Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Recours en récupération - Donation |
Dossier no 020312
Mme S...
Séance du 27 novembre 2003
Décision lue en séance publique le 19 décembre 2003
Vu, enregistré par le secrétariat de la commission de céans le 11 juillet 2001, le recours introduit par maître Serge B..., représentant les intérêts de Mme Josette S..., demeurant à Avignon (84000), tendant à lannulation de la décision du 16 mai 2001 par laquelle la commission départementale daide sociale du Vaucluse a confirmé celle du 6 novembre 2000 de la commission dadmission dAvignon Ouest de récupérer sur la requérante la prime dassurance-vie de 146 000 F versée de son vivant par Mme Paule S..., bénéficiaire jusquà son décès de lallocation compensatrice pour laide dune tierce personne pour un montant de 414 577,77 F, et ce pour les motifs, dune part, que le contrat dassurance-vie en cause, relevant de « dispositions particulières qui écartent à son sujet les règles de fond des donations », nentre pas dans les champs de larticle 146 de lancien code de la famille et de laide sociale alors en vigueur, dautre part, que Mme Josette S... sest beaucoup occupée de Mme Paule S... de sorte quelle échapperait à toute récupération ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, enregistré le 10 janvier 2002, le mémoire en défense du président du Conseil général du département du Vaucluse, tendant au rejet des conclusions du recours susvisé par les motifs que le contrat était dénué de tout aléa sérieux compte tenu de lâge de Mme Paule S... à la date de sa souscription (85 ans), quil avait le caractère dune donation déguisée, et que la collectivité débitrice de laide sociale intervient au titre dun recours sur donataire et non dune succession, de sorte que la protection dont bénéficient les personnes sétant occupées de manière constante dun handicapé ne trouve pas à sappliquer en lespèce ;
Vu, enregistrées le 29 septembre 2003, les écritures complémentaires du département du Vaucluse ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Après avoir entendu à laudience publique du 27 novembre 2003 M. Goussot, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que le contrat dassurance-vie souscrit par Mme Paule S... désignant en cas de décès de celle-ci Mme Josette S..., ou à défaut sa fille comme bénéficiaires constitue une stipulation pour autrui, qui nétait pas susceptible, contrairement à ce quont estimé les premiers juges, de constituer une donation déguisée ; que par contre, comme lavait estimé la commission dadmission à laide sociale, un tel acte est susceptible, le cas échéant, dêtre requalifié en donation indirecte ; que toutefois, si une donation, fût-elle indirecte, présente un caractère rémunératoire, elle ne peut donner lieu au recours prévu à larticle 146 b du code de la famille et de laide sociale devenu L. 132-8 du code de laction sociale et des familles, dès lors que lintention libérale du donateur nest alors pas caractérisée ;
Considérant en lespèce queu égard à lâge de la stipulante au moment de la souscription du contrat « Ecureuil Vie » moyennant une prime unique de 140 000 F (près de quatre-vingt-cinq ans) et au montant de la prime par rapport à celui des autres capitaux mobiliers de lintéressée à son décès en 1998 (deux fois moindre), sa maison ayant, par ailleurs, été vendue en viager aux époux S... dans des conditions avantageuses, laléa et le caractère de pure gestion patrimoniale du contrat souscrit nétaient pas tels lors de la souscription que ledit contrat ne fût en principe susceptible dêtre regardé comme une donation indirecte ; que ni labsence dacceptation du vivant de la stipulante, ladite acceptation ayant pu être donnée en rétroagissant à la date de souscription du contrat après le décès de celle-ci par lacceptation du versement par le promettant du capital stipulé au bénéficiaire, ni la possibilité du vivant de la stipulante en labsence dacceptation du bénéficiaire de décider du reversement de la souscription ou de la modification du bénéficiaire, ni labsence de rapport à la succession du capital ou de la prime ne sont de nature à interdire la requalification de la stipulation pour autrui en donation indirecte ; que labsence dappauvrissement du donateur invoqué par la requête nest pas de nature à interdire lexercice du recours en récupération contre le donataire ; que sagissant dun recours dirigé contre ce dernier, le moyen tiré des dispositions seulement applicables au recours contre la succession lorsque les héritiers sont les enfants de la personne handicapée ou la personne qui en a assuré la charge effective et constante, sont inopérants ;
Considérant toutefois que, quelle que puisse être lambiguïté de son argumentation, qui fait valoir à la fois les sentiments filiaux éprouvés par la bénéficiaire à légard de la stipulante comme le caractère « familial » de leurs soins et lensemble des services rendus dès avant la souscription du contrat en date du 20 janvier 1993 par la famille S... à Mme Paule S..., qui bénéficiait de lallocation compensatrice pour tierce personne depuis 1983, et quelle que puisse être lintensité réelle des services ainsi rendus, Mme Josette S... fait bien valoir que sa désignation - et celle de sa fille - comme bénéficiaires ont été effectuées par Mme Paule S... en raison des services quelles lui avaient rendus et étaient susceptibles de lui rendre ; que non seulement ladministration ne le conteste pas, même si le rapport dun travailleur social quelle joint a été élaboré à une période postérieure à celle de la souscription du contrat à laquelle seule il y a lieu de se référer pour apprécier lintention libérale, mais fait valoir elle-même que la relation entre les intéressées avait un fondement marchand incontestable prouvant la donation déguisée ; quelle fait également valoir que ce fondement est corroboré par la vente en viager de la maison de Mme Paule S... dans les conditions sus-rappelées ; que, comme il a été dit, le contrat dassurance-vie nest pas susceptible dêtre requalifié comme donation si lintention libérale nest pas établie ; que dans les circonstances de lespèce, ladministration nétablit pas que la « donation rémunératoire » dont il sagit nétait pas dépourvue dune telle intention ; que si elle fait valoir qu« une donation nexclut en aucune façon le caractère familial de (la) relation », elles ont en lespèce un caractère respectivement exclusif et aucune disposition du code de la famille et de laide sociale et du code de laction sociale et des familles ne permet lexercice du recours contre le bénéficiaire dun tel acte ; que sil est avéré enfin que lintention libérale sapprécie dans le chef du donateur, le dossier ne permet pas de présumer que Mme Paule S..., sans famille, et dépendant exclusivement de la famille S..., nentendait pas en réalité gratifier les bénéficiaires en raison des services quelles lui avaient dores et déjà rendus et étaient dailleurs de plus en plus susceptibles de lui rendre à raison de lévolution de son état ; que dailleurs le comportement ultérieur des époux S... tel quil ressort du rapport non contesté dun travailleur social corrobore la qualification de lintention de Mme Paule S..., qui avait conservé toutes ses facultés intellectuelles, telle quelle vient dêtre appréciée ; que dans ces conditions il ne peut, en létat des textes et sagissant dune appréciation de faits et non de valeur, quêtre fait droit à la requête et les décisions attaquées doivent être annulées,
Décide
Art. 1er. - Ensemble sont annulées les décisions de la commission dadmission dAvignon Ouest du 6 novembre 2000 et de la commission départementale daide sociale du Vaucluse du 16 mai 2001.
Art. 2. - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 27 novembre 2003 où siégeaient M. Lévy, président, M. Reveneau, assesseur, M. Goussot, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 19 décembre 2003.
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer