Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2220
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Domicile de secours - Compétence - Collectivité débitrice à l’aide sociale
 

Dossier no 022446

PCP75/PCG95
Séance du 27 novembre 2003

Décision lue en séance publique le 23 décembre 2003

    Vu enregistrée le 16 septembre 2002 la requête du président du Conseil de Paris siégeant en formation de conseil général tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale reconnaître la compétence du département du Val-d’Oise pour la prise en charge des frais d’allocation personnalisée d’autonomie de MM. Maurice L..., Jean F..., Ammar S..., Djemai C..., Ramdane B..., par les moyens que l’article L. 232-2, alinéa 2, du code de l’action sociale et des familles, l’article L. 232-12 alinéa 4 du même code et l’article 11 du décret du 20 novembre 2001 conduisent à désigner le Val-d’Oise comme collectivité compétente pour régler les frais d’allocation personnalisée d’autonomie litigieux ; qu’il résulte des termes même de l’article L. 232-2, alinéa 2, qu’une élection de domicile spécifique à l’allocation personnalisée d’autonomie est nécessaire, qu’elle ne semble pas avoir été faite ; que la décision d’admission à l’aide sociale à l’hébergement d’origine a été prononcée par l’instance parisienne dans la mesure où les intéressés étaient sans domicile fixe à Paris sans qu’une quelconque élection de domicile spécifique soit d’ailleurs exigible dans le cadre d’une instruction d’une demande d’aide sociale à l’hébergement ; mais la compétence de l’instance ne résultait nullement d’un domicile de secours à Paris les frais étant imputés à l’Etat ; que les dispositions de l’article L. 232-12, alinéa 4, dérogent aux dispositions générales de l’article L. 121-7 ; les termes mêmes retenus par le législateur renvoient a une compétence départementale de la collectivité dans le ressort de laquelle est situé l’organisme agréé à recevoir des élections de domicile dans le cadre de l’allocation personnalisée d’autonomie ;
    Vu la décision attaquée en date du 24 juillet 2002 du président du conseil général du Val-d’Oise ;
    Vu l’absence de mémoire en défense du président du conseil général du Val-d’Oise ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la loi du 20 juillet 2001 ;
    Vu le décret du 20 novembre 2001 ;
    Vu le décret du 17 décembre 1990 ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 novembre 2003, le rapport de Mlle Erdmann, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’audience publique ;
    En ce qui concerne les prestations dues à MM. Maurice L..., Jean F..., Ammar S..., Ramdane B... ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 232-2 du code de l’action sociale et des familles « Les personnes sans résidence stable doivent pour prétendre au bénéfice de l’allocation personnalisée d’autonomie élire domicile auprès de l’un des organismes mentionnés à l’article L. 232-13 » (2e alinéa) « agréé à cette fin conjointement par le représentant de l’Etat dans le département et le président du conseil général » ; qu’à ceux de l’article L. 232-12 « L’allocation personnalisée d’autonomie est accordée par décision du président du conseil général et servie par le département sur proposition d’une commission (...) l’allocation personnalisée d’autonomie est servie aux personnes sans résidence stable par le département où elles sont domiciliées en application du dernier alinéa de l’article L. 232-2 » ; qu’aux termes de l’article 11 du décret 2001-1055 du 20 novembre 2001 l’agrément prévu au dernier alinéa de l’article L. 232-2 du code de l’action sociale et des familles est accordé sur leur demande aux organismes mentionnés à l’article L. 232-13 du même code pour une durée de trois ans renouvelable. L’agrément précise les modalités d’enregistrement des déclarations d’élection de domicile. Un organisme au moins doit être agréé dans chaque département ;
    Considérant qu’il résulte de ces dispositions rapprochées de celles de l’article 3 de la loi du 24 janvier 1997 selon lesquelles « La prestation spécifique dépendance est servie et gérée par le département où le bénéficiaire possède son domicile de secours (...) en cas d’absence de domicile de secours la prestation est servie et gérée par le département de résidence. Toutefois les dispositions figurant au neuvièmement de l’article 35 de la loi du 22 juillet 1983 (...) sont applicables à la prestation spécifique dépendance » ; que, d’abord, même lorsque l’allocation est à la charge de l’Etat au titre des personnes « sans résidence stable » (notion équivalente à celle de l’article L. 111-3 « Personnes pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé »), elle est servie par le département où la personne est « domiciliée », le département étant en principe intégralement défrayé par l’Etat dans le cadre du fonds de financement de l’allocation personnalisée d’autonomie ; ensuite que le domicile de cette personne est situé dans le département où elle a élu domicile ; enfin que, comme le soutient le département de Paris et contrairement à ce qui a été indiqué au département du Val-d’Oise par la direction générale de l’action sociale, l’élection de domicile dont il s’agit est nécessairement, eu égard notamment aux modalités d’agrément, distinctes de celles applicables tant en matière de revenu minimum d’insertion en vertu de l’article 15 de la loi du 1er décembre 1988 qu’en matière d’aide médicale antérieurement à l’entrée en vigueur de la couverture maladie universelle en vertu de l’article 189-3 du code de la famille et de l’aide sociale alors applicable, distincte des élections souscrites en matière de revenu minimum d’insertion ou d’aide médicale et que la stabilité de la résidence est entendue au moment de la demande ; que la question est alors de savoir si la résidence dans un établissement social au moment de la demande n’est pas de nature à conférer une résidence stable au sens des dispositions précitées à la personne qui dépose une demande d’allocation personnalisée d’autonomie, auquel cas les frais sont à charge du département de résidence ;
