Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2220
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Domicile de secours - Collectivité débitrice de l’aide sociale
 

Dossier no 032232

M. M...
Séance du 31 janvier 2005

Décision lue en séance publique le 4 février 2005

    Vu et enregistré par le secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, le 19 septembre 2003, le recours par lequel le président du conseil général d’Indre-et-Loire demande au juge de l’aide sociale de fixer dans le département de Loire-Atlantique le domicile de secours de M. Eric M..., par le moyen que ce dernier réside dans un « logement accompagné », géré par l’association pour la réinsertion des traumatisés crâniens atlantiques (ARTA), situé à Nantes, et insusceptible d’être qualifié d’établissement au sens de l’article L. 132-1 du code de l’action sociale et des familles, depuis le 1er octobre 2001 ;
    Vu la décision de prise en charge « à titre conservatoire » par le département d’Indre-et-Loire des frais d’hébergement de M. Eric M... adoptée par la commission d’admission à l’aide sociale de Tours, du 8 septembre 2003 ;
    Vu et enregistré comme ci-dessus, le 28 octobre 2004, le mémoire en réponse du président du conseil général de Loire-Atlantique tendant au rejet des conclusions du recours susvisé par les motifs que le service d’accompagnement à la vie sociale annexé au centre d’aide par le travail ou l’intéressé est admis comprend une section de « logements accompagnés » offrant un hébergement encadré sur le plan éducatif et pédagogique de nature à favoriser leur autonomie, notamment au travers des modalités de paiement de leurs frais de loyer et d’entretien, que cette formule innovante est prévue par l’article 23 bis du règlement départemental d’aide sociale et repose désormais sur un fondement légal depuis l’entrée en vigueur de la rédaction de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles issue de la loi du 2 janvier 2002 portant rénovation de l’action sociale et médico-sociale, et qu’enfin cette structure n’est pas acquisitive du domicile de secours à l’instar d’un établissement classique ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 21 septembre 2004, invitant les parties à l’instance à se présenter à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 31 janvier 2005, M. Goussot, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens de la requête :
    Considérant que M. Eric M..., ancien pupille de l’Etat né le 11 janvier 1957, avait acquis à sa majorité un domicile de secours dans le département d’Indre-et-Loire au service d’aide sociale à l’enfance duquel il avait été confié ; qu’il l’a conservé par la suite en raison d’un placement familial à Marigny-Marmande, d’une hospitalisation à Chinon et d’un accueil au foyer occupationnel de Vendôme, jusqu’au 30 septembre 2001 ; qu’à compter du 1er octobre 2001, il a été admis en Loire-Atlantique dans l’un des dix-sept « logements accompagnés » du service d’accompagnement à la vie sociale de l’ARTA, créé le 6 juin 2000 et habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale à partir du 1er avril 2001, conformément aux arrêtés des 6 juin 2000 et 27 mars 2001 du président du conseil général de Loire-Atlantique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 344-4 du code de l’action sociale et des familles « les frais d’hébergement et d’entretien des personnes handicapées....dans les foyers et les foyers logements sont à la charge.... de l’aide sociale » légale ; que celle-ci n’intervient ainsi que pour prendre en charge de tels frais dans des foyers en internat ou semi-internat, qui sont des établissements et non des services ; qu’une telle prise en charge comporte nécessairement le financement de dépenses d’hébergement et/ou d’entretien ; que la prise en charge de l’accompagnement du suivi et du soutien pour un assisté dont l’aide sociale ne prend en charge ni l’hébergement ni l’entretien relève, avant comme après l’entrée en vigueur de la loi du 2 janvier 2002 qui en modifiant le 7o de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles en y ajoutant les services n’a par elle-même pas modifié les règles d’intervention, en l’absence de modification des textes régissant celle-ci, de l’aide sociale facultative ; qu’au demeurant l’inclusion des services au nombre des structures soumises à autorisation ne date pas, comme paraît le croire le président du conseil général de la Loire-Atlantique, de cette entrée en vigueur, mais était prévue antérieurement par le 12e alinéa de l’article 3 de la loi du 30 juin 1975 issu de l’article 3 de la loi du 6 janvier 1986, pour peu qu’un décret en Conseil d’Etat eut inclus les services favorisant le maintien à domicile au nombre de ceux soumis à autorisation ;
    Considérant qu’aux termes de l’arrêté du président du conseil général de Loire-Atlantique du 27 mai 2001, toujours en vigueur « l’ARTA est habilitée à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale dans le cadre de son service d’accompagnement à la vie sociale (...) 17 places de logements accompagnés » ; que si l’article 1er de la convention passée entre le département de Loire-Atlantique et l’ARTA le 22 mai 2001, qualifie ces logements d’« établissements », l’article 8 dispose que « les personnes prises en charge par le service supportent la totalité des dépenses de la vie quotidienne (nourriture...loyer et charges afférentes, loisirs, taxe d’habitation, chauffage, équipements mobiliers.....etc) ; que l’article 4 dispose que « la commission d’admission à l’aide sociale décide de la prise en charge de la participation de la personne handicapée à ses frais d’hébergement cette contribution qui a pour seul objectif de couvrir tout ou partie des frais d’accompagnement de la personne handicapée est fixée (...) de telle sorte que la personne handicapée puisse conserver au moins le minimum de revenu fixé en application... de l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale ; qu’il résulte d’une telle rédaction que nonobstant l’emploi du terme « hébergement » la participation de la personne handicapée comme celle, en tout état de cause, de l’aide sociale n’en concernent pas moins exclusivement les frais « d’accompagnement » par un « service » ;
    Considérant que la structure « logements accompagnés » relève ainsi, quelle que puisse être pour le surplus la différence de la prise en charge quant au nombre de jeunes résidant dans un logement et l’intensité de l’intervention du service avec celle du « service d’accompagnement à la vie sociale »,de la catégorie des « services » et non de celle des « établissements » ; que l’intervention du département de Loire-Atlantique et éventuellement d’autres départements - s’y effectue dès lors au titre des prestations d’aide sociale facultative crées, ou financées de leur propre initiative par les collectivités d’aide sociale ;
    Considérant que si en règle générale échappent à la compétence de la juridiction spécialisée d’attribution de l’aide sociale les litiges relatifs à l’aide sociale facultative et notamment ceux concernant l’imputation financière des dépenses de la sorte, il ne peut en aller ainsi, en tout état de cause, dans le cadre de l’aide sociale à la prise en charge résidentielle et extra-résidentielle des adultes handicapés compte tenu de l’étroite imbrication des modes d’intervention de l’aide sociale en ce qui les concerne et de la diversité des formes d’intervention dans le cadre d’un même litige soumis au juge, formes relevant tantôt de l’aide sociale légale et tantôt de l’aide sociale facultative ; que d’ailleurs alors que la présente juridiction a affirmé et réaffirmé sa compétence en cette matière depuis environ cinq ans cette position n’a à ce jour fait l’objet d’aucune contestation par une collectivité d’aide sociale devant le juge de cassation ;
    Considérant que les dispositions législatives relatives à la détermination de l’imputation financière des dépenses pour la fixation d’un domicile de secours ne sont applicables selon les articles L. 122-1 et L. 121-1 du code de l’action sociale et des familles qu’aux prestations « légales » d’aide sociale ; qu’en l’état de la rédaction susrappelée de l’article L. 344-4 du code de l’action sociale et des familles tel n’est pas le cas de la prise en charge des dépenses d’un service, le texte ne concernant que les frais « d’hébergement » et/ou « d’entretien » ;
    Considérant qu’en l’absence de dispositions législatives en disposant autrement les départements ne sauraient, dans le cadre du règlement départemental d’aide sociale ou d’une convention à valeur réglementaire passée avec les gestionnaires des structures relevant de l’aide sociale facultative, limiter l’admission à ces structures aux seules personnes ayant un domicile de secours dans le département sans méconnaître le principe d’égalité devant le service public ; que tel n’est d’ailleurs pas le cas de la convention applicable en l’espèce passée entre le président du conseil général du département de Loire-Atlantique et l’ARTA ;
    Considérant par contre qu’en l’absence de toute convention entre départements ou d’accord d’un département autre que le département d’implantation de la structure conventionnée financée par l’aide sociale facultative prévue par le règlement départemental d’aide sociale et/ou une convention avec un gestionnaire émanée de ce dernier département ; les dispositions de la convention passée entre le département d’implantation et le gestionnaire prévoyant l’imputation de la charge aux départements du domicile de secours ne sauraient s’imposer aux départements tiers ;
    Considérant au demeurant et en tout état de cause qu’à supposer même qu’il eut été loisible à la convention passée entre le département de Loire-Atlantique et l’ARTA d’imputer sans leur accord à des départements tiers domiciles de secours des assistés la charge des frais, ce qui n’est certes pas contesté par le président du conseil général de l’Indre-et-Loire mais qui, comme il a été dit, n’est pas possible, il résulte, en tout état de cause, des faits ci-dessus rappelés que M. Eric M... est arrivé en Loire-Atlantique le 1er octobre 2001, pour y être pris en charge non par un établissement social comportant hébergement mais par un service intervenant comme tel et non comme un établissement d’hébergement ; que cette situation est d’ailleurs conforme aux dispositions de l’annexe XXIII bis du règlement départemental d’aide sociale de Loire-Atlantique quelles que puissent être leur précision et leur rigueur sémantique ; qu’ainsi les logements accompagnés ne sont pas des « établissements sociaux » au sens de l’article L. 122-3 du code de l’action sociale et des familles dans lesquels le séjour est sans effet sur l’acquisition d’un domicile de secours ; qu’arrivé le 1er octobre 2001 en Loire-Atlantique pour être pris en charge dans un logement accompagné géré par l’ARTA M. Eric M... a ainsi acquis le 1er janvier 2002, son domicile de secours en Loire-Atlantique ; qu’ainsi à supposer même que ce mode d’intervention eût été opposable au département d’Indre-et-Loire (qui se borne à se prévaloir d’une décision de la présente juridiction antérieure à celle du 31 octobre 2002, Drôme Vaucluse CJAS 03/3 27 dans laquelle elle a fixé sa position jurisprudentielle actuelle) les frais litigieux seraient également à la charge du département de la Loire-Atlantique ;
    Considérant sans doute comme le relève le président du conseil général de la Loire-Atlantique que cette situation est contre-incitative au financement de la création par les départements d’implantation de structures dites « innovantes » et en tout cas différentes des foyers d’hébergement « traditionnels » seuls pris en compte, alors, par la loi du 30 juin 1975 et les décrets du 31 décembre 1977 ; que, toutefois, la présente juridiction applique les textes en vigueur et appelle depuis cinq ans l’attention des différents responsables et des pouvoirs publics sur l’inadaptation des dispositions en vigueur édictées il y a trente ans à l’évolution des formes de prise en charge des adultes handicapés depuis une vingtaine et à tout le moins une quinzaine d’années ; qu’elle se borne à cet égard à renvoyer le président du conseil général de Loire-Atlantique à la motivation de sa décision susrappelée du 31 octobre 2002 à laquelle elle n’a rien à ajouter ou à retrancher, aucune disposition de la loi modifiant la loi du 30 juin 1975 n’ayant entendu prendre en compte la situation générale à nouveau illustrée dans la présente instance pour y remédier alors que le juge ne saurait se substituer pour ce faire au législateur voire au pouvoir réglementaire ;

Décide

    Art. 1er.  -  Le domicile de secours de M. Eric M... est fixé dans le département de Loire-Atlantique auquel incombent les dépenses d’aide sociale exposées en faveur de l’intéressé depuis le 1er janvier 2002.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 31 janvier 2005, où siégeaient M. Lévy, président, Mme Kornmann, assesseur, M. Goussot, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 4 février 2005.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la protection sociale, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer