Conseil d'État
N° 491452
ECLI:FR:CECHS:2024:491452.20241018
Inédit au recueil Lebon
7ème chambre
M. Gilles Pellissier, président
Mme Céline Boniface, rapporteure
M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats
Lecture du vendredi 18 octobre 2024
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 février et 11 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, MM. A... C... et D... B... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 6 décembre 2023 du jury du concours d'entrée à l'Institut national du service public fixant la liste des candidats admis au concours externe et au deuxième concours externe au titre de l'année 2023, en tant que leur nom n'y figure pas ;
2°) d'enjoindre à la directrice de l'Institut national du service public de réorganiser les épreuves d'admission de ces deux concours.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- le code général de la fonction publique ;
- le décret n° 2015-1449 du 9 novembre 2015 ;
- le décret n° 2023-30 du 25 janvier 2023 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Céline Boniface, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Institut national du service public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que MM. C... et B..., candidats au concours externe et au deuxième concours externe d'entrée à l'Institut national du service public au titre de l'année 2023 et déclarés, pour le premier, admissible aux deux concours et, pour le second, admissible au concours externe à l'issue des épreuves écrites, n'ont pas été retenus sur la liste des candidats admis, arrêtée par la délibération, publiée le 6 décembre 2023, du jury de ces concours. Ils demandent l'annulation pour excès de pouvoir des résultats de ce concours en tant que leur nom n'y figure pas.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du décret du 9 novembre 2015 relatif aux conditions d'accès et aux formations à l'Ecole nationale d'administration, applicable aux concours en litige en application de l'article 43 du décret du 25 janvier 2023 relatif aux conditions d'accès et aux formations à l'Institut national du service public : " Les jurys des concours sont nommés chaque année par arrêté du Premier ministre et du ministre chargé de la fonction publique, sur proposition du directeur de l'école. / Le jury de chaque concours d'entrée comprend, outre le président : quatorze à dix-huit membres dont au moins cinq fonctionnaires autres que des enseignants et au plus quatre personnalités non fonctionnaires. / (...) / Des examinateurs spécialisés peuvent être désignés par décision du directeur de l'école pour participer, avec les membres du jury, à la correction des épreuves écrites et aux interrogations orales. / Les examinateurs spécialisés participent aux délibérations des jurys avec voix consultative pour l'attribution des notes se rapportant aux épreuves qu'ils ont évaluées ou corrigées ".
3. Il ne résulte pas des dispositions précitées que l'expertise des examinateurs désignés par le directeur de l'Institut national du service public devrait résulter de diplômes ou d'un seuil minimal d'années d'expérience professionnelle dans le domaine concerné. Par suite, MM. C... et B... ne peuvent utilement soutenir que l'examinateur spécialisé dans les questions européennes ayant participé aux épreuves orales d'admission du concours externe et du troisième concours, dont le nom a au demeurant été proposé par le chef du service des affaires européennes de l'Assemblée nationale, n'aurait pas les compétences nécessaires pour exercer ces fonctions.
4. En deuxième lieu, le respect du principe d'impartialité fait obstacle à ce qu'un jury de concours constitué pour le recrutement de fonctionnaires, puisse régulièrement siéger si l'un de ses membres a, avec l'un des candidats, des liens, tenant à la vie personnelle ou aux activités professionnelles, dont l'intensité est de nature à influer sur son appréciation. Si MM. C... et B... soutiennent, pour démontrer que le jury des épreuves d'admission aurait été irrégulièrement composé au regard du principe d'impartialité, que, d'une part, l'examinateur spécialisé dans l'épreuve orale de questions européennes aurait fait partie, au cours de ses études, des mêmes promotions d'élèves que certains des candidats aux concours d'entrée de l'Institut national du service public au titre de l'année 2023 et que l'examinatrice spécialisée ayant participé aux interrogations orales d'anglais aurait déjà eu à examiner la candidature de M. C... au titre la session précédente, ces seules circonstances ne sont pas de nature à mettre en doute l'impartialité de ces examinateurs. MM. C... et B... ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que la composition du jury aurait entaché la procédure d'irrégularité.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 325-36 du code général de la fonction publique : " Chaque concours de la fonction publique de l'État donne lieu à l'établissement d'une liste classant par ordre de mérite les candidats déclarés aptes par le jury. / Ce jury établit, dans le même ordre, une liste complémentaire afin de permettre le remplacement des candidats inscrits sur la liste principale qui ne peuvent pas être nommés et, éventuellement, de pourvoir des vacances d'emplois survenant dans l'intervalle de deux concours (...) ". Aux termes de l'article 2 du décret du 9 novembre 2015 mentionné au point 2 : " (...) Le jury peut, pour chacun de ces concours, établir, par ordre de mérite, une liste complémentaire des candidats aptes à entrer à l'école, dans le cas où des vacances résultant de démissions ou de décès viendraient à se produire sur la liste principale du même concours ". Si, en vertu de ces dispositions, il appartient en principe au jury d'un concours d'établir à la fois une liste de candidats déclarés aptes et une liste complémentaire, le jury, qui n'est pas tenu de proposer pour l'admission autant de candidats qu'il existe de postes à pourvoir, ne commet pas d'irrégularité en s'abstenant de dresser une liste complémentaire lorsqu'il estime qu'en dehors de ceux déclarés aptes, aucun candidat ne justifie des aptitudes nécessaires pour être inscrit sur cette liste. Il suit de là que MM. C... et B..., qui au demeurant se bornent à faire valoir que les rapports annuels des jurys soulignent la qualité des candidats aux concours d'accès à l'Institut national du service public, ne sont pas fondés à soutenir que le jury aurait irrégulièrement omis de dresser une liste complémentaire d'admis au concours externe spécial.
6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par l'Institut national du service public, MM. C... et B... ne sont pas fondés à demander l'annulation de la délibération qu'ils attaquent. Leur requête doit, par suite, être rejetée.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MM. C... et B... la somme de 500 euros chacun à verser à l'Institut national du service public au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de MM. C... et B... est rejetée.
Article 2 : MM. C... et B... verseront à l'Institut national du service public la somme de 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C..., premier requérant dénommé, et à l'Institut national du service public.
Copie en sera adressée au ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l'action publique.
N° 491452
ECLI:FR:CECHS:2024:491452.20241018
Inédit au recueil Lebon
7ème chambre
M. Gilles Pellissier, président
Mme Céline Boniface, rapporteure
M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats
Lecture du vendredi 18 octobre 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 février et 11 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, MM. A... C... et D... B... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 6 décembre 2023 du jury du concours d'entrée à l'Institut national du service public fixant la liste des candidats admis au concours externe et au deuxième concours externe au titre de l'année 2023, en tant que leur nom n'y figure pas ;
2°) d'enjoindre à la directrice de l'Institut national du service public de réorganiser les épreuves d'admission de ces deux concours.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- le code général de la fonction publique ;
- le décret n° 2015-1449 du 9 novembre 2015 ;
- le décret n° 2023-30 du 25 janvier 2023 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Céline Boniface, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Institut national du service public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que MM. C... et B..., candidats au concours externe et au deuxième concours externe d'entrée à l'Institut national du service public au titre de l'année 2023 et déclarés, pour le premier, admissible aux deux concours et, pour le second, admissible au concours externe à l'issue des épreuves écrites, n'ont pas été retenus sur la liste des candidats admis, arrêtée par la délibération, publiée le 6 décembre 2023, du jury de ces concours. Ils demandent l'annulation pour excès de pouvoir des résultats de ce concours en tant que leur nom n'y figure pas.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du décret du 9 novembre 2015 relatif aux conditions d'accès et aux formations à l'Ecole nationale d'administration, applicable aux concours en litige en application de l'article 43 du décret du 25 janvier 2023 relatif aux conditions d'accès et aux formations à l'Institut national du service public : " Les jurys des concours sont nommés chaque année par arrêté du Premier ministre et du ministre chargé de la fonction publique, sur proposition du directeur de l'école. / Le jury de chaque concours d'entrée comprend, outre le président : quatorze à dix-huit membres dont au moins cinq fonctionnaires autres que des enseignants et au plus quatre personnalités non fonctionnaires. / (...) / Des examinateurs spécialisés peuvent être désignés par décision du directeur de l'école pour participer, avec les membres du jury, à la correction des épreuves écrites et aux interrogations orales. / Les examinateurs spécialisés participent aux délibérations des jurys avec voix consultative pour l'attribution des notes se rapportant aux épreuves qu'ils ont évaluées ou corrigées ".
3. Il ne résulte pas des dispositions précitées que l'expertise des examinateurs désignés par le directeur de l'Institut national du service public devrait résulter de diplômes ou d'un seuil minimal d'années d'expérience professionnelle dans le domaine concerné. Par suite, MM. C... et B... ne peuvent utilement soutenir que l'examinateur spécialisé dans les questions européennes ayant participé aux épreuves orales d'admission du concours externe et du troisième concours, dont le nom a au demeurant été proposé par le chef du service des affaires européennes de l'Assemblée nationale, n'aurait pas les compétences nécessaires pour exercer ces fonctions.
4. En deuxième lieu, le respect du principe d'impartialité fait obstacle à ce qu'un jury de concours constitué pour le recrutement de fonctionnaires, puisse régulièrement siéger si l'un de ses membres a, avec l'un des candidats, des liens, tenant à la vie personnelle ou aux activités professionnelles, dont l'intensité est de nature à influer sur son appréciation. Si MM. C... et B... soutiennent, pour démontrer que le jury des épreuves d'admission aurait été irrégulièrement composé au regard du principe d'impartialité, que, d'une part, l'examinateur spécialisé dans l'épreuve orale de questions européennes aurait fait partie, au cours de ses études, des mêmes promotions d'élèves que certains des candidats aux concours d'entrée de l'Institut national du service public au titre de l'année 2023 et que l'examinatrice spécialisée ayant participé aux interrogations orales d'anglais aurait déjà eu à examiner la candidature de M. C... au titre la session précédente, ces seules circonstances ne sont pas de nature à mettre en doute l'impartialité de ces examinateurs. MM. C... et B... ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que la composition du jury aurait entaché la procédure d'irrégularité.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 325-36 du code général de la fonction publique : " Chaque concours de la fonction publique de l'État donne lieu à l'établissement d'une liste classant par ordre de mérite les candidats déclarés aptes par le jury. / Ce jury établit, dans le même ordre, une liste complémentaire afin de permettre le remplacement des candidats inscrits sur la liste principale qui ne peuvent pas être nommés et, éventuellement, de pourvoir des vacances d'emplois survenant dans l'intervalle de deux concours (...) ". Aux termes de l'article 2 du décret du 9 novembre 2015 mentionné au point 2 : " (...) Le jury peut, pour chacun de ces concours, établir, par ordre de mérite, une liste complémentaire des candidats aptes à entrer à l'école, dans le cas où des vacances résultant de démissions ou de décès viendraient à se produire sur la liste principale du même concours ". Si, en vertu de ces dispositions, il appartient en principe au jury d'un concours d'établir à la fois une liste de candidats déclarés aptes et une liste complémentaire, le jury, qui n'est pas tenu de proposer pour l'admission autant de candidats qu'il existe de postes à pourvoir, ne commet pas d'irrégularité en s'abstenant de dresser une liste complémentaire lorsqu'il estime qu'en dehors de ceux déclarés aptes, aucun candidat ne justifie des aptitudes nécessaires pour être inscrit sur cette liste. Il suit de là que MM. C... et B..., qui au demeurant se bornent à faire valoir que les rapports annuels des jurys soulignent la qualité des candidats aux concours d'accès à l'Institut national du service public, ne sont pas fondés à soutenir que le jury aurait irrégulièrement omis de dresser une liste complémentaire d'admis au concours externe spécial.
6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par l'Institut national du service public, MM. C... et B... ne sont pas fondés à demander l'annulation de la délibération qu'ils attaquent. Leur requête doit, par suite, être rejetée.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MM. C... et B... la somme de 500 euros chacun à verser à l'Institut national du service public au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de MM. C... et B... est rejetée.
Article 2 : MM. C... et B... verseront à l'Institut national du service public la somme de 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C..., premier requérant dénommé, et à l'Institut national du service public.
Copie en sera adressée au ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l'action publique.