Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2220 |
DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE | ||
Mots clés : Domicile de secours - Collectivité locale - Aide sociale |
Dossier no 020220
Mlle R...
Séance du 3 mars 2003
Décision lue en séance publique le 18 mars 2003
Vu le recours formé par le Président du conseil général du Calvados, enregistré le 14 décembre 2001 au secrétariat de la commission centrale daide sociale, tendant à déterminer le domicile de secours de Mlle Fabienne R... pour la prise en charge de ses frais dhébergement au foyer « Les Hortensias » du centre daide par le travail (CAT) géré par lADAPEI de Flers (Orne) ;
Le requérant soutient, dune part, que Mlle Fabienne R..., qui réside habituellement au foyer « Les Hortensias » et ne rentre chez son père que les week-end, a conservé le domicile de secours quelle avait acquis dans lOrne, avant son entrée dans létablissement, par sa résidence au domicile dalors de son père, à Banvou (Orne), dautre part, quil na pas été informé dans les délais requis par larticle L. 122-4 du code de laction sociale et des familles, nayant reçu le dossier du département de lOrne que le 14 août 2000, alors que la demande de renouvellement de prise en charge avait été formulée dès le 26 mai 2000 ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2002, présenté par le président du conseil général de lOrne, qui conclut au rejet du recours et au maintien du titre émis à lencontre du département du Calvados ; il soutient que la section annexe du CAT, dans laquelle Mlle Fabienne R... a été admise, nétant pas un établissement régi par lancien article 168 du code de la famille et de laide sociale et par le 5o ou le 6o de larticle 3 de la loi du 30 juin 1975, relève de laide sociale facultative dont la charge incombe au département de résidence du bénéficiaire et non à celui où ce dernier possède son domicile de secours ; que dès lors quil apparaît que lintéressée réside les trois quarts de lannée chez son père, dans le Calvados, il y avait lieu soit de mettre fin à la mesure, soit de transmettre le dossier au département du Calvados, à charge pour ce dernier de continuer la mesure au titre de son aide facultative ou dy mettre fin ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 23 janvier 2003, présenté par le Président du conseil général du Calvados, qui conclut à son incompétence territoriale et qui demande quil soit ordonné le retrait du titre émis à son encontre le 27 octobre 2000 ; il soutient que la section annexe du CAT constituant un établissement dhébergement de jour prévu à larticle 3-5 de la loi du 30 juin 1975, cest bien la notion de domicile de secours qui permet de déterminer le département compétent pour la prise en charge des frais daccueil, et non pas la résidence comme le soutient le département de lOrne, qui sest dailleurs référé à cette notion sur létat des sommes dues au titre du foyer et de la section annexe du CAT, transmis le 28 septembre 2000 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu la loi no 75-535 du 30 juin 1975 ;
Vu la lettre en date du 21 octobre 2002 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale daide sociale si elles souhaitent être entendues à laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 3 mars 2003, M. Peronnet, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Sur la saisine du président du conseil général du Calvados en date du 12 décembre 2001 :
Considérant quil résulte de linstruction que Mlle Fabienne R..., qui est née en 1955, a quitté le domicile de son père, situé dans lOrne, pour entrer le 15 décembre 1997 au foyer « Les Hortensias » situé à Flers (Orne), où elle résidait depuis sa majorité, ce qui nest pas contesté, géré par lADAPEI, où elle a également été admise en « section annexe » ; que par une décision en date du 24 juin 1998 la commission dadmission à laide sociale a décidé la prise en charge des frais dhébergement au foyer depuis le 15 décembre 1997 et que par un arrêté en date du 26 juin 2000 le président du conseil général de lOrne a décidé de prendre en charge les frais de laccompagnement social proposé dans la section annexe du CAT à compter du 1er juillet 1998 ;
Considérant quaux termes de larticle 193 du code de la famille et de laide sociale alors en vigueur : « Nonobstant les dispositions des articles 102 à 111 du code civil, le domicile de secours sacquiert par une résidence habituelle de trois mois dans un département postérieurement à la majorité ou à lémancipation, sauf pour les personnes admises dans des établissements sanitaires ou sociaux (...), qui conservent le domicile de secours quelles avaient acquis avant leur entrée dans létablissement (...) » et quaux termes de larticle 194 du même code : « Lorsquil estime que le demandeur a son domicile de secours dans un autre département, le président du conseil général doit, dans le délai dun mois après le dépôt de la demande, transmettre le dossier au président du conseil général du département concerné. Celui-ci doit, dans le mois qui suit, se prononcer sur sa compétence. Si ce dernier nadmet pas sa compétence, il transmet le dossier à la commission centrale daide sociale instituée par larticle 129 » ;
Considérant quil est constant que le département de lOrne a transmis le 4 août 2000 au département du Calvados un dossier tendant à ce que ce dernier prenne en charge les frais dhébergement en foyer de Mlle Fabienne R..., au motif que celle-ci aurait acquis son domicile de secours dans le Calvados ; quà la suite du refus du département du Calvados, le département de lOrne a renouvelé sa démarche dans les mêmes termes par lettre du 25 octobre 2000 ; quà la suite dun nouveau refus du département du Calvados, celui-ci a enfin par requête du 12 enregistrée le 14 décembre 2001 mis en uvre la procédure décrite à larticle 194 du code de la famille et de laide sociale alors applicable en transmettant le dossier à la présente juridiction, tout en continuant de réfuter sa compétence pour la prise en charge des frais précités ;
Considérant que, si le quatrième alinéa de larticle 194 du code de la famille et de laide sociale fait obligation au président du conseil général du département qui estime quun demandeur de laide sociale a son domicile de secours dans un autre département de transmettre le dossier au département concerné « dans un délai dun mois après le dépôt de la demande », le point de départ du délai ainsi fixé commence à courir, lorsquil y a changement de domicile de secours postérieurement à une demande dadmission au bénéfice de laide sociale, à compter de la date à laquelle ce changement survient ; quen outre le délai dun mois de saisine du département concerné nest pas prescrit à peine de nullité ; que, dans ces conditions, le président du conseil général du Calvados nest pas fondé à soutenir que la contestation du domicile de secours de Mlle Fabienne R... par le département de lOrne était tardive ;
Considérant que Mlle Fabienne R... possédait son domicile de secours dans lOrne, où elle demeurait avec son père, avant son entrée en foyer ; quelle a conservé ce domicile de secours lors de son séjour dans cet établissement social, conformément à larticle 193 du code de la famille et de laide sociale ; que la fréquence de sa présence en section annexe du CAT (SACAT), qui ne constitue pas son lieu de résidence, ne peut avoir deffet sur ce domicile de secours ; que, dès lors, ce domicile de secours ne peut quêtre situé dans lOrne ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède quil y a lieu de mettre à la charge du département de lOrne les frais de placement au foyer dhébergement de Mlle R... ;
Sur le titre de perception du 27 octobre 2000 :
Considérant que la commission centrale daide sociale a été saisie en cours dinstance de conclusions relatives à ce titre tant par le président du conseil général de lOrne que par le président du conseil général du Calvados ;
Considérant que le 27 octobre 2000 le président du conseil général de lOrne a émis un titre dun montant de 43 156,57 F dont 12 548 F au titre de la section daccompagnement du centre daide par le travail où Mlle R... était accueillie et le solde au titre de frais dhébergement au foyer pour la période courant jusquau 31 août 2000 ; que le président du conseil général de lOrne demande le « maintien du titre » ; que le président du conseil général du Calvados demandant den « ordonner le retrait » ;
En ce qui concerne les frais dhébergement au foyer ;
Sur les conclusions du président du conseil général de lOrne ;
Considérant quil nappartient pas à la commission centrale daide sociale de « maintenir » un titre de perception émis par une autorité administrative dans le cadre de ses prérogatives à la demande de ladite autorité, mais seulement le cas échéant de statuer sur une opposition à ce titre ; que les conclusions du Président du conseil général de lOrne doivent être rejetées ;
Sur les conclusions du président du conseil général du Calvados ;
Considérant que si le président du conseil général du Calvados demande à la commission centrale daide sociale dordonner le retrait du titre émis à son encontre le 27 octobre 2000 et quil nappartient pas au juge de laide sociale dadresser des injonctions à ladministration, ces conclusions doivent être requalifiées en opposition à titre de perception ;
Considérant que le juge de laide sociale est compétent pour connaître des contestations relatives au recouvrement des créances daide sociale, y compris entre collectivités daide sociale ;
Considérant queu égard à lunique objet de lopposition qui ne présente à juger que limputation financière des frais litigieux, le litige est indivisible de celui précédemment soumis concernant ladite imputation et la Commission centrale daide sociale se reconnaît compétente en premier et dernier ressort ;
Considérant que le délai de recours nétait pas indiqué dans la notification du titre mais seulement la juridiction compétente ; quaucune forclusion ne doit être opposée au département du Calvados ;
Considérant quil résulte de ce quil a été dit ci-avant que les frais dhébergement de Mlle R... au foyer de Falaise sont à charge du département de lOrne ; que les conclusions du président du conseil général du Calvados doivent être en conséquence accueillies ;
En ce qui concerne les frais de la section annexe du centre daide par le travail (SACAT) ;
Considérant que le 26 juin 2000 le président du conseil général de lOrne a par une décision individuelle fondée ni sur le règlement départemental daide sociale ni sur une convention passée avec lADAPEI gestionnaire accordé la prise en charge de ces frais ; que le 28 septembre 2000 il a abrogé cette décision à compter du 1er octobre puis a émis à lencontre du département du Calvados un titre de perception pour le remboursement de la somme de 12 548 F (période du 1er avril au 31 août 2000) ;
Considérant que la présente section de la commission centrale daide sociale sest reconnue compétente lorsque les frais dintervention dun service ou dune structure daccueil ne relevant pas de larticle 168 du code de la famille et de laide sociale alors applicable étaient en litige, nonobstant la décision du Conseil dEtat SIPOS du 2 janvier 1983, en raison de létroite imbrication des situations daide sociale légale et daide sociale facultative à nouveau manifestée dans le présent litige, quil sagisse de statuer sur les droits de lassistée ou limputation financière de la dépense ; que dans sa décision du 28 octobre 2002 (Vaucluse contre Drôme) elle a rejeté la demande dimputation des frais dintervention dun service à un département qui navait pas passé convention avec son gestionnaire pour prévoir une telle prise en charge ; quelle na pas dénié sa compétence pour ce faire ; quen lespèce si aucune convention entre le département de lOrne et lADAPEI gestionnaire de la « SACAT » nest invoquée dans lensemble du dossier, il serait en pratique particulièrement contre-indiqué de renvoyer au tribunal administratif lexamen du litige relatif à cette section aux motifs que le département de lOrne na pas signé de convention avec le gestionnaire ; que la commission centrale daide sociale admettra sa compétence ;
Considérant que pour les mêmes motifs que ci-dessus en ce qui concerne le foyer il y a lieu de rejeter les conclusions du président du conseil général de lOrne ;
Considérant que le dossier ne permet pas de se prononcer sur la question de savoir si les frais litigieux sont ou non de la nature de ceux normalement pris en compte par lEtat dans le cadre de la dotation globale du centre daide par le travail, mais quen tout état de cause - en admettant que tel ne soit pas le cas - le département du Calvados navait signé aucune convention avec le gestionnaire ou le département de lOrne pour la prise en charge de frais de la structure dont il sagit ; que dailleurs Mlle R... résidait dans lOrne au foyer de Falaise ; que sans quil soit besoin dès lors de se prononcer sur la compétence de lEtat dans le cadre de la prise en charge des frais du budget principal du centre daide par le travail ou du département de lOrne qui a en tout état de cause admis sa compétence par la décision du 28 janvier 2000 et se borne à soutenir que la charge litigieuse est au département du Calvados, les conclusions dopposition à titre de perception du département du Calvados doivent être également accueillies en ce qui concerne la section annexe du centre daide par le travail ; quil semble bien dailleurs que les « SACAT » soient des structures doccupations diverses sans caractère professionnel, implantées dans des CAT et ouvertes, notamment, à des personnes handicapées hébergées en foyer qui y sont accueillies à temps partiel ; que limplantation en CAT dune activité sans caractère professionnel ne justifie pas la prise en charge par lEtat mais relève bien des départements au titre de laide sociale facultative ;
Considérant que la juridiction ne peut à nouveau quobserver que du fait des modalités de gestion du présent dossier par les collectivités daide sociale le gestionnaire se trouve amené à choisir entre une avance de trésorerie qui ne lui incombe pas et le renvoi de lassistée qui na évidemment pas les moyens de sacquitter du tarif ; que comme la plupart des litiges soumis en matière daide légale au placement et daide sociale facultative aux adultes handicapés, le présent litige pose la question des règles dimputation financières des dépenses daide sociale légale selon le domicile de secours de lassistée dune part, de la mise à jour des compétences de laide sociale légale compte tenu de la diversification des modes de prise en charge depuis plus de vingt-cinq ans sans que les textes relatifs aux interventions de laide sociale en ce qui concerne le financement des établissements et services par la collectivité naient été adaptés à une telle situation, dautre part ;
Décide
Art. 1er. - Pour la prise en charge des frais dhébergement au foyer de Falaise, le domicile de secours de Mlle Fabienne R... est fixé dans le département de lOrne.
Art. 2. - Le titre de perception du 27 octobre 2000 est annulé en tant quil met à la charge du département du Calvados une somme de 43 156,57 F.
Art. 3. - Lensemble des conclusions du président du conseil général de lOrne est rejeté.
Art. 4. - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 3 mars 2003 où siégeaient M. Lévy, président, Mme Jégu, assesseur, M. Peronnet, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 18 mars 2003
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer