Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) - Recours en récupération - Assurance-vie |
Dossier no 000259
Mme V...
Séance du 27 février 2002
Décision lue en séance publique le 7 mars 2002
Vu la requête enregistrée le 17 décembre 1999, présentée par le président du conseil général de lHérault, tendant à lannulation de la décision du 28 octobre 1999 par laquelle la commission départementale daide sociale de lHérault a infirmé sa décision du 1er juillet 1997 mettant à la charge des deux filles de Mme V... la somme de 16 250,00 F au titre dun recours en récupération de donation ;
Il soutient quil lui était possible dintroduire un recours en récupération sur donation en qualifiant de donation indirecte les versements résultant dun contrat dassurance-vie ; quil y a lieu de rechercher si la souscription dun contrat dassurance-vie au profit dun tiers est constitutive en cas de décès du souscripteur sans quil ait été mis un terme de son vivant à ce contrat, dune libéralité au profit de ce tiers, exposant ce dernier à un recours sur donation ; que la souscription dun contrat dassurance vie par un bénéficiaire de laide sociale est contraire au principe du droit de laide sociale, en ce que la personne demande laide de la collectivité publique alors que dans le même temps, elle sappauvrit des primes versées sur le contrat ; que la commission départementale a commis une erreur de droit en fondant sa décision sur un motif tiré de ce que la requalification dun contrat dassurance-vie en donation ne pouvait trouver son fondement que dans lintention frauduleuse du souscripteur ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 octobre 2001, présenté par Mme Solange V..., qui conclut au rejet de la requête. Elle soutient que le contrat dassurance-vie souscrit par sa mère ne peut être regardé comme une donation déguisée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le code de la famille et de laide sociale ;
Vu la lettre en date du 21 mars 2000 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale daide sociale si elles souhaitent être entendues à laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 27 février 2002, M. Lenica, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Sans quil soit besoin de statuer sur la question de savoir si le contrat dassurance-vie souscrit par lépouse de lassisté, marié sous le régime de la communauté, est susceptible dêtre, pour la moitié du montant souscrit, récupéré à lencontre du bénéficiaire sur le fondement de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles ;
Considérant que la stipulation pour autrui constituée par le contrat dassurance-vie peut être requalifiée en donation, si ladministration de laide sociale établit lintention libérale du souscripteur vis à vis du bénéficiaire au moment de la souscription du contrat, alors même que lacceptation du bénéficiaire ne se serait réalisée, mais rétroactivement, quau moment ou le promettant lui a versé les sommes dues en application du contrat après le décès du stipulant ; que la preuve de lintention libérale doit être apportée par ladministration, sous réserve de question préjudicielle à lautorité judiciaire, en cas de difficultés sérieuses, alors même que, comme le fait valoir à bon droit le président du conseil général de lHérault, la stipulation pour autrui ne peut être requalifiée en donation déguisée, mais bien en donation indirecte, comme dailleurs lavait antérieurement jugé la présente commission, revenant en cela sur sa décision du département du Nord du 25 mai 1998 (cf. par exemple no 992.226 Mme D... du 16 août 2001 à paraître aux cahiers de jurisprudence de laide sociale no 12) ;
Considérant quaux termes de larticle 194 du code civil « la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui laccepte » ; quaux termes de larticle L. 132-14 du code des assurances, le capital ou la rente garanti au profit dun bénéficiaire déterminé ne peuvent être réclamés par les créanciers du contractant, ces derniers ont seulement droit au remboursement des primes dans le cas indiqué par larticle L. 132-13, 2e alinéa » aux termes duquel « le capital ou la rente payable au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant. Ces règles ne sappliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci naient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés » ;
Considérant que, compte tenu de ces dispositions, un contrat dassurance-vie ne peut être requalifié par le juge de laide sociale en donation que lorsque eu égard à lensemble des circonstances de la souscription du contrat, le stipulant se dépouille au profit du bénéficiaire de manière actuelle et, nonobstant la possibilité de résiliation du contrat, en fait non aléatoire et ne se borne pas à un acte de gestion de son patrimoine ; que dans une telle situation, notamment lintention libérale doit être regardée comme établie et la stipulation pour autrui peut être requalifiée en donation ; que par contre, tout contrat dassurance-vie nest pas par lui-même une donation indirecte, même sil désigne le bénéficiaire comme titulaire des droits, nés de la souscription du contrat après le décès du stipulant ;
Considérant quil nest pas clairement établi en lespèce queu égard à lâge du stipulant au moment de la souscription du contrat (72 ans), à la durée de ce contrat, au montant des primes, seules susceptibles dêtre prises en compte, comme ladmet du reste le président du conseil général, - même libres - par rapport aux ressources et au patrimoine des époux V..., le contrat souscrit par M. V... ait été à tel point dépourvu daléas et étranger à une gestion normale de son patrimoine par lintéressé, quil procédât dune volonté de se dépouiller de manière actuelle et certaine au bénéfice de ses filles ; quainsi lintention libérale ne peut être regardée comme établie ; que la seule circonstance commune à toute souscription dun contrat dassurance-vie au bénéfice denfants que M. V... ait souscrit le contrat pour que son produit nentre pas en compte dans la liquidation de la succession, doù il suit en lespèce, quaucune succession na été déclarée, selon le président du conseil général de lHérault, demeure par elle-même sans effet sur ladministration de la preuve de lintention libérale qui appartient à ladministration ;
Considérant dailleurs, en tout état de cause, quà supposer même quune telle preuve eut été apportée, il résulte de linstruction et notamment du mémoire non contesté des intéressés, enregistré le 18 octobre 2001 et communiqué au président du conseil général, quà tout le moins, Mme Solange V... aurait été fondée devant le juge de laide sociale à solliciter la remise de la créance de celle-ci, nonobstant la circonstance quelle sest engagée à verser une rente de 1 800,00 F par an (valeur 1972) à ses parents lors de la donation de la maison familiale, alors que, par ailleurs, elle a assisté sa mère, sévèrement handicapée, au-delà, clairement, de ce que justifiait lexercice normal de son obligation alimentaire ;
Décide
Art. 1er. - La requête du président du conseil général de lHérault est rejetée.
Art. 2. - La présente décision sera transmise au ministre de lemploi et de la solidarité à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 27 février 2002 où siégeaient M. Levy, président, Mme Covin-Leroux, assesseur, M. Lenica, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 7 mars 2002.
La République mande et ordonne au ministre de lemploi et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | Le rapporteur |
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer