Conseil d'État
N° 472006
ECLI:FR:CECHS:2023:472006.20231222
Inédit au recueil Lebon
8ème chambre
M. Thomas Andrieu, président
M. Vincent Mahé, rapporteur
M. Romain Victor, rapporteur public
SCP DELAMARRE, JEHANNIN, avocats
Lecture du vendredi 22 décembre 2023
Vu la procédure suivante :
La société anonyme (SA) Carfos a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le titre exécutoire émis le 11 décembre 2017 par le grand port maritime de Marseille pour paiement de la somme de 179 336,36 euros, correspondant aux frais de remise en état du portique " C2 " du terminal minéralier de Fos-sur-mer, et de la décharger de l'obligation de payer cette somme. Par un jugement n° 1801791 du 16 juillet 2020, ce tribunal a fait droit à sa demande.
Par un arrêt n° 20MA03554 du 9 janvier 2023, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par le grand port maritime de Marseille contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 mars, 11 avril et 21 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le grand port maritime de Marseille demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la société Carfos la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Grand Port Maritime de Marseille et à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de la société Carfos ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par une convention d'autorisation d'outillage privé avec obligation de service public du 6 juillet 2007, le port autonome de Marseille, établissement public de l'Etat auquel s'est substitué le grand port maritime de Marseille, a autorisé la société anonyme Carfos à établir et exploiter sur le terminal minéralier de Fos-sur-Mer un portique à processus continu, appartenant à cette société, dénommé " P+ ", destiné au déchargement de vracs solides. La société Carfos et le port autonome de Marseille ont conclu le même jour une seconde convention aux fins de déterminer les conditions de réalisation de prestations de services rendues par le port pour le fonctionnement, notamment, de ce portique. Le 1er décembre 2008, le portique " P+ ", alors conduit par l'un des agents du grand port maritime, a percuté le portique " C2 " appartenant à cet établissement public. Estimant que cet accident était imputable à la société Carfos, le grand port maritime a, le 11 décembre 2017, après l'annulation d'un premier titre, émis un titre exécutoire d'un montant de 179 336,36 euros, augmenté de 758,54 euros d'intérêts de retard, pour remboursement des frais de remise en état des installations portuaires. Le grand port maritime de Marseille se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 9 janvier 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'il avait formé contre le jugement du 16 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé ce titre exécutoire et déchargé la société Carfos de l'obligation de payer la somme de 179 336,36 euros.
2. Aux termes de l'article 1er de la convention de prestation conclue le 6 juillet 2007 entre la société Carfos et le port autonome : " La présente convention a pour objet de définir le contenu et les conditions de la prestation de services effectuée par le [port autonome de Marseille] dans le cadre du chargement et du déchargement des vracs solides non alimentaires. / Les obligations respectives du [port autonome de Marseille] et de l'Opérateur sont également précisées dans la présente convention ". Aux termes de l'article 2 de cette même convention : " Les outillages visés par la présente convention (...) sont (...) [l]es deux outillages privés appartenant à l'Opérateur, dits " A...+ " et " P4 ", faisant par ailleurs l'objet d'[autorisations d'outillage privé avec obligation de service public] ". Aux termes de l'article 4 de la convention : " 4.1. Les prestations de service effectuées par le [port autonome de Marseille sont : (...) b) sur les outillages privés objets d'[autorisations d'outillage privé avec obligation de service public] : conduite et dépannage associé (...) 4.3. Les prestations du [port autonome de Marseille] seront effectuées sous le contrôle de l'encadrement du [port autonome de Marseille], par les agents du [port autonome de Marseille], et notamment par les agents de conduite du terminal minéralier de Fos et les électrotechniciens associés, dans le cadre de leur régime de travail normal ".
3. En premier lieu, en déduisant de ces stipulations, dont il ressort que les parties ne se sont pas bornées à organiser les modalités d'intervention des agents du terminal minéralier de Fos mis à la disposition de la société Carfos pour la réalisation des opérations de conduite et de dépannage des portiques appartenant à cette société, mais ont défini le contenu et les conditions de la prestation de services effectués par ces agents sous le contrôle et l'encadrement du grand port maritime, que le grand port maritime de Marseille était responsable des dommages causés du fait de la manipulation par ses agents du portique " P+ " appartenant à la société Carfos, la cour administrative d'appel n'a dénaturé ni les stipulations de la convention, ni l'intention des parties à cette convention.
4. En second lieu, la cour n'a pas donné aux faits de l'espèce une inexacte qualification juridique en jugeant que, par voie de conséquence, la responsabilité contractuelle de la société Carfos à l'égard du grand port maritime de Marseille n'était pas engagée du fait de l'accident intervenu le 1er décembre 2008.
5. Il résulte de ce qui précède que le grand port maritime de Marseille n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Son pourvoi doit être rejeté, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du grand port maritime de Marseille la somme de 3 000 euros à verser à la société Carfos au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi du grand port maritime de Marseille est rejeté.
Article 2 : Le grand port maritime de Marseille versera à la société Carfos la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au grand port maritime de Marseille et à la société anonyme Carfos.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 décembre 2023 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, président de chambre, présidant ; M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat et M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 22 décembre 2023.
Le président :
Signé : M. Thomas Andrieu
Le rapporteur :
Signé : M. Vincent Mahé
La secrétaire :
Signé : Mme Sandrine Mendy
N° 472006
ECLI:FR:CECHS:2023:472006.20231222
Inédit au recueil Lebon
8ème chambre
M. Thomas Andrieu, président
M. Vincent Mahé, rapporteur
M. Romain Victor, rapporteur public
SCP DELAMARRE, JEHANNIN, avocats
Lecture du vendredi 22 décembre 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société anonyme (SA) Carfos a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le titre exécutoire émis le 11 décembre 2017 par le grand port maritime de Marseille pour paiement de la somme de 179 336,36 euros, correspondant aux frais de remise en état du portique " C2 " du terminal minéralier de Fos-sur-mer, et de la décharger de l'obligation de payer cette somme. Par un jugement n° 1801791 du 16 juillet 2020, ce tribunal a fait droit à sa demande.
Par un arrêt n° 20MA03554 du 9 janvier 2023, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par le grand port maritime de Marseille contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 mars, 11 avril et 21 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le grand port maritime de Marseille demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la société Carfos la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Grand Port Maritime de Marseille et à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de la société Carfos ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par une convention d'autorisation d'outillage privé avec obligation de service public du 6 juillet 2007, le port autonome de Marseille, établissement public de l'Etat auquel s'est substitué le grand port maritime de Marseille, a autorisé la société anonyme Carfos à établir et exploiter sur le terminal minéralier de Fos-sur-Mer un portique à processus continu, appartenant à cette société, dénommé " P+ ", destiné au déchargement de vracs solides. La société Carfos et le port autonome de Marseille ont conclu le même jour une seconde convention aux fins de déterminer les conditions de réalisation de prestations de services rendues par le port pour le fonctionnement, notamment, de ce portique. Le 1er décembre 2008, le portique " P+ ", alors conduit par l'un des agents du grand port maritime, a percuté le portique " C2 " appartenant à cet établissement public. Estimant que cet accident était imputable à la société Carfos, le grand port maritime a, le 11 décembre 2017, après l'annulation d'un premier titre, émis un titre exécutoire d'un montant de 179 336,36 euros, augmenté de 758,54 euros d'intérêts de retard, pour remboursement des frais de remise en état des installations portuaires. Le grand port maritime de Marseille se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 9 janvier 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'il avait formé contre le jugement du 16 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé ce titre exécutoire et déchargé la société Carfos de l'obligation de payer la somme de 179 336,36 euros.
2. Aux termes de l'article 1er de la convention de prestation conclue le 6 juillet 2007 entre la société Carfos et le port autonome : " La présente convention a pour objet de définir le contenu et les conditions de la prestation de services effectuée par le [port autonome de Marseille] dans le cadre du chargement et du déchargement des vracs solides non alimentaires. / Les obligations respectives du [port autonome de Marseille] et de l'Opérateur sont également précisées dans la présente convention ". Aux termes de l'article 2 de cette même convention : " Les outillages visés par la présente convention (...) sont (...) [l]es deux outillages privés appartenant à l'Opérateur, dits " A...+ " et " P4 ", faisant par ailleurs l'objet d'[autorisations d'outillage privé avec obligation de service public] ". Aux termes de l'article 4 de la convention : " 4.1. Les prestations de service effectuées par le [port autonome de Marseille sont : (...) b) sur les outillages privés objets d'[autorisations d'outillage privé avec obligation de service public] : conduite et dépannage associé (...) 4.3. Les prestations du [port autonome de Marseille] seront effectuées sous le contrôle de l'encadrement du [port autonome de Marseille], par les agents du [port autonome de Marseille], et notamment par les agents de conduite du terminal minéralier de Fos et les électrotechniciens associés, dans le cadre de leur régime de travail normal ".
3. En premier lieu, en déduisant de ces stipulations, dont il ressort que les parties ne se sont pas bornées à organiser les modalités d'intervention des agents du terminal minéralier de Fos mis à la disposition de la société Carfos pour la réalisation des opérations de conduite et de dépannage des portiques appartenant à cette société, mais ont défini le contenu et les conditions de la prestation de services effectués par ces agents sous le contrôle et l'encadrement du grand port maritime, que le grand port maritime de Marseille était responsable des dommages causés du fait de la manipulation par ses agents du portique " P+ " appartenant à la société Carfos, la cour administrative d'appel n'a dénaturé ni les stipulations de la convention, ni l'intention des parties à cette convention.
4. En second lieu, la cour n'a pas donné aux faits de l'espèce une inexacte qualification juridique en jugeant que, par voie de conséquence, la responsabilité contractuelle de la société Carfos à l'égard du grand port maritime de Marseille n'était pas engagée du fait de l'accident intervenu le 1er décembre 2008.
5. Il résulte de ce qui précède que le grand port maritime de Marseille n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Son pourvoi doit être rejeté, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du grand port maritime de Marseille la somme de 3 000 euros à verser à la société Carfos au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi du grand port maritime de Marseille est rejeté.
Article 2 : Le grand port maritime de Marseille versera à la société Carfos la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au grand port maritime de Marseille et à la société anonyme Carfos.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 décembre 2023 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, président de chambre, présidant ; M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat et M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 22 décembre 2023.
Le président :
Signé : M. Thomas Andrieu
Le rapporteur :
Signé : M. Vincent Mahé
La secrétaire :
Signé : Mme Sandrine Mendy