Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Vie maritale - Foyer
 


Dossier no 216066

M. Silvy
Séance du 22 mai 2002

Lecture du 12 juin 2002

    Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 janvier et 9 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Robert Silvy, demeurant chez Mme Le Coz, Belle Eau, au Mesnil-Bacley (14140) ;
    M. Silvy demande au Conseil d’Etat d’annuler la décision en date du 15 mars 1999 par laquelle la commission centrale d’aide sociale, statuant en appel d’une décision du 13 septembre 1996 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Calvados a confirmé, d’une part, une décision du 14 juin 1995 du préfet du Calvados lui refusant le bénéfice du revenu minimum d’insertion, d’autre part, une décision du 26 octobre 1995 du même préfet prescrivant à Mme Le Coz le remboursement d’un trop perçu de 53 750,00 F d’allocation de revenu minimum d’insertion, a annulé ces décisions mais a constaté l’existence d’une vie maritale entre M. Silvy et Mme Le Coz et les a renvoyés devant le préfet du Calvados pour réexamen de leur situation ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code civil ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 ;
    Vu le décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 ;
    Vu le code de justice administrative ;
    Après avoir entendu en audience publique :
    -  le rapport de Mlle Courreges, auditeur ;
    -  les observations de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat de M. Silvy ;
    -  les conclusions de Mme Boissard, commissaire du Gouvernement ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 3 de la loi du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d’insertion : « Le revenu minimum d’insertion varie dans des conditions fixées par voie réglementaire selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge. Son montant est fixé par décret et révisé deux fois par an en fonction de l’évolution des prix » ; qu’aux termes de l’article 1er du décret du 12 décembre 1988 relatif à la détermination du revenu minimum d’insertion dans sa rédaction en vigueur à la date des faits : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire (...) est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint ou concubin de l’intéressé ou soient à sa charge » ; que l’article 2 du même décret dans sa rédaction alors applicable dispose que : « Sous réserve des dispositions de l’article 8 de la loi du 1er décembre 1988 susvisée, sont considérés comme à charge : 1o Les enfants ouvrant droit aux prestations familiales ; 2o Les autres personnes de moins de vingt-cinq ans qui sont à la charge réelle et continue du bénéficiaire à condition, lorsqu’elles sont arrivées au foyer après leur dix-septième anniversaire, d’avoir avec le bénéficiaire ou son conjoint ou concubin un lien de parenté jusqu’au quatrième degré inclus (...) » ; qu’enfin, aux termes de l’article 3 du même décret : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent, sous les réserves et selon les modalités ci-après, l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer, tel qu’il est défini à l’article 1er, et notamment les avantages en nature, les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ;
    Considérant que, pour l’application des dispositions précitées, le concubin est la personne qui mène avec le demandeur une vie de couple stable et continue ; que pour estimer que M. Silvy et Mme Le Coz composaient un foyer au sens du décret du 12 décembre 1998, la commission centrale d’aide sociale s’est fondée exclusivement sur ce que ces deux personnes étaient copropriétaires d’un bien immobilier qu’elles occupaient ensemble depuis 1993, sans rechercher si les intéressés menaient une vie de couple stable et continue ; qu’elle a ainsi entaché sa décision d’erreur de droit ; que cette décision doit, dès lors, être annulée ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat, s’il prononce l’annulation d’une décision d’une juridiction administrative statuant en dernier ressort, « peut régler l’affaire au fond si l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie » ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au fond ;
    Sur les droits de Mme Le Coz :
    Considérant que si M. Silvy et Mme Le Coz étaient copropriétaires d’une maison d’habitation qu’ils occupaient ensemble depuis 1993, il ne résulte pas de l’instruction que les intéressés vivaient en concubinage ; que, d’ailleurs, par un arrêt du 3 mai 1999, la cour d’appel de Caen statuant sur le droit de Mme Le Coz au bénéfice de l’allocation de parent isolé à compter de 1993 a estimé que la réalité d’une vie maritale entre M. Silvy et Mme Le Coz n’était pas démontrée ; que, par suite, c’est à tort, que, par sa décision du 13 septembre 1996, la commission départementale d’aide sociale du Calvados, confirmant une décision du préfet du Calvados du 26 octobre 1995, a considéré que, faute d’avoir déclaré son concubinage avec M. Silvy, Mme Le Coz était tenue de rembourser la somme de 53 750,00 F correspondant à un trop perçu d’allocation de revenu minimum d’insertion pour la période de décembre 1993 août 1995 ; qu’il y a lieu, par voie de conséquence, de décharger Mme Le Coz du paiement de cette somme ;
    Sur les droits de M. Silvy :
    Considérant que, pour rejeter la demande de M. Silvy tendant au bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion, l’administration s’est fondée sur le caractère incomplet de sa déclaration de ressources, faute pour lui d’avoir fait état de sa situation de concubinage ; qu’il y a lieu d’annuler cette décision par voie de conséquence de ce qui a été dit ci-dessus et de renvoyer l’intéressé devant le préfet du Calvados afin que soient calculés ses droits à l’allocation de revenu minimum d’insertion, en fonction de ses ressources propres, à compter du 1er mai 1995, en tenant compte des intérêts moratoires dus sur la somme ainsi calculée ;
    Considérant que si M. Silvy demandait, en outre, à ce que l’Etat soit condamné à lui verser une somme de 10 000,00 F à titre de dommages et intérêts, ces conclusions soulèvent un litige distinct qui échappe à la compétence des juridictions de l’aide sociale ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission centrale d’aide sociale en date du 15 mars 1999, la décision de la commission départementale d’aide sociale du Calvados en date du 13 septembre 1996 et les décisions du préfet du Calvados en date du 14 juin 1995 et du 26 octobre 1995 sont annulées.
    Art. 2.  -  Mme Le Coz est déchargée du paiement de la somme de 53 700,00 F mise à sa charge par le préfet du Calvados.
    Art. 3.  -  M. Silvy est renvoyé devant le préfet du Calvados afin qu’il soit statué, selon les modalités énoncées dans les motifs de la présente décision, sur ses droits à l’allocation de revenu minimum d’insertion à compter du 1er mai 1995.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions de la requête de M. Silvy est rejeté.