Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Recours en récupération - Donation - Assurance-vie |
Dossiers nos 051501 et 051501 bis
M. Jean-Noël J..., Mme Bernadette J... et Mme Christiane M...
Mme Nicole T...
Contre le président du conseil général de lAllier
Séance du 19 avril 2006
Décision lue en séance publique le 28 avril 2006
Vu premièrement enregistrée au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 4 avril 2005, sous le numéro 051501 la requête présentée pour Mme Christiane M..., M. Jean-Noël J... et Mme Bernadette J... par Me Rodolphe M... avocat, et deuxièmement enregistrée sous le numéro 051501 bis la requête présentée pour Mme Nicole T... par Me Frédérique Gregoire, avocate, tendant lune et lautre à lannulation de la décision en date du 1er février 2005, par laquelle la commission départementale daide sociale de lAllier a rejeté leurs demandes dirigées contre la décision de la commission dadmission à laide sociale de Vichy en date du 10 juin 2004, décidant dune récupération de 38 244,57 euros à leur encontre en leur qualité de donataires de Mme Georgette J....
1o M. Jean-Noël J..., Mme Christiane M... et Mme Bernadette J... exposent que la décision de la commission dadmission à laide sociale de Vichy est entachée de la méconnaissance du principe dimpartialité stipulé à larticle 6-1 de la Convention européenne des droits de lhomme et procédant des principes généraux applicables à la fonction de juger ; que par courrier du 25 mars 2004, antérieur par hypothèse à la décision de la commission dadmission à laide sociale le président du conseil général de lAllier informait lun des enfants J... de lexercice dun recours en récupération par ses services ; que le contenu de ce courrier ne se limitait pas à une simple information mais comportait largumentation sur laquelle la commission allait fonder sa décision du 10 juin 2004 ; que dès lors lexistence de cette pièce au dossier est de nature par elle-même à faire naître un doute objectivement justifié sur limpartialité de la commission dadmission à laide sociale ; que le principe du contradictoire a été méconnu, seul lun des enfants de Mme Georgette J... - Mme Bernadette J... - ayant été informé par les services de lengagement dun recours en récupération ; quainsi la procédure est irrégulière en ce quelle concerne M. Jean-Noël J... et Mme Christiane M... ; que le courrier adressé à Mme Bernadette J... est de nature à susciter des malentendus ; que les dispositions de larticle 16 du règlement départemental daide sociale de lAllier doivent être interprétées conformément aux règles générales de procédure applicables devant toutes les juridictions administratives comme sappliquant à toutes les parties présentes dans une même instance devant la commission dadmission à laide sociale ; quelles imposent à la commission dadmission à laide sociale de mettre les parties à même dexercer la faculté qui leur est reconnue de solliciter une audition, ce qui na pas été fait ; que sur le fond la décision du Conseil dEtat invoquée par le président de la commission départementale daide sociale na été communiquée à lun des enfants J... sur sa demande que le 4 février 2005 ; quen matière de recours sur récupération de lallocation compensatrice pour tierce personne toute souscription dun contrat dassurance-vie ne constitue pas une donation indirecte ; que ladministration de laide sociale doit établir lintention libérale ; quil en est ainsi seulement lorsquau regard de lensemble des circonstances de la souscription du contrat le stipulant sy dépouille au profit du bénéficiaire de manière actuelle et non aléatoire ne se bornant pas ainsi à un acte de gestion de son patrimoine ; que la commission départementale daide sociale au regard de ces principes a dénaturé les faits et requalifié à tort le contrat dassurance-vie souscrit par Mme Georgette J... auprès de la Caisse nationale de prévoyance en donation indirecte ; que ce contrat « Trésor vie » est un contrat dassurance-vie viager (ou contrat dassurance-vie placement) cest-à-dire sans terme autre que la vie de son souscripteur, quil sagit pour la CNP dun produit dépargne, que le contrat permettait des rendements conséquents, que les sommes placées étaient disponibles à tout moment ; que Mme Georgette J... pouvait en disposer comme bon lui semblait ; quil ny a donc pas eu de dépouillement immédiat et irrévocable de la part de Mme Georgette J... au profit de ses quatre enfants ; quau surplus Mme Georgette J... qui est toujours restée à la charge de ses enfants depuis quelle était devenue paraplégique sétait ainsi assuré les moyens financiers pour faire face au coût éventuel dun placement dans un établissement médicalisé dans lhypothèse où elle - serait devenue - une trop lourde charge pour ses enfants ; que compte tenu de lâge de la souscriptrice, 73 ans, le contrat était bien aléatoire ; quil nest pas davantage établi que sa souscription procède dun acte étranger à la gestion normale du patrimoine de lassistée ; que la souscription du contrat ne répondait à aucune volonté de se placer en dehors du champ dapplication dun recours en récupération des sommes perçues au titre de lallocation compensatrice pour tierce personne fondé sur larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles ; quen effet en labsence dune telle souscription les services sociaux nauraient disposé daucun recours en récupération sur la succession ; quà titre subsidiaire la loi du 11 février 2005, conduit à décharger les requérants de toute récupération ; quà titre infiniment subsidiaire Mme Bernadette J... dispose de ressources peu élevées, sera bientôt à la retraite et sest occupée de sa mère ; M. Jean-Noël J... a mis à disposition de sa celle-ci une maison pendant plusieurs années ; Mme Christiane M... a fait de même ; quainsi il y aurait lieu de réduire le montant de la somme à récupérer à 2 000 euros pour chacun dentre eux ; quil y a lieu de décider quil ny a lieu à restitution à lencontre des requérants de prononcer lannulation des titres exécutoires formant avis des sommes à payer de prononcer la restitution des sommes perçues par la paierie départementale de lAllier, majorées de lintérêt légal à compter de leur paiement, et à titre infiniment subsidiaire de récupérer 2 000 euros par enfant ;
2o Mme Nicole T... expose que la commission dadmission à laide sociale de Vichy a statué sans quelle nait pu présenter aucune observation ; quelle na en effet jamais été sollicitée pour ce faire avant que la commission ne statue, ni interrogée sur les sommes quelle a pu percevoir après le décès de sa mère ; que les stipulations de larticle 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de lhomme et des libertés fondamentales ont été méconnues ; que les décisions de la commission ordonnant une récupération tranchent une contestation relative à des droits et obligations à caractère civil ; quau surplus les termes du dernier alinéa de larticle L. 131-5 du code de laction sociale et des familles ont été méconnus ; que Mme Nicole T... na jamais été destinataire de la correspondance du 25 mars 2004, dont se prévaut le président du conseil général ; que la requalification du contrat dassurance ne saurait être opérée que sil est établi par ladministration que lintention du stipulant était lors de la conclusion du contrat de consentir irrévocablement à une libéralité au profit des bénéficiaires alors que Mme Georgette J... a souscrit un contrat à 73 ans, effectué un premier versement de 107 103,10 francs correspondant aux économies quelle avait pu faire et que les autres versements correspondaient aux sommes économisées sur sa retraite en tenant compte du fait quelle navait pas à exposer des frais dhébergement puisquelle bénéficiait du logement de ses enfants ; que le contrat souscrit comportait bien un aléa, le décès du souscripteur ; que le capital devait être versé au souscripteur en cas de vie à léchéance prévue par le contrat et à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés en cas de décès avant cette date ; que lintention libérale nest pas établie ; quà titre subsidiaire le contrat ne pourrait être requalifié quen contrat de capitalisation conformément à une jurisprudence constante en matière dassurance-vie ; que de tels contrats sont réintégrables dans lactif successoral ; quainsi elle est en droit de se prévaloir de larticle L. 245-6 du code de laction sociale et des familles interdisant la récupération sur la succession ; quà défaut larticle R. 132-12 limitant la récupération aux sommes versées au-delà du seuil de 46 000 euros est applicable ; quà titre infiniment subsidiaire il conviendra eu égard à la situation financière modeste de la requérante de réduire le montant de la somme récupérée à 2 000 euros ;
Vu enregistré le 31 août 2005, le mémoire complémentaire présenté pour M. Jean-Noël J..., Mme Bernadette J... et Mme Christiane M... persistant dans les conclusions de leur requête par les mêmes moyens et le moyen quune réponse ministérielle Dubernard intervenue à leur initiative confirme que les dispositions de larticle 95 de la loi du 11 février 2005, ne permettent pas la récupération litigieuse ;
Vu enregistré le 28 février 2006, le mémoire en défense du président du conseil général de lAllier tendant au rejet de la requête par les motifs que Mme Georgette J... lourdement handicapée a préféré utiliser des remboursements de capitaux et un retrait sur un PEA plutôt que daffecter ces sommes à son entretien à la souscription dun contrat dassurance-vie ; que ce contrat ne distribuait aucun revenu et ne permettait donc pas à Mme Georgette J... de bénéficier de ressources complémentaires ; queu égard à son état de santé il était probable quelle ne bénéficierait pas dun produit à échéance de 8 ans ; que les sommes affectées au paiement de la tierce personne sont inférieures aux sommes versées par le département au titre de lallocation compensatrice pour tierce personne quil est permis de penser quelles ont servi à approvisionner partiellement le contrat ; que le courrier du 25 mars 2004 a bien été envoyé aux quatre enfants aux adresses alors connues au dossier ; que dans un courrier postérieur les rédacteurs se présentent bien comme les enfants de Mme Georgette J... et font part de leurs arguments mais ne demandent à aucun moment à être entendus par la commission dadmission à laide sociale ; que les enfants avaient ainsi tout à fait connaissance du passage du dossier en commission et nont jamais manifesté leur désir dy participer ; que le demandeur est le président du conseil général et non les tiers à lencontre desquels les recours sont exercés ; quil ny a lieu à modération de la créance ; que contrairement à ce que soutient Mme Nicole T... les contrats dassurance-vie ne doivent pas être requalifiés en contrats à capitalisation réintégrables dans lactif successoral ;
Vu les lettres enregistrées les 10, 14 et 23 mars 2006, des consorts J..., du président du conseil général de lAllier et de Mme T... en réponse au supplément dinstruction en date du 8 mars 2006 ;
Vu enregistré le 21 mars 2006, le mémoire en réplique présenté pour les consorts M... - J... persistant dans les conclusions de leur requête par les mêmes moyens et les moyens que Mme Georgette J... ne se savait nullement condamnée lors de la souscription du contrat ; que les services du conseil général auraient dû rechercher les adresses de lensemble des requérants ; que le courrier adressé à Mme Bernadette J... « lors de lengagement de la procédure est ambiguë » ; que les dispositions de larticle 16 du règlement départemental sappliquaient à lensemble « des parties » devant la commission dadmission à laide sociale ; que la saisine ne fait état daucun élément précisément de ce que Mme Georgette J... ait entendu se dépouiller actuellement et irrévocablement à leur profit au 31 décembre 1994 ; que pour entrer en application de larticle 95-1 de la loi du 11 février 2005, il importe peu de savoir si Mme Georgette J... avait pour bénéficier de lallocation personnalisée dautonomie ou de la prestation de compensation, aucun choix nayant du reste été ouvert ; quen tout état de cause seul le différentiel entre les arrérages perçus et les sommes versées à la tierce personne aurait pu servir à approvisionner le montant et quà titre infiniment subsidiaire de ramener la récupération à titre gracieux non à 2 000 euros mais à 1 182,21 euros pour chacun des 3 gratifiés ;
Vu enregistré le 22 mars 2006, le mémoire en réplique de Mme Nicole T... persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens que les dispositions de larticle L. 131-2 du code de laction sociale et des familles sappliquent à toutes les « parties » à linstance dadmission ; quelle na jamais été associée aux démarches des consorts M... J..., et na pas signé la correspondance dont ladministration se prévaut ; que le président du conseil général de lAllier ne démontre pas que les arrérages dallocation aient servi à approvisionner le contrat et que les économies alléguées porteraient sur 4 728,85 euros ; quelle verse aux débats son avis dimposition 2004 en contestant les allégations du président du conseil général selon lesquelles elle ne déclarerait pas lintégralité de ses rentes viagères ;
Vu la Convention européenne des droits de lhomme et des libertés fondamentales ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu la loi du 11 février 2005, pour légalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ;
Vu le règlement départemental daide sociale de lAllier ;
Après avoir entendu à laudience publique du 19 avril 2006, Mlle Erdmann, rapporteure, Me Rodolphe M..., et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quil y a lieu de joindre les requêtes susvisées formulées pour trois des quatre enfants de Mme Georgette J... et pour le quatrième, bénéficiaires dun contrat dassurance-vie décès souscrit par lassistée et qui présentent à juger des questions identiques ou liées entre elles ;
Sur la régularité de la décision attaquée ;
Considérant que le juge de première instance sest borné à reprendre intégralement la note de ladministration à la « commission dadmission à laide sociale » en date du 1er février 2005, sans répondre aux nouveaux moyens formulés devant lui par Mme Nicole T..., notamment celui formulé à titre subsidiaire qui nétait pas inopérant, tiré de ce que le contrat litigieux était un contrat de capitalisation, dans le mémoire enregistré le 31 janvier 2005, antérieurement à la clôture de linstruction, sans réouverture de celle-ci après ladite clôture ; que toutefois dune part, le moyen tiré du défaut de réponse à moyen nest pas dordre public, dautre part, le fait pour le juge de se borner à reprendre intégralement une production administrative antérieure sans tenir compte de létat du litige lorsquil statue nest pas en lui-même de nature à justifier de labsence dimpartialité et dindépendance de la juridiction, même si dans le département de lAllier la situation apparaît actuellement identique en pratique à ce quelle était avant que le fonctionnaire concerné, nétant plus rapporteur nominal, la commission départementale daide sociale reprenne intégralement largumentation quil produit au nom du département, dailleurs par une erreur de plume justifiant dêtre relevée à « la commission dadmission à laide sociale » ; que si en réalité tant que la commission départementale daide sociale naura pas été sauf dans quelques rares départements dotée des moyens lui permettant de fonctionner comme une juridiction, sa dépendance vis-à-vis de ladministration de laide sociale sera avérée quelle que puisse être « lapparence » de limpartialité au sens de larticle 6-1 de la Convention européenne des droits de lhomme et des libertés fondamentales, la présente juridiction nestime pas devoir soulever doffice en lespèce le moyen tiré de la méconnaissance du principe dindépendance et dimpartialité des juridictions administratives et, comme il a été dit, le moyen tiré du défaut ou de linsuffisante motivation et/ou du défaut de réponse à moyen de la décision du premier juge nest pas dordre public ;
Sur la régularité de la procédure devant la commission dadmission à laide sociale de Vichy ;
Considérant que si les consorts J..., M... ont été informés par la président du conseil général de lAllier et non la commission dadmission à laide sociale de son intention dengager devant linstance dadmission un recours en récupération, celle-ci ne les a ni convoqués à sa séance, ni avertis quils pouvaient être entendus par elle ; que les dispositions de larticle L. 131-5 du code de laction sociale et des familles, qui, contrairement à ce que soutient le président du conseil général de lAllier, sappliquent au demandeur à la récupération (ladministration) comme aux intimés devant linstance dadmission (les donataires) et que les dispositions invoquées du règlement départemental daide sociale se bornent à rappeler, ont été méconnues, dès lors que la commission dadmission à laide sociale est une instance distincte du président du conseil général, et que cest à linstance dadmission elle-même quil incombe de mettre à même les personnes attraites devant elle aux fins de récupération, comme le demandeur à cette récupération, de présenter leurs observations à sa séance, selon lune des deux modalités ci-dessus rappelées quil lui appartient de mettre en uvre elle-même, et dont ni lune ni lautre nont été en lespèce, comme il a été dit, mises en uvre alors, au surplus, que, contrairement à ce qui est affirmé dans le présent dossier comme dans de trop nombreux dossiers soumis à la présente juridiction, il nappartient pas au président de linstance dadmission dapprécier discrétionnairement sil entend permettre aux personnes attraites devant linstance quil préside duser de la faculté daudition qui leur est ouverte par la loi, comme à ladministration saisissante ; quainsi et alors même que contrairement à ce qui est soutenu par les conseils des requérants linstance dadmission nest évidemment pas une juridiction à laquelle sappliqueraient, notamment, les stipulations de larticle 6-1 de la Convention européenne des droits de lhomme et des libertés fondamentales, il y a lieu dannuler la décision de la commission dadmission à laide sociale de Vichy en date du 10 juin 2004 ;
Sur la tardive communication dune décision du Conseil dEtat, invoquée en séance par le président de la commission départementale daide sociale, postérieurement à ladite séance ;
Considérant quen admettant que ce moyen soit soulevé pour mettre en cause la régularité de la procédure soit devant la commission départementale daide sociale soit devant la commission centrale daide sociale il est en tout état de cause non fondé, aucune disposition nimpartissant au président de la commission départementale daide sociale de communiquer aux personnes présentes à laudience une décision du Conseil dEtat dont il aurait fait état au cours de la séance publique de jugement dans les échanges avec les parties présentes ; quainsi ce moyen doit en toute hypothèse être écarté ;
Sur les conclusions des consorts J..., M... dirigées contre les titres de perception rendus exécutoires émis pour avoir versement de la créance de laide sociale ;
Considérant que ces conclusions sont formées pour la première fois en appel par les consorts J..., M... ; que Mme Nicole T... navait pas en première instance formulé et ne formule pas devant le juge dappel de telles conclusions ; quainsi lesdites conclusions des consorts J..., M... sont nouvelles en appel et comme telles irrecevables ;
Au fond ;
Considérant que si les consorts J..., M... se prévalent à titre seulement « subsidiaire » des dispositions de larticle 95-I de la loi du 11 février 2005, il appartient au juge dexaminer préalablement la question dordre public tirée de limpossibilité de statuer le cas échéant sur les conclusions et moyens des parties sil estime que ces dispositions sont applicables ; quen lespèce le recours est introduit contre les donataires et non contre la succession et que contrairement à la réponse à question écrite suscitée en cours dinstance par les consorts J..., M... et adressée à un parlementaire par le ministre chargé du travail de lemploi et de la cohésion sociale qui est dépourvue de valeur normative et fait dailleurs expresse réserve « de linterprétation des tribunaux », le législateur na imparti au juge dentrer en décharge des récupérations pendantes devant lui à la date dentrée en vigueur de la loi du 11 février 2005, que lorsquil sagit du recours contre la succession et, non de celui contre le donataire, même sil a pu envisager en réalité les deux hypothèses, dès lors que la formulation de la loi écarte clairement la seconde et que sagissant de la loi du 11 février 2005, comme dailleurs des dispositions législatives précédemment intervenues, lorsquun texte est clair il appartient au juge de lappliquer tel quil est rédigé, sans se référer en tant que de besoin aux travaux préparatoires ;
Sans quil y ait lieu à examen des autres moyens et des conclusions subsidiaires des requêtes susvisées ;
Considérant quun contrat dassurance-vie décès, acte neutre, est susceptible dêtre requalifié en donation indirecte si ladministration établit lintention libérale du souscripteur au moment de la souscription du contrat lamenant à se dépouiller au profit du bénéficiaire de second rang à ladite date de manière telle que laléa inhérent à la souscription dun tel acte puisse être tenu comme non avéré ; quil appartient à ladministration de laide sociale détablir dans le contexte particulier de chaque espèce lintention libérale dont elle se prévaut ; que le juge de laide sociale apprécie les faits sur lesquels il se fonde sans quil soit besoin en ce qui concerne cette appréciation à renvoi préjudiciel à lautorité judiciaire ;
Considérant en lespèce que Mme Georgette J... a souscrit à 73 ans et sans quil soit établi, notamment par les pièces produites à lappui du mémoire en défense du président du conseil général de lAllier, quelle fut alors atteinte dune affection évolutive de nature à présumer à terme rapproché de son décès, le bénéfice dune allocation compensatrice pour tierce personne ne justifiant pas par lui même dun tel état, un contrat dassurance-vie conclut effectivement, ainsi quil résulte des documents fournis par les consorts J..., M... en réponse au supplément dinstruction de la présente juridiction en date du 8 mars 2006, selon les modalités dun contrat dassurance-vie décès non compris dans lactif brut successoral et susceptible de se dénouer soit au terme de huit années, soit par le décès du souscripteur bénéficiaire de premier rang, et non contrairement à ce que persiste à soutenir Mme J... dans le dernier état de linstruction conclu pour la vie entière de la stipulante ; que compte tenu des taux garantis et des modalités de retrait stipulées, cette souscription ne procédait pas dune gestion patrimoniale anormale du patrimoine de lassistée, que pour lessentiel, elle avait été amenée à réinvestir lors de la souscription du contrat ; que lutilisation des fonds investis disponibles à tout moment était susceptible de devenir nécessaire à Mme Georgette J..., compte tenu de son état de dépendance, pour supporter les frais de placement dans un établissement dhébergement pour personnes âgées dépendantes, au cas où le maintien à domicile ne pourrait plus être assuré, compte tenu de lévolution ultérieure de son état, tout en évitant une demande daide sociale à lhébergement des personnes âgées avec les contraintes inhérentes à cette forme daide sociale, mais en utilisant alors (outre la pension et lallocation compensatrice pour tierce personne en établissement) le capital ainsi préservé et amélioré ; que la circonstance que la requérante nait pas utilisé la totalité de lallocation compensatrice pour tierce personne versée postérieurement à la souscription du contrat et ait dans la même période abondé le montant des primes versées au titre de celui-ci (absence dutilisation dailleurs partielle de 12 373 euros sur 153 748 euros selon les propres indications du président du conseil général) nest pas de nature à établir quen continuant à alimenter le contrat dont sagit elle ait manifesté son intention libérale à légard des bénéficiaires de second rang, alors dailleurs quil nest pas contesté que dans le même moment ceux-ci mettaient à sa disposition une maison, la dispensant ainsi de sacquitter dun loyer pour son maintien à domicile ; que dans lensemble de ces circonstances ladministration nétablit pas que labsence daléa effectif à la date de la souscription du contrat et à celles des primes ultérieurement versées jusquau décès de lassistée le 16 août 1997 manifeste lintention libérale de celle-ci vis-à-vis de ses enfants bénéficiaires de second rang, et ainsi justifie dune requalification du contrat en donation indirecte ; quil y a lieu par suite dannuler dans son ensemble la décision attaquée de la commission départementale daide sociale de lAllier en tant non seulement quelle na pas annulé la décision de la commission dadmission à laide sociale de Vichy, mais quelle a, en outre, rejeté dans leur ensemble les demandes dont elle était saisie ;
Sur les conclusions des consorts J..., M... tendant au paiement dintérêts sur les sommes versées en exécution de la décision de la commission dadmission à laide sociale de Vichy ;
Considérant qualors même, que comme il a été dit, les conclusions aux fins dannulation des titres de perception rendus exécutoires ne sont pas recevables il appartient en toute hypothèse au juge de plein contentieux de la décision de la commission dadmission à laide sociale de statuer sur les conclusions aux fins de paiement dintérêts ; quil lui est loisible de les accorder dans le cadre de linstance relative à la décision de linstance dadmission, sans quil y ait lieu à contraindre les requérants à formuler une demande distincte après la notification de la présente décision ; quil y a lieu par suite en application de larticle 1153 du code civil de condamner le département de lAllier à verser à Mme Christiane M..., à Mme Bernadette J... et à M. Jean-Noël J... (Mme Nicole T... nayant pas formulé de demande de la sorte et les intérêts courant en ce qui la concerne pour compter de la notification de la présente décision) lesdits intérêts en ce qui concerne M. Jean-Noël J... de la date de paiement de la somme mise à sa charge et en ce qui concerne Mmes M... et J... des dates respectives des versements partiels procédant de léchéancier qui leur avait été accordé par le payeur ;
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale de lAllier et la décision de la commission dadmission à laide sociale de Vichy en date des 1er février 2005, et 10 juin 2004, sont annulées.
Art. 2. - Il ny a lieu à récupération à lencontre des consorts M..., J... et de Mme Nicole T... des arrérages dallocation compensatrice pour tierce personne avancés par laide sociale à Mme Georgette J....
Art. 3. - Le département de lAllier paiera à Mme J..., à Mme M... et à M. J... les intérêts au taux légal des sommes quils lui ont versées en application de la décision annulée de la commission dadmission à laide sociale de Vichy dans les conditions précisées dans les motifs de la présente décision.
Art. 4. - La présente décision sera transmise au ministre de lemploi de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 19 avril 2006, où siégeaient M. Levy, président, Mme Kornmann, assesseure, Mlle Erdmann, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 28 avril 2006.
La République mande et ordonne au ministre de lemploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer