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Ariane Web: Conseil d'État 492642, lecture du 30 juillet 2024, ECLI:FR:CECHR:2024:492642.20240730

Décision n° 492642
30 juillet 2024
Conseil d'État

N° 492642
ECLI:FR:CECHR:2024:492642.20240730
Inédit au recueil Lebon
5ème - 6ème chambres réunies
M. Pierre Collin, président
Mme Sara-Lou Gerber, rapporteure
M. Maxime Boutron, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats


Lecture du mardi 30 juillet 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par deux mémoires, enregistrés les 17 juin et 8 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, M. B... A... demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt n° 22PA02945 du 5 décembre 2023 de la cour administrative d'appel de Paris rejetant sa demande indemnitaire dirigée contre la Ville de Paris, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 2223-4 du code général des collectivités territoriales, en ce qu'elles ne mettent pas à la charge des communes une obligation d'informer les ayant-droits des défunts inhumés en terrain commun de l'expiration du délai de sépulture et de la possibilité qu'à l'occasion d'une reprise de cette sépulture, l'exhumation débouche sur une crémation des restes du défunt.





Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 66 et 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Guermonprez-Tanner, avocat de M. A... et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la Ville de Paris.



Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. Aux termes de l'article L. 2223-4 du code général des collectivités territoriales : " Un arrêté du maire affecte à perpétuité, dans le cimetière, un ossuaire aménagé où les restes exhumés sont aussitôt réinhumés. / Le maire peut également faire procéder à la crémation des restes exhumés en l'absence d'opposition connue ou attestée du défunt. / Les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l'ossuaire ".

3. Ces dispositions, applicables au présent litige au sens et pour l'application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Les griefs tirés de ce que ces dispositions, en ce qu'elles ne prévoient pas l'obligation pour la commune d'informer les proches des défunts inhumés en terrain commun de l'expiration du délai de sépulture et du fait qu'en cas de reprise de la sépulture, l'exhumation est susceptible d'aboutir à la crémation des restes du défunt, priveraient de garantie légale le droit au respect de la vie privée et la liberté de conscience des personnes ainsi inhumées, garantis par les articles 2 et 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, soulèvent une question nouvelle au sens de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. Ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.




D E C I D E :
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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution des dispositions de l'article L. 2223-4 du code général des collectivités territoriales est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de M. A... jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question ainsi soulevée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la Ville de Paris,
Copie en sera adressée au Premier ministre.

Délibéré à l'issue de la séance du 12 juillet 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseillère d'Etat, M. Cyril Roger-Lacan, M. Stéphane Hoynck, M. Alain Seban, conseillers d'Etat et Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 30 juillet 2024.

Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Sara-Lou Gerber
La secrétaire :
Signé : Mme Anne-Lise Calvaire