Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Recours en récupération - Donation - Assurance vie - Contrat |
Dossier no 020854
Mme L...
Séance du 31 mars 2003
Décision lue en séance publique le 4 avril 2003
Vu enregistré le 13 mai 2002 au secrétariat de la commission centrale daide sociale, la requête du président du conseil général de la Dordogne tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale annuler la décision du 7 mars 2002 de la commission départementale daide sociale de la Dordogne renvoyant à titre préjudiciel les parties à se pourvoir devant lautorité judiciaire pour quil soit statué sur la requalification en donation indirecte du contrat dassurance-vie souscrit le 29 mars 1999 par Mme Armelle L... au bénéfice de sa fille, Mme Jacqueline H... ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en date du 29 mai 2002 par lequel le président du conseil général de la Dordogne fait valoir ses moyens selon lesquels le contrat quinvoquait Mme H... devant le premier juge nest pas le contrat litigieux ; que sa mère avait souscrit à son profit quatre contrats dassurance-vie dont deux contrats par transformation de PEP, assurance-vie déclarés à ladministration ; que la totalité de ces placements semble avoir excédé lactif successoral, outre les deux PEP épargne transformés en PEP assurance sur les conseils du banquier, ce sont deux contrats dassurance-vie que M. puis Mme L... ont choisi de souscrire portant donc au nombre de quatre les placements hors succession ; que lintérêt de ces placements consiste en la diminution de lactif des net successoral et quil sagit dun appauvrissement volontaire visant à détourner une partie des avoirs des donateurs ; que le placement attaqué en linstance na été effectué par Mme L... quau profit de sa fille peu de temps après le règlement de la succession de M. L... et correspond à la valeur de la part de Mme H... sur la succession de son père, part pour laquelle elle fait valoir une dette de quasi-usufruit ; que par ce jeu décritures lactif de succession de Mme L... est encore réduit dautant ; quenfin, lâge de la bénéficiaire de laide sociale au moment de la souscription du contrat, soit quatre-vingt dix ans, permet de penser que ce placement ne peut être lobjet dune simple opération dépargne et de prévoyance, mais reflète bien la volonté davantager la fille unique par rapport à laction éventuelle de créanciers et/ou des services fiscaux ; que la souscription du contrat ne peut procéder dun seul souci de prévoyance ou de gestion du patrimoine ; que le département de la Dordogne sest vu renvoyé à lautorité judiciaire pour douze dossiers semblables sur quinze dossiers ; quil y a lieu à renvoi en lespèce ; quil sagit bien dune donation indirecte entrant dans le champ dapplication de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles ;
Vu enregistré le 26 juillet 2002, le mémoire en défense de Mme H... tendant au rejet de la requête par les motifs que diverses « erreurs » bizarres affectent les écritures du président du conseil général ; que certaines affirmations tendant à établir quelle aurait entendu minorer lactif successoral sont fausses et tendancieuses ; que la volonté dappauvrissement volontaire des donateurs nest pas établie alors que ceux-ci nont pas usé de la possibilité de dons manuels de 300 000 F dans les conditions prévues par la loi fiscale ; quelle a fourni à la Commission centrale daide sociale toutes indications sur sa situation personnelle et financière qui est précaire ; quelle a déjà remboursé au conseil général 260 000 F au titre de lallocation compensatrice de son père et de la prestation spécifique dépendance de sa mère et à la mutualité sociale agricole 446 000 F au titre de diverses prestations payées pour ses parents ;
Vu enregistré le 27 mars 2003, le nouveau mémoire du président du conseil général de la Dordogne persistant dans les conclusions de la requête par les mêmes moyens et les moyens que de 2000 à 2002, les onze dossiers présentés à la commission départementale daide sociale ont donné lieu à question préjudicielle ; quen arguant dun « problème de droit » et non de lexistence dune difficulté sérieuse dinterprétation, la commission départementale daide sociale est restée en deçà de sa compétence ; que lincompétence négative est constitutive dune erreur de droit ; quil y a excès de formalisme préjudiciable au département comme aux usagers ; que la capacité de remboursement du donataire ne pourra quévoluer à la baisse ; que lensemble des douze dossiers transmis depuis 2000 sont toujours dans lattente dune décision de lautorité judiciaire ; que la stipulation pour autrui présente toute les caractéristiques dune donation indirecte sans aléas sérieux ; que Mme L... a procédé de telle sorte que lactif successoral au moment de son décès serait sensiblement diminué ; que le capital souscrit na pas été utilisé alors que Mme L... a nécessité des soins lourds à la fin de sa vie (GIR. 2 PSD) ; que si lintérêt de Mme L... dont la souscription des quatre contrats nest pas avérée, celui de Mme H... apparaît avec évidence ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu le code des assurances ;
Vu le décret 90-1124 du 17 décembre 1990 ;
Après avoir entendu à laudience publique du 31 mars 2003, Mlle Erdmann, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que, comme le fait valoir le président du conseil général de la Dordogne, il nappartient au juge de laide sociale de surseoir à statuer pour renvoi préjudiciel à lautorité judiciaire de la question de la qualification comme donation indirecte de la stipulation pour autrui que constitue la souscription dun contrat dassurance-vie quen cas de difficultés sérieuses ;
Considérant que sil est vrai que la décision attaquée est seulement motivée par lénonciation que des « problèmes de droit se posent pour procéder à la requalification du contrat dassurance-vie ... « en donation indirecte » telle quappréciée par le département et quelle ne spécifie pas par ce seul motif le caractère sérieux de la difficulté justifiant selon les premiers juges le renvoi préjudiciel à lautorité judiciaire, il appartient au juge dappel dapprécier au vu de lensemble des pièces du dossier si en considérant comme sérieuses les difficultés rencontrées, le premier juge a dans lensemble des circonstances de laffaire entaché sa décision dune inexacte appréciation de la situation de lespèce, à supposer même la motivation de la décision attaquée entachée derreur de droit ;
Considérant que la circonstance que la commission départementale daide sociale aurait sursis à statuer dans douze dossiers sur quinze de requalification par le président du conseil général dun contrat dassurance-vie en donation indirecte, comme, après 2000, de onze dossiers sur onze ne saurait par elle-même, en labsence de tout élément fourni sur le contexte des décisions dont il sagit établir le bien-fondé de la critique de lappréciation de la commission départementale daide sociale dans la décision attaquée et ainsi quen lespèce, il nexistait aucune difficulté sérieuse de nature à entraîner un renvoi préjudiciel ;
Considérant que la circonstance que les parents de Mme H... auraient souscrit plusieurs contrats dassurance-vie au bénéfice de leur fille comme ils en avaient légalement la possibilité est par elle-même sans incidence sur la démonstration par ladministration de laide sociale de leur intention libérale au moment de la souscription du contrat litigieux ; que celle-ci dépend en effet essentiellement, dune part, de laléa procédant de lâge du souscripteur au moment de la souscription quant au bénéficiaire effectif du contrat, dautre part, de lensemble des placements effectués par le souscripteur de nature à caractériser ou non comme gestion patrimoniale normale la souscription litigieuse dun contrat dassurance-vie ; que dailleurs, de ce point de vue, Mme H..., dont la mère était considérée comme personne handicapée naurait pas été soumise à récupération de laide sociale dans le cadre de cette succession et que du point de vue de ses relations avec la collectivité daide sociale qui sont seules ou/et à tout le moins pour lessentiel à prendre en compte en linstance le président du conseil général nétant pas chargé de défendre les intérêts des services fiscaux, elle navait aucun intérêt à faire souscrire à ses parents un contrat constitutif de donation indirecte alors que la succession eut été elle-même exonérée de récupération ; quil nest dailleurs pas contesté que ladministration fiscale na opéré aucun redressement sur la succession ; quainsi lélément de démonstration avancé par le président du conseil général et tiré de ce que les parents de Mme H... auraient entendu diminuer lactif brut successoral au bénéfice de la requérante nest pas de nature à établir lintention libérale imputée à Mme Armelle L... pour la souscription du contrat litigieux ;
Considérant que sil est vrai que la souscriptrice avait 90 ans au moment de la souscription du contrat et que le montant de la prime est denviron 3 fois supérieur à celui des actifs mobiliers de sa succession après son décès, 18 mois plus tard, le président du conseil général nétablit pas que le premier juge na pu, eu égard au montant global de lactif brut hors la prime litigieuse que le notaire instrumentaire y avait réintégrée au regard du montant de cette prime, estimer sans entacher son appréciation dune erreur de droit ou de qualification de nature à entraîner sa censure par le juge dappel de plein contentieux dans un contexte juridique dailleurs incertain, en ce qui concerne la distinction par la Cour de Cassation du contrat dassurance-vie et du placement purement patrimonial, quil ne pouvait procéder lui-même à la requalification du contrat et quil a pu considérer, quelle quait pu être la pertinence de la motivation du premier juge, comme posant « une difficulté sérieuse » ; que de manière générale la présente formation de la commission centrale daide sociale, à supposer même quelle neut pas elle-même, si la question sétait posée directement à elle, procédé en lespèce au renvoi litigieux, considère que tant du moins que le Conseil dEtat naura pas statué avec précision sur la requalification des contrats « dassurance-vie décès » en donations, il y a lieu dans le contexte juridique général sus-rappelé de laisser aux premiers juges une latitude dappréciation en la matière et de ne censurer que des renvois très clairement injustifiés, alors même que le contrôle du juge dappel est en la matière un contrôle normal, dans une matière où la connaissance et la pratique relèvent dabord du juge judiciaire ; que de telles conditions dune censure à la position du premier juge ne sont pas remplies ; que la requête doit en conséquence être rejetée ;
Décide
Art. 1er. - La requête du président du conseil général de la Dordogne est rejetée.
Art. 2. - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 31 mars 2003 où siégeaient M. Lévy, président, Mlle Bauer, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 4 avril 2003.
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer