Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Recours en récupération - Donation - Date deffet |
Dossier no 001973
Mme T...
Séance du 3 juin 2003
Décision lue en séance publique le 19 juin 2003
Vu la requête présentée le 27 mai 1999 par M. Robert R..., tendant à la réformation de la décision du 20 avril 1999 de la commission départementale daide sociale de la Haute-Garonne maintenant la décision du 16 septembre 1998 par laquelle la commission cantonale dadmission à laide sociale du Fousseret (Haute-Garonne) a décidé la récupération à son encontre des sommes avancées par laide sociale à M. Edouard R..., père et donateur du requérant, pour la prise en charge des services ménagers à domicile qui lui ont été prodigués du 1er octobre 1986 au 31 mai 1994 ;
Le requérant soutient quil na pas été convoqué à laudience tenue par la commission départementale le 20 avril 1999 ; que sa situation financière ne lui permet pas de payer la somme qui lui est réclamée ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le nouveau mémoire, présenté le 18 septembre 2000 par M. Robert R..., qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre quil est le seul de sa fratrie a avoir constamment assuré le soutien matériel et moral de son père, avant même la signature de la clause de soins et dentretien dont était assorti lacte daté du 24 mars 1981 organisant à son profit la donation dune partie du bien immobilier détenu par son père, et ce jusquà la mort de lintéressé ; quil lui a personnellement dispensé des soins corporels et a notamment pris en charge, en lieu et place de son père, la quote-part des frais représentatifs de services ménagers laissée à la charge du bénéficiaire de laide sociale, ainsi que les frais de ses obsèques ; quen outre, ni son père, ni lui-même nont été avertis du droit à récupération ouvert par loctroi des prestations daide sociale ;
Vu les observations présentées le 1er mars 2001 par le président du conseil général de la Haute-Garonne, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la collectivité débitrice de laide sociale entend récupérer les sommes quelle a avancées sur le seul fondement de larticle 9 du décret du 2 septembre 1954, relatif à la révision des décisions dadmission à laide sociale prises sur la base de déclarations incomplètes ou erronées et à la répétition de lindu ; que M. R... na pas demandé, dans sa demande introductive dinstance devant la commission départementale daide sociale, à être entendu par cette commission ; que, dès lors, la décision attaquée est intervenue au terme dune procédure régulière ; que M. R... ne justifie pas des difficultés financières quil allègue ; quau demeurant, ces difficultés ont dores et déjà motivé la limitation des créances qui lui sont réclamées à la somme de 20.000 F ;
Vu le nouveau mémoire, présenté le 24 mars 2002 par M. Robert R..., qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre avoir hébergé et soigné son père à sa sortie de lhôpital ; quil na pas été informé par le notaire chargé de la succession de son père du droit à récupération dont ladministration de laide sociale se prévaut ; que la somme qui lui est réclamée est disproportionnée par rapport au montant de la donation dont il a bénéficié ; quau demeurant, son calcul nest justifié par la production daucun état détaillé ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de la famille et de laide sociale, ensemble le code de laction sociale et des familles ;
Vu le décret no 54-883 du 2 septembre 1954 portant règlement dadministration publique pour lapplication de lensemble des dispositions du décret du 29 novembre 1953 relatif à la réforme des lois dassistance, modifié par le décret no 61-495 du 15 mai 1961 ;
Vu le décret no 61-495 du 15 mai 1961 modifiant certaines dispositions du code de la famille et de laide sociale, dans sa rédaction issue du décret no 97-426 du 28 avril 1997 ;
Les parties ayant été régulièrement informées, par une lettre du 25 février 2002, de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 3 juin 2003, M. Bereyziat, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quaux termes du premier alinéa de larticle 202 du code de la famille et de laide sociale, repris à larticle L. 134-9 du code de laction sociale et des familles : « Le demandeur, accompagné de la personne ou de lorganisme de son choix, est entendu, lorsquil le souhaite, devant la commission départementale et la commission centrale daide sociale » ; que ces dispositions imposent à la commission centrale daide sociale de mettre toutes les parties présentes dans une instance à même dexercer la faculté qui leur est ainsi reconnue ; quà cet effet, elle doit, soit avertir les parties de la date de la séance, soit les inviter à lavance à lui faire connaître sil elles ont lintention de présenter des explications verbales pour quen cas de réponse affirmative de leur part, elle avertisse ultérieurement de la date de la séance celles des parties qui ont manifesté une telle intention ;
Considérant que la décision attaquée ne comporte aucune mention relative à la convocation des parties à laudience ; que ne figure au dossier aucune pièce justifiant que M. Régis ait été expressément invité à faire savoir sil souhaitait présenter des observations orales ; que, par suite, et alors même quil naurait pas demandé, dans sa demande introductive dinstance devant la commission départementale daide sociale, à être entendu par cette commission, M. Robert Régis est fondé à soutenir que les dispositions précitées de larticle L. 134-9 du code de laction sociale et des familles ont été méconnues ; quil y a lieu, pour ce seul motif, dannuler la décision attaquée et, évoquant la demande présentée par M. R... devant la commission départementale daide sociale de la Haute-Garonne, de statuer immédiatement sur cette demande ;
Considérant quil résulte de linstruction que, par un acte notarié du 24 mars 1981, M. Edouard Régis a donné à M. Robert R..., son fils, la nue-propriété dune fraction (165/480) dun bien immobilier sis dans la commune du Fousseret (Haute-Garonne), appréciés à cette date pour une valeur de 13 750 F, les deux autres fils du donateur recevant chacun en partage des droits égaux à la moitié de ceux reconnus à M. Robert R... ; que cette donation préciputaire a été conclue sous réserve dune clause de soins et dentretien, aux termes de laquelle M. Robert R... sest engagé à « loger, nourrir, entretenir, blanchir, chauffer, éclairer et soigner » son père, « tant en santé quen maladie » ; que ce dernier a bénéficié, du 1er octobre 1986 au 31 mai 1994, de la prise en charge par laide sociale de frais représentatifs de services ménagers, à concurrence dune somme de 117 276,05 F dont les éléments de calcul figurent au dossier ; que M. Edouard Régis est décédé le 31 août 1994 ; quà la date à laquelle sa succession a été ouverte, la valeur de lensemble des biens donnés à la fratrie a été estimée à 44 415 F ; que la collectivité débitrice de laide sociale a alors demandé à la commission cantonale dadmission à laide sociale du Fousseret la récupération, à lencontre du seul Robert R... et à lexclusion des autres donataires, de la totalité des sommes avancées au défunt ; que, le 16 septembre 1998, la commission cantonale a fait droit à cette demande, dans la limite dune somme de 20 000 F ; que M. Robert R... demande à être déchargé du paiement de cette somme ;
Considérant, en premier lieu, quil ressort des énonciations de sa décision que, pour statuer comme elle la fait, la commission cantonale sest fondée sur les dispositions de larticle 146 du code de la famille et de laide sociale ; que, toutefois, les textes applicables à une action en récupération dallocations daide sociale sont ceux en vigueur à la date à laquelle la situation de la personne contre laquelle cette action est exercée peut être regardée comme ayant été définitivement constituée ; que, sagissant dun recours exercé contre un donataire, il en est ainsi lorsque les deux conditions de lexistence dune donation et de ladmission du donateur à laide sociale sont réunies ; que, par suite, lorsquil statue sur un litige relatif à un recours contre une donation antérieure à louverture des droits à laide sociale, il appartient au juge de faire application des textes en vigueur à cette dernière date ; quaux termes de larticle 146 du code de la famille et de laide sociale, dans sa rédaction en vigueur à la date du 1er octobre 1986 à laquelle, postérieurement à la donation quil avait faite au profit de ses fils, M. Edouard R... a été admis au bénéfice de laide sociale, des recours peuvent être exercés par le département : « (...) b) Contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande daide sociale ou dans les cinq ans qui ont précédé cette demande » ; quil résulte de linstruction que monsieur Edouard Régis a formé sa première demande daide sociale le 24 février 1986, soit dans le délai de cinq ans suivant lintervention de la donation litigieuse, le 24 mars 1981 ; que, dès lors, la collectivité débitrice de laide sociale était tenue dexercer à lencontre des donataires, au nombre desquels figure le requérant, le recours en récupération prévu à larticle 146 précité ;
Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant soutient que ni lui, ni son père nauraient été informés, lors de linstruction de la demande daide sociale, de la liquidation de cette aide ou de louverture de la succession du demandeur, de lexistence dun tel recours, un tel moyen est inopérant à lappui de conclusions relevant de la compétence des juridictions daide sociale ; quil appartient seulement au requérant, sil sy croit fondé, dengager devant les juges compétents la responsabilité pour faute de ladministration de laide sociale ou celle du notaire chargé de la succession en cause ;
Considérant, en troisième lieu, que larticle 4 du décret du 15 mai 1961 susvisé dispose : « Les recours prévus à larticle 146 du code de la famille et de laide sociale sont exercés, dans tous les cas, dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de laide sociale. En cas de donation, le recours est exercé jusquà concurrence de la valeur des biens donnés par le bénéficiaire de laide sociale, appréciée au jour de lintroduction du recours (...). Le montant des sommes à récupérer est fixé par la commission dadmission saisie par le préfet » ; quil résulte de linstruction quà la date à laquelle le département de la Haute-Garonne a saisi la commission cantonale dadmission à laide sociale du Fousseret de la demande en récupération litigieuse, la valeur totale des biens donnés en 1981 était évaluée à 44 415F ; quainsi, compte tenu, dune part, de la quote-part des droits qui ont été donnés à M. Robert R..., dautre part, de la réévaluation qui pouvait en être faite, mais sans que pût être prise en considération la valeur des droits rachetés par lui à ses co-donataires, le recours en récupération pouvait être exercé, à son encontre, dans la limite dune somme de 22 207,50 F ; que, dès lors, le requérant nest pas fondé à soutenir que la somme de 20 000 F qui lui est réclamée serait disproportionnée par rapport à la valeur des biens qui lui ont été donnés ni, en tout état de cause, quelle excéderait les prévisions de larticle 4 du décret du 15 mai 1961 précité ;
Considérant, en quatrième et dernier lieu, quil ne résulte pas des pièces versées au dossier que la situation financière du requérant ne lui permettrait pas de payer la somme qui lui est réclamée ; que si M. Robert R... fait également valoir, sans être contredit sur ce point, quil est le seul de sa fratrie a avoir constamment assuré le soutien matériel et moral de son père, cette circonstance ne crée dans son chef aucun droit à modération du montant des sommes pouvant être récupérées à son encontre ; quen outre, il ressort des écritures du requérant lui-même quaprès vente de la propriété immobilière qui lui a été partiellement donnée, désintéressement de ses frères des parts minoritaires quils détenaient sur ce bien et règlement des frais dobsèques de son père, M. Robert R... est demeuré en possession de 82 000 F ; que, dès lors, en limitant à 20 000 F les sommes que le département de la Haute-Garonne pouvait récupérer à lencontre du requérant, la commission cantonale dadmission à laide sociale du Fousseret a fait une exacte appréciation de lensemble des circonstances de lespèce ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède, et sans quil y ait lieu de procéder à la substitution de base légale demandée par le président du conseil général de la Haute-Garonne, que la demande présentée par M. Robert R... devant la commission départementale daide sociale de ce département ne peut quêtre rejetée ; quil appartient au requérant, sil sy croit fondé, de demander au comptable public compétent un étalement de sa dette ;
Décide
Art 1er. - La décision susvisée du 20 avril 1999 de la commission départementale daide sociale de la Haute-Garonne est annulée.
Art. 2. - La demande présentée par M. Robert R... devant la commission départementale daide sociale de la Haute-Garonne, ensemble le surplus des conclusions de sa requête devant la commission centrale daide sociale, sont rejetés.
Art. 3. - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 3 juin 2003 où siégeaient M. Belorgey, président, M. Vieu, assesseur, M. Bereyziat, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 19 juin 2003.
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer