Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Recours en récupération - Assurance vie - Donation - Qualification |
Dossier no 031789
Mme M...
Séance du 25 mai 2005
Décision lue en séance publique le 4 juillet 2005
Vu le recours formé par M. le président du conseil général de la Dordogne, le 8 septembre 2003, tendant à lannulation dune décision du 3 juillet 2003, par laquelle la commission départementale daide sociale de la Dordogne a rejeté laction en récupération sur le bénéficiaire de lassurance vie de la somme avancée par le département à Mme Marie M... au titre de la prestation spécifique dépendance du 14 avril 2000 au 17 janvier 2002, au motif que le bénéficiaire étant lunique héritier et la succession insuffisante, il n y a pas de donation indirecte permettant la récupération sur les donataires ;
Le requérant conteste cette décision, soutenant que la souscription par Mme Marie M... dun contrat dassurance vie procède dune intention libérale manifeste en totale cohérence et continuité des démarches précédentes de celle-ci et qui attestent de sa volonté de se dessaisir de son patrimoine au profit de son fils unique ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Après avoir entendu à laudience publique du 25 mai 2005, Mlle Sauli, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant dune part quaux termes des dispositions de larticle 146 du code de la famille et de laide sociale applicable à la date des faits, devenu larticle L. 132-8, 2o du code de laction sociale et des familles : « Des recours sont exercés par ladministration (...) contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande daide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande » ; quaux termes de larticle 4 du décret no 61-495 du 15 mai 1961 : « Ces recours sont exercés jusquà concurrence de la valeur des biens donnés (...) dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de laide sociale » ;
Considérant dautre part, quaux termes de larticle 894 du code civil : « La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donateur qui laccepte » ; quun contrat dassurance vie soumis aux dispositions des articles L. 132-1 et suivants du code des assurances, par lequel il est stipulé quun capital ou une rente sera versé au souscripteur en cas de vie à léchéance prévue par le contrat, et à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés en cas de décès du souscripteur avant cette date, na pas en lui-même le caractère dune donation, au sens de larticle 894 du code civil ;
Considérant toutefois que ladministration et les juridictions de laide sociale sont en droit de rétablir la nature exacte des actes pouvant justifier lengagement dune action en récupération, sous réserve, en cas de difficulté sérieuse, dune éventuelle question préjudicielle devant les juridictions de laide judiciaire ; quà ce titre, un contrat dassurance vie peut être requalifié en donation si, compte tenu des circonstances dans lesquelles ce contrat a été souscrit, il révèle pour lessentiel, une intention libérale de la part du souscripteur vis-à-vis du bénéficiaire et après que ce dernier a donné son acceptation ; que lintention libérale doit être regardée comme établie lorsque le souscripteur du contrat, eu égard à son espérance de vie et à limportance des primes versées par rapport à son patrimoine, sy dépouille au profit du bénéficiaire de manière à la fois actuelle et non aléatoire en raison de la naissance dun droit de créance sur lassureur ; que, dans ce cas, lacceptation du bénéficiaire, alors même quelle ninterviendrait quau moment du versement de la prestation assurée après le décès du souscripteur, a pour effet de permettre à ladministration de laide sociale de le regarder comme un donataire, pour lapplication des dispositions relatives à la récupération des créances daide sociale ;
Considérant quil résulte de linstruction que Mme Marie M... a bénéficié du 14 avril 2000 au 17 janvier 2002 - date de son décès - de la prestation spécifique dépendance ; que les sommes avancées à ce titre par le département sélèvent à 7 991,50 Euro ; que le 7 avril 1994, Mme Marie M..., née le 9 août 1913, a souscrit au profit de son fils bénéficiaire désigné un contrat assurance vie pour un montant initial de 7 622,45 Euro ; quau décès de Mme Marie M..., celui-ci a bénéficié de la somme de 38 614,04 Euro ;
Considérant quen se fondant sur lâge de Mme Marie M... (81 ans) à la date de souscription du contrat dassurance vie auprès de la compagnie Prédica, rapproché de sa durée, ainsi que sur limportance des primes par rapport à ses ressources et le bénéficiaire désigné, le président du conseil général de la Dordogne a fait une exacte appréciation des circonstances de laffaire en estimant que - la durée du contrat rendant très probable que le capital assuré serait versé au fils unique de Mme Marie M... - celle-ci avait bien fait preuve dune intention libérale à son égard et que légalement, elle pouvait en déduire que cette dernière devait être regardée comme le bénéficiaire dune donation ; que dans ces conditions, cest à tort que la commission départementale de la Dordogne estimant que lintention libérale nétant pas établie, a décidé que la souscription dudit contrat par Mme Marie M... ne pouvait pas être qualifiée de donation indirecte justifiant laction en récupération de la créance départementale sur le donataire prévue par larticle 146 précité ; que la donation a bien été effectuée dans la période définie par larticle 146 susmentionnée ; que les sommes qui font lobjet de récupération au titre de la prestation spécifique dépendance ne dépassent pas le montant de la donation et que le seuil de récupération sur les successions de 46 000,00 Euro nest pas opposable en ce qui concerne le recours à lencontre des donataires ; que dans ces conditions, ladite décision attaquée doit être annulée et la somme de 7 991,50 Euro doit faire lobjet dune récupération sur la bénéficiaire du contrat dassurance vie, dans la limite du capital reçu par celui-ci ;
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale de la Dordogne en date du 3 juillet 2003, est annulée.
Art. 2. - La présente décision sera transmise au ministre de lemploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 25 mai 2005, où siégeaient M. Seltensperger, président, M. Guionnet, assesseur, Mlle Sauli, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 4 juillet 2005.
La République mande et ordonne au ministre de lemploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer