Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) - Recours en récupération - Retour à meilleure fortune |
Dossier no 012351
Mme V...
Séance du 29 septembre 2003
Décision lue en séance publique le 20 octobre 2003
Vu le recours formé pour Mme Nicole V..., enregistré le 26 juillet 2001 dans les services de la direction des interventions sanitaires et sociales du département de lOise, tendant à lannulation de la décision de la commission départementale daide sociale de lOise en date du 21 juin 2000, qui a rejeté sa requête formée contre la décision de la commission dadmission à laide sociale du 5 mars 1999 prononçant la récupération de la somme de 162 612,37 F sur Mme Nicole V..., bénéficiaire de laide sociale revenue à meilleure fortune ;
Elle soutient que le principe du contradictoire na pas été respecté faute davoir pu sexpliquer devant la commission départementale, ayant reçu une convocation pour le 26 janvier 2000 sans indication de lheure de laudience et ayant obtenu des informations selon lesquelles la commission pourrait ne pas pouvoir siéger à cette date ; que les dispositions de larticle 39 de la loi du 30 juin 1975 font obstacle à la récupération de la part de lhéritage quelle tient de la succession de sa mère, bénéficiaire de lallocation compensatrice ; que le raisonnement adopté par la commission départementale est empreint dune grande injustice, privant dhéritage les seuls enfants qui ont la malchance dêtre handicapés ; quà linverse, la personne handicapée ayant la chance de trouver un emploi rémunérateur ne donnant plus droit à la perception de lallocation compensatrice pourra ultérieurement hériter, les contacts entre elle et lorganisme payeur ayant cessé ; quainsi elle se trouve sanctionnée davoir décidé de soccuper de ses deux enfants, eux-mêmes handicapés visuels ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2001, présenté par le président du conseil général de lOise, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la récupération est permise du fait que le patrimoine de lintéressée sest enrichi de façon substantielle ;
Vu le mémoire complémentaire, présenté pour Mme Nicole V..., enregistré le 1er septembre 2003, qui conclut à lannulation de la décision de la commission départementale daide sociale de lOise en date du 21 juin 2000 et de la décision de la commission dadmission à laide sociale du 5 mars 1999 ; elle soutient que larticle 54 de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a modifié les règles de récupération, lallocation compensatrice ne pouvant plus être récupérée lorsque le bénéficiaire de cette prestation revient à meilleure fortune ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu la lettre en date du 6 novembre 2001 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale daide sociale si elles souhaitent être entendues à laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 29 septembre 2003, les observations de Mme Nicole V..., M. Peronnet, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quaux termes du dernier alinéa de larticle 128 du code de la famille et de laide sociale, alors applicable à la commission départementale daide sociale, « le demandeur, accompagné de la personne ou de lorganisme de son choix, est entendu lorsquil le souhaite » ; que ces dispositions imposent à la commission départementale de mettre les parties à même dexercer la faculté qui leur est ainsi reconnue ; quà cet effet celle-ci doit, soit avertir les parties de la date de la séance, soit les inviter à lavance à lui faire connaître si elles ont lintention de présenter des explications verbales pour quen cas de réponse affirmative de leur part elle les avertisse ultérieurement de la date de la séance ; que si la commission départementale a bien averti le conseil de Mme Nicole V..., par lettre du 6 janvier 2000, de lexamen de son recours lors dune séance devant se tenir le 26 janvier 2000, il ressort des mentions de la décision attaquée que cette séance sest en réalité tenue le 21 juin 2000 ; quil nest pas soutenu que lintéressé ait été informé du report de la date de la séance ; que Mme Nicole V..., qui avait la qualité de partie à linstance, est ainsi fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise à lissue dune procédure irrégulière et à en demander, par ce motif, lannulation ;
Considérant toutefois quil appartient à la commission centrale daide sociale dévoquer et de statuer sur le bien-fondé de la demande ;
Considérant que larticle 146 du code de la famille et de laide sociale, dans sa rédaction alors en vigueur, prévoit que des recours sont exercés par le département à lencontre, notamment, du bénéficiaire de prestations daide sociale revenu à meilleure fortune ; que lallocation compensatrice est au nombre de ces prestations ;
Considérant quil résulte de linstruction que Mme Nicole V... bénéficie de lallocation compensatrice depuis 1990 ; quil nest pas contesté quà ce titre la créance départementale sélève à un montant de 297 005,24 F (45 278,16 Euro) du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1995 ; que dans le cadre de la succession de sa mère, réglée en 1996, lintéressée a hérité dune somme de 162 612,37 F (24 790,10 Euro) ;
Considérant que la décision attaquée na pas pour objet, contrairement à ce que soutient la requérante, dopérer une récupération sur la succession de sa mère, qui aurait elle-même bénéficié de lallocation compensatrice mais de récupérer des prestations versées à sa fille, la requérante ; que ladite décision nest ainsi pas soumise aux dispositions de larticle 39 de la loi du 30 juin 1975 (figurant désormais à larticle L. 245-6 du code de laction sociale et des familles) interdisant tout recours en récupération de cette prestation à lencontre de la succession du bénéficiaire décédé lorsque ses héritiers sont ses enfants, mais uniquement aux dispositions relatives au retour à meilleure fortune de la requérante ;
Considérant que la décision attaquée a pour objet de permettre la récupération partielle de sommes avancées par le département de lOise ; que le moyen tiré de linjustice qui frapperait les héritiers dune même fratrie, selon quils sont ou non handicapés, ne peut, dès lors que la loi ne fait aucune exception à la récupération quelle prévoit en cas de retour à meilleure fortune dune personne handicapée bénéficiaire de prestations daide sociale, être que rejeté ; que la circonstance alléguée que la personne handicapée ayant la chance de trouver un emploi rémunérateur ne donnant plus droit à la perception de lallocation compensatrice pourra ultérieurement hériter, en raison de la cessation des contacts entre elle et lorganisme payeur, ne prive pas la décision attaquée de son fondement légal alors dailleurs que la prescription de laction en récupération est trentenaire ; quil en est de même de la circonstance que Mme Nicole V... serait aujourdhui sanctionnée pour sêtre occupée de ses enfants, eux-mêmes handicapés, au lieu de travailler sans recourir à laide sociale ;
Considérant quaux termes du deuxième alinéa de larticle L. 245-6 du code de laction sociale et des familles, issue de la loi du 17 janvier 2002, « les sommes versées au titre de lallocation compensatrice ne font pas lobjet dun recouvrement à lencontre du bénéficiaire lorsque celui-ci est revenu à meilleure fortune » ; que ces dispositions ne peuvent sappliquer rétroactivement à une décision prise le 5 mars 1999, sagissant dune situation alors définitivement constituée nonobstant le recours contentieux et en labsence de dispositions transitoires de la loi ;
Considérant que lhéritage, postérieur à ladmission à laide sociale, doit être regardé, en tant quil augmente la valeur du patrimoine de Mme Nicole V..., comme un retour à meilleure fortune au sens des dispositions précitées ; que, dès lors, la commission dadmission à laide sociale na pas commis derreur de droit en décidant de recouvrer une partie de la créance départementale, soit 162 612,37 F (24 790,10 Euro) sur la part de lhéritage reçue par lintéressée ;
Considérant toutefois quil appartient à la présente juridiction de se prononcer également sur la remise ou la modération de la créance de laide sociale ; quil ressort des pièces du dossier que les ressources déclarées par Mme Nicole V... et son époux sélèvent à 29 670 Euro pour lannée 2002 ; que son conjoint et ses deux enfants, âgés de 17 et 20 ans, sont eux-mêmes handicapés ; que ces derniers poursuivent des études ; que lensemble de ces circonstances entraîne nécessairement des dépenses supplémentaires ; quil y a lieu dans les circonstances de lespèce de modérer la somme réclamée à hauteur de 12 500 Euro,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale de lOise en date du 21 juin 2000 est annulée.
Art. 2. - Une somme de 12 500 Euro sera recouvrée à lencontre de Mme Nicole V....
Art. 3. - La décision de la commission dadmission à laide sociale du 5 mars 1999 est réformée en ce quelle a de contraire à la présente décision.
Art. 4. - Le surplus des conclusions de Mme Nicole V... est rejeté.
Art. 5. - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées auxquels il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 29 septembre 2003 où siégeaient M. Levy, président, M. Pages, assesseur, M. Peronnet, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 20 octobre 2003.
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer