Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Recours en récupération - Donation - Assurance vie - Modération - Personnes handicapées |
Dossier no 022426
Mme R...
Séance du 30 avril 2004
Décision lue en séance publique le 2 juin 2004
Vu enregistré le 11 septembre 2002, la requête de la société davocats G..., R..., P..., P... représentant Mme Maryse R... épouse R..., M. Régis R... et M. Jacques R..., tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale dannuler une décision de la commission départementale daide sociale de lOise du 4 juin 2002, confirmant la décision de la commission dadmission à laide sociale de Nivillers du 20 avril 2000, de récupération du capital provenant du contrat assurance vie auprès de ses bénéficiaires aux motifs que les décisions de la commission départementale daide sociale doivent être intégralement communiquées de telle sorte que les motifs apparaissent clairement ; que tel nest pas le cas en lespèce ; que la décision de la commission départementale daide sociale nest aucunement motivée puisquelle est rédigée en ces termes : « Maintien de la décision du 20 avril 2000 » ; quen outre, aux termes de larticle 146 du code de la famille et de laide sociale, le recouvrement sur la succession du bénéficiaire sexerce sur la partie de lactif net successoral défini par les règles de droit commun ; quen lespèce, lassurance vie contractée par feue Mme Odette R... au profit de ses quatre enfants ne constitue pas une donation qui doit être rapportée à lactif de la succession ; que la question est résolue par larticle L. 132-13 du code des assurances qui dispose : « Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles (...). Ces règles ne sappliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci naient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés » ; quen conséquence on peut considérer que lassurance sur la vie souscrite par Mme Odette R... au profit des consorts R... ne leur est pas acquise au titre successoral de sorte que la commission dadmission à laide sociale de Nivillers ne peut décider de récupérer les prestations daide sociale servies à Mme R..... auprès des bénéficiaires des contrats dassurance vie ; quà titre subsidiaire, les consorts Rabbe entendent préciser quils sétonnent que Mme Odette R... ait pu être admise au bénéficiaire de ces prestations compte tenu de ses revenus et de sa situation patrimoniale ; que de 1994 à 1999 le service départemental daide sociale aurait réglé à Mme Odette R... une somme de 198 293,47 francs ; que ces prestations lui auraient été versées au vu des justificatifs de ressources et de charges communiquées par Mme R... ; que dune part Mme R... percevait une pension de réversion de son époux et dautre part quelle était hébergée chez sa fille Aline R... épouse M... de sorte que ses frais étaient très limités ; quà aucun moment les consorts R... nont été informés de la demande de leur mère et ce alors même quils étaient tenus à obligation alimentaire dont ils auraient pu sacquitter si nécessaire ; que les articles 3 et 4 de larrêté du 19 juillet 1961 prévoient les dispositions permettant de tenir compte des débiteurs daliments et de leurs revenus ; que manifestement ces documents nont pas été réclamés par le bureau daide sociale ou nont pas été examinés avec lattention suffisante ; que cette faute, à lorigine des paiements indus de lallocation justifie que lesdits ayants droit soient déchargés de toute éventuelle obligation de restitution ;
M. le président du conseil général de lOise na pas fourni de mémoire en défense ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code civil ;
Vu le code des assurances ;
Vu la lettre du 12 janvier 2004, convoquant les parties à laudience de la commission centrale daide sociale ;
Après avoir entendu à laudience publique du 30 avril 2004, Melle Erdmann, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que la commission départementale daide sociale na pas répondu au moyen tiré de linsuffisante motivation de la décision de la commission dadmission à laide sociale de Nivillers du 20 avril 2000 ; quelle na dailleurs pas motivé sa décision ; que le premier juge ne pouvait se borner à justifier en droit la possibilité dune récupération, mais devait préciser pourquoi les critères quil retenait étaient susceptibles dapplication en fait à lespèce dont il était saisi ;
Considérant quil résulte de ce qui précède que la décision attaquée doit être annulée et quil y a lieu dévoquer la demande ;
Considérant que la décision susrappelée de la commission dadmission à laide sociale qui inflige une sujétion au sein de larticle 1er de la loi du 11 juillet 1979 est insuffisamment motivée ; quelle doit pour ce motif être annulée ;
Considérant que le défaut dinformation de lassisté au moment dune demande daide sociale sur léventualité dune récupération nentache pas la légalité et le bien-fondé dune telle mesure ;
Considérant que la circonstance alléguée que le capital versé nest pas acquis au bénéficiaire « à titre successoral » est sans incidence sur la légalité, et le bien-fondé du recours de lespèce, qui est un recours contre le donataire ;
Considérant que la requête fait valoir que les revenus de Mme Odette R... en ce comprises ses créances alimentaires, rendaient indu le paiement de lallocation ; quen tout état de cause lallocation compensatrice pour tierce personne est attribuée en fonction du revenu net fiscal du demandeur et quil nest ni établi ni même allégué que celui-ci ne fut pas de nature à justifier son octroi ; quau surplus et dabord le moyen est inopérant des lors que les prestations ont bien été versées ; quil résulte de ce qui précède que les consorts Rabbe navaient nullement à être informés, comme ils le soutiennent, en qualité dobligés alimentaires ; quil nappartient pas au juge de laide sociale de statuer sur la prétendue faute de ladministration à avoir admis Mme R... au bénéfice de lallocation ;
Considérant quen admettant, que toute souscription dun contrat dassurance vie ne constitue pas au profit du bénéficiaire une donation indirecte susceptible dêtre appréhendée par laide sociale sur le fondement de larticle 146 b du code de la famille et de laide sociale alors applicable à hauteur du montant des primes, du seul fait de lappauvrissement du stipulant à ladite hauteur au profit du bénéficiaire acceptant, sans contrepartie de celui-ci, un tel contrat ne peut être qualifié en donation que si ladministration de laide sociale établit lintention libérale du souscripteur au moment de la souscription du contrat alors requalifiable en donation entre vifs, alors même que lacceptation du bénéficiaire serait réalisée en fait, mais en rétroagissant à la date de le signature du contrat, quau moment où le promettant lui a versé les sommes dues en application du contrat après le décès du stipulant ;
Considérant que la preuve de lintention libérale doit être rapportée alors même que le contrat peut être qualifié non comme une donation déguisée mais comme une donation indirecte ;
Considérant quaux termes de larticle 894 du code civil « La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui laccepte » ; quaux termes de larticle 312614 du code des assurances « Le capital ou la rente garantie au profit dun bénéficiaire déterminé ne peuvent être réclamés par les créanciers du contractant ces derniers ont seulement droit au remboursement des primes dans le cas indiqué par larticle L. 132613, 2o alinéa, selon lequel les règles relatives au rapport à la succession ou à la réduction pour atteinte à la réserve héréditaire « Ne sappliquent pas (...) aux sommes versées par le contractant à titre de primes à moins quelles naient été manifestement exagérées au regard de ses facultés » ; que compte tenu de ces dispositions, un contrat dassurance vie ne peut être qualifié par le juge daide sociale en donation que lorsquau regard de lensemble des circonstances de la souscription du contrat, le stipulant sy dépouille au profit du bénéficiaire de manière actuelle et, nonobstant la possibilité de résiliation du contrat, non aléatoire, lintention libérale doit être regardée comme établie et la stipulation par autrui peut être qualifiée en donation indirecte, sous réserve, en cas de difficulté sérieuse de question préjudicielle à lautorité judiciaire ;
Considérant que nonobstant labsence de tout mémoire en cours dinstances de 1er degré et dappel du conseil général et même en létat informe du dossier transmis, il appartient au juge non de sanctionner comme tel le comportement pour le moins désinvolte de ladministration dans lapport de la preuve qui lui incombe, mais de rechercher au vu des éléments du dossier si cette preuve peut être regardée comme en ressortant ; quil résulte clairement en lespèce du dossier dune part que la prime versée par Mme R... en 1994, à 83 ans révolus pour la souscription du contrat dont ses quatre enfants étaient bénéficiaires de second rang sélevait à environ 240 000,00 francs ; dautre part que lors de son décès six ans après, il nexistait pas dactif successoral ; que compte tenu, par ailleurs, de labsence totale dinfirmation de ces éléments de fait par ceux produits par les requérants, ladministration doit être regardée comme apportant la preuve de lintention libérale de la stipulante lors de la souscription du contrat en faveur de ses quatre enfants dont les trois requérants ; que ceux-ci ne sont par suite pas fondés à demander la décharge des sommes récupérées ;
Décide
Art. 1er - La décision de la commission départementale daide sociale de lOise en date du 4 juin 2002, ensemble la décision de la commission cantonale de Nivillers du 20 avril 2000, sont annulées.
Art. 2 - Le surplus des conclusions de la requête présentée par les consorts R... devant la commission départementale daide sociale de lOise est rejeté.
Art. 3 - La présente décision sera transmise au ministre de lemploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre de la santé, et de la protection sociale qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 30 Avril 2004 où siégeaient M. Levy, président, M. Reveneau, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 2 juin 2004.
La République mande et ordonne au ministre de lemploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre de la santé, et de la protection sociale, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pouvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer