Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Succession - Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP)
 

Conseil d’Etat statuant au contentieux
Dossier no 266216

Mlle Christine M..., M. Marc M...
Séance du 26 mai 2005

Lecture du 27 juin 2005

    Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 4 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour Mlle Christine M... et M. Marc M... ; Mlle Christine M... et M. Marc M... demandent au Conseil d’Etat :
    1o D’annuler la décision du 23 décembre 2003 de la commission centrale d’aide sociale rejetant leur requête tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne du 7 mars 2001, confirmant la décision de la commission d’admission de Boissy-Saint-Léger du 12 mai 2000, de récupérer sur les requérants les sommes reçues au titre de l’aide sociale par Mme Suzanne M..., leur grand-mère ;
    2o De mettre à la charge du département du Val-de-Marne la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code civil ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la loi no 75-534 du 30 juin 1975, notamment ses articles 39 et 43 ;
    Vu le décret no 61-495 du 15 mai 1961, notamment son article 4-1 ;
    Vu le code de justice administrative ;
    Après avoir entendu en audience publique :
    -  le rapport de M. Michel Delpech, chargé des fonctions de maître des requêtes ;
    -  les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de Mlle Christine M... et de M. Marc M... ;
    -  les conclusions de M. Christophe Devys, commissaire du Gouvernement ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :
    Considérant que l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, repris en partie par l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles, prévoit que les recours sont exercés par le département à l’encontre notamment de la succession de la personne qui a bénéficié de l’aide sociale ; que le II de l’article 39 de la loi du 30 juin 1975, repris à l’article L. 245-6 du code de l’action sociale et des familles, énonce toutefois qu’ « il n’est exercé aucun recours en récupération de l’allocation compensatrice à l’encontre de la succession du bénéficiaire décédé lorsque ses héritiers sont son conjoint, ses enfants ou la personne qui a assuré de façon effective et constante la charge du handicapé » ; que la même dérogation est applicable aux recours en récupération de l’aide ménagère aux personnes handicapées en vertu des dispositions du II de l’article 43 de la même loi, reprises à l’article L. 2414 du même code ; que, pour l’application de ces dispositions, les enfants du bénéficiaire décédé s’entendent de ses descendants en ligne directe appelés à la succession, soit de leur propre chef, soit par représentation d’un enfant du défunt mort avant lui conformément aux règles tracées par les article 739 et suivants du code civil ; que, dès lors, en estimant que ces dispositions ne permettent d’exonérer les petits-enfants de la récupération que dans le cas où il existe plusieurs souches successorales la commission centrale d’aide sociale qui, au surplus, a fondé sa décision sur les seules dispositions applicables à l’allocation compensatrice, alors qu’il ressort du dossier qui lui était soumis que le litige portait sur la récupération de trois prestations distinctes - a commis une erreur de droit ; que sa décision du 23 décembre 2003 doit, en conséquence, être annulée ;
    Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au fond en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en ce qui concerne la récupération des sommes versées à Mme Suzanne M..., grand-mère des requérants, au titre de l’allocation compensatrice et de l’aide ménagère aux personnes handicapées, le département du Val-de-Marne ne pouvait exercer aucune action en récupération à leur encontre, dès lors qu’ils venaient à la succession en représentation de leur père prédécédé ;
    Considérant, en revanche, qu’aucune disposition applicable à l’aide ménagère aux personnes âgées ne fait obstacle à ce que le département procède à la récupération des sommes qu’il avait versées à ce titre à Mme Suzanne M..., dans les limites alors fixées par l’article 4-1 du décret du 15 mai 1961, aux termes duquel « Le recouvrement sur la succession du bénéficiaire, prévu à l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, (...) s’exerce sur la partie de l’actif net successoral défini par les règles de droit commun qui excède 300 000 F. Seules les dépenses supérieures à 5 000 F, et pour la part excédant ce montant, peuvent donner lieu à ce recouvrement » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que la créance détenue par le département à ce titre s’élevait à 10 087,14 F (1 537,77 euros) ; que, par suite, un droit à récupération peut s’exercer à concurrence de 776,00 euros ; que les requérants, qui ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions applicables à d’autres prestations, ne font état d’aucune situation particulière de nature à justifier qu’ils soient dispensés du versement des sommes dues par eux à ce titre ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mlle Christine M... et M. Marc M... sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par sa décision du 7 mars 2001, la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne a rejeté leur demande dirigée contre la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Boissy-Saint-Léger, en tant qu’elle portait sur la récupération des prestations versées à Mme Suzanne M... au titre de l’allocation compensatrice et de l’aide ménagère aux personnes handicapées ;
    Considérant, enfin, qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions des requérants tendant à ce que le versement d’une somme de 2 500 euros soit mis à la charge du département du Val-de-Marne au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission centrale d’aide sociale en date du 23 décembre 2003 est annulée.
    Art. 2.  -  La récupération, au titre de l’aide ménagère aux personnes âgées, sur la succession de Mme Suzanne M... est fixée à 776 euros.
    Art. 3.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne en date du 7 mars 2001 et la décision de la commission d’admission de Boissy-Saint-Léger du 12 mai 2000 sont réformées en ce qu’elles ont de contraire à la présente décision.
    Art. 4.  -  Le département du Val-de-Marne versera à Mlle Christine M... et à M. Marc M... la somme globale de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
    Art. 5.  -  La présente décision sera notifiée à Mlle Christine M..., à M. Marc M..., au département du Val-de-Marne et au ministre de la santé et des solidarités.