Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) -Donation - Assurance vie |
Dossier no 010909
Mme R..., épouse L...
Séance du 26 mai 2003
Décision lue en séance publique le 28 mai 2003
Vu le recours formé par Mme Jacqueline R..., épouse L..., en date du 12 décembre 2000 tendant à lannulation de la décision de la commission départementale daide sociale de la Dordogne en date du 17 novembre 2000 confirmant la décision de la commission dadmission à laide sociale de Périgueux, en date du 22 juin 2000, en ce quelles exercent un recours contre le donataire au titre de lallocation compensatrice et de la prestation spécifique dépendance versées du 1er avril 1993 au 28 novembre 1999 suite à la souscription, le 4 octobre 1990, dun contrat dassurance vie Assur écureuil par un versement unique de 60 000 F ;
Elle soutient que cette souscription ne constitue pas une donation en raison de son caractère révocable, que le versement de la prime unique provient de la vente dun bien immobilier et na entraîné aucune augmentation du patrimoine de sa mère, que ce contrat a toujours été mentionné dans les demandes dallocations ;
Vu la décision attaquée ;
Vu et enregistré le 22 mai 2003 le mémoire en réplique présenté pour Mme L... par la société civile professionnelle C... -P..., avocat, persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et le moyen que sa désignation comme bénéficiaire la été pour rémunérer les services rendus à sa mère ;
Vu le mémoire en défense du président du conseil général précisant que la clause bénéficiaire du contrat avait fait lobjet dune attention particulière par lassuré, puisque seuls deux des quatre enfants était, à lorigine mentionnés, puis, quelle a été modifié quatre jours avant son décès au profit des trois filles dun de ses enfants mentionné à lorigine, prédécédé ; que cette attention constitue bien une intention libérale ; que la commission départementale était compétente pour requalifier le contrat dassurance vie ; que le fait que celui-ci puisse faire lobjet dun rachat, ou que la clause bénéficiaire puisse être modifié ne fait pas obstacle à la qualification de donation indirecte ; que celle-ci est caractérisée par le fait que la quasi-totalité du patrimoine de Mme Henriette R... a été placé dans ce contrat. quelle a souscrit à lâge de 87 ans la souscription a eu lieu ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu la lettre en date du 14 février 2003 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale daide sociale si elles souhaitent être entendues à laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 26 mai 2003, M. Fabrice Courault, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quen relevant quil appartenait au juge de laide sociale de requalifier la stipulation pour autrui que constitue la souscription dun contrat dassurance vie décès au bénéfice dun tiers en une donation relevant de larticle 146 du code de la famille et de laide sociale alors applicable et en énonçant les circonstances de fait susceptibles en lespèce de justifier une telle requalification (montant de la prime et modalités de souscription ; capitalisation annuelle de lépargne ; âge de la stipulante à la date de la souscription) la commission départementale daide sociale de la Dordogne a suffisamment motivé sa décision ;
Considérant quen admettant que toute souscription dun contrat dassurance vie ne constitue pas au profit du bénéficiaire une donation indirecte susceptible dêtre appréhendée par laide sociale sur le fondement de larticle 146-b du code de la famille et de laide sociale alors applicable à hauteur du montant des primes, sans quil soit même besoin dexaminer les conditions dans lesquelles chaque contrat de la sorte a été souscrit, du seul fait de lappauvrissement du stipulant à ladite hauteur au profit du bénéficiaire acceptant, sans contrepartie de celui-ci, un tel contrat ne peut être requalifié en donation que si ladministration de laide sociale établit lintention libérale du souscripteur au moment de la souscription du contrat alors requalifiable en donation entre vifs, alors même que lacceptation du bénéficiaire ne se serait réalisée en fait, mais en rétroagissant à la date de la signature du contrat, quau moment où le promettant lui a versé les sommes dues en application du contrat après le décès du stipulant ;
Considérant que la preuve de lintention libérale doit être rapportée alors même que le contrat peut être requalifié non comme donation déguisée mais comme donation indirecte ;
Considérant quaux termes de larticle 894 du code civil, la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui laccepte ; quaux termes de larticle L. 132-14 du code des assurances le capital ou la rente garantie au profit dun bénéficiaire déterminé ne peuvent être réclamés par les créanciers du contractant, ces derniers ont seulement droit au remboursement des primes dans le cas indiqué par larticle L. 132-13, 2e alinéa, selon lequel les règles relatives au rapport à succession ou à la réduction pour atteinte à la réserve héréditaire ne sappliquent pas... aux sommes versées par le contractant à titre de prime à moins quelles naient été manifestement exagérées au regard de ses facultés ; que compte tenu de ces dispositions, un contrat dassurance vie ne peut être requalifié par le juge de laide sociale en donation que lorsquau regard de lensemble des circonstances de la souscription du contrat, le stipulant sy dépouille au profit du bénéficiaire de manière actuelle et, nonobstant la possibilité de résiliation du contrat, non aléatoire, ne se bornant pas ainsi à un acte de gestion de son patrimoine ; que dans une telle situation, lintention libérale doit être regardée comme établie et la stipulation pour autrui peut être requalifiée en donation indirecte, sous réserve, en cas de difficulté sérieuse de question préjudicielle à lautorité judiciaire ;
Considérant en lespèce que compte tenu de lâge de la stipulante au moment de la souscription du contrat et du montant de la prime (60 000 F) par rapport à lactif successoral de celle-ci (8 405 euros) à son décès, même postérieur de plusieurs années, alors dailleurs quelle avait actualisé les bénéficiaires du contrat quelques jours avant sa mort, ladministration établit comme elle en a la charge lintention libérale de Mme R... à légard de Mme L... ;
Considérant il est vrai que dans son mémoire du 19 enregistré le 22 mai 2003 Mme L... fait valoir quen réalité Mme R... aurait entendu essentiellement tenir compte des soins prodigués au domicile de la requérante où elle avait été accueillies de février 1981 novembre 1999 et quainsi la souscription du contrat serait en tout état de cause dépourvue dintention libérale à son égard ; que toutefois lintention libérale sappréciant à la date de souscription qui est le 4 octobre 1990 ; 1o aucune pièce écrite émanant de Mme R... ne corrobore cette intention rémunératoire ; 2o Mme L... au vu du dossier na jamais envisagé une telle intention depuis lorigine de linstance devant ladministration avant le 19 mai 1991 et a, en outre expressément soutenu que la signature du contrat constituait une opération de placement, comme telle révocable, et nullement la rémunération éventuelle des services rendus par elle à sa mère ; 3o le contrat souscrit lavait été par stipulations au bénéfice de Mme L... et dun de ses frères, remplacé après la mort de celui-ci et quelques jours avant la mort de la stipulante par ses enfants ; enfin les deux pièces même produites par Mme L... au soutien de ce moyen font état de différends dordre familial au sujet de lappropriation par la requérante de biens et liquidités de ses parents qui ne permettent pas, clairement, compte tenu de labsence de toute indication écrite émanant de la stipulante, de présumer que les services rendus par Mme L... à Mme R... au-delà de ce quimpliquait son devoir filial nauraient pas déjà été en fait rémunérés par Mme R... au 4 octobre 1990, alors dailleurs quil napparaît pas que Mme L... ait intenté une action judiciaire pour faire obstacle au refus opposé pour le motif sus rappelé dau moins une de ses surs de participer aux frais dentretien de leur mère ; que dès lors, Mme L... nétablit pas comme elle en a sur ce point la charge, que sa désignation comme bénéficiaire du contrat souscrit dès le 4 octobre 1990 ne procédait pas dune intention libérale de Mme R... en sa faveur en raison de ce que la donation, en ladmettant telle comme il a été ci-dessus jugé, fut une dotation rémunératoire ;
Décide
Art. 1er. - La requête de Mme Jacqueline L... est rejetée.
Art. 2. - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 26 mai 2003 où siégeaient M. Lévy, président, Mme Kornmann, assesseur, M. Courault, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 28 mai 2003.
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer