Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Personnes handicapées - Placement - Ressources - Assurance vie
 

Dossier no 010219

M. A...
Séance du 30 juin 2003

Décision lue en séance publique le 5 août 2003

    Vu, enregistré le 23 janvier 2001 par le secrétariat de la commission de céans, le recours introduit par M. Raymond A..., en sa qualité de tuteur de son fils handicapé, M. Michel A..., demeurant 10, rue Guy-Ropartz à Saint-Quay-Portrieux (22410), et tendant à l’annulation et la réformation de la décision du 10 novembre 2000 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Côtes-d’Armor a confirmé celle du 15 février 2000 de la commission cantonale d’Etables-sur-Mer de refuser le renouvellement de la prise en charge d’une partie des frais d’hébergement de M. Michel A... au foyer l’Albatros de Saint-Brieuc à compter du 1er octobre 1999 et ce par les moyens que :
    1o  Les premiers juges ont fait une confusion entre patrimoine et revenu du patrimoine pour asseoir leur jugements, contrairement aux dispositions combinées des articles 141 de l’ancien code de la famille et de l’aide sociale, article 1er du décret du 2 septembre 1954 modifié et des décrets no 77-1547 et 77-1548 du 31 décembre 1977 ;
    2o  Ils ont omis de viser dans leur décision le règlement départemental d’aide sociale de sorte que celle-ci serait illégale ;
    3o  La commission d’admission n’a pas informé en temps utile le requérant de la possibilité d’être entendu ;
    4o  La commission départementale ne lui a pas communiqué les conclusions de l’administration, aurait à tort statué hors sa présence et a pris, en tout état de cause, une décision dépourvue de toute mention du caractère public de l’audience, autant d’éléments contrevenant aux termes de l’article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales de novembre 1950 ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en réponse du 2 août 2001 produit par le département des Côtes-d’Armor et tendant au soutien des conclusions des recours susvisé au motif que « (...) M. A... n’était pas en capacité le 1er octobre 1999 de faire face à ses frais d’entretien et d’hébergement au foyer l’Albatros de Saint-Brieuc. » ;
    Vu le mémoire en réplique du 9 octobre 2001 produit par M. A... qui persiste dans ses conclusions dirigées contre la décision du 10 novembre 2000 de la commission départementale d’aide sociale des Côtes-d’Armor ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 30 juin 2003, M. Goussot, rapporteur, les observations de M. A... et à titre d’information Mme Marie-Christiane L..., administratrice de l’URAPEI de Bretagne et de l’ADAPEI du Morbihan, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur la régularité de la décision attaquée, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen :
    Considérant que la décision attaquée de la commission départementale d’aide sociale des Côtes-d’Armor ne comporte aucune mention ; que l’audience a été publique et qu’une telle publicité ne ressort non plus d’aucune pièce du dossier ; que le requérant est par suite fondé à soutenir qu’elle est intervenue irrégulièrement en méconnaissance des stipulations de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales et à en demander, pour ce motif, l’annulation ; qu’il y a lieu d’évoquer la demande ;
    Considérant qu’il ne ressort pas du dossier que la commission d’admission à l’aide sociale d’Etables-sur-Mer ait convoqué M. A... à sa séance ou l’ait informé préalablement de la possibilité du demandeur à l’être ; que sa décision est ainsi intervenue en méconnaissance des dispositions du dernier alinéa de l’article 126 du code de la famille et de l’aide sociale alors applicable ; qu’elle doit être annulée ;
    Au fond :
    Considérant qu’aux termes de l’ancien article 141 du code de la famille et de l’aide sociale en vigueur, il est tenu compte « pour l’appréciation des ressources des postulants à l’aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenus (...) » ; que ces dispositions excluent de prendre en considération la valeur en capital des biens productifs de revenus ; que seuls ces derniers entrent dans lesdites ressources ; que d’ailleurs la valeur en capital des biens non productifs de revenus n’est prise en compte qu’en tant qu’assiette de calcul du produit financier que le postulant à l’aide sociale aurait obtenu du placement de son patrimoine, soit au minimum « la rente viagère que servirait la caisse nationale d’assurance sur la vie (...) », comme le prévoit l’article 1er du décret du 2 septembre 1954 ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret no 77-1547 du 31 décembre 1977, « toute personne handicapée qui est accueillie de façon permanente ou temporaire (...) dans un établissement de rééducation professionnelle ou d’aide par le travail fonctionnant en internat, dans un foyer ou un foyer-logement ou dans tout autre établissement d’hébergement pour personnes handicapées (...) » acquitte une contribution « qui a pour seul objet de couvrir tout ou partie (des) frais d’hébergement ou d’entretien » ; que « l’aide sociale prend en charge les frais d’hébergement et d’entretien » qui dépassent la contribution du pensionnaire ;
    Considérant qu’aux termes des articles 1er et 2 du décret no 77-1548 du 31 décembre 1977, la personne handicapée conserve un minimum de ressources dont il doit être tenu compte pour déterminer sa contribution, conformément à l’article 168 de l’ancien code de la famille et de l’aide sociale ; que ce minimum est égal à 10 % des ressources mensuelles du pensionnaire s’il ne travaille pas et, en tout état de cause, ne saurait être inférieur à 1 % du montant annuel de l’allocation aux adultes handicapés ; que, s’il travaille, ce minimum est égal à 33 % des revenus de son travail auxquels s’ajoutent 10 % des autres ressources, et ne saurait, dans cette hypothèse, être inférieur à 30 % du taux de cette allocation ;
    Considérant qu’en l’espèce, la commission cantonale d’Etaples-sur-Mer et la commission départementale d’aide sociale des Côtes-d’Armor ont méconnu les dispositions précitées ; que l’administration dans ses écritures en réponse indique que le cumul des ressources de M. Michel A... en 1999, compte tenu des intérêts capitalisés de ses placements résultant de contrats d’assurance vie, était nettement inférieur au montant des frais d’hébergement et d’entretien de l’intéressé au foyer l’Albatros de Saint-Brieuc ; qu’il y avait donc lieu de renouveler la prise en charge de M. Michel A... au titre de l’aide sociale à compter du 1er octobre 1999 ;
    Considérant, il est vrai, que dans son mémoire en réplique M. A... soutient pour la première fois que les intérêts capitalisés afférents aux contrats d’assurance vie qu’il a souscrits ne sauraient être pris en compte dès lors qu’ils appartiennent à l’assureur jusqu’au terme du contrat, le souscripteur ne disposant sur eux que d’un droit de créance ; que cette circonstance qui procède d’un acte de disposition de M. A... par la souscription de contrats d’assurance vie n’interdit pas de prendre en compte les montants des intérêts capitalisés dans la détermination des ressources retenues pour déterminer l’accès à l’aide sociale et, le cas échéant, le minimum de ressources laissé à l’assisté ;
    Considérant qu’il ressort néanmoins des pièces du dossier que l’administration prend en compte devant le juge d’appel des intérêts différents de ceux justifiés à la date de la demande et ne déduit pas de la contribution à la charge de M. A... le minimum de ressources qui lui revient en application des décrets susmentionnés du 31 décembre 1977 ; que celui-ci s’élevait à 993 F par mois en 1999, soit 33 F de plus que le minimum d’ordre public assuré aux travailleurs handicapés ; que la participation de M. A... atteignait donc 7 123 F, cette somme incluant l’intégralité de l’aide personnalisée au logement, soit 1 872 F ;

Décide

    Art. 1er - Ensemble sont annulées les décisions du 15 février 2000 de la commission d’admission à l’aide sociale d’Etaples-sur-Mer et du 10 novembre 2000 de la commission départementale d’aide sociale des Côtes-d’Armor.
    Art. 2 - Le renouvellement de la prise en charge au titre de l’aide sociale des frais d’hébergement et d’entretien de M. A... au foyer l’Albatros de Saint-Brieuc lui est accordé à compter du 1er octobre 1999, sous réserve d’une contribution de 7 123 F par mois, comprenant l’intégralité de l’aide personnalisée au logement et susceptible d’être révisée en fonction de l’évolution des ressources de l’intéressé.
    Art. 3 - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 30 juin 2003, où siégeaient M. Lévy, président, Mme Kornmann, assesseur, M. Goussot, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 5 août 2003.
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer