absence de notification de la décision au demandeur, la demande est considérée comme acceptée. Lorsque la situation du demandeur l’exige, le bénéfice de la protection complémentaire en matière de santé est attribué au premier jour du mois de dépôt de la demande, aux personnes présumées remplir les conditions prévues aux articles L. 380-1 et L. 861-1. Le bénéfice de cette protection est interrompu si la vérification de la situation du bénéficiaire démontre qu’il ne remplit pas les conditions susmentionnées. Les droits reconnus conformément aux articles L. 861-1 à L. 861-4 sont attribués pour une période d’un an renouvelable ;
    Considérant qu’aux termes de l’article R. 861-16 : « Pour bénéficier de la protection complémentaire en matière de santé, les personnes mentionnées à l’article L. 861-1 adressent à la caisse d’assurance maladie dont elles relèvent un dossier comprenant un formulaire de demande conforme à un modèle défini par arrêté ainsi que les renseignements relatifs à la composition et aux revenus du foyer. (...) II. - La décision d’attribution de la protection complémentaire en matière de santé est prise par le préfet du département dans lequel est situé le siège de la caisse d’affiliation du demandeur. Il peut déléguer par arrêté sa compétence aux directeurs des caisses d’assurance maladie du département. Le préfet ou le directeur de la caisse d’assurance maladie notifie sa décision à l’intéressé dans un délai de deux mois à compter de la réception par la caisse d’assurance maladie compétente du dossier complet de demande d’attribution de la protection complémentaire en matière de santé. Il délivre à chaque bénéficiaire âgé de seize ans révolus une attestation du droit à la protection complémentaire mentionnant la période d’ouverture du droit et l’adresse de l’organisme qui en assure le service. » ; qu’aux termes de l’article R. 861-18 : « Le renouvellement de la protection complémentaire en matière de santé est demandé au moins deux mois avant l’expiration de la période pour laquelle elle a été attribuée, selon les modalités prévues au I de l’article R. 861-16. Les dispositions du II de l’article R. 861-16 et de l’article R. 861-17 sont applicables à ce renouvellement. » ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la caisse d’assurance maladie, en l’absence d’une demande expresse, déposée et constituée dans les formes fixées par les dispositions réglementaires susmentionnées, ne pouvait pas par elle-même procéder au renouvellement de ses droits ; que la commission départementale d’aide sociale, en ce qui la concerne, était incompétente pour ordonner à la caisse d’assurance maladie de prononcer le renouvellement de son droit à la protection complémentaire en matière de santé alors même qu’elle n’était saisie d’aucune décision même implicite opposable au requérant ;
    Considérant, au surplus, qu’aucun texte ou aucun principe général du droit n’imposait à la caisse d’assurance maladie d’informer l’intéressé qu’il pouvait déposer une demande de renouvellement de son droit à la couverture maladie universelle, alors même que ce droit ne lui a été reconnu que par une décision de la juridiction d’aide sociale en date du 28 janvier 2005 pour une période d’un an ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’aucun des moyens invoqués par M. Emil V... n’est, en l’état de l’instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision dont il demande la suspension ; que, par suite, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, y compris ses conclusions à fin d’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, son recours ne peut qu’être rejeté ;

Décide

    Art. 1er.  -  Le recours de M. Emil V... est rejeté.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique du 16 mai 2006, où siégeaient M. Boillot, président, M. Mingasson, assesseur, et M. Raynaut, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 16 mai 2006.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer