Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Admission à l’aide sociale - Allocation compensatrice - Ressources
 

Dossier no 000264

Mme N...
Séance du 26 novembre 2001

Décision lue en séance publique le 5 décembre 2001

    Vu le recours formé par le président du conseil général du Haut-Rhin le 5 novembre 1999, tendant à l’annulation d’une décision du 24 septembre 1999 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Haut-Rhin a infirmé la décision du président du conseil général du Haut-Rhin du 13 avril 1999 rétablissant Mme N... dans le calcul de ses droits à l’allocation compensatrice pour tierce personne à compter du 1er décembre 1998 sur la base du revenu imposable du foyer, l’intégralité des revenus de Mme N... n’étant prise en compte que pour un quart, au motif que l’arrêt du Conseil d’Etat du 2 juillet 1997 (requête 161 207 - M. Bissey) stipule « l’exonération partielle de la prise en compte des ressources du travail ne vaut que pour les ressources qui proviennent du travail effectivement accompli par la personne handicapée » ; qu’ainsi, les indemnités journalières ne peuvent être regardées comme des ressources provenant du travail de la personne handicapée ; que par extension, pensions d’invalidité et prestations ASSEDIC, à l’instar des indemnités journalières, n’ont pas le caractère de ressources provenant d’un travail effectivement accompli par la personne handicapée ;
    Vu le mémoire en défense de Mme N..., en date du 10 avril 2000, qui conclut au rejet de la requête par les moyens qu’elle ne comprend pas pourquoi l’abattement du quart des ressources n’a pas été appliqué pour le calcul de l’allocation compensatrice sur les indemnités ASSEDIC et indemnités journalières alors qu’ils sont considérés comme des revenus pour les impôts ; que son état de santé se dégrade, nécessitant des hospitalisations, car n’ayant pas les moyens de rémunérer un tiers, elle doit faire certaines tâches qui l’épuisent ; qu’atteinte de sclérose en plaque, en fauteuil électrique, elle est excessivement fatiguée et souvent couchée ; que son fils âgé de treize ans fait office de tierce personne à la sortie d’école ; qu’elle ne peut effectuer ni le ménage, ni préparer les repas ; qu’elle se demande combien de temps elle tiendra encore ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 26 novembre 2001, Mlle Erdmann, rapporteur, et les observations orales de Mme Marlyne N... et de M. Alain N... et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 39 de la loi no 75-534 du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des handicapés : « I. - Une allocation compensatrice est accordée à tout handicapé qui ne bénéficie pas d’un avantage analogue au titre d’un régime de sécurité sociale lorsque son incapacité permanente est au moins égale au pourcentage fixé par décret prévu au premier alinéa de l’article 35, soit que son état nécessite l’aide effective d’une tierce personne pour les actes essentiels de l’existence, soit que l’exercice d’une activité professionnelle lui impose des frais supplémentaires. Le montant de cette allocation est fixé par référence aux majorations accordées aux invalides du troisième groupe prévu à l’article L. 310 du code de la sécurité sociale et varie, dans des conditions fixées par décret, en fonction soit de la nature et de la permanence de l’aide nécessaire, soit de l’importance des frais supplémentaires exposés. II. - Les dispositions du paragraphe III de l’article 35 et les articles 36 et 38 sont applicables à l’allocation prévue au présent article, le plafond de ressources étant augmenté du montant de l’allocation accordée. Toutefois, les ressources provenant de son travail ne sont prises en compte que partiellement pour le calcul des ressources de l’intéressé » ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 9 du décret no 77-1549 du 31 décembre 1977 portant application des dispositions de la loi no 75-534 du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées en tant qu’elle concerne l’allocation compensatrice prévue à l’article 39 de ladite loi : « les dispositions de l’article 2 du décret no 75-1197 du 16 décembre 1975 relatif à l’allocation pour adultes handicapés sont applicables à l’allocation compensatrice, le plafond de ressources prévu par ces dispositions étant toutefois, conformément à l’article 39-II de la loi no 75-534 du 30 juin 1975, majoré du montant de l’allocation accordée » ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 10 du décret modifié du 31 décembre 1977 : « Sous réserve des dispositions prévues à l’article 38 de la loi susvisée du 30 juin 1975, le revenu, dont il est tenu compte pour l’application de la condition de ressources prévue à l’article 39-II de ladite loi, est celui évalué selon les modalités fixées à l’article 3 du décret du 3 décembre susvisé no 75-1197 modifié par le décret no 78-325 du 15 mai 1978. Toutefois le quart seulement des ressources provenant du travail de la personne handicapée est pris en compte dans cette évaluation. Sont considérées comme ressources provenant du travail les rémunérations versées aux stagiaires de la formation professionnelle » ; que pour la détermination des ressources perçues pendant la période de référence, il y a lieu de la comparer au plafond ; qu’en vertu de ces textes codifiés à l’article 521-4 du code de la sécurité sociale, renvoyant aux articles R. 531-10 à R. 531-14 du même code, le revenu à prendre en compte est le revenu net fiscal ;
    Considérant que si Mme N... soutient que les indemnités ASSEDIC et indemnités journalières doivent être regardées comme des ressources provenant du travail puisqu’elles sont considérées comme des revenus imposables, il ressort toutefois des dispositions législatives et réglementaires précitées que l’exonération partielle de la prise en compte des ressources du travail qu’elles instituent ne vaut que pour les ressources qui proviennent d’un travail effectivement accompli par la personne handicapée ; qu’il résulte d’une part en ce qui concerne les indemnités journalières, des termes de l’article L. 321-1-2o du code de la sécurité sociale que l’indemnité journalière est due à la victime d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle pendant la période d’incapacité temporaire durant laquelle elle a été obligée d’interrompre son travail ; que bien que ces indemnités soient versées à des personnes ayant travaillé et ayant cotisé à ce titre à la sécurité sociale, elle n’ont pas le caractère de rémunération et ne peuvent, pour l’application des dispositions précitées de l’article 39-II de la loi du 30 juin 1975, être regardées comme des ressources provenant du travail de la personne handicapée ; que d’autre part, en ce qui concerne l’allocation unique dégressive versée par les ASSEDIC, elle a le caractère d’une indemnisation de la perte d’emploi et ne peut pas non plus être regardé comme entrant au nombre des ressources « provenant du travail » de la personne handicapée ;
    Considérant que par sa décision du 25 mars 1999, la COTOREP du Haut-Rhin a reconnu à Mme N... le droit à l’allocation compensatrice pour tierce personne au taux de 50 p. 100 du 1er décembre 1998 au 1er décembre 2000 ; qu’en conséquence, elle avait droit, conformément aux articles 9 et 10 du décret précité à une allocation différentielle pour la période du 1er juillet 1998 au 30 juin 1999 (plafond de ressources pour un couple et un enfant : 105 482,00 F + ACTP à 50 p. 100 : 33 948,00 F, soit au total 139 430,00 F) à comparer au revenu net fiscal : M. N... : 109 317,00 F - Mme N... : salaires : 28 634,00 F + 21 276,00 F = 49 910,00 F prise en compte 1/4 = 12 477,00 F + ASSEDIC : 24 495,00 F soit 36 972,00 F desquels on déduit les 10 et 20 p. 100 pour déterminer le revenu net fiscal = 25 881,00 F soit 135 195,00 F ; qu’en comparant ce revenu au plafond de ressources qui s’élève à 139 430,00 F, l’allocation différentielle s’élève à 4 235,00 F soit 352,91 F par mois ; qu’en ce qui concerne la période du 1er juillet 1999 au 30 juin 2000 (plafond de ressources pour un couple et un enfant : 106 645,00 F + ACTP à 50 p. 100 / 34 356,00 F soit 141 001,00 F) à comparer au revenu net fiscal 1998 : M. N... : 108 274,00 F - Mme N.... : salaires : 24 901,00 F dont on retient 1/4 soit 6 231,00 F + indemnités journalières : 2 156,00 F + pension d’invalidité : 14 263,00 F soit 46 551,00 F desquels on déduit les 10 et 20 p. 100 pour déterminer le revenu net fiscal : 33 517,00 F. Le revenu net fiscal du couple s’élève donc à : 108 274,00 F + 33 517,00 F soit 141 791,00 F ; qu’il n’est pas contesté que les revenus de 1998 étaient supérieurs au plafond d’octroi ;
    Considérant que si Mme N... soutient que son état de santé se dégrade nécessitant des hospitalisations car elle n’a pas les moyens de rémunérer un tiers ; qu’atteinte de sclérose en plaque, en fauteuil électrique, son fils âgé de treize ans fait office de tierce personne à sa sortie d’école et qu’elle ne peut effectuer les tâches ménagères, aucune disposition applicable à l’allocation compensatrice ne permet de tenir compte de ces circonstances pour faire échec à l’application des dispositions précitées dont il résulte que le revenu à prendre en compte, pour être comparé au plafond dans la limite duquel une allocation différentielle est attribuée, est celui constitué par le revenu net fiscal de la période de référence ; qu’il paraît opportun d’ajouter que la commission ne méconnaît nullement la portée sociale et humaine des moyens invoqués et les difficultés de la situation de la requérante, mais qu’il n’est pas possible au juge de l’aide sociale d’attribuer une allocation soumise à une condition de ressources par les textes en vigueur lorsque cette condition n’est pas remplie ; qu’à cet égard, quel que puisse être le caractère socialement opportun de l’interprétation des premiers juges, les textes en vigueur font référence non aux ressources « consécutives » au travail de la personne handicapée, mais à celles « provenant » de ce travail et il n’apparaît pas, en tout état de cause à la commission centrale d’aide sociale que les travaux préparatoires à l’article 39 de la loi du 30 juin 1975 permettent d’interpréter le second terme comme équivalant au premier, à supposer que l’on considère qu’il n’est pas clair en lui-même ; qu’il n’appartient qu’au législateur de modifier la loi dont le décret du 31 décembre 1977 ne fait pas une inexacte application ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le président du conseil général du Haut-Rhin est fondé à demander l’annulation de la décision attaquée ;

Décide

    Art.  1er. - La décision de la commission départementale d’aide sociale du Haut-Rhin du 24 septembre 1999 est annulée.
    Art.  2. - La demande de Mme N.... devant la commission départementale d’aide sociale du Haut-Rhin est rejetée.
    Art.  3. - La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi et de la solidarité à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 26 novembre 2001 où siégeaient M. Levy, président, Mlle Bauer, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 5 décembre 2001.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer