Procédure dans le contentieux de l’aide sociale générale  

1312
 
  INSTANCE  
 

Mots clés : Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) - Récupération sur succession
 

Dossier no 982596

M. B...
Séance du 21 décembre 2000

Décision lue en séance publique le 22 décembre 2000

    Vu la requête en date du 13 juillet 1998 de M. Thierry B... tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale réformer les décisions de la commission départementale d’aide sociale des Alpes-de-Haute-Provence et de la commission d’admission à l’aide sociale de Manosque des 28 avril 1998 et 9 décembre 1997 décidant d’une récupération de 56 226,16 F sur la succession de son grand-père M. Edouard B... dont il est l’unique héritier par les moyens qu’il a supporté de nombreux frais pharmaceutiques, d’entretien, de voyages pour son grand-père ; que lorsque l’allocation compensatrice lui a été proposée, il n’était pas exigé de participation des familles ; qu’il a beaucoup de difficultés pour rembourser la somme demandée ; qu’il a dû faire des travaux importants sur la maison donnée ;
    Vu le mémoire du président du conseil général des Alpes-de-Haute-Provence tendant au maintien de la décision attaquée ;
    Vu la transmission le 22 octobre 1998 par le préfet des Alpes-de-Haute-Provence d’une lettre exposant un nouveau moyen soutenu par M. Thierry B... et tiré du décès prématuré de son père alors qu’il n’avait lui-même que 18 ans ;
    Vu la lettre du 5 février 1999 de M. Thierry B... demandant « une petite réduction », « un temps un peu long » par les mêmes moyens que ceux de sa requête ;
    Vu enregistré le 2 novembre 2000 le mémoire en réplique de M. Thierry B... persistant dans les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et les moyens qu’il a assumé de manière effective et constante la charge de son grand-père ; que le vice-président du conseil général lui a proposé un étalement de la dette voire une réduction avant même qu’il n’ait fait appel et que son appel ne soit jugé ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le code civil ;
    Vu l’article 39 de la loi du 30 juin 1975 ;
    Vu le décret no 90-1124 du 17 décembre 1990 ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 21 décembre 2000 Mme Normand, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’en première instance, M. Thierry B... a soulevé le moyen tiré de ce qu’il avait été « trop tôt orphelin de » son « père qui était fils unique de » son grand-père et fait valoir que ce « cas bien particulier » devait entrer dans les prévisions du législateur du 30 juin 1975 qui a exonéré de la récupération sur succession les enfants des personnes handicapées bénéficiaires des prestations qu’il instituait ; que si dans sa requête introductive d’instance d’appel du 13 juillet 1998 il n’a soulevé que le moyen tiré de la difficulté où il se trouve de rembourser la somme dont la récupération est recherchée, il a, devant le secrétaire de la commission départementale d’aide sociale qui l’a transmis par mémoire du 22 octobre 1998 soulevé le même moyen qu’en première instance tiré du « décès prématuré de son père alors qu’il n’avait lui-même que 18 ans » ; que le 5 février 1999, il a renouvelé seulement sa demande de « petite réduction » ;
    Considérant qu’il appartient au juge de l’aide sociale d’interpréter avec le libéralisme qu’appelle la possibilité, pour les assistés ou leurs ayants droit, de présenter eux-mêmes leurs requêtes, les conclusions et moyens des parties, qui ne sont pas à même de formaliser leurs prétentions dans le langage juridique habituel ; que si le moyen sus rappelé, soulevé en première instance n’est pas repris dans la requête d’appel, il doit être considéré comme ne reposant pas sur une cause juridique distincte de celui évoqué dans cette requête et a été repris dès lors valablement en cours d’instance d’appel ; que de même les conclusions de la requête doivent être regardées comme tendant à la décharge de toute récupération, dans la mesure où ce moyen serait retenu et seulement subsidiairement à « une petite réduction » ; qu’il y a lieu par suite de statuer sur le moyen soulevé postérieurement à l’expiration du délai d’appel ;
    Considérant que pour l’application du II de l’article 39 de la loi du 30 juin 1975 qui prévoit qu’il n’est pas exercé de recours en récupération sur succession lorsque les héritiers du bénéficiaire sont ses enfants, ceux-ci s’entendent des héritiers d’un même lit appelés à la succession soit de leur propre chef soit par représentation d’un enfant du défunt mort avant lui, conformément aux règles tracées par les articles 739 et suivants du code civil ; que comme il a été rappelé ci-dessus, M. Thierry B... fait valoir sans contredit qu’il était « orphelin de son père qui était fils unique » de son grand-père ; qu’il ressort des pièces du dossier que le père de M. Thierry B... est décédé avant son grand-père ; qu’il résulte de ce qui précède qu’il n’y a pas lieu à récupération de l’allocation compensatrice versée à M. Edouard B... à l’encontre de la succession appréhendée par M. Thierry B... ;

Décide

    Art. 1er. - Les décisions de la commission départementale d’aide sociale des Alpes-de-Haute-Provence du 28 avril 1998 et de la commission d’admission à l’aide sociale de Manosque du 9 décembre 1997 sont annulées.
    Art. 2. - Il n’y a pas lieu à récupération sur succession à l’encontre de M. Thierry B... de la somme de 56 226,16 F par le département des Alpes-de-Haute-Provence.
    Art. 3. - La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi et de la solidarité à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 21 décembre 2000 où siégeaient M. Lévy, président, M. Jourdin assesseur, et Mme Normand rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 22 décembre 2000.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer