Conseil d'État
N° 495488
ECLI:FR:CEORD:2024:495488.20240708
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
Lecture du lundi 8 juillet 2024
Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution de la décision de la maire du 9e arrondissement de Paris du 30 mai 2024, de la décision du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris du 31 mai 2024 ainsi que de la délibération du conseil d'arrondissement du 10 juin 2024 et, d'autre part, d'enjoindre à la maire du 9e arrondissement de Paris de prendre toutes mesures utiles pour faire cesser l'atteinte grave et manifestement illégale à sa liberté politique et au libre exercice de son mandat politique sous huit jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2415163 du 13 juin 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a, d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 30 mai 2024 de la maire du 9e arrondissement de Paris en tant qu'elle a pris acte de la démission de M. A... de son mandat de conseiller d'arrondissement et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Par une requête, enregistrée le 26 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la maire du 9e arrondissement de Paris demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler l'ordonnance du 13 juin 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Paris en tant qu'elle a partiellement fait droit à la demande de M. A... ;
2°) de rejeter les conclusions de première instance présentées par M. A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris est entachée d'irrégularité dès lors que le juge des référés a méconnu son office en prononçant une mesure qui ne revêt pas un caractère provisoire ;
- la condition d'urgence n'est pas satisfaite dès lors que, en premier lieu, M. A... s'est placé lui-même dans une situation d'urgence, en deuxième lieu, il ne s'est pas présenté aux rendez-vous auxquels il devait assister en sa qualité d'adjoint à la maire, en troisième lieu, cette fonction d'adjoint à la maire a été pourvue et le prochain conseil municipal aura lieu au mois de septembre, en quatrième lieu, il est tenu par son engagement en tant que candidat aux élections législatives au sein de la 14e circonscription du Nord et ne comptait, en tout état de cause, pas exercer ses missions d'élu d'opposition et, en dernier lieu, il n'a pas démontré qu'il y avait un intérêt public à la suspension de la décision contestée ;
- il n'est pas porté une atteinte grave et manifestement illégale au libre exercice du mandat de M. A... dès lors qu'il a présenté sa démission de manière non équivoque.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Aux termes de l'article L. 2121-4 du code général des collectivités territoriales qui est applicables aux conseillers d'arrondissement par application de l'article L. 2511-9 du même code : " Les démissions des membres du conseil municipal sont adressées au maire. /La démission est définitive dès sa réception par le maire, qui en informe immédiatement le représentant de l'Etat dans le département. "
3. Il résulte de l'instruction conduite devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris que, par lettre du 30 mai 2024, M. A..., élu conseiller d'arrondissement au sein de la mairie du 9e arrondissement de Paris en juin 2020 et adjoint au maire au cours du mois de juillet de la même année, a fait part à la maire de cet arrondissement de son changement d'orientation politique. Le jour-même, celle-ci a, d'une part, pris acte de la démission de M. A... de ses mandats d'adjoint et de conseiller d'arrondissement et, d'autre part, transmis la démission de M. A... au préfet de région Ile-de-France, préfet de Paris, lequel en a également pris acte le 31 mai 2024.
4. Par une ordonnance du 13 juin 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, suspendu l'exécution de la décision de la maire du 9e arrondissement de Paris en tant qu'elle a pris acte de la démission de M. A... de son mandat de conseiller d'arrondissement et rejeté le surplus. La maire du 9e arrondissement de Paris relève appel de cette ordonnance dans la mesure de la suspension prononcée.
5. Pour faire droit à la demande de suspension, le juge des référés du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la circonstance que M. A..., par le courrier transmis à la maire du 9e arrondissement de Paris, n'avait pas présenté sa démission de son mandat de conseiller d'arrondissement. Si, en appel, la maire du 9e arrondissement de Paris critique cette appréciation, il est constant que le courrier manuscrit de M. A... en date du 30 mai 2024 n'indique pas expressément une intention de démissionner de son mandat de conseiller d'arrondissement. Il ne peut pas, en l'espèce, être interprété comme indiquant une telle intention, pas plus que les circonstances postérieures dont fait état la maire. C'est donc à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif de Paris a estimé que le courrier de la maire prenant acte de sa supposée démission de son mandat de conseiller du 9e arrondissement de Paris était de nature à porter une atteinte grave et manifestement illégale au libre exercice de son mandat par M. A.... Le juge des référés du tribunal administratif ne s'étant pas, contrairement à ce qui est soutenu en appel, mépris sur la condition d'urgence posée par l'article L. 521-2 du code de justice administratif et n'ayant pas méconnu l'office qu'il tire de ces dispositions, la requête de la maire du 9e arrondissement de Paris doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en application des dispositions de l'article L. 522-3 du même code.
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de la maire du 9e arrondissement de Paris est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la maire du 9e arrondissement de Paris et à M. B... A....
Copie en sera adressée au préfet de la région Ile-de-France, Préfet de Paris.
Fait à Paris, le 8 juillet 2024
Signé : Stéphane Hoynck
N° 495488
ECLI:FR:CEORD:2024:495488.20240708
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
Lecture du lundi 8 juillet 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution de la décision de la maire du 9e arrondissement de Paris du 30 mai 2024, de la décision du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris du 31 mai 2024 ainsi que de la délibération du conseil d'arrondissement du 10 juin 2024 et, d'autre part, d'enjoindre à la maire du 9e arrondissement de Paris de prendre toutes mesures utiles pour faire cesser l'atteinte grave et manifestement illégale à sa liberté politique et au libre exercice de son mandat politique sous huit jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2415163 du 13 juin 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a, d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 30 mai 2024 de la maire du 9e arrondissement de Paris en tant qu'elle a pris acte de la démission de M. A... de son mandat de conseiller d'arrondissement et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Par une requête, enregistrée le 26 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la maire du 9e arrondissement de Paris demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler l'ordonnance du 13 juin 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Paris en tant qu'elle a partiellement fait droit à la demande de M. A... ;
2°) de rejeter les conclusions de première instance présentées par M. A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris est entachée d'irrégularité dès lors que le juge des référés a méconnu son office en prononçant une mesure qui ne revêt pas un caractère provisoire ;
- la condition d'urgence n'est pas satisfaite dès lors que, en premier lieu, M. A... s'est placé lui-même dans une situation d'urgence, en deuxième lieu, il ne s'est pas présenté aux rendez-vous auxquels il devait assister en sa qualité d'adjoint à la maire, en troisième lieu, cette fonction d'adjoint à la maire a été pourvue et le prochain conseil municipal aura lieu au mois de septembre, en quatrième lieu, il est tenu par son engagement en tant que candidat aux élections législatives au sein de la 14e circonscription du Nord et ne comptait, en tout état de cause, pas exercer ses missions d'élu d'opposition et, en dernier lieu, il n'a pas démontré qu'il y avait un intérêt public à la suspension de la décision contestée ;
- il n'est pas porté une atteinte grave et manifestement illégale au libre exercice du mandat de M. A... dès lors qu'il a présenté sa démission de manière non équivoque.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Aux termes de l'article L. 2121-4 du code général des collectivités territoriales qui est applicables aux conseillers d'arrondissement par application de l'article L. 2511-9 du même code : " Les démissions des membres du conseil municipal sont adressées au maire. /La démission est définitive dès sa réception par le maire, qui en informe immédiatement le représentant de l'Etat dans le département. "
3. Il résulte de l'instruction conduite devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris que, par lettre du 30 mai 2024, M. A..., élu conseiller d'arrondissement au sein de la mairie du 9e arrondissement de Paris en juin 2020 et adjoint au maire au cours du mois de juillet de la même année, a fait part à la maire de cet arrondissement de son changement d'orientation politique. Le jour-même, celle-ci a, d'une part, pris acte de la démission de M. A... de ses mandats d'adjoint et de conseiller d'arrondissement et, d'autre part, transmis la démission de M. A... au préfet de région Ile-de-France, préfet de Paris, lequel en a également pris acte le 31 mai 2024.
4. Par une ordonnance du 13 juin 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, suspendu l'exécution de la décision de la maire du 9e arrondissement de Paris en tant qu'elle a pris acte de la démission de M. A... de son mandat de conseiller d'arrondissement et rejeté le surplus. La maire du 9e arrondissement de Paris relève appel de cette ordonnance dans la mesure de la suspension prononcée.
5. Pour faire droit à la demande de suspension, le juge des référés du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la circonstance que M. A..., par le courrier transmis à la maire du 9e arrondissement de Paris, n'avait pas présenté sa démission de son mandat de conseiller d'arrondissement. Si, en appel, la maire du 9e arrondissement de Paris critique cette appréciation, il est constant que le courrier manuscrit de M. A... en date du 30 mai 2024 n'indique pas expressément une intention de démissionner de son mandat de conseiller d'arrondissement. Il ne peut pas, en l'espèce, être interprété comme indiquant une telle intention, pas plus que les circonstances postérieures dont fait état la maire. C'est donc à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif de Paris a estimé que le courrier de la maire prenant acte de sa supposée démission de son mandat de conseiller du 9e arrondissement de Paris était de nature à porter une atteinte grave et manifestement illégale au libre exercice de son mandat par M. A.... Le juge des référés du tribunal administratif ne s'étant pas, contrairement à ce qui est soutenu en appel, mépris sur la condition d'urgence posée par l'article L. 521-2 du code de justice administratif et n'ayant pas méconnu l'office qu'il tire de ces dispositions, la requête de la maire du 9e arrondissement de Paris doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en application des dispositions de l'article L. 522-3 du même code.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de la maire du 9e arrondissement de Paris est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la maire du 9e arrondissement de Paris et à M. B... A....
Copie en sera adressée au préfet de la région Ile-de-France, Préfet de Paris.
Fait à Paris, le 8 juillet 2024
Signé : Stéphane Hoynck