Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Succession
 

Dossier no 020311

Mme D...
Séance du 27 novembre 2003

Décision lue en séance publique le 16 décembre 2003

    Vu, enregistré le 16 juin 2001 par la direction départementale de la solidarité, le recours introduit par maître Alain de Bezenac, avocat à la cour, en qualité de conseil des consorts D..., demeurant respectivement à Elbeuf (76500), Caudebec-lès-Elbeuf (76520) et Saint-Pierre-lès-Elbeuf (76520), tendant à l’annulation de la décision du 10 avril 2001 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Seine-Maritime a confirmé celle du 19 février 2000 de la commission d’admission de Rouen d’exercer une action en récupération des dépenses d’aide sociale engagées en sa faveur sur la succession de Mme Annick D..., épouse et mère des requérants, qui a été hébergée du 31 juillet 1987 au 20 novembre 1997, date de son décès, dans l’établissement pour personnes âgées géré par la fondation Lecallier-Leriche bien qu’elle fût handicapée à la suite d’un grave accident de la circulation et eût moins de soixante ans, et ce par les moyens que, d’une part, la juridiction du premier ressort était dépourvue du caractère objectivement impartial requis, par l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme de 1950, d’autre part, le recours sur la succession est en l’espèce illégal au regard des termes de l’article 43 de la loi du 30 juin 1975 repris à l’article 39-II de la même loi ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense du 30 juillet 2001 du président du conseil général du département de Seine-Maritime, tendant au rejet des conclusions du recours susvisé par le motif que, bien que Mme Annick D... fût handicapée et âgée de moins de soixante ans, le fait pour elle d’avoir été hébergée dans un établissement pour personnes âgées priverait la succession de l’exemption de récupération prévue à l’article 39-II de la loi du 30 juin 1975 ;
    Vu, enregistré par le secrétariat de la commission de céans, le mémoire en réplique de maître Alain de B..., tendant aux même fins que le recours initial selon des moyens identiques ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 novembre 2003, M. Goussot, rapporteur, maître de B..., avocat, et Mme D..., et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que les mentions de la décision attaquée font apparaître que deux membres de la commission départementale d’aide sociale non habilités à siéger en l’espèce (le représentant de l’ONAC et celui de l’association service/emploi) ainsi que le commissaire du Gouvernement auraient participé comme membres de la formation de jugement à l’audience et au délibéré ; qu’aucune pièce du dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale n’infirme d’ailleurs une telle interprétation ; qu’en outre, il n’est pas contesté que le rapporteur est un agent en fonction à la direction du département de la Seine-Maritime chargée de l’aide sociale ; qu’au surplus la présence au sein de la juridiction chargée de connaître des demandes concernant les prestations d’aide sociale versées par ce département de conseillers généraux dudit département est de nature à priver la juridiction départementale de l’apparence d’impartialité et d’indépendance que requièrent les stipulations de l’article 6-1 de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’ainsi tant au regard desdites stipulations qu’à celui du principe général d’impartialité et d’indépendance des juridictions dont elles s’inspirent comme à celui des dispositions de l’article L. 134-8 du code de l’action sociale et des familles la composition de la juridiction de première instance n’a pas été régulière ; qu’il y a lieu d’annuler sa décision et d’évoquer la demande ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;
    Considérant que Mme Annick D..., née le 7 septembre 1946, a été orientée par la COTOREP en 1985 vers un centre de long séjour où elle est demeurée jusqu’à son décès le 9 novembre 1997 ; qu’elle a été admise à ce titre à l’aide sociale sur le fondement de l’article 166 renvoyant à l’article 164 du code de la famille et de l’aide sociale alors applicable ; qu’elle a ainsi bénéficié de l’une des formes d’aide aux personnes âgées également susceptible d’être accordée aux personnes handicapées de moins de soixante ans ;
    Considérant que s’il est vrai que l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale alors applicable n’emporte d’exonération de la prise en compte des créances sur les débiteurs d’aliment et de récupération sur succession dans les cas qu’il prévoit, que lorsque les frais de placement ont été supportés au titre de l’aide sociale aux personnes handicapées dans des établissements compris dans le champ dudit article au nombre desquels n’étaient pas les unités de soins de longue durée même ouvertes aux personnes handicapées de moins de soixante ans, l’article 43 de la loi modifiée du 30 juin 1975 aujourd’hui codifié à l’article L. 241-1 du code de l’action sociale et des familles dans le dernier état de sa rédaction a pour objet par dérogation aux dispositions de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale alors applicable de limiter l’exercice du recours en récupération de l’ensemble des dépenses d’aide sociale exposée sur décision de la COTOREP au titre du chapitre VI du même code relatif à l’aide sociale aux personnes handicapées, lorsqu’une personne handicapée à tout le moins de moins de soixante ans a été orientée sur décision de la COTOREP vers un établissement d’hébergement même non mentionné à l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale alors applicable au titre du placement dans lequel elle bénéficie de l’aide sociale aux personnes handicapées, qu’il n’y a lieu à récupération sur la succession du handicapé à ses enfants, en application dudit article 43 ; que la circonstance que la commission d’admission à l’aide sociale ait décidé l’admission sous réserve de la participation des débiteurs d’aliment comme en toute hypothèse une participation de M. D... au titre de son devoir d’entretien conjugal est en tout état de cause sans incidence sur l’application des dispositions susrappelées de l’article 43 modifié de la loi du 30 juin 1975 à la récupération litigieuse ;
    Considérant à la vérité que la situation actuelle de l’aide sociale aux personnes handicapées admises dans des établissements recevant des personnes âgées que ce soit avant ou après soixante ans est complexe et fragile ; que le conseil d’état dans sa décision de section M. Garofalo n’a pas contredit la décision de la présente juridiction du 7 mai 1999 M. M... dont fait état l’administration dans son mémoire en défense en demandant le rejet de la requête ; que ladite décision M. M... n’était pas prise pour l’application de l’article 43 sus rappelé de la loi du 30 juin 1975 modifiée à une récupération sur succession, situation litigieuse en la présente instance ; qu’ainsi la prise en compte des créances des débiteurs d’aliments pour l’admission à l’aide sociale dans une unité de soins de longue durée va de pair selon l’interprétation qui doit être donnée de la décision Garofalo avec l’exonération en vertu de l’article 43 de la loi du 30 juin 1975 de la récupération des prestations assurées dans une telle situation ; qu’il est clair que la cohérence d’un tel état de droit n’est pas évidente et que seule une intervention du législateur, toujours attendue, est de nature à y remédier ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu de faire droit à la requête ;

Décide

    Art.  1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de Seine-Maritime du 1er avril 2001 ensemble la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Rouen du 19 février 2000 sont annulées.
    Art.  2.  -  Il n’y a lieu à récupération à l’encontre de la succession de Mme Annick D... des prestations avancées à celle-ci par l’aide sociale en raison de son hébergement à l’USD de la fondation Lecallier-Leriche à Caudebec-lès-Elbeuf.
    Art.  3.  -  La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 novembre 2003 où siégeaient M. Lévy, président, M. Reveneau, assesseur, M. Goussot, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 16 décembre 2003.
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer