Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Placement en établissement - Aide sociale - Recours en récupération
 

Dossier no 980162

M. B...
Séance du 10 juillet 2001

Décision lue en séance publique le 4 décembre 2001

    Vu le recours formé par MM. Michaël et Daniel B..., le 17 octobre 1997, tendant à l’annulation ensemble de la décision en date du 16 octobre 1997 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Loire a maintenu la décision de récupération de la totalité de l’actif successoral disponible de la succession de M. Marcel B..., en recouvrement partiel de la créance détenue par le département du fait de la prise en charge de l’intéressé au bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées pour des frais de placement à la maison de retraite Saint-Jean-Bonnefonds du 30 juin 1994 au 3 mars 1996, date de son décès et de la décision administrative de la commission cantonale d’admission de Saint-Etienne 3 en date du 20 décembre 1996 décidant la récupération de l’intégralité de l’actif net successoral ;
    Les requérants soutiennent que la décision de la commission départementale d’aide sociale et celle de la commission d’admission sont irrégulières ; ils excipent également de l’illégalité de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale ainsi que d’une évaluation erronée de l’actif net successoral permettant de déterminer la part récupérable de la créance d’aide sociale détenue par le département de la Loire ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les observations du président du conseil général de la Loire en date du 21 août 1998 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
    Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
    Vu le code civil et notamment les articles 205 et suivants ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu les lettres en date du 13 novembre 1998 demandant aux requérants s’ils souhaitent être entendus à l’audience et celles en date du 23 mai 2001 les convoquant régulièrement à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 10 juillet 2001, M. Rosat, rapporteur, M. Michaël B..., présent à l’audience, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions attaquées ;
    Considérant que les consorts B... demandent l’annulation, ensemble, de la décision de la commission départementale d’aide sociale en date du 16 octobre 1997 et celle de la commission d’admission de Saint-Etienne 3 en date du 20 décembre 1996 en tant qu’elles ont respectivement maintenu et admis le principe de la récupération sur la succession de M. Marcel B... des sommes versées par le département de la Loire au titre de l’aide sociale aux personnes âgées ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;
    Considérant qu’en se bornant à admettre et maintenir le principe de la récupération demandée par le département de la Loire sans se prononcer sur la légalité qui était contestée dans son principe, les commissions départementales et cantonales ont entaché ces décisions d’omission de statuer ; que, dès lors, les consorts B... sont fondés à en demander l’annulation ;
    Considérant que l’affaire est en l’état d’être jugée ; qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement ;
    Considérant qu’il n’est pas contesté que M. Marcel B... a bénéficié d’une prise en charge par l’aide sociale aux personnes âgées pour couvrir ses frais de placement à la maison de retraite Saint-Jean-Bonnefonds du 30 juin 1994 au 3 mars 1996, date de son décès, la créance d’aide sociale détenue par le département de la Loire s’élevant à 115 904,94 F (17 669,59 Euro) ; qu’il n’est pas davantage contesté que l’actif net successoral du bénéficiaire, déduction faite des frais funéraires pris pour leur montant réel, est inférieur à la créance d’aide sociale détenue par le département de la Loire ;
    Considérant que pour contester l’action en récupération engagée par le département de la Loire sur le fondement de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale alors applicable, les requérants soutiennent que le principe de la récupération sur succession est contraire aux principes d’égalité et de solidarité contenus dans la Constitution du 4 octobre 1958 ; que toutefois il n’appartient pas aux juridictions administratives de statuer sur la constitutionnalité de dispositions législatives ; que par ailleurs, les travaux préparatoires de la loi du 19 juin 1983 qui a donné une base législative à la disposition contestée, n’ont pas la portée que leur prête le requérant ;
    Considérant que la disposition contestée n’est contraire à aucun principe de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
    Considérant que la mise en œuvre de la solidarité familiale dont l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale prévoit une modalité d’application n’est qu’un cas particulier du principe de l’obligation alimentaire décrit aux articles 205 et suivants du code civil ; que cette solidarité familiale est même première par rapport à celle qu’il appartient à la collectivité de mettre en œuvre ; qu’en cas d’impécuniosité des bénéficiaires d’une succession, les commissions d’admission et les juridictions d’aide sociale peuvent réduire la part récupérable de la créance d’aide sociale détenue par le département ; mais qu’en l’espèce, les requérants n’invoquent pas leur impécuniosité ; que, dès lors, la part récupérable de la créance d’aide sociale détenue par le département de la Loire correspond au montant de l’actif net successoral de M. Marcel B..., déduction faite des frais funéraires pour leur montant réel, et dans la limite du montant de la créance départementale ;
    Considérant que le désaccord qui oppose les parties sur le montant de cet actif net successoral n’est pas de la compétence des juridictions d’aide sociale ;

Décide

    Art.  1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Loire en date du 16 octobre 1997, ensemble celle de la commission d’admission de Saint-Etienne 3 en date du 20 décembre 1996, sont annulées.
    Art.  2.  -  La part récupérable de la créance d’aide sociale détenue par le département de la Loire sur la succession de M. B... est fixée au montant de l’actif net successoral de M. Marcel B..., déduction faite des frais funéraires pour leur montant réel, et dans la limite du montant de la créance départementale.
    Art.  3.  -  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
    Art.  4.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi et de la solidarité à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 10 juillet 2001 où siégeaient M. Belorgey, président, M. Vieu, assesseur, M. Rosat, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 4 décembre 2001.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer