Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2400
 
  OBLIGATION ALIMENTAIRE  
 

Mots clés : Personnes âgées - Placement - Obligation alimentaire
 

Dossier no 001006

M. C...
Séance du 16 décembre 2004

Décision lue en séance publique le 16 mars 2005

    Vu la requête enregistrée le 31 mai 2000, au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale présentée par M. Alain C... ; M. Alain C..., demande à la commission centrale d’aide sociale : 1o d’annuler la décision du 28 mars 2000, par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Nord a confirmé la décision du 11 octobre 1999, de la commission d’admission à l’aide sociale de Tourcoing Nord-Est refusant à son père, M. Louis C..., le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de ses frais de placement à la maison de retraite de Roncq (Nord) au motif que ses ressources personnelles augmentées des possibilités contributives des débiteurs d’aliments permettaient de couvrir ses frais de séjour ; 2o d’admettre M. Louis C... à l’aide sociale aux personnes âgées ; le requérant fait valoir que sa situation financière ne lui permet pas de contribuer aux frais d’hébergement dans la mesure appréciée par la commission départementale ; que le calcul de sa capacité contributive s’est fait à partir de données fiscales erronées intégrant des revenus exceptionnels (indemnisation de frais de mutation et de doubles résidence et prime exceptionnelle de mutation à Paris) ; que l’administration fiscale a rectifié en 1999 l’imposition de ses revenus ; qu’il n’a jamais obtenu le barème de calcul de l’obligation alimentaire de la commission départementale d’aide sociale du Nord ; que la décision de la commission n’est pas suffisamment motivée ; que son père reste titulaire d’une somme indivise et indéterminée bloquée à la caisse des dépôts et consignation ; que l’organisme tutélaire s’est abstenu de recouvrir une créance de 79 000 F au profit de son père ;
    Vu la requête enregistrée le 4 avril 2000 au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale présentée par l’association pour la gestion des services sociaux pour M. Louis C... ; l’association pour la gestion des services sociaux demande à la commission centrale d’aide sociale : 1o d’annuler la décision du 28 mars 2000 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Nord a confirmé la décision du 11 octobre 1999, de la commission d’admission à l’aide sociale de Tourcoing Nord-Est refusant à M. Louis C..., le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de ses frais de placement à la maison de retraite « La colombe » de Roncq (Nord) au motif que ses ressources personnelles augmentées des possibilités contributives de ses débiteurs d’aliments permettaient de couvrir ses frais de séjour ; 2o d’admettre M. Louis C... à l’aide sociale aux personnes âgées ; l’association fait valoir que la situation financière de M. Louis C... ne lui permet pas de contribuer à la totalité de ses frais d’hébergement dans la mesure appréciée par la commission départementale ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les observations présentées le 9 octobre 2000, par le président du conseil général du Nord qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que le recours de l’association tutélaire ne contient aucun moyen ; que l’argumentation développée par M. Alain C..., devant la commission départementale demandant au président du conseil général du Nord, en sa qualité de créancier, de faire appréhender la créance de son père auprès de l’office ministériel est inopérante dès lors que la décision attaquée refuse l’admission à l’aide sociale et que par conséquent le département du Nord ne peut être considéré comme créancier ; que la prise en compte des revenus exceptionnels et des charges foncières de M. Alain C... peut être évaluée à 6 000 F par mois environ ; que cette somme ajoutée aux ressources de M. Louis C... sont suffisantes pour couvrir ses frais d’hébergement qui s’élèvent à 8 258 F par mois ;
    Vu le mémoire complémentaire, présenté le 15 novembre 2000, par M. Alain C..., qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que l’appréciation des ressources de son père doit tenir compte de la carence de l’association pour la gestion des services sociaux, organisme tutélaire de M. Louis C..., qui l’empêche de récupérer sa part en pleine propriété sur la vente de son bien indivis, part qui pourrait être appréhendée en garantie de la créance ;
    Vu les observations complémentaires, enregistrées le 9 avril 2001, présentées par le président du conseil général du Nord, qui informe la commission du décès de M. Louis C... le 13 janvier 2001 ;
    Vu le nouveau mémoire, présenté le 12 novembre 2003, par M. Alain C..., qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il fait valoir en outre qu’il est seul à être mis à contribution alors que son frère a quatre enfants solvables ; qu’aucune évaluation n’a été faite quant à leur capacité contributive ; que l’organisme tutélaire avait seul la possibilité de reconstituer l’intégralité de l’actif de son père afin de l’épuiser ; qu’en vertu de la règle « aliments ne s’arrérageant pas », seul le juge judiciaire pouvait et devait être saisi pour fixer la dette alimentaire au titre des articles 205 et suivants du code civil ; qu’ainsi, il n’a plus à ce jour la qualité de débiteur d’aliments ; que la succession de son père est en déshérence ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code civil ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale, ensemble le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le décret no 54-883 du 2 septembre 1954 modifié ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 16 décembre 2004, Mme Marion, rapporteure, et en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que les requêtes susvisées sont connexes et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que, par une décision en date du 11 octobre 1999, la commission d’admission à l’aide sociale de Tourcoing Nord-Est (Nord) a rejeté la demande de prise en charge par l’aide sociale aux personnes âgées des frais de placement de M. Louis C... à la maison de retraite « La Colombe » de Roncq (Nord) au motif que ses ressources personnelles augmentées des possibilités contributives de ses débiteurs d’aliments permettaient de couvrir ses frais de séjour ; que, par une décision du 28 mars 2000, la commission départementale d’aide sociale du Nord a confirmé cette décision ;
    Considérant que la décision attaquée est suffisamment motivée ;
    Considérant que la règle « aliments ne s’arrérageant point » est seulement fondée sur la présomption selon laquelle le créancier qui ne réclame pas les termes échus de sa pension est considéré comme étant à l’abri du besoin ; qu’elle n’a ni pour objet, ni pour effet de faire obstacle à ce que la personne subrogée dans les droits du créancier défunt puisse rechercher, dans le délai de cinq ans prévu à l’article 2277 du code civil, les débiteurs d’aliments en paiement des pensions dues à l’intéressé de son vivant ; que, dès lors, M. Alain C... ne saurait invoquer la circonstance que son père est décédé pour demander la décharge des dettes d’aliments éventuellement mises à sa charge du temps du vivant de l’intéressé ; qu’au demeurant, la seule juridiction compétente pour trancher un tel litige est, en toute hypothèse, le juge aux affaires familiales ; que la dette que chacun des obligés alimentaires est en mesure de supporter ou condamné à assumer ne constitue, pour les juridictions spécialisées de l’aide sociale, qu’un élément de calcul en vue de fixer la contribution d’ensemble de ceux-ci ;
    Considérant, que, aux termes de l’article 141 du code de la famille et de l’aide sociale, alors en vigueur « il sera tenu compte, pour l’appréciation des revenus des postulants à l’aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu qui sera évaluée dans les conditions fixées par règlement d’administration publique » ; qu’aux termes de l’article 1er du décret du 2 septembre 1954 : « Sous réserve des dispositions prévues à l’article 41 relatives à l’aide médicale, pour l’évaluation des ressources des postulants, les biens non productifs de revenus à l’exclusion des meubles d’usage couran, sont considérés comme procurant un revenu égal à la rente viagère que servirait la Caisse nationale d’assurances sur la vie contre le versement à capital aliéné, à la date d’admission à l’aide sociale de l’intéressé, d’une somme représentant la valeur de ces biens » ;
    Considérant qu’il résulte de ces dispositions que seuls les revenus du capital détenu par un postulant à l’aide sociale peuvent être pris en compte pour l’évaluation des ressources de ce dernier, soit pour leur montant réel, soit, lorsque ce capital n’est pas productif de revenu, pour un montant fictif calculé selon les modalités définies par les dispositions de l’article 1er du décret du 2 septembre 1954 précité ; qu’ainsi le moyen tiré de ce que M. Louis C..., disposerait d’une somme de 192 000 F bloquée à la caisse des dépôts et consignation, pouvant être utilisée pour couvrir ses frais d’hébergement mais que sa tutelle se serait abstenue d’appréhender est inopérant dès lors que ce capital ne pouvait, en tout état de cause, être pris en compte en tant que tel par la commission départementale d’aide sociale pour l’évaluation des ressources de l’intéressé ;
    Considérant, en outre, qu’aux termes de l’article L. 132-6 du code de l’action sociale et des familles, ancien article 144 du code de la famille et de l’aide sociale : « Les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais ; la commission d’admission fixe, en tenant compte du montant de leur participation éventuelle, la proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques. La décision de la commission peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission. La décision de la commission fait également l’objet d’une révision lorsque les débiteurs d’aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu’elle avait prévus » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que si les ressources de M. Louis C... ne lui permettaient pas de prendre en charge l’intégralité de ses frais d’hébergement à la maison de retraite « La Colombe » de Roncq (Nord), l’aide que celui-ci est en droit d’attendre de l’ensemble de ses obligés alimentaires est suffisante pour couvrir lesdits frais ; qu’ainsi, les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que la commission départementale a refusé à son père le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées ;
    Considérant qu’il n’appartient pas aux juridictions d’aide sociale de répartir entre les personnes tenues à l’obligation alimentaire la participation qui leur incombe ; qu’il appartient aux requérants, en cas de désaccord entre les débiteurs d’aliments de saisir le juge aux affaires familiales afin qu’il fixe les obligations de chacun d’entre eux en fonction de leurs possibilités contributives ;

Décide

    Art. 1er.  -  Les requêtes de M. Alain C... et de l’association pour la gestion des services sociaux sont rejetées.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale à l’issue de la séance publique du 16 décembre 2004 où siégeaient M. Pierre Marette, président, M. Jacques Brossat, assesseur, et Mme Laurence Marion, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 16 mars 2005.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer