Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Recours en récupération - Donation - Assurance vie - Qualification de lacte |
Dossier no 042211
Mme C...
M. C...
Séance du 2 mai 2005
Décision lue en séance publique le 12 mai 2005
Vu le recours formé par Mme Simone C... et M. Bernard C..., en date du 29 janvier 2003, tendant à lannulation de la décision de la commission départementale daide sociale en date du 5 novembre 2002 relative à la récupération de la somme de 24 457,78 euros, au titre du versement de lallocation compensatrice pour la période du 1er août 1996 au 23 juillet 2001, effectué au profit de M. André C..., décédé le 23 juillet 2001, dans le cadre du recours contre les bénéficiaires de contrats dassurance vie ;
Les requérants soutiennent quun défaut dinformation sur les conséquences de la souscription dun contrat dassurance vie existe, quil ny a pas dintention libérale, en raison du rapport entre les primes versées et le patrimoine au jour du versement qui est inférieur à un tiers et que les moyens financiers des requérants doivent être pris en considération ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en réplique du président du conseil général de la Haute-Garonne en date du 8 novembre 2004, transmis aux requérants par courrier en date du 15 novembre 2004, qui soutient que, en raison de lâge de lassuré à la souscription - 86 ans - du rapport entre le capital investi de 36 838,82 euros, et lactif net de succession 26 086,35 euros, et de diverses donations partage lintention de transmettre à titre gratuit est démontrée, et par conséquent il y a lieu de requalifier le contrat dassurance en donation indirecte. Il soutient également que la remise gracieuse ni laménagement du recouvrement nest pas justifiée en labsence de réelle situation de précarité des requérants. Il conclut par une demande du rejet du pourvoi et la confirmation de la décision de la commission départementale daide sociale ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu le code des assurances ;
Vu la loi no 2005-102 du 11 février 2005, pour légalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ;
Vu la lettre en date du 24 janvier 2005, invitant les parties à linstance à se présenter à laudience ;
Après avoir entendu, à laudience publique du 2 mai 2005, M. Courault, rapporteur, Mme Simone C... en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Sans quil soit besoin dexaminer les autres moyens ;
Considérant que ladministration de laide sociale est en droit de rétablir la nature exacte des actes pouvant justifier lengagement dune action en récupération ; que le même pouvoir appartient aux juridictions de laide sociale, sous réserve, en cas de difficulté sérieuse, dune éventuelle question préjudicielle devant les juridictions de lordre judiciaire : quà ce titre, un contrat dassurance vie peut être requalifié en donation si, compte tenu des circonstances dans lesquelles ce contrat a été souscrit, il révèle, pour lessentiel, une intention libérale du souscripteur vis-à-vis du bénéficiaire et ce, après que ce dernier ait donné son acceptation ; que lintention libérale doit être regardée comme établie lorsque le souscripteur du contrat, eu égard à son espérance de vie et à limportance des primes versées par rapport à son patrimoine, sy dépouille au profit du bénéficiaire de manière à la fois actuelle et non aléatoire en raison de la naissance dun droit de créance sur lassureur ; que, dans ce cas, lacceptation du bénéficiaire, alors même quelle ninterviendrait quau moment du versement de la prestation assurée après le décès de lassuré, a pour effet de permettre à ladministration de laide sociale de le regarder comme un donataire, pour lapplication des dispositions de larticle L. 132-8 2e alinéa du code de la famille et de laide sociale relative à la récupération des créances daide sociale ; que la preuve de lintention libérale sapprécie dans chaque cas despèce compte tenu de lensemble des circonstances de fait au moment de la souscription du contrat ; que si en règle générale, une telle intention est établie par la conjonction dun faible aléa de dénouement du contrat au bénéfice du souscripteur bénéficiaire de premier rang et de limportance du montant des primes versées par rapport au patrimoine, notamment mobilier, ces éléments ne sont pas insusceptibles dêtre infirmés par dautres éléments propres à chaque espèce de nature à infirmer les présomptions quils manifestent, étant rappelé que le simple transfert de valeurs sur le bénéficiaire de second rang nest pas à soi seul suffisant pour permettre de requalifier un contrat dassurance vie-décès en donation indirecte ;
Considérant en lespèce que, certes, lorsque M. C... souscrit, le 28 mars 1996, un contrat dassurance vie-décès désignant comme bénéficiaires de second rang son épouse et à défaut ses enfants, il est âgé de 86 ans, et dès alors la prime de 100 000 francs est nettement supérieure à ses autres actifs mobiliers (hors appartement des époux) qui sont de lordre de 54 000 francs (le dossier ne permet pas de déterminer si les sommes employées sont des deniers de communauté) ; quaprès le décès de son épouse, en octobre 1997, M. C..., alors âgé de 87 ans, verse le capital perçu en qualité de bénéficiaire de second rang dun contrat dassurance vie-décès souscrit par son épouse en 1994 soit 80 000 francs sur le même contrat souscrit en 1996 ; quil décède le 23 juillet 2000 à 89 ans ; quainsi, même si les consorts C... font valoir que rien ne laissait présumer à lépoque de ces souscriptions, la survenance de laffection dont leur père a été victime, laléa effectif et le montant des sommes placées par rapport aux autres éléments patrimoniaux susprécisés constituent bien une présomption de lintention libérale du souscripteur à leur égard ;
Mais considérant, comme il a été dit, quune telle présomption peut ne pas valoir preuve si dans le cas particulier de lespèce elle est infirmée de façon suffisamment claire, précise et concordante par les autres éléments résultant de linstruction ; quà cet égard, il est déterminant en linstance de constater que, comme le font valoir les requérants, si les sommes dont sagit avaient été en 1996 et 1997 placées sous dautres formes et réintégrées à la succession il était prévisible que le montant global de celle-ci eût été tel que, compte tenu de labattement dont chaque héritier en ligne directe peut bénéficier, il ny aurait pas eu lieu pour chacun des deux requérants à acquittement de droits de succession ; que, M. C..., navait aucun intérêt au regard des allocations daide sociale dont il bénéficiait à souscrire un placement susceptible à la différence des autres de même incidence fiscale prévisionnelle dêtre requalifié en donation indirecte à son décès et ainsi, seul, appréhendé par laide sociale ; quaucun élément de gestion rationnelle de M. C..., dont lépouse était dailleurs professionnelle de gestion financière, nétait ainsi de nature en lespèce à priver les placements souscrits du caractère essentiel de modalité de gestion de son patrimoine et quainsi, nonobstant les présomptions procédant de lâge du souscripteur et du montant de la souscription, lintention libérale de M. C... à légard de ses enfants ne se trouve pas établie ;
Considérant, il est vrai, que ladministration a fait valoir en outre que les requérants avaient bénéficié dès 1984, dune donation hors champ pour lapplication de larticle 146 b du code de la famille et de laide sociale alors applicable dune valeur, alors, de 270 000 francs et quantérieurement à ladmission en octobre 1996 à lallocation compensatrice pour tierce personne de M. C..., les époux C... ont le 9 octobre 1996, modifié la donation dont sagit en supprimant la clause dentretien et de soins à charge de leurs enfants dont elle était assortie ;
Considérant sans doute quil eut été loisible au président du conseil général de la Haute-Garonne sil sy était cru fondé de rechercher pour lapplication de larticle 146 b du code de la famille et de laide sociale alors applicable dans le délai de prescription la récupération à raison de la modification de lacte de donation dont sagit, qui, en modifiait substantiellement le caractère et la portée ; mais que tel nest pas le cas, les requérants étant seulement recherchés à raison des souscriptions susrappelées de contrats dassurance vie-décès de leur père moyennant les versements des deux primes également susrappelés ; quau regard des éléments susénoncés qui conduisent à ne pas requalifier par elles-mêmes ces souscriptions de donations indirectes les conditions dans lesquelles la donation, faite en décembre 1984, a été substantiellement modifiée en 1994, à les supposer susceptibles de permettre de rechercher à cette dernière date une donation, sont inopérantes, quil nappartient pas au juge, fut-il de plein contentieux de laide sociale, de substituer à la donation seule recherchée par ladministration une autre donation qui aurait procédé en lespèce de la modification en 1994 de la donation de 1984, qui ne lest pas et qui au demeurant ne pourra dorénavant plus lêtre compte tenu de la suppression pour lavenir par larticle 95 de la loi du 11 février 2005, de la récupération des arrérages dallocation compensatrice à lencontre du donataire, laquelle sapplique à toute récupération postérieure à la date d entrée en vigueur de la loi quel quen puisse être le fait générateur ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède que dans les circonstances particulières de lespèce, la donation seule recherchée par ladministration ne peut être tenue comme établie faute de preuve de lintention libérale de M. C... hors gestion normale de son patrimoine mobilier au moment des souscriptions de primes litigieuses ; quil y a lieu, en conséquence, dannuler les décisions attaquées et de dire quil ny a lieu à récupération des prestations avancées par laide sociale à M. André C... ;
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale de la Haute-Garonne du 5 novembre 2002, et la décision de la commission dadmission à laide sociale de Toulouse du 7 janvier 2002, sont annulées.
Art. 2. - Il ny a lieu à récupération à lencontre de M. Bernard C... et de Mme Simone C... des prestations dallocation compensatrice avancées par laide sociale à M. André C....
Art. 3. - La présente décision sera transmise au ministre de lemploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille, à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 2 mai 2005 où siégeaient M. Lévy, président, M. Peronnet, assesseur, M. Courault, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 12 mai 2005.
La République mande et ordonne au ministre de lemploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer