Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2400
 
  OBLIGATION ALIMENTAIRE  
 

Mots clés : Personnes âgées - Placement - Participation financière - Obligation alimentaire
 

Dossier no 011001

Mme R...
Séance du 3 juin 2003

Décision lue en séance publique le 19 juin 2003

    Vu 1o sous le no 011001, la requête datée du 23 novembre 2000, enregistrée le 27 novembre 2000 par les services de l’aide sociale des Vosges, présentée par M. Jean-Michel K... et tendant, en premier lieu, à l’annulation de la décision du 2 novembre 2000 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Vosges a maintenu la décision du 10 juillet 2000 de la commission cantonale d’admission à l’aide sociale de Saint-Dié des Vosges refusant à Mme Suzanne K... veuve R..., mère du requérant, le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge des frais de son hébergement à l’unité de long séjour de l’hôpital de Senones, à compter du 2 février 2000, au motif que l’intéressée et ses obligés alimentaires peuvent supporter la dépense, en second lieu, à ce que la commission centrale d’aide sociale le décharge de toute participation à la prise en charge de ces frais ;
    Le requérant fait valoir que sa situation financière, grevée par ses charges de famille et caractérisée par une mise en redressement judiciaire, ne lui permet pas de contribuer aux frais d’hébergement de sa mère dans la mesure appréciée par la commission départementale ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu 2o sous le no 011001-bis, la requête datée du 28 décembre 2000, enregistrée le 2 janvier 2001 par les services de l’aide sociale des Vosges, présentée par L’association tutélaire des Vosges et tendant à l’annulation de la décision du 2 novembre 2000 susvisée ;
    L’association requérante soutient que Mme R... et ses obligés alimentaires, dont la dette totale d’aliments a été fixée à 1 350 F par un jugement rendu le 18 décembre 1998 par le tribunal de grande instance de Saint-Dié, ne peuvent supporter la dépense ;
    Vu les observations présentées le 28 février 2001 par le président du conseil général des Vosges, qui conclut au rejet des deux requêtes ; il soutient que la capacité contributive de ceux des obligés alimentaires de Mme R... qui ont fait connaître leurs ressources suffit à assurer le paiement des frais d’hébergement non couverts par les ressources personnelles de l’intéressée ; que le jugement du tribunal de grande instance de Saint-Dié est sans incidence sur ce point ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale, ensemble le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 3 juin 2003, M. Bereyziat, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que les requêtes susvisées sont connexes et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 132-3 du code de l’action sociale et des familles, reprenant l’article 142 du code de la famille et de l’aide sociale : « Les ressources de quelque nature qu’elles soient, à l’exception des prestations familiales, dont sont bénéficiaires les personnes placées dans un établissement au titre de l’aide aux personnes âgées ou de l’aide aux personnes handicapées, sont affectées au remboursement de leurs frais d’hébergement et d’entretien dans la limite de 90 %. Toutefois, les modalités de calcul de la somme mensuelle minimum laissée à la disposition du bénéficiaire de l’aide sociale sont déterminées par décret (...) » ; que l’article L. 132-6 du code de l’action sociale et des familles, reprenant l’article 144 du code de la famille et de l’aide sociale, dispose : « Les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. La commission d’admission fixe, en tenant compte du montant de leur participation éventuelle, la proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques. La décision de la commission peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission (...) » ;
    Considérant, d’une part, qu’il résulte de l’instruction que, pour la période postérieure au 2 février 2000, les frais d’hébergement de Mme Suzanne R... à l’unité de long séjour de l’hôpital de Senones excédaient chaque mois de 2 000 F environ les ressources personnelles de toute nature de l’intéressée, appréciées selon les règles visées à l’article L. 132-3 précité ;
    Considérant, d’autre part, que pour l’application des dispositions législatives précitées, il appartient aux juridictions de l’aide sociale, lorsqu’elles déterminent l’aide qu’un demandeur est en droit d’attendre de l’ensemble de ses obligés alimentaires, de tirer les conséquences des jugements rendus, le cas échéant, par le juge aux affaires familiales, notamment lorsque celui-ci limite cette aide à une somme inférieure à celle qu’avait envisagée l’organisme d’admission ; qu’il résulte de l’instruction que, par un jugement du 18 décembre 1998, le tribunal de grande instance de Saint-Dié, saisi par l’hôpital de Senones en vue du paiement des frais d’hébergement de Mme Suzanne R... dans cet établissement, pour la période comprise entre le 28 mai 1997 et le 2 février 2000, a fixé à 1 350 F par mois la créance détenue par l’intéressée sur l’ensemble de ses débiteurs d’aliments à compter de la date de ce jugement, eu égard, notamment, à la mise en redressement judiciaire dont M. Jean-Michel K... faisait l’objet ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que les capacités contributives de ces débiteurs aient connu une quelconque évolution depuis cette date ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. Jean-Michel K... et L’association tutélaire des Vosges sont fondés à demander l’annulation de la décision du 2 novembre 2000 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Vosges a refusé à Mme Suzanne R... le bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge des frais de son hébergement à la maison de retraite de l’hôpital de Senones ; qu’il y a lieu d’admettre Mme R... au bénéfice de cette aide, à compter du 21 février 2000, sous réserve, d’une part, du prélèvement légal sur ses ressources de toute nature, d’autre part, d’une participation mensuelle laissée à la charge de l’ensemble de ses débiteurs d’aliments et fixée à 1 350 F (205,81 Euro) ;
    Mais considérant qu’il n’appartient pas aux juridictions d’aide sociale de répartir entre les personnes tenues à l’obligation alimentaire la participation globale qui leur incombe ; qu’ainsi les conclusions de M. Jean-Michel K... tendant à ce que la commission centrale d’aide sociale le décharge de toute participation aux frais d’hébergement de sa mère ne peuvent qu’être rejetées ; qu’il incombe aux débiteurs d’aliments de Mme R... de convenir d’une répartition de la somme de 1 350 F susmentionnée ; qu’à défaut d’accord, il appartiendra au plus diligent de ces débiteurs ou, en cas de carence des intéressés, au président du conseil général des Vosges, de saisir une nouvelle fois le juge aux affaires familiales afin que celui-ci ajuste les participations de chacun d’entre eux en fonction de leurs possibilités contributives ;

Décide

    Art 1er.  -  La décision susvisée du 2 novembre 2000 de la commission départementale d’aide sociale des Vosges est annulée.
    Art. 2.  -  Mme Suzanne R... est admise au bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de ses frais de placement à la maison de retraite de l’hôpital de Senones à compter du 2 février 2000, sous réserve du prélèvement légal sur l’ensemble de ses ressources de toute nature et d’une participation de ses obligés alimentaires fixée à 205,81 Euro (1 350 F) par mois.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête no 011001 de M. Jean-Michel K... est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 3 juin 2003 où siégeaient M. Belorgey, président, M. Vieu, assesseur, M. Bereyziat, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 19 juin 2003.
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer