Dispositions spécifiques aux différents types daide sociale |
3420 |
AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH) | ||
Mots clés : Personnes handicapées - Hébergement - Foyer à double tarification - COTOREP |
Dossier no 000472
Mlle B...
Séance du 23 septembre 2002
Décision lue en séance publique le 13 janvier 2003
Vu, enregistré par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Vosges, le recours introduit par la fondation de linstitution des jeunes aveugles et déficients visuels de Nancy dont le siège est dans cette ville, 8, rue de Santifontaine (54098) et dirigé contre la décision du 16 septembre 1999 par laquelle la commission départementale daide sociale a confirmé celle du 21 mai 1999 de la commission dadmission du canton de Saint-Dié de rejeter la demande de prise en charge des frais dhébergement de Mlle B... dans létablissement pour mineurs gérés par la requérante dans la mesure où lintéressée y a été maintenue après son vingtième anniversaire à défaut de pouvoir être orienté, conformément à la décision de la commission technique dorientation et de reclassement professionnel (COTOREP) du 21 août 1997, dans un foyer à double tarification dépourvu de base légale, et ce, par les moyens que :
1o larrêté du 7 août 1998 du président du conseil général du département des Vosges prévoit que cette collectivité « (...) prend en charge les frais de maintien des jeunes adultes handicapés en établissement déducation spéciale, faute de place en foyer de vie ou foyer occupationnel (...) » ;
2o les frais dhébergement dune personne admise au foyer à double tarification de Vézelise, géré par la fondation sont supportés par le département des Vosges ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense du président du conseil général du département des Vosges du 1er février 2000 tendant au rejet des conclusions de la requête susvisée aux motifs que les foyers à double tarification étant dépourvus de base légale et la circulaire du 27 janvier 1995 du ministre des affaires sociales relative aux modalités dapplication de lamendement dit Creton ayant été annulée, la collectivité débitrice de laide sociale ne peut prendre à sa charge les frais dhébergement de Mlle B... au centre déducation pour déficients visuels de Nancy dans la mesure où celle-ci y a été maintenue à défaut de pouvoir être placée dans un foyer à double tarification ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Après avoir entendu à laudience publique du 23 septembre 2002, M. Goussot, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que la carence de lEtat dune part à clarifier par des normes réglementaires appropriées les dispositions législatives dites « amendement Creton » qui à lheure actuelle donnent lieu à des différences de jurisprudence tant quant à la compétence que quant au fond entre ordres de juridictions, dautre part à conférer depuis leur « institution » en 1986 par une circulaire ultérieurement modifiée en 1995 et ayant donné lieu à annulation en 1997 par le Conseil dEtat une base réglementaire au financement des « foyers à double tarification » qui nen ont dailleurs toujours pas, ne peut quamener « sur le terrain » notamment lorsque sont en cause, comme en lespèce, les rapports entre dépenses dorientation non avérée en foyer à double tarification et dépenses de maintien en institut médico-éducatif, à des conflits inextricables entre organismes financeurs, assurance maladie et collectivités daide sociale ; que cette situation en général ignorée ou supportée par la trésorerie des établissements est illustrée, toutefois, par le présent litige ;
Considérant certes que la requête comme la demande de létablissement « de maintien » (centre déducation pour déficients visuels Santifontaine) dune personne handicapée orientée vers une structure de type foyer à double tarification, en labsence de place disponible, ainsi que le mémoire en défense se bornent à faire état de circulaires tant ministérielles que du département des Vosges et de la caisse nationale dassurance maladie également illégales et, en ce qui concerne le requérant, à faire valoir que sur leur fondement « laide sociale des Vosges prend en charge les frais dhébergement dune personne admise » dans un établissement géré par lassociation gestionnaire du centre ; quainsi, dans le présent litige comme du reste dans la plupart de ceux dont est saisie la présente juridiction la question posée au juge de plein contentieux de laide sociale est de savoir si et dans quelle mesure il y a lieu de sen tenir à largumentation des parties ou de juger le litige en considérant lessentiel des questions posées comme dordre public, alors quelles ne le seraient pas dans dautres contentieux ; quen lespèce, néanmoins, compte tenu de la carence sus rappelée qui est de nature à induire en erreur des gestionnaires qui ne sont pas des juristes professionnels, la commission centrale daide sociale optera pour la seconde alternative ;
Considérant que par une décision conjointe au titre de larticle 6-I bis de la loi du 30 juin 1975 modifiée devenu L. 242-4 du code de laction sociale et des familles en date du 24 août 1997 et du 20 mars 1998 la COTOREP et la CDES ont orienté Mlle B... née le 5 avril 1978 vers un « placement en foyer à double tarification » et maintenu « en labsence de place disponible », par ailleurs la jeune fille dans létablissement Santifontaine ; que lorientation décidée était une orientation générale et ne procédait pas de la désignation dun établissement donné relevant donc du deuxièmement de larticle L. 323-11 du code du travail ;
Considérant que par la décision attaquée du 21 mai 1999 confirmée en première instance la commission dadmission à laide sociale de Saint-Dié refusait la prise en charge par laide sociale au motif que les foyers à double tarification sont dépourvus de base légale ;
Considérant que si la décision conjointe portait sur la période du 6 avril 1998 au 5 avril 1999 et si figure au dossier une décision du 5 août 1999 de la COTOREP (sans décision conjointe concomitante de la commission départementale déducation spéciale) orientant à nouveau Mlle B... vers « une place en foyer à double tarification » pour un an à compter du 5 août 1999, cette nouvelle décision de lun des co-décisionnaires seulement ne prive pas dobjet le litige pour la période deffet de la décision conjointe du 1er avril 1998 au 5 avril 1999 ; quen létat des moyens de la commission centrale il nest pas possible de pourvoir à des suppléments dinstruction supplémentaires pour déterminer la situation à la date de la présente décision ; que si en réalité une décision conjointe avait été maintenue après le 5 avril 1999, il appartiendrait aux parties de régler le litige compte tenu des motifs de la présente décision sous le contrôle à nouveau en tant que besoin du juge de laide sociale ;
Considérant certes quune orientation par la COTOREP vers une structure dépourvue de base légale ne saurait en son principe lier la commission dadmission à laide sociale statuant sur les conditions administratives de prise en charge et que si celle-ci doit appliquer en principe la décision même illégale de la COTOREP, elle ne peut être tenue dadmettre à laide sociale dans une structure dépourvue dexistence juridique ;
Considérant par ailleurs et pour faire reste de droit au moyen inopérant du directeur du centre pour déficients visuels Santifontaine que les « foyers à double tarification » ne sont pas dans la terminologie administrative communément appliquée des « foyers occupationnels » et quainsi la circulaire du 7 avril 1998 du président du conseil général des Vosges qui concerne les frais de maintien en cas dorientation inaboutie vers des foyers « occupationnels » est sans incidence ;
Mais considérant quil convient, dune part, décarter largumentation inopérante de la défense du président du conseil général des Vosges et de rechercher dautre part la base légale de la participation de laide sociale ;
Considérant que la COTOREP na pas, comme il la été ci-dessus rappelé, désigné un foyer déterminé au titre du troisièmement du 1 de larticle L. 323-11 du code du travail, mais sest « prononcée sur lorientation de la personne handicapée » au titre de son deuxièmement ; quainsi, en droit comme en fait, elle ne peut quêtre regardée nonobstant la mention juridiquement inopérante « à double tarification » comme ayant entendu orienter Mlle B... vers un « foyer » de la nature de ceux prévus à larticle 168 du code de la famille et de laide sociale alors applicable ; quen tout état de cause en effet les foyers illégalement transformés en foyers à double tarification sont considérés par le juge du tarif et le seront par la présente commission comme des foyers et quen tout état de cause encore aucun élément du dossier ne permet de présumer que lensemble des foyers de la nature de ceux vers lesquels a été orientée la requérante seraient des « foyer à double tarification » créés ex nihilo et comme tels dépourvus de tout lien avec un foyer préexistant ; que dans ces conditions il y a lieu de considérer que la commission dadmission à laide sociale était tenue dadmettre la requérante à la prise en charge des frais de maintien pour le quantum légalement à charge de laide sociale du département, cest-à-dire selon la jurisprudence du Conseil dEtat qui sera ici appliquée à lexclusion de celle de la Cour de cassation, les frais dhébergement et les frais déducation à lexclusion des frais de soin, tels que ces frais résultent des bases du tarif de létablissement de maintien en fonction de chacun des tarifs applicables durant la période dorientation décidée par la COTOREP (cf. Conseil dEtat du 7 mai 1999 département de lEssonne, décision quil y aura lieu pour le département des Vosges de prendre en compte pour lexécution de la présente décision) ;
Considérant que le moyen tiré par le président du conseil général des Vosges de ce quune circulaire de la Caisse nationale dassurance maladie aurait admis que les frais de maintien en « foyers à double tarification » seraient à charge de lassurance maladie ces structures se rapprochant davantage des maisons daccueil spécialisées que des foyers est inopposable au requérant ; quil est inopérant ;
Considérant que le moyen tiré de la « médicalisation institutionnelle » nécessaire à Mlle B... est également inopérant puisque, ainsi quil résulte de ce qui précède les frais de soins dans létablissement de maintien demeurent à charge de lassurance maladie ; quun refus de financement par la caisse primaire dassurance maladie de telles dépenses relèverait de la compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale ;
Considérant quil nappartient pas au président du conseil général de mettre en cause dans la présente instance la décision dorientation de la COTOREP quil na pas attaquée devant la juridiction compétente en faisant valoir que « Mlle B... naurait dû être orienté quen maison daccueil spécialisée » ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède que le directeur du centre de déficients visuels Santifontaine doit être renvoyé devant le président du conseil général des Vosges afin que la commission dadmission à laide sociale statue sur le quantum des frais autres, que les frais de soins à prendre en charge par le département des Vosges sur la base des tarifs applicables durant la période litigieuse conformément aux motifs de la présente décision,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale des Vosges du 16 septembre 1999 et la décision de la commission dadmission à laide sociale de Saint-Dié du 21 mai 1999 sont annulées.
Art. 2. - Mlle Barbaro est admise à laide sociale au placement des adultes handicapés pour la prise en charge de ses frais de maintien au centre pour déficients visuels Santifontaine de Nancy du 6 avril 1998 au 5 avril 1999.
Art. 3. - Le directeur du centre déducation pour déficients visuels Santifontaine est renvoyé devant le président du conseil général des Vosges pour examen des droits de Mlle Barbaro en ce qui concerne le quantum de la participation de laide sociale sur les bases fixées par la présente décision.
Art. 4. - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 23 septembre 2002 où siégeaient M. Lévy, président, M. Pages, assesseur, M. Goussot, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 13 janvier 2003.
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer