Dispositions communes à tous les types d’aide sociale |
2320 |
RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Conseil d’Etat statuant au contentieux
Dossier
no 208934
Consorts Z.
Séance du
7 mars 2001
Lecture
du 30 mars 2001
Vu la requête enregistrée le 10 juin 1999
au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour Mme Y.
Z., M. P. Z., demeurant à Paris (75007) et Mme H. Z., épouse
W., demeurant en République de Chine et élisant domicile au cabinet d’avocats
Acacia, 19, rue des Mézereaux, à Melun (77000) ; les consorts Z. demandent
au Conseil d’Etat ;
1o D’annuler la
décision du 18 novembre 1998 de la commission centrale d’aide sociale
en tant que celle-ci n’a que partiellement fait droit à leur requête tendant à
l’annulation de la décision du 29 novembre 1996 par laquelle la
commission départementale d’aide sociale de Paris a maintenu la décision de la
commission d’admission de récupérer sur la succession de M. X. Z. la somme de 308 536,91 F correspondant aux sommes versées
au titre de l’aide sociale aux personnes âgées par le département de
Paris ;
2o De condamner le
département de Paris à leur verser la somme de 22 000,00 F au titre
des frais exposés par eux et non compris dans les
dépens ;
Vu les autres pièces du
dossier ;
Vu le code de la famille et de l’aide
sociale ;
Vu la loi no 79-587 du
11 juillet 1979 ;
Vu le décret
no 61-495 du
15 mai 1961 ;
Vu le code de justice
administrative ;
Après avoir entendu en audience
publique :
- le rapport de
M. Donnat, auditeur,
- les
observations de la SCP Tiffreau, avocat au département de
Paris,
- les conclusions de
Mme Boissard, commissaire du
Gouvernement ;
Sur les conclusions tendant à
l’annulation partielle de la décision de la commission centrale d’aide
sociale :
Considérant que les consorts
Z. demandent l’annulation de la décision de la commission centrale
d’aide sociale en date du 18 novembre 1998 en tant que cette décision
a maintenu le principe de la récupération sur la succession de M. X. Z. des sommes versées par le département de Paris au titre de l’aide
sociale aux personnes âgées ;
Sans qu’il soit
besoin d’examiner les autres moyens de la
requête ;
Considérant qu’en vertu du premier
alinéa de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale relatif
à la récupération des allocations d’aide sociale, des recours peuvent être
exercés par le département contre la succession du
bénéficiaire ;
Considérant qu’en se bornant à
rectifier le montant des sommes faisant l’objet de la récupération demandée par
le département de Paris sans se prononcer sur le bien-fondé de la décision de
récupération, qui était contesté dans son principe, la commission centrale
d’aide sociale a entaché sa décision d’omission de statuer ; que, dès lors,
les consorts Z. sont fondés à demander l’annulation de la décision de
la commission centrale d’aide sociale en date du 18 novembre 1998 en
tant qu’elle a maintenu le principe de
récupération ;
Considérant qu’aux termes de
l’article L. 821-2 du code de justice administrative, « Le Conseil
d’Etat, s’il prononce l’annulation d’une décision d’une juridiction
administrative statuant en dernier ressort, peut régler l’affaire au fond si
l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie » ;
que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au
fond ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les
autres moyens de la requête devant la commission centrale d’aide
sociale ;
Considérant que, dans sa décision du
29 novembre 1996, la commission départementale d’aide sociale de Paris
n’a pas répondu aux moyens soulevés devant elle, tirés d’une part, de
l’insuffisance de motivation de la décision de la commission d’admission à
l’aide sociale et, d’autre part, de l’incompétence de cette commission pour
décider l’inscription d’une hypothèque sur le bien immobilier faisant partie de
la succession de M. Z. ; que sa décision doit, en
conséquence, être annulée ;
Considérant qu’il
appartient au Conseil d’Etat d’évoquer et de statuer immédiatement sur les
conclusions des consorts Z. présentées devant la commission
départementale d’aide sociale en tant qu’elles contestent le principe de la
récupération ;
Considérant qu’aux termes du
premier alinéa de l’article 148 du code de la famille et de l’aide
sociale : « Pour la garantie des recours prévus à l’article 146
ci-dessus, les immeubles appartenant aux bénéficiaires de l’aide sociale sont
grevés d’une hypothèque légale, dont l’inscription est requise par le
représentant de l’Etat ou le président du conseil général dans les conditions
prévues à l’article 2148 du code civil » ; que si, aux termes de
ces dispositions, il appartient seulement au représentant de l’Etat ou au
président du conseil général de requérir l’inscription de l’hypothèque, la
commission d’admission à l’aide sociale s’est bornée, en l’espèce, après avoir
décidé d’autoriser la récupération sur succession et de reporter l’exercice de
celle-ci, comme il lui était loisible de le faire, jusqu’au décès du conjoint
survivant ou jusqu’à la vente du bien immobilier faisant partie de la
succession, à préconiser l’inscription d’une telle hypothèque ; que, dès
lors, le moyen tiré de ce que la commission d’admission à l’aide sociale aurait
excédé ses compétences en décidant de l’inscription d’une hypothèque manque en
fait ;
Considérant qu’aux termes de
l’article 1er de la loi du
11 juillet 1979 : « Les personnes physiques ou morale ont le
droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives
individuelles défavorables qui les concernent./A cet effet, doivent être
motivées les décisions qui : (...) subordonnent l’octroi d’une autorisation
à des conditions restrictives ou imposent des sujétions » ; que la
décision de la commission d’admission à l’aide sociale en date du
25 juillet 1996, qui vise les textes applicables, indique le montant
de l’aide sociale perçue, et précise que l’actif net successoral est suffisant
pour recouvrer la créance, est suffisamment motivée au regard des dispositions
précitées ;
Considérant que, contrairement à ce
qui est soutenu, la commission d’admission à l’aide sociale ne s’est pas estimée
en situation de compétence liée pour décider de la
récupération ;
Considérant qu’il résulte de
l’instruction que l’actif net de la succession de M. X. Z.
est nettement supérieur à la créance de l’aide sociale ; que la
circonstance que Mme Z. a fait preuve de dévouement pendant la
maladie de son mari ne suffit pas, en l’absence de tout élément invoqué par les
consorts Z. relatif à leur situation matérielle, à faire obstacle à
l’exercice du recours en récupération prévu par la loi ; que, dès lors,
c’est à bon droit que la commission d’admission a autorisé l’exercice de ce
recours, tout en reportant les effets dans le
temps ;
Sur les conclusions relatives aux frais
exposés et non compris dans les
dépens :
Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans
les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner le
département de Paris à payer aux consorts Z. les sommes qu’ils
demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les
dépens ; qu’il n’y a pas davantage lieu de condamner les consorts
Z. à payer au département de Paris la somme qu’il demande au titre des
frais de même nature qu’il a exposés ;
Décide
Art. 1er.
- La décision de la commission centrale d’aide sociale en date du
18 novembre 1998 tant qu’elle a maintenu le principe de récupération
de l’aide sociale sur la succession de M. X. Z. et la
décision de la commission départementale d’aide sociale de Paris en date du
29 novembre 1996 sont
annulées.
Art. 2. - La décision de la commission
d’admission à l’aide sociale du 7e arrondissement de Paris en
date du 25 juillet 1996 est maintenue dans les limites énoncées à
l’article 2 de la décision de la commission centrale d’aide sociale en date
du 18 novembre 1998.
Art. 3. - Le
surplus des conclusions de la requête des consorts Z. devant le
Conseil d’Etat est rejeté.
Art. 4. - Les
conclusions du département de Paris tendant à l’application des dispositions de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont
rejetées.
Art. 5. - La présente décision sera
notifiée à Mme Y. Z., à M. P. Z.,
à Mme H. Z., au département de Paris et au ministre de l’emploi
et de la solidarité.