Dispositions spécifiques aux différents types daide sociale |
3210 |
REVENU MINIMUM DINSERTION (RMI) | ||
Mots clés : Conditions de ressources |
Conseil dEtat statuant au contentieux
Dossier no 213496
M. Dupont
Séance du 10 avril 2002
Lecture du 15 mai 2002
Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 18 octobre 1999, 4 septembre 2000 et 29 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil dEtat, présentés pour M. Jean Dupont, demeurant 68, rue Edouard-Nortier à Neuilly-sur-Seine (92200) ; M. Dupont demande au Conseil dEtat lannulation de la décision du 1er juin 1999 par laquelle la commission centrale daide sociale a rejeté sa demande tendant au bénéfice de lallocation de revenu minimum dinsertion ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré présentée pour M. Dupont ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 ;
Vu le décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Landais, auditeur ;
- les observations de Me Odent, avocat de M. Dupont,
- les conclusions de Mme Boissard, commissaire du Gouvernement ;
Considérant quil résulte de linstruction que M. Dupont, qui contestait devant la commission centrale daide sociale la décision de la commission départementale daide sociale du 12 décembre 1996, a déposé, le 12 mai 1999, une demande daide juridictionnelle ; quil a informé, le 18 mai 1999, la commission centrale du dépôt de cette demande ; que, dans ces conditions, la commission centrale daide sociale ne pouvait, sans méconnaître les règles générales de procédure applicables devant elle, sabstenir de différer le jugement de laffaire jusquà ce que lintéressé ait reçu notification de la décision prise sur sa demande daide juridictionnelle ; que cette notification nest intervenue que le 3 juin 1999 ; que, par suite, la décision prise le 1er juin 1999 par la commission centrale daide sociale est entachée dirrégularité ; que, M. Dupont est, dès lors, fondé à en demander lannulation ;
Considérant quil y a lieu, dans les circonstances de lespèce, de faire application des dispositions de larticle L. 821-2 du code de justice administrative et de régler laffaire au fond ;
Considérant quil résulte des dispositions de larticle 128 du code de la famille et de laide sociale et de larticle 27 de la loi du 1er décembre 1988 que les commissions départementales daide sociale sont des juridictions administratives lorsquelles statuent sur les décisions relatives à lallocation de revenu minimum dinsertion ; quil suit de là que ces juridictions doivent observer les règles générales de procédure qui nont pas été écartées par une disposition législative expresse ou qui ne sont pas incompatibles avec leur organisation ; quau nombre de ces règles figure celle suivant laquelle ces décisions doivent être motivées ;
Considérant quen se bornant à confirmer la décision par laquelle le préfet a refusé à M. Dupont le bénéfice de lallocation de revenu minimum dinsertion sans répondre à largumentation soulevée en défense par le requérant, la commission départementale daide sociale des Hauts-de-Seine a insuffisamment motivé sa décision ; que, par suite, cette décision en date du 12 décembre 1996 doit être annulée ;
Considérant quil y a lieu dévoquer et de statuer sur la demande présentée par M. Dupont devant la commission départementale daide sociale ;
Considérant quaux termes de larticle 3 du décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de lallocation de revenu minimum dinsertion comprennent, sous les réserves et selon les modalités ci-après, lensemble des ressources, de quelque nature quelles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) et notamment les avantages en nature, les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; quaux termes de larticle 7 du même décret : « Lorsque les biens ou capitaux mentionnés à larticle 3 ne sont ni exploités, ni placés, ils sont censés procurer aux intéressés un revenu annuel évalué à 50 % de leur valeur locative sil sagit dimmeubles bâtis, à 80 % de cette valeur sil sagit de terrains non bâtis et à 3 % des capitaux » ;
Considérant quil résulte de ces dispositions que lensemble des revenus procurés par le placement de capitaux doit être pris en compte pour la détermination de lallocation de revenu minimum dinsertion ; que, lorsquun allocataire ou un demandeur dallocation dispose dun capital qui nest pas placé, il est présumé percevoir un revenu annuel de 3 % de ce capital ; que, par suite, doivent être pris en compte pour le calcul de lallocation de revenu minimum dinsertion les revenus procurés par des capitaux placés en épargne-retraite sans que puisse y faire obstacle la circonstance que le capital et les intérêts seraient temporairement indisponibles ; quen labsence de dispositions prévoyant lexclusion de telles ressources de la base de calcul de lallocation de revenu minimum dinsertion, les revenus tirés dune indemnité perçues en réparation dun préjudice doivent être pris en compte alors même que les services fiscaux considéreraient cette indemnités comme non imposable ;
Considérant quil résulte de linstruction que M. Dupont a déposé, le 25 octobre 1993, une demande tendant au bénéfice de lallocation de revenu minimum dinsertion pour lui-même et une personne à charge ; quil nest pas contesté quil avait, en octobre 1992, perçu une indemnité de dédit, réparant le préjudice causé par la non-réalisation dune opération immobilière, dont le montant sélevait à 800 000,00 F ; que, sur ces 800 000,00 F, 210 000,00 F ont été placés en épargne-retraite et procurait à M. Dupont un revenu de 9 % par an ; que, par suite, et compte tenu de ce qui a été dit plus haut, les ressources de M. Dupont, à la date de sa demande, devaient être regardées comme comprenant des revenus mensuels de capitaux pour 1 575,00 F ; quen outre, M. Dupont a déclaré avoir perçu, pendant le trimestre précédant sa demande, un salaire de 7 820,00 F, soit 2 606,00 F par mois, en contrepartie dune activité de garde denfant ; quenfin, et conformément aux dispositions de larticle 4 du décret du 12 décembre 1988 précité, M. Dupont disposait dun avantage en nature de 540,00 F par mois, correspondant à 16 % de lallocation de revenu minimum dinsertion pour deux personnes, au titre de loccupation gratuite de son logement ; quainsi, à la date de sa demande, ses ressources mensuelles atteignaient au moins 4 721,00 F, soit un montant supérieur au plafond de lallocation de revenu minimum dinsertion pour deux personnes qui était alors de 3 379,50 F ;
Considérant quil résulte de ce qui précède que M. Dupont nest pas fondé à demander lannulation de la décision du 12 avril 1994 par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine lui a refusé le bénéfice de lallocation de revenu minimum dinsertion au motif que ses ressources étaient supérieures au plafond ;
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission centrale daide sociale en date du 1er juin 1999 ainsi que la décision de la commission départementale daide sociale des Hauts-de-Seine du 12 décembre 1996 sont annulées.
Art. 2. - La demande présentée par M. Dupont devant la commission départementale daide sociale des Hauts-de-Seine est rejetée.
Art. 3. - La présente décision sera notifiée à M. Jean Dupont et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.