Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) -  Recours en récupération -  Retour à meilleure fortune
 

Dossier no 042267

Mme N...
Séance du 3 octobre 2005

Décision lue en séance publique le 7 novembre 2005

    Vu enregistrée le 31 août 2001, au secrétariat de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de Toulouse la requête de Mme Michèle N..., tutrice légale de sa sœur, Mlle Marie Françoise N..., tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale d’annuler une décision de la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Garonne du 4 juillet 2001, confirmant celle de la commission d’admission à l’aide sociale de Castanet Tolosan en date du 11 septembre 2000, décidant d’une récupération de la somme de 38 112,25 euros, pour retour à meilleure fortune, sur les fonds reçus par Mlle Marie Françoise N..., adulte handicapé bénéficiaire de l’aide sociale, à l’occasion du décès de son père ;
    Par le moyen que la somme laissée à la disposition de l’assistée par le conseil général est très modeste et ne suffit pas à régler les dépenses inhérentes à son état et à sa condition que le conseil général est déjà assuré d’une récupération des droits immobiliers de l’assistée ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense du conseil général de la Haute-Garonne en date du 29 août 2004 ;
    Vu enregistré le 22 juillet 2005, le mémoire de Mme Michèle N... ;
    Vu les pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 3 octobre 2005, Mme Ciavatti, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que la commission d’admission à l’aide sociale de Castanet Tolosan a, le 11 septembre 2000, pris la décision suivante au titre de la récupération à l’encontre de Mme Michèle N... pour retour à meilleure fortune « récupération partielle de la somme de 250 000,00 francs (38 112,25 euros) compte tenu de l’amélioration conséquente de vos ressources ou de votre patrimoine » ; qu’il résulte de cette décision « éclairée » par les motifs de la saisine du président du conseil général de la Haute-Garonne en date du 5 septembre 2000, que la récupération litigieuse de 250 000,00 francs (38 112,25 euros) au titre du seul retour à meilleure fortune ne porte pas sur le montant des primes versées par le père de l’assistée, souscripteur d’un contrat d’assurance-vie-décès désignant Mlle Marie Françoise N... en qualité de bénéficiaire de second rang, laquelle a perçu lors du décès du souscripteur 53 000,00 francs (8 079,80 euros) ultérieurement répartis entre elle et ses deux sœurs, non plus que sur les droits acquis à raison de la succession de son père par Mlle Marie Françoise N..., propriétaire indivis d’une maison d’habitation à hauteur de 167 362,00 francs (25 514,17 euros), (en tout état de cause la récupération au décès de la mère de Mlle Marie Françoise N... occupant la maison familiale, n’est pas contestée et n’apparaît d’ailleurs pas expressément sur la seule décision susmentionnée de la commission d’admission à l’aide sociale), mais sur et seulement sur les capitaux mobiliers en possession de Mlle Marie Françoise N... antérieurement à la date du décès de son père, constitués par des versements réguliers de celui-ci sur les comptes de sa fille, dans un but de prévoyance pour garantir la situation de celle-ci après son décès ; que c’est ainsi sur ce seul capital d’un montant de 377 681,77 francs (57 576,97 euros) à la date de la décision de la commission départementale d’aide sociale qu’a été exclusivement décidé le recours pour retour à meilleure fortune litigieux, à hauteur de 250 000,00 francs (38 112,25 euros) ;
    Considérant qu’en première instance la requérante formulait le moyen suivant « son père avait mis de l’argent de côté pour qu’elle puisse subvenir à ses besoins, merci de prendre en compte cet élément essentiel, que mon père n’ait pas fait tout ça pour rien » ; que si la requérante, juridiquement autodidacte indiquait également « je suis consciente que vous êtes dans votre droit », elle entendait bien, ainsi, soulever le moyen tiré du caractère progressif et continu de la constitution du capital que l’administration entend aujourd’hui recouvrer ; que par la motivation non autrement précisée selon laquelle « les dispositions légales et réglementaires (...) permettent de diligenter en l’espèce un recouvrement des avances faites au titre de l’aide sociale et l’administration a satisfait aux règles de droit et procédure applicables en la matière », la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Garonne ne peut être regardée comme ayant en quelque façon répondu à ce moyen ; qu’ainsi le juge d’appel saisi en l’absence de contestation de la régularité de la décision attaquée, par l’effet dévolutif de l’appel est tenu de l’examiner ;
    Considérant que la constitution progressive « au fil des ans », ainsi que l’expose l’administration elle-même, d’un capital mobilier par des versements réguliers du père de l’assistée dans un but de préservation de la situation de sa fille à son décès, au surplus d’ailleurs pour partie antérieurement aux demandes d’aide sociale, ne constitue pas un événement nouveau améliorant la situation patrimoniale ou de revenus du bénéficiaire entrant dans le champ des dispositions aujourd’hui codifiées à l’article L. 132-8-1 du code de l’action sociale et des familles ; que la circonstance dont se prévaut l’administration que « l’admission à l’aide sociale s’est d’abord effectuée sans qu’une information ne soit dispensée sur l’existence et l’importance des fonds placés » est sans incidence quant aux conditions légales de la récupération pour retour à meilleure fortune ;
    Considérant que enfin l’administration qui a diligenté un recours en récupération pour retour à meilleure fortune à raison de la situation procédant des capitaux placés dans les conditions susrappelées au bénéfice de Mlle Marie Françoise N... par ses parents, ne saurait en tout état de cause utilement faire valoir dans son mémoire en défense que « les fonds détenus par Mlle Marie Françoise N... sont » (le 29 avril 2004) « issus de l’héritage et du contrat d’assurance-vie perçu (sic) par cette dernière » et que « cet apport de liquidités (...) a bien pour origine un élément nouveau et extérieur non présent lors de la constitution initiale du dossier d’aide sociale » ;
    Considérant que le caractère subsidiaire de l’aide sociale demeure par lui-même sans incidence sur le présent litige dès lors que la requérante est recherchée sur des sommes n’entrant pas légalement dans le champ des dispositions légales susrappelées qui en circonscrivent la mise en œuvre ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu d’annuler les décisions attaquées,

Décide

    Art. 1er.  - La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Garonne et la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Castanet Tolosan en date des 4 juillet 2001 et 11 septembre 2000, sont annulées.
    Art. 2.  - Il n’y a lieu à récupération à raison des prestations d’allocation compensatrice et d’aide sociale à l’hébergement des personnes handicapées avancées à Mlle Marie Françoise N... par l’aide sociale.
    Art. 3.  - La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 3 Octobre 2005, où siégeaient M. Lévy, président, Mme Le Meur, assesseure, Mme Ciavatti, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 7 novembre 2005.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer