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  Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Récupération de l’aide sociale - Procédure - Dénaturation
 

Dossier no 980075

M. B...
Séance du 20 décembre 2000

Décision lue en séance publique le 3 septembre 2001

    Vu le recours formé pour les époux L..., par Me D..., tendant à l’annulation de la décision du 30 mai 1995, par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Haute-Garonne a maintenu la décision de récupération contre M. et Mme L... des sommes avancées par l’aide sociale à M. Jean B... au titre de l’aide ménagère à domicile du 1er novembre 1986 au 28 février 1991, qui s’élèvent à 39 933,79 F, au motif que la clause de soins contenue dans le contrat de vente signé entre les époux B... et les époux L... le 18 juillet 1980 créait des obligations à la charge de ces derniers, qui n’ont pas été effectivement remplies compte tenu de l’admission d’urgence aux services d’aide ménagère à domicile de M. B... ;
    Les requérants soutiennent que, ne répondant à aucune des qualités mentionnées par l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, héritiers, légataires ou donataires, M. et Mme L... ne sont pas tenus au remboursement de la créance d’aide sociale de M. B... ; que l’article sus-dit devrait être interprété de façon restrictive ; que, par ailleurs, M. et Mme L... n’avaient pas été informés de la demande d’aide ménagère à domicile de M. B..., eux-mêmes n’ayant sollicité aucune assistance pour remplir leur obligation ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les observations du président du conseil général de Haute-Garonne du 9 janvier 1998 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale et les textes subséquents ;
    Vu la lettre en date du 8 novembre 2000 convoquant à l’audience de la commission centrale d’aide sociale ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 20 décembre 2000, Mlle Koszul, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes des dispositions, dans leur rédaction alors applicable, de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale relatives à la récupération des allocations d’aide sociale, des recours peuvent être exercés par le département :
    « a)  Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ;
    b)  Contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les cinq ans qui ont précédé cette demande ;
    c)  Contre le légataire »,
qu’aux termes de l’article 9 alinéa 2 du décret no 54-883 du 2 septembre  : « Lorsque les décisions administratives ont été prises sur la base de décisions incomplètes ou erronées, il peut être procédé à leur révision, avec répétition de l’indu. Dans ce cas, la révision est poursuivie devant l’autorité qui a pris la décision » ;
    Considérant que, par acte du 18 juillet 1980, M. et Mme B... ont vendu aux époux L... un bien d’une valeur de 90 000,00 F, le versement au comptant étant limité à 10 000,00 F, le solde du prix, soit 80 000,00 F, étant converti en une rente viagère de 600,00 F par mois, une charge de soins générale, et la fourniture d’un travail personnel pour préparer la nourriture, effectuer le blanchissage et administrer tous médicaments et donner tous autres soins aux vendeurs ;
    Considérant que par une décision du 25 juillet 1991 de la commission cantonale, au reste non motivée, M. B... a reçu avis qu’il ne bénéficierait plus d’une prise en charge par l’aide sociale au titre de l’aide ménagère à domicile qu’il recevait depuis le 1er novembre 1986 ; qu’une décision ultérieure en date du 17 novembre 1994 permet la récupération de la somme de 39 933,79 F sur la vente sus-décrite à l’encontre de M. B... ;
    Considérant que par lettre du 16 mars 1994, antérieure à cette dernière décision, le directeur départemental de la solidarité avait fait connaître aux époux L... que des recours sont exercés contre l’acquéreur d’un bien appartenant à un bénéficiaire de l’aide sociale lorsque la vente comporte une clause de soins dès lors « qu’en vertu de la subsidiarité de l’aide sociale, l’obligation stipulée dans l’acte de vente est prioritaire sur l’attribution des services ménagers » ; que M. et Mme L... ont introduit un recours le 13 janvier 1995 devant la commission départementale d’aide sociale de Haute-Garonne pour faire obstacle à la récupération soit à l’encontre de M. B..., soit à leur propre encontre ; que par décision en date du 30 mai 1995 cette commission a décidé de procéder à la récupération litigieuse à l’encontre de M. et Mme L... ;
    Considérant que, dans la mesure où l’acte contesté était la récupération à l’encontre de M. B..., soit le recours présenté le 13 janvier 1995 par M. et Mme L... était irrecevable comme présenté par un tiers à la décision attaquée, soit, si M. et Mme L... disposaient d’un mandat de M. B..., ce que la commission départementale d’aide sociale n’a pas recherché, celle-ci ne pouvait statuer que sur la récupération en cause ; que, dans la mesure où l’acte contesté était la lettre du directeur départemental en date du 16 mars 1994, soit il lui appartenait de décliner sa compétence, soit, comme à n’importe quelle juridiction, de constater que cette lettre, dépourvue de toute base légale, constituait une voie de fait ; qu’elle ne pouvait, en toute hypothèse se prononcer comme elle l’a fait ; que sa décision doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant en premier lieu que le président du conseil général dans son mémoire du 9 janvier 1998 fait valoir qu’il ne fonde pas sa demande de récupération sur l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, mais sur l’article 9 alinéa 2 du décret no 54-883 du 2 septembre 1954 ; que cet argument est dépourvu de toute portée, le décret en cause étant pris pour l’application des dispositions du code ;
    Considérant en second lieu que, s’il fait valoir que M. et Mme B... n’ont pas fait connaître à la commission d’admission le bénéfice de la rente en « nature » qu’ils retiraient de la vente, et que l’admission d’urgence montre que M. et Mme L... ne s’en acquittaient de toute façon pas, ce moyen est inopérant à l’encontre de M. B... ; que ceux-ci sont fondés à soutenir qu’ils ne peuvent être recherchés eux-mêmes sur le fondement des dispositions du code de la famille et de l’aide sociale ; qu’il appartient au département, s’il s’y croit fondé, d’engager soit conformément à ce code une action en récupération contre les époux L..., soit une action à leur encontre devant le juge civil ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la décision attaquée doit être annulée ;

Décide

    Art. 1er. - La décision susvisée de la commission départementale d’aide sociale du 30 mai 1995, ensemble la lettre du 16 mars 1994 du directeur départemental de la Haute-Garonne sont annulées.
    Art. 2. - Le surplus des conclusions du recours de M. et Mme L... est rejeté.
    Art. 3. - La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi et de la solidarité à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 20 décembre 2000 où siégeaient M. Belorgey, président, M. Vieu, assesseur, Mlle Koszul, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 3 septembre 2001.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer