Conseil d'État
N° 488881
ECLI:FR:CECHR:2024:488881.20240625
Inédit au recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
M. Bastien Lignereux, rapporteur
Mme Céline Guibé, rapporteure publique
HUGLO LEPAGE AVOCATS SAS, avocats
Lecture du mardi 25 juin 2024
Vu la procédure suivante :
Par une requête, un mémoire en réplique et deux nouveaux mémoires, enregistrés le 16 octobre 2023 et les 24 avril, 31 mai et 3 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Le Caloch Consultant demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 20 avril 2023 portant approbation du barème d'Enedis pour la facturation des opérations de raccordement des utilisateurs aux réseaux publics de distribution d'électricité, ainsi que la décision implicite par laquelle la Commission de régulation de l'énergie a rejeté le recours gracieux qu'elle a présenté le 16 juin 2023, tendant au retrait de cette délibération ;
2°) de mettre à la charge de la Commission de régulation de l'énergie la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'énergie ;
- la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bastien Lignereux, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 juin 2024, présentée par la Commission de régulation de l'énergie ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 20 avril 2023, la Commission de régulation de l'énergie a approuvé le barème de facturation des opérations de raccordement des utilisateurs aux réseaux publics de distribution d'électricité proposé par la société Enedis. Si la société Le Caloch Consultant demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette délibération dans son ensemble, il ressort de l'argumentation de sa requête qu'elle n'attaque, en réalité, cette décision qu'en tant qu'elle a approuvé la facturation d'une nouvelle prestation intitulée " étude de l'impact d'un projet sur le réseau ". Elle demande également l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par la CRE au recours gracieux qu'elle a présenté le 16 juin 2023 contre cette délibération, qui tendait aux mêmes fins.
Sur l'intervention de la société La Compagnie énergies et territoires :
2. La société La Compagnie énergies et territoires justifie, en sa qualité d'entreprise spécialisée dans le déploiement des installations d'énergies renouvelables, faisant appel à des bureaux d'étude en impact des projets de raccordement au réseau d'électricité, d'un intérêt suffisant à l'annulation de la délibération attaquée. Son intervention est, dès lors, recevable.
Sur le cadre juridique du litige :
3. En vertu de l'article L. 322-8 du code de l'énergie, les gestionnaires de réseau de distribution d'électricité sont notamment chargés : " 1° De définir et de mettre en oeuvre les politiques d'investissement et de développement des réseaux de distribution afin de permettre le raccordement des installations des consommateurs, des producteurs et des installations de stockage ainsi que l'interconnexion avec d'autres réseaux ; / (...) 4° D'assurer, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, le raccordement et l'accès à ces réseaux ; / (...) ". Le 5° de cet article prévoit par ailleurs que ces gestionnaires fournissent " aux utilisateurs des réseaux les informations nécessaires à un accès efficace aux réseaux, sous réserve des informations protégées par des dispositions législatives ou réglementaires ", notamment, depuis la modification de cet article par la loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités, " en évaluant l'incidence sur le réseau des projets qui lui sont soumis en matière d'insertion des énergies renouvelables, de déploiement des dispositifs de charge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables, d'aménagement urbain et de planification énergétique ".
4. Aux termes de l'article L. 341-2 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Les tarifs d'utilisation du réseau public de transport et des réseaux publics de distribution sont calculés de manière transparente et non discriminatoire, afin de couvrir l'ensemble des coûts supportés par les gestionnaires de ces réseaux dans la mesure où ces coûts correspondent à ceux d'un gestionnaire de réseau efficace. / Ces coûts comprennent notamment : / 1° Les coûts résultant de l'exécution des missions et des contrats de service public (...) ; / 3° Une partie des coûts de raccordement à ces réseaux, l'autre partie pouvant faire l'objet d'une contribution dans les conditions fixées aux articles
L. 341-2-1 et L. 342-6 à L. 342-12. (...) Le niveau de la prise en charge prévue au présent 3° ne peut excéder 40 % du coût du raccordement (...). / 5° Une partie des coûts des prestations annexes réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de ces réseaux ".
5. Aux termes de l'article L. 342-6 de ce code, dans sa rédaction en vigueur à la même date : " La part des coûts de branchement et d'extension non couverts par les tarifs d'utilisation des réseaux publics peut faire l'objet d'une contribution due par le redevable selon les principes établis au présent article ainsi qu'aux articles L. 342-7 à L. 342-12. La contribution est versée au maître d'ouvrage des travaux, qu'il s'agisse d'un gestionnaire de réseau, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'un syndicat mixte. " Aux termes de l'article L. 342-8 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la même date : " Lorsque le gestionnaire du réseau public de distribution est le maître d'ouvrage des travaux, les principes généraux de calcul de la contribution qui lui est due sont arrêtés par l'autorité administrative sur proposition de la Commission de régulation de l'énergie. / Les méthodes de calcul des coûts de la contribution mentionnée au premier alinéa, établies par chaque gestionnaire de réseau de plus de 100 000 clients, sont soumises à l'approbation de la Commission de régulation de l'énergie (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions, en vigueur à la date de la décision attaquée, que les coûts résultant de l'exécution des missions de service public confiées au gestionnaire de réseau de distribution d'électricité sont en principe intégralement couverts par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité. Par exception à ce principe, les coûts de raccordement autres que les coûts de renforcement des réseaux ne sont qu'en partie couverts par ce tarif et font l'objet d'une contribution du demandeur du raccordement versée au maître d'ouvrage des travaux. Les méthodes de calcul des coûts couverts par cette contribution sont établies par chaque gestionnaire de réseau de plus de 100 000 clients et soumis à l'approbation de la Commission de régulation de l'énergie, dans le respect de principes généraux de calcul définis par arrêté.
Sur la légalité de la délibération attaquée :
7. La délibération du 20 avril 2023 attaquée a approuvé le barème des coûts de raccordement établi par la société Enedis applicable à compter du 20 juillet 2023, pour le calcul de la contribution mentionnée à l'article L. 342-6 du code de l'énergie cité au point 5. Ce barème comporte notamment une nouvelle prestation d'étude de l'impact d'un projet sur le réseau. Selon les termes de cette délibération, cette prestation, réalisée en amont de la demande de raccordement, vise à permettre d'estimer la faisabilité, les coûts et les délais du raccordement de projets en matière d'insertion des énergies renouvelables, de déploiement des dispositifs de charge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables, d'aménagement urbain et de planification énergétique.
8. Ainsi que le font valoir en défense la Commission de régulation de l'énergie et la société Enedis, l'évaluation de l'incidence de tels projets sur le réseau figure, depuis la loi du 24 décembre 2019, en vertu de l'article L. 322-8 du code de l'énergie modifié par cette loi, cité au point 3, parmi les missions de service public confiées au gestionnaire de réseau de distribution. Toutefois, il résulte des termes mêmes de cet article que cette évaluation relève non pas de la mission relative au raccordement et à l'accès au réseau mentionnée au 4° de l'article
L. 322-8 mais de la mission distincte, prévue au 5° du même article, consistant en la fourniture d'informations aux utilisateurs du réseau. Par suite, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que cette évaluation n'est pas au nombre de celles des missions de service public dont le coût peut faire l'objet de la contribution du demandeur du raccordement, mentionnée à l'article L. 342-6 du code de l'énergie. Le coût de cette évaluation doit dès lors être intégralement couvert par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité, en application du 1° de l'article L. 341-2 du code de l'énergie. Il s'ensuit que la délibération attaquée méconnaît les dispositions de ces articles en tant que le barème qu'elle approuve fixe les prix facturés pour cette prestation.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que la société Le Caloch Consultant est fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation de la délibération qu'elle attaque, ainsi que celle de la décision rejetant son recours gracieux.
Sur les frais de l'instance :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Commission de régulation de l'énergie la somme de 3 000 euros à verser à la société Le Caloch Consultant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit mise au même titre à la charge de cette société qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'intervention de la société La Compagnie énergies et territoires est admise.
Article 2 : La délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 20 avril 2023 portant approbation du barème d'Enedis pour la facturation des opérations de raccordement des utilisateurs aux réseaux publics de distribution d'électricité, en tant que ce barème fixe les prix facturés pour la prestation intitulée " étude de l'impact d'un projet sur le réseau ", et la décision rejetant le recours gracieux de la société Le Caloch Consultant sont annulées.
Article 3 : La Commission de régulation de l'énergie versera à la société Le Caloch Consultant la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la société Enedis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Le Caloch Consultant, à la Commission de régulation de l'énergie, à la société Enedis et à la société La Compagnie énergies et territoires.
Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 juin 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta,
Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, conseillers d'Etat, M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire et M. Bastien Lignereux, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 25 juin 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Bastien Lignereux
La secrétaire :
Signé : Mme Fehmida Ghulam
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chacun en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :
N° 488881
ECLI:FR:CECHR:2024:488881.20240625
Inédit au recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
M. Bastien Lignereux, rapporteur
Mme Céline Guibé, rapporteure publique
HUGLO LEPAGE AVOCATS SAS, avocats
Lecture du mardi 25 juin 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête, un mémoire en réplique et deux nouveaux mémoires, enregistrés le 16 octobre 2023 et les 24 avril, 31 mai et 3 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Le Caloch Consultant demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 20 avril 2023 portant approbation du barème d'Enedis pour la facturation des opérations de raccordement des utilisateurs aux réseaux publics de distribution d'électricité, ainsi que la décision implicite par laquelle la Commission de régulation de l'énergie a rejeté le recours gracieux qu'elle a présenté le 16 juin 2023, tendant au retrait de cette délibération ;
2°) de mettre à la charge de la Commission de régulation de l'énergie la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'énergie ;
- la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bastien Lignereux, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 juin 2024, présentée par la Commission de régulation de l'énergie ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 20 avril 2023, la Commission de régulation de l'énergie a approuvé le barème de facturation des opérations de raccordement des utilisateurs aux réseaux publics de distribution d'électricité proposé par la société Enedis. Si la société Le Caloch Consultant demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette délibération dans son ensemble, il ressort de l'argumentation de sa requête qu'elle n'attaque, en réalité, cette décision qu'en tant qu'elle a approuvé la facturation d'une nouvelle prestation intitulée " étude de l'impact d'un projet sur le réseau ". Elle demande également l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par la CRE au recours gracieux qu'elle a présenté le 16 juin 2023 contre cette délibération, qui tendait aux mêmes fins.
Sur l'intervention de la société La Compagnie énergies et territoires :
2. La société La Compagnie énergies et territoires justifie, en sa qualité d'entreprise spécialisée dans le déploiement des installations d'énergies renouvelables, faisant appel à des bureaux d'étude en impact des projets de raccordement au réseau d'électricité, d'un intérêt suffisant à l'annulation de la délibération attaquée. Son intervention est, dès lors, recevable.
Sur le cadre juridique du litige :
3. En vertu de l'article L. 322-8 du code de l'énergie, les gestionnaires de réseau de distribution d'électricité sont notamment chargés : " 1° De définir et de mettre en oeuvre les politiques d'investissement et de développement des réseaux de distribution afin de permettre le raccordement des installations des consommateurs, des producteurs et des installations de stockage ainsi que l'interconnexion avec d'autres réseaux ; / (...) 4° D'assurer, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, le raccordement et l'accès à ces réseaux ; / (...) ". Le 5° de cet article prévoit par ailleurs que ces gestionnaires fournissent " aux utilisateurs des réseaux les informations nécessaires à un accès efficace aux réseaux, sous réserve des informations protégées par des dispositions législatives ou réglementaires ", notamment, depuis la modification de cet article par la loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités, " en évaluant l'incidence sur le réseau des projets qui lui sont soumis en matière d'insertion des énergies renouvelables, de déploiement des dispositifs de charge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables, d'aménagement urbain et de planification énergétique ".
4. Aux termes de l'article L. 341-2 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Les tarifs d'utilisation du réseau public de transport et des réseaux publics de distribution sont calculés de manière transparente et non discriminatoire, afin de couvrir l'ensemble des coûts supportés par les gestionnaires de ces réseaux dans la mesure où ces coûts correspondent à ceux d'un gestionnaire de réseau efficace. / Ces coûts comprennent notamment : / 1° Les coûts résultant de l'exécution des missions et des contrats de service public (...) ; / 3° Une partie des coûts de raccordement à ces réseaux, l'autre partie pouvant faire l'objet d'une contribution dans les conditions fixées aux articles
L. 341-2-1 et L. 342-6 à L. 342-12. (...) Le niveau de la prise en charge prévue au présent 3° ne peut excéder 40 % du coût du raccordement (...). / 5° Une partie des coûts des prestations annexes réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de ces réseaux ".
5. Aux termes de l'article L. 342-6 de ce code, dans sa rédaction en vigueur à la même date : " La part des coûts de branchement et d'extension non couverts par les tarifs d'utilisation des réseaux publics peut faire l'objet d'une contribution due par le redevable selon les principes établis au présent article ainsi qu'aux articles L. 342-7 à L. 342-12. La contribution est versée au maître d'ouvrage des travaux, qu'il s'agisse d'un gestionnaire de réseau, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'un syndicat mixte. " Aux termes de l'article L. 342-8 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la même date : " Lorsque le gestionnaire du réseau public de distribution est le maître d'ouvrage des travaux, les principes généraux de calcul de la contribution qui lui est due sont arrêtés par l'autorité administrative sur proposition de la Commission de régulation de l'énergie. / Les méthodes de calcul des coûts de la contribution mentionnée au premier alinéa, établies par chaque gestionnaire de réseau de plus de 100 000 clients, sont soumises à l'approbation de la Commission de régulation de l'énergie (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions, en vigueur à la date de la décision attaquée, que les coûts résultant de l'exécution des missions de service public confiées au gestionnaire de réseau de distribution d'électricité sont en principe intégralement couverts par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité. Par exception à ce principe, les coûts de raccordement autres que les coûts de renforcement des réseaux ne sont qu'en partie couverts par ce tarif et font l'objet d'une contribution du demandeur du raccordement versée au maître d'ouvrage des travaux. Les méthodes de calcul des coûts couverts par cette contribution sont établies par chaque gestionnaire de réseau de plus de 100 000 clients et soumis à l'approbation de la Commission de régulation de l'énergie, dans le respect de principes généraux de calcul définis par arrêté.
Sur la légalité de la délibération attaquée :
7. La délibération du 20 avril 2023 attaquée a approuvé le barème des coûts de raccordement établi par la société Enedis applicable à compter du 20 juillet 2023, pour le calcul de la contribution mentionnée à l'article L. 342-6 du code de l'énergie cité au point 5. Ce barème comporte notamment une nouvelle prestation d'étude de l'impact d'un projet sur le réseau. Selon les termes de cette délibération, cette prestation, réalisée en amont de la demande de raccordement, vise à permettre d'estimer la faisabilité, les coûts et les délais du raccordement de projets en matière d'insertion des énergies renouvelables, de déploiement des dispositifs de charge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables, d'aménagement urbain et de planification énergétique.
8. Ainsi que le font valoir en défense la Commission de régulation de l'énergie et la société Enedis, l'évaluation de l'incidence de tels projets sur le réseau figure, depuis la loi du 24 décembre 2019, en vertu de l'article L. 322-8 du code de l'énergie modifié par cette loi, cité au point 3, parmi les missions de service public confiées au gestionnaire de réseau de distribution. Toutefois, il résulte des termes mêmes de cet article que cette évaluation relève non pas de la mission relative au raccordement et à l'accès au réseau mentionnée au 4° de l'article
L. 322-8 mais de la mission distincte, prévue au 5° du même article, consistant en la fourniture d'informations aux utilisateurs du réseau. Par suite, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que cette évaluation n'est pas au nombre de celles des missions de service public dont le coût peut faire l'objet de la contribution du demandeur du raccordement, mentionnée à l'article L. 342-6 du code de l'énergie. Le coût de cette évaluation doit dès lors être intégralement couvert par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité, en application du 1° de l'article L. 341-2 du code de l'énergie. Il s'ensuit que la délibération attaquée méconnaît les dispositions de ces articles en tant que le barème qu'elle approuve fixe les prix facturés pour cette prestation.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que la société Le Caloch Consultant est fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation de la délibération qu'elle attaque, ainsi que celle de la décision rejetant son recours gracieux.
Sur les frais de l'instance :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Commission de régulation de l'énergie la somme de 3 000 euros à verser à la société Le Caloch Consultant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit mise au même titre à la charge de cette société qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'intervention de la société La Compagnie énergies et territoires est admise.
Article 2 : La délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 20 avril 2023 portant approbation du barème d'Enedis pour la facturation des opérations de raccordement des utilisateurs aux réseaux publics de distribution d'électricité, en tant que ce barème fixe les prix facturés pour la prestation intitulée " étude de l'impact d'un projet sur le réseau ", et la décision rejetant le recours gracieux de la société Le Caloch Consultant sont annulées.
Article 3 : La Commission de régulation de l'énergie versera à la société Le Caloch Consultant la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la société Enedis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Le Caloch Consultant, à la Commission de régulation de l'énergie, à la société Enedis et à la société La Compagnie énergies et territoires.
Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 juin 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta,
Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, conseillers d'Etat, M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire et M. Bastien Lignereux, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 25 juin 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Bastien Lignereux
La secrétaire :
Signé : Mme Fehmida Ghulam
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chacun en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :