Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Personnes handicapées - Placement - Ressources - Participation financière
 

Conseil d’Etat statuant au contentieux
Dossier no 262606

M. V...
Séance du 8 juin 2005

Lecture du 27 juillet 2005

    Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 décembre 2003 et 13 avril 2004 au secrétariat du contentieux du conseil d’Etat, présentés pour M. Patrick V..., assisté de son curateur M. Daniel D... ; M. V... demande au conseil d’Etat :
    1o D’annuler la décision en date du 28 mai 2003 par laquelle la commission centrale d’aide sociale a rejeté sa requête tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Allier du 12 juin 2001 confirmant la décision du 21 septembre 2000 de la commission d’admission d’aide sociale de Moulins en ce qu’elles intègrent la rente viagère d’orphelin versée par la Caisse nationale de retraite et la Caisse nationale de prévoyance des ouvriers du bâtiment dans les ressources à prendre en compte pour la détermination de sa participation aux frais de son hébergement au foyer des Alouettes ;
    2o Statuant au fond, d’annuler la décision du 12 juin 2001 de la commission départementale d’aide sociale de l’Allier et la décision du 21 septembre 2000 de la commission d’admission ;
    3o D’annuler le titre de recettes du 16 novembre 2003 ;
    4o De mettre à la charge du département de l’Allier une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code général des impôts ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la loi no 75-534 du 30 juin 1975 ;
    Vu la loi no 83-1179 du 29 décembre 1983 portant loi de finances pour 1984 ;
    Vu le code de justice administrative ;
    Après avoir entendu en audience publique :
        -  le rapport de Mlle Anne Courrèges, maître des requêtes ;
        -  les observations de la SCP Gaschignard, avocat de M. V... ;
        -  les conclusions de M. Christophe Devys, commissaire du Gouvernement ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale, issu de la loi du 30 juin 1975, alors applicable : « (...) Les frais d’hébergement et d’entretien des personnes handicapées dans les établissements de rééducation professionnelle et d’aide par le travail ainsi que les foyers et foyers-logements sont à la charge : 1o A titre principal, de l’intéressé lui-même sans toutefois que la contribution qui lui est réclamée puisse faire descendre ses ressources au-dessous d’un minimum fixé par décret et par référence à l’allocation aux handicapés adultes, différent selon qu’il travaille ou non, majoré, le cas échéant, du montant des rentes viagères visées à l’article 8 de la loi no 69-1161 du 24 décembre 1969 portant loi de finances pour 1970 (...) » ; que l’article 8 de la loi du 24 décembre 1969, ultérieurement modifié par l’article 3 de la loi du 29 décembre 1983 portant loi de finances pour 1984 qui a substitué au régime de déduction du revenu imposable celui de la réduction d’impôt, désormais codifié aux premier alinéa et 2o de l’article 199 septies du code général des impôts, visait les rentes viagères versées à un enfant de l’assuré « atteint d’un infirmité qui l’empêche, soit de se livrer dans des conditions normales de rentabilité à une activité professionnelle d’un niveau normal » ; qu’il résulte de ces dispositions que les rentes viagères dont le montant vient majorer le minimum des ressources laissées à la disposition de la personne handicapée qui séjourne dans un établissement de rééducation professionnelle et d’aide par le travail ou dans un foyer ou foyer-logement, sont celles qui sont versées aux enfants répondant à la définition donnée à l’article 8 de la loi du 24 décembre 1969 indépendamment du caractère facultatif ou obligatoire du contrat d’assurance en cas de décès garantissant le versement de la rente viagère ainsi que du régime fiscal applicable aux primes afférentes à ce contrat ; que, par suite, en décidant que les contrats de prévoyance à adhésion obligatoire, dont les cotisations ne donnent pas lieu à la réduction d’impôts prévue au 2o de l’article 199 septies du code général des impôts, n’entraient pas dans le champ des dispositions de l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale précitées, la commission centrale d’aide sociale a commis une erreur de droit ; que, donc sa décision en date du 28 mai 2003 doit être annulée ;
    Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, par application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ;
    Sur l’appel formé par M. V... assisté de son curateur :
    Considérant que la commission départementale d’aide sociale de l’Allier, dans sa décision en date du 12 juin 2001, a jugé que la demande présentée par M. V... et son curateur n’était pas recevable au motif qu’elle n’avait pas été signée par l’intéressé, sans avoir au préalable invité ce dernier à régulariser la demande ; qu’ainsi, sa décision doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et statuer sur la demande présentée par M. V... et son curateur devant la commission départementale d’aide sociale de l’Allier ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que la rente viagère d’orphelin servie à M. V... par la Caisse nationale de retraite et la Caisse nationale de prévoyance des ouvriers du bâtiment entre dans le champ des dispositions de l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale précitées et doit, ainsi, être exclue des ressources à prendre en compte pour la détermination de la participation de l’intéressé aux frais de séjour et d’entretien au foyer des Alouettes à Avernes pendant la période du 19 mai 1998 au 17 mai 2003 ; que, par suite, la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Moulins du 21 septembre 2000 doit être annulée en tant qu’elle inclut cette rente viagère dans les ressources dont elle prescrit que 90 % devront être versés au département de l’Allier ;
    Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
    Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du département de l’Allier la somme de 2 500 euros que M. V... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’en revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. V..., qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme, d’ailleurs non chiffrée, au titre des frais exposés par le département de l’Allier et non compris dans les dépens ;

Décide

    Art.  1er.  -  La décision de la commission centrale d’aide sociale en date du 28 mai 2003 est annulée.
    Art.  2.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Allier en date du 12 juin 2001 est annulée.
    Art.  3.  -  La décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Moulins du 21 septembre 2000 est annulée en tant qu’elle inclut dans les ressources à prendre en compte pour la détermination de la participation de M. V... aux frais de séjour et d’entretien au foyer des Alouettes à Avernes pendant la période du 19 mai 1998 au 17 mai 2003 la rente d’orphelin servie à l’intéressé par la Caisse nationale de retraite et la Caisse nationale de prévoyance des ouvriers du bâtiment (CNRO-CNPO).
    Art.  4.  -  Le département de l’Allier versera à M. V... une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
    Art.  5.  -  Les conclusions présentées par le département de l’Allier au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
    Art.  6.  -  La présente décision sera notifiée à M. Patrick V..., à M. Daniel D..., au département de l’Allier et au ministre de la santé et des solidarités.