    Considérant certes que dans une décision de section du 28 juillet 1989, département des Hauts-de-Seine, le Conseil d’Etat a jugé « qu’il résulte de l’ensemble des dispositions des articles 193 et 194 du code de la famille et de l’aide sociale que le séjour même prolongé dans un établissement sanitaire et social » n’est pas de nature à faire acquérir aux personnes concernées un domicile fixe au sens du 3e alinéa de l’article 194 situé dans cet établissement » ; que cette solution dans sa généralité paraît s’écarter de celle préconisée dans ses conclusions par le commissaire du Gouvernement qui proposait de juger, le litige concernant des pensionnaires de la maison départementale de Nanterre, « qu’un établissement sanitaire et social destiné à titre principal ou accessoire à accueillir des errants ne peut constituer quelle que soit la durée du séjour un domicile fixe au sens de l’article 194 » ;
    Considérant que la présente formation de jugement n’a pas appliqué, tant que le Conseil d’Etat n’aurait pas expressément confirmé sa position de 1989, la position du Conseil d’Etat dans sa décision ; qu’elle considère en effet que dans le cadre de l’ancien article 194 du code de la famille et de l’aide sociale en l’absence de domicile de secours les dépenses exposées par les personnes résidant dans un département au moment de leur demande sont à charge de ce département et non imputées à l’Etat en principe ; que l’imputation au titre de l’absence « de domicile fixe » ou « de résidence stable » ne peut être qu’une imputation subsidiaire si le second critère prélable posé par le code n’est pas satisfait ;
    Considérant à cet égard que s’il est vrai qu’une personne sans domicile fixe qui vient à être admise dans un centre d’hébergement ou dans un autre établissement d’accueil temporaire voir prolongé, spécifiquement destiné aux errants, ne peut être regardée comme acquérant dans cet établissement une résidence, il n’en va pas de même pour une personne même à l’origine dépourvue « de domicile fixe » ou « de résidence stable » qui se trouve, en l’espèce semble-t-il pour le reste de son âge (...), accueillie de manière prolongée stable et régulière dans un établissement social tel une maison de retraite ; que dans ce cas la personne réside bien à la maison de retraite où elle est domiciliée pour ses déclarations fiscales, sociales, où elle reçoit son courrier, où elle a sa ligne de téléphone... et que seules des considérations d’opportunité financière qui n’ont pas lieu d’être prises en compte, compte tenu des termes clairs de la loi du 6 janvier 1986, nonobstant ceux du neuvièmement de l’article 35 de la loi du 22 juillet 1983, justifieraient d’imputer à l’Etat les frais entraînés par la demande d’une nouvelle prestation d’aide sociale après un séjour suffisamment prolongé dans un établissement social ; qu’en effet, l’errant peut devenir sédentaire notamment à la fin de sa vie ; qu’aucune disposition n’exclut clairement dans ce cas la prise en compte financière par le département de résidence des dépenses de prestations d’aide sociale ultérieurement demandées et que la présente formation de jugement considère qu’il n’appartient qu’au législateur d’en décider clairement autrement ;
    Considérant ainsi que s’il est vrai que les cinq assistés dont la prestation est en litige n’ont pu acquérir de domicile de secours dans les maisons de retraite où ils se trouvaient de manière stable et où ils semblent se trouver toujours depuis qu’ils y avaient été admis, ils n’y en ont pas moins acquis une résidence et que dans ces conditions, quoi qu’il en soit de la question de savoir si l’élection de domicile au regard de l’allocation personnalisée d’autonomie doit être nécessairement formalisée dans le département où l’allocation est demandée et si ainsi celle-ci est nécessairement, sous réserve de remboursement par le Fonds, servie par le département du lieu de cette demande, les frais entraînés par le service de l’allocation doivent être en l’espèce imputés au département du Val-d’Oise ;
    En ce qui concerne M. Djemai C...
    Considérant qu’en terme de l’article L. 232-2 du code de l’action sociale et des familles « L’allocation personnalisée d’autonomie (...) est accordée sur sa demande à toute personne attestant d’une résidence stable et régulière » ;
    Considérant que la demande d’aide sociale a été formulée pour M. Djemai C... le 24 mai 2002 par le directeur de la résidence de Sarcelles du centre communal d’action sociale de Paris où M. Djemai C... avait été admis le 12 décembre 2001 comme « sans domicile fixe » mais qui l’avait quittée dès le 11 janvier 2002 manifestant ainsi sa difficulté, fut-ce sur la fin de son âge, à passer de l’état d’errance à l’état de stabilité, du moins de la résidence ; qu’il ressort suffisamment clairement du dossier qu’en l’espèce M. Djemai C... n’a pas été relocalisé ; que la demande d’allocation était manifestement irrecevable et que rien ne permet de présumer qu’elle puisse être régularisée ; qu’il y a lieu, par suite de la demande présentée par le directeur de la résidence de Sarcelles sans mandat de M. Djemai C... et sans qu’il puisse être pourvu à la production dudit mandat au cours d’une éventuelle instruction de la demande par le juge du fond étant déjà irrecevable antérieurement au dépôt de la présente requête, non de prononcer un non lieu sur celle-ci, mais de la rejeter ;

Décide

    Art.  1er.  -  La requête du président du Conseil de Paris statuant en formation de conseil général est rejetée en ce qui concerne M. Djemai C...
    Art.  2.  -  En ce qui concerne MM. Maurice L..., Jean F..., Ammar S..., Ramdane B..., l’allocation personnalisée d’autonomie qui leur est attribuée est servie par le département du Val-d’Oise sans remboursement par l’Etat.
    Art.  3.-  La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 novembre 2003 où siégeaient M. Lévy, président, M. Reveneau, assesseur, et Mlle Erdmann, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 29 décembre 2003.
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer